Page images
PDF
EPUB

semble le plus à son plus proche voisin. Mais faire intervenir la distribution alphabétique en philologie, c'est vouloir tout brouiller, tout confondre. De plus, le système adopté par l'auteur l'oblige à répéter dix fois, vingt fois, le même mot dans le même article. Prenons un exemple. Je veux savoir comment se dit blé en patois vosgien. J'épargnerai au lecteur la description du voyage d'exploration qu'il m'a fallu accomplir pour en arriver à découvrir le blé, triticum, à la page 192.

A part la localité de Fraize où le blé s'appelle grè1, comme en italien grano, grain, et Trampot qui dit bièe, anc. fr. blée, ital. biada, le lorrain a, comme le français, les deux mots blé et froment, biè et fromō (ỏ = eu; ò nasal), l'un pris au latin populaire bladum, l'autre au latin classique frumentum. D'après sa classification alphabétique, l'auteur dans une demi-page est obligé de répéter 11 fois le mot biè et 20 fois le mot frómò ou formò, transposition générale dans les langues romanes (fr. froment et anc. fr. forment; ital. formento et frumento, comme fromage et anc. formage; provençal formatge et fromatge, comme ferté et freté, prenait et anc. pernoit, etc., etc.). N'était-il pas plus simple de donner bie qui se prononce ainsi dans tout le département; car je ne puis admettre que dans la même localité, Bourzemont, on prononce bie et biè, quoique l'auteur cite à l'appui de la première prononciation Charton, Voyages pittoresques et historiques, p. 274, et à l'appui de la seconde, Jouve, Chanson en patois vosgien. C'est évidemment la prononciation du chansonnier qui est la bonne et qui est conforme au parler de tout le département. Après bie serait venu frômō avec toutes ses variantes, suivant les localités divisées en patois de la montagne et patois de la plaine. Deux mots au lieu de trente-un.

Malgré les défauts que nous venons de signaler sommairement, la Flore populaire des Vosges est un travail fort estimable, consciencieux, où l'auteur a dépensé patience, savoir et connaissance approfondie de la matière, et nous nous résumerons en disant qu'il ressemble à ces coffres-forts qui renferment de grandes richesses que l'on ne peut utiliser, parce qu'on a oublié de nous donner la combinaison du secret pour ouvrir la serrure.

Dr Bos.

1. A Fraize, grè, grain, signifie blé et seigle, ce qui nous semble une généralisation plutôt qu'un nom spécial.

PÉRIODIQUES.

I. REVUE DES LANGUES ROMANES, 3e série, XV; mai 1886. P. 209-55. Chabaneau, Paraphrase des litanies en vers provençaux, nouvelle édition du texte publié en 1874, dans la Revue de Marseille, par M. V. Lieutaud, sous le titre de Un troubadour aptésien de l'ordre de saint François, voy. Rom., IV, 510. En appendice, réimpression, d'après une publication faite à Apt en 1862, de paraphrases sans importance de l'Ave Maria et du Credo, et extrait de la Vie provençale de saint Georges, conservée dans le ms. de la Bibl. nat. 14973. Juin 1886. P. 261-83. C. Chabaneau. Sainte Marie-Madeleine dans la littérature provençale (suite). VII Cantiques populaires sur sainte Madeleine. M. Ch. a cru utile de donner en appendice, d'après une des anciennes versions provençales du Nouveau Testament, des extraits de saint Luc et de saint Jean, où il est question de sainte Marie-Madeleine.

[ocr errors]

XVI. Juillet 1886. - P. 5-52. De Grateloup, Grammaire gasconne et française. Cette grammaire, qui n'avait jamais été publiée, est accompagnée d'une dédicace à l'évêque de Dax, qui est datée de 1734. C'est, même eu égard au temps où elle a été rédigée, un assez pauvre ouvrage. On ne sait rien de l'auteur.-P. 55-6. Bibliographie. Korting, Encyclopædie d. rom. spr.; de Nolhac, Le canzoniere autographe de Pétrarque (C. C.).

II.

P. M.

Zeitschrift für ROMANISCHE PHILOLOGIE, X (1886), no 1. — P. 1. V. Crescini, Idalagos (fin). Ce savant travail, publié en italien, semble bien mettre hors de doute, surtout par l'explication d'anagrammes, donnés grâce aux leçons manuscrites, que l'histoire d'Idalagos dans le Filocolo, comme celle d'Ibrida dans l'Ameto, est l'histoire de Boccace, et par conséquent, que l'auteur du Décaméron naquit à Paris en 1313, d'une jeune fille ou veuve de noble condition, séduite par son père. - P. 22, W. Meyer, Etudes francoitaliennes, II, Aspremont. Même étude que pour Anseïs sur quelques centaines de vers publiés sous la forme française et la forme italianisée. P. 52, n. 1, remarque intéressante sur reçoivre, qui devrait être recivre; mais ce verbe n'est pas aussi isolé que le dit l'auteur: boivre a les mêmes formes, et aussi mentoivre, qui, s'il vient de mente habere, n'est pas moins irrégulier que reçoivre. En réalité, l'infinitif primitif a dû être receveir, menteveir; les formes recevons,

mentevons auraient influencé tout le reste de la conjugaison, peut-être précisément sous l'influence de bevons beivre. - P. 56, L. Hirsch, phonologie et morphologie du Dialecte de Sienne (suite). - P. 70, Scheffer-Boichorst; Noch einmal Dino Compagni. [L'auteur, qui naguère le prenait de si haut avec ceux qui ne partageaient pas ses vues sur Dino Compagni (voy. par ex. Rom. XI, 614-5), confesse aujourd'hui que son opinion antérieure, selon laquelle le nom de Dino aurait dû être rayé de la littérature historique, lui paraît actuellement entièrement erronée (p. 121). C'est tout ce que nous trouvons d'intéressant dans cet article. P. M.] — P. 124, G. Caviezel, Spass e tours our dal chantun Grischun. Petits contes plaisants que n'accompagne aucun mot d'explication ni d'introduction, et dont les plus intéressants sont ceux qui appartiennent à la classe des béotismes. P. 143, K. Bartsch, Zum Girart de Rossilho. [On a découvert récemment dans les archives municipales de Stolberg1 deux feuillets de parchemin écrits au xive siècle, et appartenant à une traduction allemande en prose de Girart de Roussillon. Cette version n'est pas connue d'ailleurs. Le contenu des deux feuillets fut publié d'abord dans la Zeitschrift für deutsches Alterthum, t. XXX, pp. 76 et suiv. On y joignit, comme terme de comparaison, la partie correspondante de ma traduction (SS 635-9 et 651-5). M. Bartsch réimprime le même texte, plaçant en regard le texte original. Bien que la version soit assez exacte, elle n'apporte aucun secours appréciable à l'interprétation du texte, qui, en cet endroit, est généralement facile à établir et à comprendre. L'existence de cette traduction n'en est pas moins un fait curieux, car jusqu'à présent on n'avait aucune preuve que cette chanson de geste eût été connue à l'étranger ailleurs qu'en Italie. M. Bartsch conjecture (p. 152) que cette version germanique a pu être mise en prose d'après un poème allemand du XIIe siècle. J'ai peine à le croire: la traduction est trop voisine du texte original pour qu'il y ait lieu de supposer un intermédiaire. Il semble probable que la traduction aura été faite, sous la forme où nous la connaissons par le fragment de Stolberg, d'après quelque ms. porté accidentellement en Allemagne, peut-être de Flandre. On sait, en effet, que Girart de Roussillon a joui d'un regain de popularité en Flandre, à partir de l'avènement de la domination bourguignonne. - P. M. ]. P. 153, G. Stengel, Die zwei provenzalischen Gedichte, das Glaubens-und das Beichtbekenntniss der Pariser Hs. fonds lat. 11312.

Nouvelle édition de deux pièces que j'ai publiées pour la première fois en 1860, dans la Bibliothèque de l'Ecole des Chartes. M. Stengel s'est efforcé de

1. Quel Stolberg? On ne le dit pas, et il y en a au moins trois.

2. Voy. ma traduction, p. cvii et CVIII.

3. Il y avait dans la librairie des ducs de Bourgogne un ms. de Girart de Roussillon qui ne s'est pas retrouvé. Voy. ma traduction, p. CLXXVII et suiv.

rétablir la forme rythmique de ces deux pièces que, selon lui, je n'aurais pas comprise. Je suis, je crois, après vingt-sept ans, en état de juger très impartialement une publication que j'ai faite étant encore sur les bancs de l'Ecole des Chartes, mais je dois confesser que je ne puis me rallier aux vues de M. Stengel. On jugera de ce qu'il y a d'arbitraire dans ses procédés de restitution par la façon dont il arrange les quatre premiers vers du texte :

Eu aor Domrideu lo pair omnipotent

Qui creet cel e terra e quant es de neient,

E aor so bo fil Jhesu Christ esament

Qui nasquet de Maria per nostre salvament.

Voici ce que deviennent ces quatre vers dans la restitution de M. Stengel. Je souligne les mots transposés ou corrigés :

[blocks in formation]

Ce sont là, assurément, des corrections qui n'améliorent pas le texte.

P. M.]

II.

Mélanges I. Textes. P. 162. Stengel, L'Alba de Peire Espagnol. Critique des textes. 1. P. 164, Tobler, Sur Joinville; § 23 que je nen avoie pooir de enyvrer, lire, évidemment, poour.

[ocr errors]

2. P. 166, Tobler, Sur les lais de Marie de France; nombreuses remarques. 3. P. 169, Settegast, sur les serments; propose et in aiudha er in cadhuna cosa; correction peu nouvelle et contestable; voy. Rom. XV, 633; Sur le S. Léger, deux corrections peu plausibles, surtout la première. III. Etymologies. 1. P. 171, W. Meyer, Étymologies romanes. 1. It. abbiaccare (ce mot pistoiais le tosc. abbachiare, qui serait abbatulare d'abbattere; cette partie de la proposition n'est guère acceptable; pourquoi ne pas rattacher bacchiare et abbacchiare à bacchio ?). 2. Beffa (viendrait d'une onomatopée). 3. Esp, esconzado (excomptiatum). 4. Graulus, graula (non de graculus, mais d'un type gravulus, d'origine douteuse). - 5. Esp. jeja (de sasia, nom celtique du seigle, qu'il faut rétablir dans Pline, XVII, 40, au lieu d'asia. — 6. It. sciupare (e x et l'all. sa upan?). - 7. Scuppire (l'étymol. exconspuere, Rom. IX, 130, est condamnée par le roumain scuip, et par le p de l'hispanoroman et du gallo-roman; cette dernière raison n'est pas bonne : le p est conservé par l'u en hiatus, comme let de batu ere; une forme excuppěre devenu excuppire peut fort bien être sortie en lat. vulg. d'exco (s)puere et avoir aussi donné naissance au roumain; cela paraît plus vraisemblable qu'une onomatopée, et convient mieux au sens du mot ancien français, qui répond presque toujours à conspuere. 8. It. sdrajarsi disra

--

diare. 9. Esp. sisa (pourrait venir de scissa aussi bien que de censa, voy. Rom., XIII, 305). 10. Esp. tobillo (l'étym. de Diez, tubellum de tuberem, est la meilleure). 11. Fr. vouge (d'après le pr. vezoig du lat. viduvium, brillante étymologie, que confirme l'anc. fr. vooge, voouge; mais comment s'explique ce vidŭvium lui-même, attesté, outre les glossaires, par un scholiaste de Juvénal cité dans Du Cange au mot viduvium? et faut-il lire viduvium ou vidubium?). — 12. Lui lei (observations sur l'article de M. Thomas, Rom. XII, 332).— 2. P. 174, Græber, It. anzi, fr. ains (conteste avec quelque vivacité les arguments donnés par M. Thomas, Rom. XIV, 572, à l'appui d'antius comme étymologie de ces mots).

[ocr errors]

No 2. P. 179, M. Kuhfuss, Sur la vie de Dante abrégée attribuée à Boccace; l'auteur cherche à établir, contre M. Scheffer-Boichorst, que la vie abrégée de Dante attribuée à Boccace n'est pas de lui. - P. 205, A. Pakscher, Etude sur un Catalogue de Fulvius Ursinus (1re partie; ce travail, par suite d'un arrangement de l'auteur avec M. de Nolhac (voy. plus loin p. 447), ne sera pas continué. M. P., dans cet article, s'occupe du chansonnier en partie autographe de Pétrarque, auquel M. de Nolhac a de son côté consacré une étude). P. 246, H. Tiktin, Der Vocalismus des Rumænischen. Ce premier chapitre d'un excellent et important travail est consacré à l'a. - P. 256, G. Osterhage, Ueber Ganelon und die Verræter in der Karlssage; l'auteur se place à un point de vue mythologique assez abandonné aujourd'hui, et voit dans Ganelon une des variantes du type du « beau-père persécuteur ». P. 263, Th. Braune, Ueber einige romanische Worter deutscher Herkunft. L'auteur essaye d'abord de rattacher la première syllabe d'albergo, alberga à l'all. a da 1, en s'appuyant sur un prétendu adalberga, qu'il prend pour le nom d'un droit féodal et qui est simplement un nom propre de femme (Martene, Thes. Anecd. I, 97). Il part de là pour retrouver a dal dans alloggiare et dans alodis, comme si adal avait pu de si bonne heure se contracter en al (cf. les noms propres où entre a dal et où cet élément forme deux syllabes au XIIe siècle). Ce que dit M. Br. de feodum, qu'il explique par un composé de fehu et od, est beaucoup plus digne d'attention (cf. Rom. VIII, 135). L'explication de haring, d'où hareng, comme un dérivé de hari, « le poisson qui marche en bandes, » et non par le latin halec, est très séduisante. Les remarques sur harangue, quoique n'aboutissant pas à une conclusion certaine, méritent d'être prises en considération. Quant à arroi, il n'y a pas de raison pour reconnaître hari dans la première syllabe; l'origine de redo, roi reste assez obscure. Atgier dans le Rol. paraît bien avoir été restitué avec raison pour algier qui, en tout cas, ne saurait être a dalger.

Mélanges. I. Textes. 1. P. 278, Stengel, Onze nouveaux manuscrits du Brut en prose. [L'objet que s'est proposé M. Stengel a été de faire un supplément au mémoire que j'ai publié en 1878 dans le Bulletin de la Société des anciens textes français sur les chroniques anglo-normandes en prose qui ont porté le nom de Brut (voy. Rom. VIII, 466). Je m'étais proposé de distinguer les uns

« PreviousContinue »