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RÉPERTOIRE

MÉTHODIQUE ET ALPHABÉTIQUE

DE LÉGISLATION, DE DOCTRINE

ET DE JURISPRUDENCE.

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ART. 1.
ART. 2.

SECT. 5.
SECT. 6.
SECT. 7.
CHAP. 7.

SECT. 1.

SECT. 2.

SECT. 3.

SECT. 4.

SECT. 5.

SECT. 1. SECT. 2.

Du principe de l'inaliénabilité.-Droit ancien (no 3408).
Inaliénabilité de la dot mobilière. Fruits et intérêts de

SECT. 6.

-

la dot (no 3424).

CHAP. 8.

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Effets de l'inaliénabilité quant à la capacité de la femme
(D° 3445).

SECT. 1.
SECT. 2.

SECT. 4.

Effets de la séparation de biens quant à l'inaliénabilité
(ng 3499).

CHAP. 9.
TIT. 5.

SECT. 5. SECT. 6. ART. 1. ART. 2. § 1. § 2.

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De l'inaliénabilité après la dissolution du mariage (no3536).
Exceptions au principe de l'inaliénabilité de la dot (no 3549).
Exceptions résultant de la convention (no 3549).
Exceptions établies par la loi (no 3578).
Établissement des enfants (no 3578).
Aliénations autorisées par justice.

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- Prison, aliments,

dettes antérieures au mariage, réparations, indivision
(n° 5618).

Echange du fonds dotal.-Expropriation pour utilité pu-
blique (no 3706).

Exceptions non expressément établies crimes et délits,
quasi-délit, quasi-contrat, dépens (no 3750).
Des formalités de l'aliénation dans les cas où elle est per-
mise (no 3769).

De la révocation ou de la nullité des aliénations de la dot
indùment faites (no 3788).

Loi qui régit la dot, quant à l'inaliénabilité, à raison
soit de l'époque de sa publication, soit de la situation
des biens. Questions transitoires. Statut réel et

personnel (no 3889).

De l'imprescriptibilité de la dot et des cas où la prescription
peut avoir lieu (no 3919).

De l'emploi et du remploi (no 3939).

Nature de l'emploi et du remploi.-Droit ancien (no3939).
Dans quels cas il y a lieu à l'emploi ou au remploi (no3948). ·|
De l'emploi et du remploi conventionnel (no 3949).
De l'emploi et du remploi légal et judiciaire (no 3978).
Comment doit être fait l'emploi ou le remploi (no 3984).
En quels biens doit-il être fait (no 3984).

Dans quelles formes doit avoir lieu l'emploi ou le rem-
ploi (no 4008).

Par qui l'emploi ou le remploi doit être fait, accepté et
exigé (no 4021).

TOME XIV.

CHAP. 1.
CHAP. 2.

-

--

Par qui le remploi doit être fait et accepté (no 4021).
Par qui peut et doit être exigé l'emploi ou le remplo:
(n° 4028).

Quand doit être fait l'emploi ou le remploi (no 4046).
Effets de l'emploi et du remploi (no 4051).

Du défaut d'emploi et de remploi (no 4058).

De la restitution de la dot et des cas où il y a lieu à restitution (no 4082).

Dans quels cas, par qui et à qui la dot doit être restituée (n° 4084).

Des choses qui doivent être restituées, du délai et du mode d'action en restitution (no 4097).

De la preuve de la réception de la dot, et du cas où cette
réception est présumée (no 4139).

Des intérêts de la dot à restituer et des fruits de la der-
nière année.-Aliments, habitation, deuil (no 4185).
Des sûretés pour la restitution de la dot (no 4223).
Du cas où le mari était insolvable lors du mariage (no 4240).
Des biens paraphernaux (no 4244).

Droits et obligations de la femme (no 4245).
Obligations du mari quand il a l'administration des biens
paraphernaux (no 4257).

De la société d'acquêts sous le régime dotal (no 4272).
DU DOUAIRE ET DE L'AUGMENT DE DOT SOUS L'ANCILN
DROIT (no 4280).

Douaire proprement dit ou douaire de la veuve (no 4281).
Douaire des enfants (no 4330).

TIT. 4.-DU RÉGIME DOTAL ET DE LA PARAPHERNALITÉ. 3145. Le mot dot (dos), vient, d'après Festus et Varron, du grec, et signifie don. Dote manifestum est, dit le premier de ces grammairiens, ex græco esse; nam dldova dicitur apud eos dare (Festus, 4, in vo Dos). Dos erit pecunia, dit aussi Varron (De lingua latiná, vo Dos), si nuptiarum causá data, hæc græcè own, ita enim hæc Siculi ab eodem donum.-Dans l'origine la dot n'était autre chose qu'un don fait au mari comme l'indique son étymologie et comme la considéraient les très-anciens jurisconsultes, les fondateurs de l'ancien droit: Ideò enim antiqui juris conditores inter donationes etiam dotes connumerant, (L. 20, Cod., De donat. antè nuptias).—Dans le langage juridique, le mot dot exprime particulièrement les apports de la femme sous le régime dotal; sous les autres régimes, on se sert préférablement du mot apports. Le régime dotal tire lui-même manifeslement son nom du mot dot, et c'est une distraction de quelques auteurs d'avoir dit le contraire (V. M. Rolland de Villargues, vo Régime dotal, t. 6, p. 147). Ce régime a été bien nommé, il faut le reconnaître, car le régime dotal est un système d'associaparticulières qui assurent sa conservation pendant le mariage tion conjugale d'après lequel la dot se trouve régie par des règles et dans l'intérêt de la famille, bien mieux que les règles des autres régimes. L'un des principaux reproches qu'on lui adresse, c'est même d'avoir tout sacrifié à cette conservation.-La dotalité est le caractère de ce qui est soumis au régime dotal. Le mot dot

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permission de son mari, pourvu qu'elle soit autorisée par la justice, et c'est ainsi que tout en stipulant le régime dotal, il n'y aura ni dot proprement dite, ni biens affectés de dotalité; car le régime paraphernal a les plus grandes analogies avec le régime de la séparation de biens.

sert encore à désigner le droit de la femme dotale, et quelquefois ; que la femme pourra les administrer et même les aliéner sans la la convention de dot ou le régime dotal. C'est ainsi que les deux traités modernes qui ont été publiés sur la matière portent le titre de Traités de la dot, et non pas traités du régime dotal. Les auteurs ont cédé en cela aux habitudes reçues dans les pays de droit écrit, où les anciens traités portaient le même titre, ce qui prouve l'identification ancienne de la dot et du régime dotal.-On a présenté plus haut l'historique et la législation du régime dotal (V. t. 13, nos 14 et suiv.): on ne reviendra pas sur ces points, que M. le premier président Troplong a d'ailleurs environnés de tout l'éclat de sa science, si peu favorable qu'elle soit à ce régime. CHAP. 1.-Nature du régime dotal; soumission à ce régime; ses effets.

3146. La dot n'est pas particulière au régime dotal, et il peut y avoir des biens dotanx aussi bien sous le régime de la communauté et sous le régime exclusif de communauté que sous le régime dotal (V. le rapport de M. Duveyrier, t. 13, p. 28, n° 97). La dot n'est même, sous le premier comme sous les autres, que le bien que la femme apporte au mari pour supporter les charges du mariage (c. civ. 1540): Quod marito datur ad onera matrimonii sustinenda (V. Delaurière, Glossaire, vo Dot). Sous tous les régimes, son caractère essentiel est de servir à la satisfaction des besoins de la famille, d'être là où sont les charges du ménage : Ibi dos esse debet, ubi onera matrimonii sunt (L. 56, D., De jure dotium). Si elle n'est pas destinée à supporter ces charges et si elle n'y sert pas, elle perd son caractère: Nisi matrimonii oneribus dos serviat, nulla est (L. 76, ib.). Mais comme sous plusieurs régimes d'association conjugale, les biens de la femme ou partie de ces biens peuvent être affectés à cette destination, la dot peut exister avec chacun d'eux. Seulement sous ceux de ces régimes où les biens de la femme sont affectés en totalité au soutien du ménage, il est vrai de dire que tous ces biens ont destination dotale ou sont dotaux, tandis qu'avec ceux sous lesquels quelques-uns seulement de ces biens sont affectés à cette destination, ceux-là seuls doivent être dits dotaux. Ainsi, sous le régime de communauté, et même sous le régime sans communauté, tous les biens de la femme sont dotaux, tandis que sous le régime dotal la dot ne comprend que les biens qui ont été constitués en dot.—Mais qu'on ne perde pas de vue qu'en restituant ici aux mots dot, dotaux, leur sens général, nous n'entendons pas les confondre avec l'acception qui leur est donnée dans les cas où il s'agit des biens que la femme s'est constitués en stipulant le régime dotal : c'est à ceux-ci que les auteurs et nous-mêmes faisons allusion, quand nous nous servons des expressions: biens dotaux, biens affectés de dotalité, etc.

3147. Ce qui caractérise le régime dotal, ce n'est donc pas la dot, puisqu'il y a ou qu'il peut y avoir une dot dans les autres régimes et surtout que le régime dotal lui-même peut exister sans dot, mais c'est la séparation des patrimoines des époux. Sous le régime dotal, chacun des époux conserve ses biens propres; actif et passif sont séparés. Cette séparation forme la principale différence qui existe entre le régime dotal et le régime de la communauté; de celle-là découlent toutes les autres.

3148. Mais, sous le régime dotal, il n'y a pas néanmoins cette séparation entière, absolue, qui existe sous le régime de la séparation de biens (c. civ. 1536). Les biens des époux sont, il est vrai, distincts, et la femme conserve la propriété de ceux qu'elle a apportés lors du mariage ou qui lui sont échus depuis ; mais en contractant mariage, elle peut remettre tout ou partie de ses biens à son mari, pour qu'il les administre et en jouisse pendant la durée du mariage. Et c'est par là que le régime dotal se distingue du régime de la séparation de biens; mais précisément parce que le principe du régime dotal est la séparation, il n'y a de dotal que ce qui a été constitué en dot. D'où cette première conséquence que s'il n'y a pas de dot constituée, même sous le régime dotal, il n'y aura pas de biens dotaux (V. nos 3162, 3191); et cette autre que la dot, quoique ayant donné son nom à ce régime, n'est pas de son essence. Il peut très-bien se faire, en effet, que les époux ayant déclaré adopter le régime dotal, il n'y ait pas eu de dot constituée et, dans ce cas, malgré l'absence de dot, la clause de dotalité produira effet; mais alors tous les biens de la femme seront extradofaux ou paraphernaux (c. civ. 1574), c'est-à-dire

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3149. Du principe de la séparation des patrimoines, sous le régime dotal, résulte bien la nécessité de la conservation et de la restitution de la dot, de la part du mari, comme sous le régime de la communauté, pour les propres de la femme, et sous le régime sans communauté, pour tous ses biens; mais cette conservation a cela de spécial et de caractéristique, sous le régime dotal, qu'elle est prescrite et réglée non pas seulement à l'égard du mari et dans l'intérêt de la femme, pour la conservation des droits de propriété de celle-ci, mais encore à l'égard de la femme elle-même et dans l'intérêt de la famille; de telle sorte que la femme dotale, même avec le consentement de son mari, ne peut pas disposer de ses biens dotaux.— La dot est frappée d'inaliénabilité pendant le mariage, c'est là un des points caractéristiques, sinon essentiels, du régime dotal. La dot a ainsi, sous le régime dotal, un caractère propre, spécial. Constituée par l'épouse ou en sa faveur, elle est censée l'être surtout en faveur de la famille, elle forme comme un fonds de réserve pour cette dernière, distinct tout à la fois des biens du mari et des biens de la femme, dont l'un a l'administration, l'autre la propriété, mais aucun d'eux ni même tous les deux ensemble la libre disposition. En d'autres termes, la dot est, sous le régime dotal, indisponible ou inaliénable, au moins en principe; car les époux peuvent, comme nous le verrons bientôt, se réserver la faculté de l'aliéner.

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3150. Ce caractère ne lui a pas été tout d'abord attribué. La dot, comme son nom l'indique, ne fut dans le principe qu'un don fait au mari ou un apport de la femme pour subvenir aux dépenses du ménage. Avec le divorce, naquirent les actions eu restitution; mais le mari était toujours maître de la dot, pouvant en disposer à son gré. La loi Julia de adulteriis restreignit, la première, les droits du mari sur la dot, en interdisant l'aliénation du fonds dotal sans le consentement de la femme (Gaïus, 2, 63; Paul, Sent. 2, 22, 2; Inst. 2, 8; Dig., De fundo dotali; Brisson, Ad leg. Juliam de adult.) et même en prohibant l'hypothèque de ce fonds avec son consentement. Les motifs de cette restitution de la dot et surtout de cette double prohibition de la loi Julia sont exprimés dans la loi 2, D., De jure dotium: Reipublicæ interest, dit le jurisconsulte Paul, auquel ce fragment a éte emprunté, mulieres dotes salvas habere propter quas nubere possunt. Ainsi c'est afin que les femmes pussent convoler à de nouvelles noces après la dissolution du mariage existant, que l'on prohìbait l'aliénation de la dot. Aussi cette prohibition ne s'appliquait-elle qu'autant que la femme ne consentait pas à l'aliénation. La dot n'était pas encore conservée dans l'intérêt de la famille; on ne veillait à sa conservation que comme à un moyen nécessaire pour contracter mariage. Justinien fit plus, il étendit la défense d'aliéner aux fonds provinciaux, et il défendit l'aliénation des immeubles dotaux aussi bien que l'hypothèque, même avec le consentement de la femme, et voici la raison que donne le législateur de cette prohibition : c'est afin, dit-il, que la femme se laissant aller aux entraînements de sa nature faible, ne soit pas tout à coup ! réduite à la misère. Ne fragilitate naturæ suæ in repentinum deducatur inopiam (L. unique, Cod., De rei uxoriæ act., § 15; Inst. quibus alien. licet, pr.). La femme fut ainsi mise en garde et protégée contre sa propre faiblesse dans l'intérêt de la famille ; il n'est plus question de secondes noces, et la dot devient vraiment inaliénable.

3151. Mais en même temps qu'il met cette restriction aux droits du mari et de la femme sur les biens dotaux, le régime dotal, et c'est encore là un des points caractéristiques de co régime, attribue au mari, sur ces mêmes biens, des droits beaucoup plus étendus que ne lui en accordent les autres régimes d'association conjugale, sur les propres de la femme. Ce n'est pas ici le lieu de déterminer la nature, l'étendue et les limites du pouvoir du mari sur les biens dotaux, ni de rechercher la cause de ce pouvoir; nous constatons seulement un fait qui ressort avec évidence de la comparaison des articles 1549, 1428,

1531, à savoir que le mari a, par rapport aux biens dotaux sous le régime dotal, des droits qu'il n'a pas sous les régimes de la communauté et sans communauté relativement aux biens propres et dotaux de la femme, notamment celui d'exercer les actions réelles immobilières de celle-ci. Cela tient-il à quelque principe ancien, passé du droit romain dans notre code, ou bien à l'essence même du régime dotal qui, réputant les biens dotaux biens de la famille pendant le mariage, et ne les considérant pas seulement comme biens de la femme, a dû conférer au mari, en. sa qualité de chef de la famille, des pouvoirs plus élendus que ceux qui lui sont attribués, sous les autres régimes, en qualité de simple administrateur des biens de son épouse? La restriction des droits de la femme d'une part, l'extension de ceux du mari de l'autre, procéderaient, dans ce dernier cas, du même principe, du principe fondamental et caractéristique du régime dotal, les droits et l'intérêt de la famille. Mais c'est là une question que nous nous bornons à indiquer dans ces notions générales; nous y reviendrons plus tard.

3152. Le régime dotal, quoiqu'il restreigne les droits de la femme sur les biens dotaux, par l'inaliénabilité, n'a pas pour effet de diminuer la capacité générale de la femme. Seulement, lorsque tous les biens de la femme sont dotaux, ces biens étant entre les maios du mari qui en a l'administration et la jouissance, la femme ne peut rien acquérir, car elle n'a rien au moyen de quoi elle puisse faire des acquisitions. Elle a la capacité, mais elle est dans l'impuissance d'acquérir. Si tous les biens de la femme ne sont pas dotaux, comme elle a alors des biens disponibles, au moyen desquels elle peut acquérir, cette impuissance cesse. Jugé, dans la première hypothèse, que la femme mariée sous le régime dotal avec constitution générale de biens présents et à venir ne peut valablement s'obliger pendant le mariage (Montpellier, 30 juill. 1840) (1); et, en sens contraire, que la femme mariée sous le régime dotal peut valablement contracter (Riom, 25 juin 1849, aff. Malguy, D. P. 50. 2. 67). Une conséquence qui résulte de cet état de la femme qui n'a que des biens dotaux, et qui ne peut pas acquérir, c'est que si elle acquiert, elle est censée avoir acquis des deniers du mari, et au contraire, si la femme a des biens extradotaux, elle reste dans les termes du droit commun; ce qu'elle acquiert, elle est censée l'avoir acquis de ses propres biens.

3153. Ne doit-on pas considérer aussi, avec un auteur moderne, comme caractéristique du régime dotal, comme l'un de ses dogmes favoris, cette présomption que tout ce que la femme acquiert pendant le mariage est censé acquis avec les deniers du mari, à moins qu'elle ne prouve l'origine des deniers, c'est-à-dire l'undè habuit (L. 51, D., De donat. inter. virum et ux.)? Cette présomption, selon le même auteur, « dérive rigoureusement de la position faite à la femme par le régime dotal qui croit lui avoir assez payé sa dette en lui conservant l'intégrité de son avoir. ...Elle repose sur cet état de la femme dotale, qui se doit toute à son mari, qui est censée ne vivre, n'agir, ne travailler que pour lui, et qui, par conséquent, doit montrer la légitime origine de ce qu'elle prétend avoir acquis pour son propre compte » (V. M. Troplong, nos 3017 et 3018). Ce qui

(1) (Veuve Bouby C. époux Sirven.) — LA COUR; En ce qui concerne la dame Sirven : - Attendu qu'elle est sous les liens d'une consti-tution générale de dot qui embrasse tous ses biens présents et à venir; Que, d'après les dispositions du code civil, les mêmes que celles des anciens principes admis dans les pays de droit écrit, la femme ne peut, d'une manière directe ou indirecte, porter atteinte à l'inaliénabilité de ses biens dotaux ; Que, dès lors, l'obligation par elle contractee est entièrement inefficace lorsque tous ses biens à venir sont frappés de dotalité ;- Attendu qu'il n'y a d'obligation valable que celle qui peut se réaliser sur les biens mobiliers ou immobiliers du débiteur; Que toute obligation dépourvue d'action sur les biens est évidemment impuissante et nulle; Attendu que, bien que la capacité soit la condition ordinaire, les femmes mariées sont au nombre des incapables, aux termes de l'art. 1124 c. civ., pour les cas prévus par la loi;-Que parmi ces cas se trouve celui d'une constitution générale de dot, puisque l'indisponibilité absolue des biens porte atteinte à l'obligation elle-même et la vicie dans son principe; Qu'il suit de là qu'une constitution générale de biens présents et à venir frappe la femme d'une interdiction réelle quant aux obligations qu'elle voudrait contracter pendant le mariage;

Attendu, au sarplus, que telle était la règle admise dans les pays de dolalité, et que, si les dispositions du code civil laissent quelques

prouve d'abord que cette présomption n'est pas un des principes caractéristiques du régime dotal, ni même un de ses dogmes fa voris, c'est qu'on l'applique sous d'autres régimes que le régime dotal, et alors que le mari n'a pas sur les biens de la femme les droits que lui confère ce dernier régime. Ainsi, cette présomption est admise par M. Troplong lui-même sous le régime sans communauté, et des jurisconsultes anciens l'appliquaient aussi à la femme mariée en communauté. Cela s'explique aisément si l'on remonte au principe qui sert de base à cette présomption, car ce principe n'est point particulier au régime dotal; ce n'était point autre chose qu'un principe d'honnêteté et de morale publique, applicable sous tous les régimes, qu'une conséquence de l'autorité qui est attribuée au mari, quel que soit le régime d'association conjugale qu'ont adopté les époux. Les termes mêmes de la loi Quintus Mucius suffisent à le prouver: Quintus Mucius ait, porte cette loi, cùm in controversiam venit, undè ad mulierem quid pervenerit : et verius, et honestius est, quod non demonstratur, undè habeat, existimari à viro, aut qui in potestate ejus esset, ad eam pervenisse. Evitandi autem turpis quæstús gratia circà uxorem hoc videtur Quintus Mucius probásse (L. 51, D., De don. inter vir. et ux.). V. aussi L. 6, Cod., De donat. int. vir. et ux.: quod cùm probari non possit, undè uxor tempore matrimonii honestè quæsierit...-C'est donc uniquement pour empêcher que la femme ne fasse des gains honteux, qu'on a admis la présomption que ce qu'elle a gagné et dont elle ne peut prouver l'origine, appartient au mari, Qu'y a-t-il là de propre au régime dotal? Et alors même qu'on n'appliquerait cette présomption que sous ce régime, il est évident qu'elle ne dérive point de l'état de la femme dotale, et du principe en vertu duquel elle est censée ne vivre, n'agir, ne travailler que pour son mari, et qui frapperait la femme d'incapacité, principe emprunté à la manus, mais complétement étranger, opposé même au régime dotal. Ajoutons que, bien loin d'être un dogme favori du régime dotal, la présomption de la loi Quintus Mucius, si l'on s'en réfère à ses motifs, n'est plus que très-difficilement applicable aujourd'hui, la femme ne pouvant acquérir, sous aucun régime, qu'avec l'autorisation de son mari (c. civ. 217).-Mais à cette présomption il en est substitué une autre, résultant de l'impossibilité pour la femme d'acquérir lorsqu'elle n'a à sa disposition ni ses capitaux ni ses revenus, ce qui peut très-bien se réaliser sous le régime dotal, dans le cas de constitution générale, mais ce qui peut aussi se réaliser sous d'autres régimes, comme nous l'avons déjà vu. Il faut même ajouter que si cette présomption peut être appliquée sous le régime dotal, elle peut aussi ne pas l'être, dans les cas suivants, qui sont assurément ceux qui se présentent le plus ordinairement si la femme, ne s'étant constitué en dot qu'une partie de ses biens, ou même si, n'ayant pas fait de constitution dotale, elle s'est réservé une partie ou la totalité de ses biens comme paraphernaux. D'après M. Troplong lui-même, la présomption cesse dans ces divers cas. Elle a été admise expressément dans notre législation, dans un cas spécial, lorsque le mari est commerçant failli (art. 559 c. com.). Mais dans ce cas encore, elle n'est pas spécialement applicable au régime dotal; elle est commune à tous les régimes : doutes, il faudrait en cette matière l'interpréter par l'ancienne jurisprudence, d'autant que le régime dolal n'a pas été complétement défini dans la loi nouvelle, et qu'il a été dans l'intention des auteurs du code civil de maintenir les prohibitions créées dans l'intérêt des dots;— Qu'on ne saurait objecter la possibilité de trouver après la dissolution du mariage des biens non dotaux sur lesquels les obligations contractées par la femme seraient exécutoires; puisque la femme, en prenant la libre administration de sa fortune, pouvant alors dénaturer sa dot et la confondre avec les autres biens qui lui écherraient ultérieurement ou qu'elle acquerrait à autre titre, il deviendrait impossible de démêler dans son patrimoine c qui proviendrait de la dot ou ce qui serait venu d'une autre source; Que l'on ne pourrait donc trouver aucun moyen légal de garantir la dot de toute atteinte directe ou indirecte; qu'on ouvrirait ainsi la porte à toutes les fraudes en dépouillant la femme dotale de la protection qu'elle devait trouver dans sa constitution primitive; que ses obligations doivent être considérées au temps même où elles ont été contractées sous l'empire de cette constitution; Attendu, enfin, que d'après les termes de l'obligation la femme a engagé ses biens présents, qu'elle les a même hypothéqués; qu'ainsi l'acte est nul comme contenant aliénation directe; -Emendant, déclare nul et de nul effet l'acte du 30 juin 1828. Du 30 juill. 1840.-C. de Montpellier.-M. Viger, 1" pr.

« Sous quelque régime qu'ait été formé le contrat de mariage, » porte cet article.

3154. Mais si la présomption de la loi Quintus Mucius ou tout autre ne forme ni un principe caractéristique ni un dogme du régime dotal, le principe qui attribue tous les profits que la femme dotale fait par son labeur à son mari, et la règle que, sous le régime dotal, la femme travaille pour son mari, ne doivent-ils pas être considérés comme tels? Non, assurément, car jamais pareil principe, pareille règle n'ont appartenu au régime dotal. Il peut se faire, sans doute, que les bénéfices faits par la femme dotale appartiennent à son mari, comme il peut se faire qu'ils | appartiennent à la femme elle-même. L'industrie de la femme, qui est un véritable capital, comme le dit très-bien M. Troplong, est-elle comprise dans la constitution dotale? Les fruits de cette industrie comme ceux de tout autre bien dotal appartiendront exclusivement au mari pour supporter les charges du mariage. Cette industrie n'est-elle pas comprise dans la constitution de dot? Alors les profits comme les fruits des autres paraphernaux appartiendront à la femme.- Dans un cas, la femme travaillera pour le mari, ou plutôt pour la famille; dans l'autre, elle travaillera pour elle même. Tout cela dépendra des conventions, et à défaut de conventions, la femme travaillera pour ellemême, tous ses biens étant réputés paraphernaux.-Le principe, sous le régime dotal, n'est donc pas que la femme travaille pour le mari, c'est le contraire qui serait plus exact; le principe véritable, c'est que les fruits des biens dotaux appartiennent au mari, et ceux des biens extradotaux à la femme; il n'y en a pas d'autre en cette matière, et il suffit à résoudre la question. M. Troplong cite toutefois un arrêt de la cour de Toulouse, du 17 déc. 1831 (V. infrà, no 3341-3o), comme posant la règle que sous le régime dotal la femme travaille pour son mari; on eût pu invoquer aussi l'arrêt de la cour de Riom, du 22 fév. 1809 (V. no 3347). Mais la règle que ces arrêts invoquent, ils sont loin de la justifier. Elle ne repose sur aucun texte ni sur aucun principe ancien ou nouveau, et elle n'est vraie qu'autant que la femme n'exerce pas une industrie propre, distincte et séparée de celle de son mari, ou qu'elle s'est constitué tous ses biens en dot; mais alors elle n'acquiert rien, parce qu'elle n'est que la préposée de son mari.

A plus forte raison, doit-on écarter l'application de ce prétendu principe si, avec certains auteurs, on ne considère pas les bénéfices résultant d'une industrie propre à la femme comme des fruits. Ces bénéfices seront en effet, ou dotaux ou paraphernaux, mais jamais ils ne seront attribués au mari (V. en ce sens M. Seriziat, du Régime dotal, no 3 et suiv., el M. Zachariæ, t. 3, p. 563). Ce dernier répute paraphernaux, sans faire de distinction, les biens que la femme acquiert au moyen de son industrie. On décidait autrefois que lorsque la femme faisait un commerce séparé de celui de son mari, la présomption de la loi Quintus Mucius cessait de plein droit (V. en ce sens, Catelan, liv. 4, ch. 5, et Roussilhe, t. 1, p. 222).—Ce que nous avons dit ne s'applique, ainsi que nous l'avons fait observer, qu'au seul cas où la femme fait un commerce ou exerce une industrie séparée de son mari. — V. du reste nos 3340 et suiv.

3155. Le régime dotal ainsi réduit à ses principes incontestables, a, sans doute, des inconvénients; quel régime n'en a pas? Mais il a aussi des avantages. Ainsi le régime dotal n'est pas favorable au mouvement de la propriété, au crédit du mari, aux droits des tiers; il sépare trop, lorsqu'il n'est pas tempéré par la société d'acquêts, les intérêts des époux. Mais, dans un système d'association conjugale, àquoi doit-on pourvoir surtout? Estce aux intérêts des tiers, et même de chacun des époux, ou bien à ceux de la familie? Que lorsqu'il s'agit de régler la transmission de la propriété, ou d'adopter un système hypothécaire, on préfère le régime qui, tout en favorisant le mieux cette transmission, donne le plus de sûretés aux tiers, cela se comprend, et tel doit être, en effet, l'objet principal de ce régime. Au contraire, dans les conventions matrimoniales, l'objet principal, ce sont les intérêts de la famille future; c'est en vue de cette famille que l'on stipule; c'est en sa faveur qu'on fait fléchir les règles du droit commun. Faut-il dès lors faire un reproche à un régime d'association conjugale, de ce qu'il pourvoit plutôt à ses intérêts, de ce qu'il garantit mieux ses droits que ceux des tiers? Or c'est là précisément ce que fait le régime dotal; la cause de

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la dot y est la cause principale, dotium causa semper et ubique præcipua est (L. 1, D., Soluto matrimonio). Elle est, en quelque sorte, d'ordre public, Reipublicæ interest, non point pour favoriser le conyol à de secondes noces, mais pour conserver le patrimoine de la famille, des enfants. « La dot est souvent, comme le reconnaît un des auteurs les moins favorables à ce régime, la dernière ressource et la dernière planche dans le naufrage; il importe de la conserver... Le fait est que la cause de la dot, qui procure aussi les aliments à la famille, et qui lui assure un avenir, a des droits privilégiés incontestables » (V. M. Troplong, no 3011). Le régime dotal est un régime éminemment conservateur; il se prête moins aux spéculations du mari, il favorise moins les augmentations du patrimoine, mais il met ce qui existe déjà à l'abri des hasards et des revers de fortune si fréquents de nos jours. S'il fait trop pour cette conservation, il faut reconnaltre que les autres régimes ne font peut-être pas assez. Comme nous le verrons bientôt, d'ailleurs, ce régime n'a rien d'exclusif, il admet des tempéraments, il permet l'aliénation des biens dotaux dans certains caş, il n'interdit pas les conventions qui font fléchir la règle de l'inaliénabilité, il se combine avec la société d'acquêts, qui attribue une part des bénéfices à la femme; ses rigueurs et ses injustices mêmes, si l'on veut, peuvent donc être corrigées, selon les circonstances; il en donne les moyens, et d'autant plus facilement qu'un contrat de mariage étant nécessaire pour que les époux y soient soumis, on peut y introduire telles modifications que ces circonstances réclament.-Ces quelques mots sur les avantages et les inconvénients du régime dotal nous paraissent suffire; car nous ne saurions entrer ici dans la grande controverse entre les auteurs des pays de coutume et ceux des pays de droit écrit, controverse à laquelle le code civil n'a pas mis tellement fin qu'il ne reste quelque chose de son esprit dans les ouvrages modernes. — V., sur celle question, suprà, no 75, et Pasquier, Lettres, liv. 9, ch. 1; Recherches, liv. 4, ch. 21; Lebrun, de la Communauté, ch. 1; le rapport fait au tribunat par M. Duvergier, suprà. t. 13, p. 18, no 45; M. Siméon, Mémoire de l'Académie des sciences morales et politiques, dans la Revue de législation, t. 2, p. 306; M. Marcel, du Régime dotal et de la nécessité d'une réforme dans cette partie de la législation.

3156. C'est du droit romain, comme nous l'avons dit (V. pour l'historique, tit. 1, ch. 1), que le régime dotal tire son origine; ce sont les principes des lois romaines, modifiées, en quelques points, par la jurisprudence des parlements de droit écrit, que le législateur moderne a voulu adopter, lorsqu'il a consacré un cbapitre spécial du contrat de mariage à ce régime. — Aussi, quoique le regime de la communauté forme le droit commun de la France, ne saurait-on considérer le régime dotal comme une simple clause modificative du droit commun, comme une exception à ce droit. Sans doute, les époux qui veulent adopter le régime dotal doivent déclarer qu'ils adoptent ce régime, et, à défaut de cette déclaration de leur part, ils sont censés avoir voulu adopter le régime de la communauté légale, qui n'a pas besoin d'être expressément stipulé. Mais en cela consiste toute la différence qui distingue aux yeux du législateur les deux régimes; ils ont chacun une existence propre, parfaitement indépendante dans notre code civil: un chapitre spécial est consacré à l'un commu à l'autre, et le législateur établit entre eux une sorte d'égalité dans l'art. 1391, qui constate et consacre l'indépendance respective de l'un et de l'autre dans les termes suivants : « Les époux peuvent cependant déclarer, d'une manière générale, qu'ils entendent se marier sous le régime de la communauté ou sous le régime dotal. Au premier cas, et sous le régime de la communauté, les droits des époux et de leurs héritiers seront réglés par les dispositions du chap. 2 du présent titre (1399 à 1496). Au deuxième cas, et sous le régime dota!, leurs droits seront réglés par les dispositions du chap. 3» (1540 à 1580). Par cet article l'égalité est établie entre les deux régimes, au moins en ce sens qu'il est libre aux époux de choisir l'un ou l'autre, et que chacun d'eux est régi par des principes et des règles qui lui sont propres, et se suffit pleinement à luimême; de telle sorte qu'on ne peut pas interpréter ou suppléer les articles du chapitre du régime dotal par les principes de la communauté, pas plus qu'on ne peut interpréter ou suppléer les dispositions du chapitre de la communauté par les principes du

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