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cessé d'exister avant le jugement sur appel (Req., 24 mars 1825, aff. Lemet, V. no 559-1o.-Conf. Merlin, Quest., v° Appel, § 14, art. 1, no 4-2°; Talandier, p. 443, approuve ce dernier arrêt).

580. L'infirmation d'un jugement en ce qu'il a mal à propos accueilli une demande en péremption autorise-t-elle l'évocation? Oui, évidemment, puisque le fond n'est point périmé et qu'il reste à juger (Conf. Pigeau, Comment., t. 2, p. 55; Boitard, t. 3, p. 155; Thomine, t. 1, p. 718; Chauveau, no 1702, § 3-1o). Il n'y aurait pas lieu à évocation si la cour infirmait par le motif que la péremption n'aurait pas été accueillie; c'est que, dans ce cas, il ne reste plus rien à juger, car l'instance est éteinte. C'est aussi l'avis de M. Chauveau, eod., no 2. - Jugé, conformément à cette opinion: 1o que le tribunal d'appel qui infirme un jugement par lequel l'instance est déclarée périmée, peut statuer en même temps sur le fond (Req., 27 germ. an 13) (1); 2° Qu'il peut évoquer le fond, alors, d'ailleurs, que la cause est jugée en état de recevoir une pareille décision, et qu'elle a subi toute l'instruction dont elle était susceptible: on dirait en vain que la péremption est une question préjudicielle qui doit être résolue par un jugement distinct (Req., 22 mars 1857, aff. Cardavac, vo Péremption); -3° L'évocation a été repoussée dans une affaire où le juge d'appel déclare qu'il ne se trouve pas en état de rendre une décision définitive (Rennes, 7 juin 1816, aff. Bréard, vo Absence, n° 325).—4° Décidé aussi qu'on ne peut évoquer lorsque les premiers juges n'ont eu à statuer que sur une exception de prescription (Rennes, 4 juill. 1820) (2). — Mais on ne croit pas que cette dernière jurisprudence doive être suivie en thèse de droit.

(1) Espèce :-(Josse de Saep C. Mus.)--En l'an 10, reprise devant le tribunal civil de Bruxelles, d'une instance introduite en 1792, devant l'ancien conseil de Brabant. Le 30 flor. an 11, jugement qui déclare cette instance périmée. Le 5 vent. an 12, la cour d'appel de Bruxelles infirme ce jugement, rejette la péremption, et retient la connaissance du fond. Pourvoi pour évocation illégale. Arrêt.

LA COUR; Attendu que les questions du fond ont été soumises aux premiers juges, et qu'il a dépendu d'eux d'y statuer lors du jugement du 30 flor.; que, par conséquent, la cour d'appel a procédé régulièrement, en se retenant la connaissance du principal; - Rejette, etc.

Du 27 germ. an 15 (non an 11).-C. C., ch. req.-MM. Muraire, 1er pr.Genevois, rap.

(2) (Riou Kerhallet C. Vacquier.) LA COUR:- Considérant, sur l'appel incidemment relevé par les héritiers Philippe, que l'art. 473 c. pr. n'est applicable que lorsque le jugement est infirmé pour vice de forme, ou autrement, et que la matière est disposée à recevoir une décision définitive; qu'en première instance, Riou de Kerhallet se bornait à proposer l'exception de la prescription, sans prendre de conclusions au fond, ainsi que le constate le jugement dont est appel; que le tribunal, en le déboutant de son exception, devait, ainsi qu'il l'a fait, lui ordonner de plaider au fond; que, sur son refus de le faire, les héritiers Philippe devaient requérir qu'il fût donné défaut contre lui, et que, par le profit, leur demande leur fût adjugée; que ne l'ayant pas fait, les premiers juges ne pouvaient, d'office, donner défaut contre Riou de Kerballet, et en juger de suite le profit; qu'ainsi ils doivent s'imputer la faute de n'avoir pas mis le tribunal à lieu de prononcer sur le fond, etc. Du 4 juill. 1820.-C. de Rennes, 5 ch.

:- (Feuchères C. duc d'Aumale.)

(3) Espèce: Le prince de Condé, à la suite de plusieurs legs en faveur de la dame Feucheres, ajoutait dans son testament: « Mon intention est que mon château d'Ecouen soit affecté à un établissement de bienfaisance en faveur des enfants, petits-enfants ou descendants des anciens officiers ou soldats de l'armée de Condé ou de la Vendée. Je donne alors ce château et le bois qui en dépend à ladite dame de Feuchères, en la chargeant de fonder l'établissement dont il s'agit... J'affecte au service des dépenses de cet établissement une somme de 100,000 fr., qui sera payée annuellement et à perpétuité par mon petit-neveu le duc d'Aumale. »- -Sur la demande qui a été formée par la dame de Feuchères, à fin de délivrance du legs particulier à elle fait à l'égard du château d'Écouen et de ses dépendances, le tribunal de première instance de la Seine, par jugement du 22 fév. 1852... « Attendu que le legs est fait seulement à l'établissement dont le prince a prescrit la fondation, et dans la vue d'exécuter cette volonté...-Attendu que la création et l'existence de cet établissement sont subordonnées à Pobtention d'autorisations qui ne sont pas encore accordées..., surseoit à statuer. >> - Depois ce jugement, une ordonnance, rendue sur la poursuite de la baronne de Feuchères, refuse d'autoriser la fondation dont il s'agit. Cependant, et sur l'appel que la baronne de Feuchères seule avait interjeté à l'égard du chef du jugement ci-dessus, relatif au sursis, la

581. Une cour peut, en infirmant un jugement qui prononce un sursis à une mainlevée d'opposition à un mariage, évoquer le fond et juger elle-même le fait qui donne lieu au sursis (Lyon, 24 janv. 1828, aff. Léger, V. Mariage).—Jugé aussi que lorsqu'un jugement s'est borné à ordonner un sursis jusqu'à l'obtention d'une autorisation, le juge d'appel peut, bien qu'il n'ait été appelé que du chef relatif au sursis, après avoir infirmé le jugement en ce chef, évoquer l'affaire au fond et y statuer..... surtout si, à cette époque, l'autorisation administrative avait été refusée (Req., 18 nov. 1834) (3). — Le droit d'évocation a été admis, même dans des cas où le tribunal s'était déclaré incompétent à limine litis, et par suite n'avait pu prendre aucune connaissance de l'affaire au fond. A plus forte raison, l'évocation a-t-elle pu avoir lieu dans l'espèce où il y avait eu un sursis, mesure qui n'implique pas nécessairement l'idée que le fond soit resté tout à fait en dehors de la discussion et étranger aux juges. Ajoutons que, d'un autre côté, il était intervenu, depuis le jugement, une ordonnance royale qui ne laissait plus de doute sur l'issue du débat au fond. C'était une raison de plus d'évoquer, afin de ne pas laisser engager les parties dans des débats nouveaux et dans des frais frustratoires.

§ 6. Infirmation pour cause de nullité.

582. Lorsque le jugement est infirmé pour cause de nullité, l'évocation est permise: c'est le cas explicitement prévu pár l'art. 473 qui exige, du reste, comme cela est de règle générale, que le fond soit en état de recevoir une décision définitive. -Que cour de Paris rendit, le 16 juillet 1853, un arrêt par lequel... << Considérant que, depuis la sentence du tribunal de première instance, qui a sursis à statuer sur la demande en délivrance du legs... une ordonnance, intervenue sur la demande de la baronne de Feuchères, a déclaré qu'il n'y avait pas lieu d'autoriser la fondation dont il s'agit; Considérant que

la cause est en état de recevoir jugement définitif;-Vu l'art. 473 c. pr.; Met l'appellation et ce dont est appel au néant; évoquant le principal et y faisant droit, déclare la baronne de Feucheres non recevable en sa demande. >>

Pourvoi de la dame de Feuchères. -1° Excès de pouvoir et violation de la règle du double degré de juridiction.— Madame de Feuchères a interjeté appel du jugement, seulement au chef qui ordonnait le sursis; ses adversaires n'ont, de leur côté, formé aucun appel incident: la cour était donc uniquement saisie pour prononcer sur le mérite d'un sursis, et cependant elle ne s'est pas bornée à infirmer purement et simplement le jugement de première instance, qui ordonnait de surseoir à la demande en délivrance; elle a, après avoir infirmé, décidé à jamais de la prétention au fond, en déclarant la baronne de Feuchères définitivement non recevable en sa demande en délivrance. La cour s'est appuyée sur l'art. 475 c. pr. Mais de l'opinion des plus graves auteurs, cet article n'accorde au juge d'appel que le droit de statuer sur les demandes agitées devant le juge inférieur; ce juge d'appel ne peut évoquer que pour faire ce que le juge de premier ressort aurait pu et dù faire. Or, une explication sinette, consacrée par la jurisprudence ( Voy, arrêts de cassation des 29 niv. an 11, 2 fruct. an 12, 6 janv. 1806 et 23 mars 1810), après avoir été développée par les auteurs (Berriat, liv. 2, sect. 1, tit. 2, app. au chap. 6), ne laisse plus de possibilité à l'application à l'espèce de cet art. 475 c. pr. Le refus d'autorisation n'étant en effet survenu qu'après le jugement de première instance, les juges dont il est émané étaient, par là même, dans l'impossibilité physique de décider la question du fond, jugée par l'arrêt, en sorte que l'arrêt attaqué juge une question qui, non-seulement n'était pas soumise à la cour d'appel, mais qui même n'avait pas été et n'avait pu être examinée en premier ressort; et sous ces deux points de vue, il encourt également la censure de la cour suprême;-2° Violation de l'art. 1176 c. civ.-Arrêt.

LA COUR; -Sur le moyen tiré du défaut des deux degrés de juridiction: Attendu que la demande de la dame de Feuchères en délivrance du château d'Écouen et dépendances et de la somme annuelle de 100,000 francs, d'abord portée devant le tribunal de première instance, l'a été ensuite devant la cour royale par les propres conclusions de la dame de Feuchères, d'où suit que le moyen n'est pas fondé; - Sur le second moyen, tiré de l'excès de pouvoir, en ce que la cour royale a évoqué hors des termes de l'art. 473 c. pr. civ.: Attendu que cet article donne aux cours royales le droit d'évoquer, lorsqu'elles infirmeront pour quelque cause que ce soit; qu'en fait, la cour royale de Paris, en confirmant la disposition principale, a cependant mis au néant celle qui avait prononcé le sursis, et qu'elle devait le faire, puisqu'au moyen de l'ordonnance qui déclarait n'y avoir lieu d'autoriser la fondation en faveur de laquelle il était jugé que le legs avait été fait, ce sursis devenait sans objet ;-Rejette. Du 18 nov. 1854.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Joubert, rap.

le jugement soit définitif ou interlocutoire, il suffit qu'il y ait infirmation pour que l'évocation puisse être exercée.

Ainsi un tribunal d'appel peut évoquer le fond et y statuer si la mesure est disposée à recevoir décision definitive: 4° Lorsqu'il annule un jugement définitif en ce que le tribunal a été irrégulièrement constitué ou composé (Conf. Merlin, Quest., Appel, § 14, art. 1. no 4; Talandier, p. 433; Chauveau, no 1702, $7), par exemple, en ce que des hommes de loi y ont concouru en majorité « La cour; attendu que la cour d'appel (de Metz, du 29 juill. 1807), en statuant sur le fond, en même temps qu'elle a annulé le jugement dans la forme, non-seulement a fait ce à quoi avaient conclu toutes les parties, mais encore s'est conformé littéralement au texte de l'art. 473 c. pr.; rejette » (5 oct. 1808.-Req.-MM. Muraire, 1er pr.-Rupérou, rap.-Aff. Simonet C. Conan).

Décisions semblables en cas d'infirmation de jugement pour composition irrégulière du tribunal (Colmar, 28 avril 1825, aff. N...; 22 juin 1826, aff. Heck C. Chartois), en ce qu'il ne mentionnait pas la cause d'empêchement du juge qui avait été remplacé par un avoué (Nîmes, 17 août 1824, M. Thourel, pr., aff. N..., el 19 août 1824, M. Fornier, pr., aff. Escalier C. Marcou), ou en ce qu'il ne mentionnait pas si l'avocat avait été appelé dans l'ordre du tableau: « Attendu que d'après l'art. 473 c. pr., la cour d'appel peut statuer en même temps sur la nullité du jugement et sur le fond du procès pour quelque cause que ce soit, pourvu que la matière soit disposée à recevoir une décision définitive, ce qui se rencontre dans l'espèce actuelle >> (5 mars 1825.-Toulouse, 1re ch.-M. Faydel, pr.-Poqué C. Besson), ou en ce que le jugement ne mentionne pas si l'avoué n'a été appelé qu'à défaut de juge suppléant ou d'avocats (Colmar, 21 avril 1825 (1); Riom, 2o ch., 31 janv. 1828, M. Thevenin, pr., aff. Rochette, etc. C. Gauthier); ou en ce qu'on aurait appelé pour composer un tribunal de commerce des juges suppléants inutiles pour parfaire le nombre de trois juges (Colmar, 31 déc. 1831) (2) ; Et cela quand même le jugement annulé pour composition irrégulière, serait un jugement interlocutoire, pourvu d'ailleurs que la cause soit en état d'être jugée définitivement (Req., 28 fév. 1828, aff. Sire, V. Jugement). — M. Chauveau, fidèle au système développé par M. Boncenne, et qu'il adopte (V. no 572), motive cette jurisprudence sur ce que la partie qui demande jugement n'a pas mission de critiquer la composition du tribunal, et qu'il lui suffit d'avoir ajourné son adversaire devant un tribunal compétent, à raison de la matière et du domicile. « L'erreur de composition, dit-il, est la faute du tribunal et non la sienne: elle ne doit pas en souffrir; » mais on verra que les arrêts ne reproduisent pas cette distinction qui est, en effet, bien subtile.

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(1) (Schulmeister C. Hertzog.)- LA COUR; - En ce qui touche l'éVocation: Considérant que, d'après l'art. 473 c. pr. civ., § 2, l'évocation devient facultative, toutes les fois que les cours d'appel infirment des jugements définitifs pour des vices de forme, on pour tout autre; que cette règle, qui est générale, ne peut recevoir d'exception que dans les cas précisés par la loi; qu'elle déroge aux lois organiques des 1er mai et 24 août 1790, sur les deux degrés de juridiction, en ce sens qu'elle regarde le premier degré comme épuisé, lors même qu'un tribunal aurait été irrégulièrement composé, et qu'elle renferme la faculté d'évoquer dans la disposition générale de l'infirmation pour toute autre cause; Considérant, au cas particulier, que la cause est disposée à recevoir une décision définitive, et que les parties ont respectivement conclu au fond, etc. Du 21 avril 1825.-C. de Colmar, aud. solen.- MM. Millet, 1er pr.Desclaux, av. gén., c. conf.-Chauffour et Antonin, av.

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(2) (Thiebaud C. Dolfuss-Muëg.) — LA COUR; En ce qui touche l'évocation: Considérant que, d'après les dispositions de l'art. 475 c. pr. civ. les cours peuvent évoquer en cas d'infirmation, et lorsque les causes sont disposées à recevoir une décision définitive; qu'au cas particulier, le procés entre les parties est susceptible de recevoir sa décision finale pour tout ce qui concerne la juridiction du tribunal de commerce; que, d'ailleurs, les parties concluent respectivement à l'évocation, qui est dans leur intérêt, pour éviter des délais inutiles et des frais préjudiciables. Du 31 déc. 1851.-C. de Colmar, 3 ch.

(3) 1 Espèce ·(Aubé C. de Polignac.)-Le tribunal civil de Meaux avait jugé, pendant les vacations, une affaire qui, n'étant pas sommaire, n'aurait pas dû être jugée dans ce temps (déc. du 30 mars 1808, art. 44;

588. 2° Lorsqu'il annule un jugement définitif en ce qu'il n'indique pas les noms et le nombre des juges qui l'ont délibéré : « Attendu que, quoique le jugement soit irrégulier, les parties n'en ont pas moins suivi le premier degré de juridiction; que la cour doit donc prononcer sur le fond; attendu qu'il est question de l'opposition à un mariage, et que les appelants ne se sont pas présentés, etc.» (Agen, 30 mai 1808, M. Lacuée, 1er pr., aff. Miegeville). 584. 3° Lorsqu'il infirme un jugement définitif pour défaut de communication au ministère public dans le cas où elle est ordonnée (Rennes, 3e ch., 17 avril 1812, aff. Trauront). Cet arrêt considère que « la cour, en iufirmant pour contravention à la loi, est autorisée par l'art. 472 c. pr. à retenir la connaissance du fond; que l'art. 473 n'est applicable qu'en appel de jugement interlocutoire; que le jugement du 30 janv. est définitif... retient le fond, etc. »- - Ce motif est, comme on voit, entièrement erroné, quoique le dispositif du jugement soit hors de critique.

585. 4° Lorsqu'il annule un jugement définitif pour vice résultant de ce que l'un des juges qui y ont pris part n'a point assisté à toutes les audiences de la cause (Rej., 20 déc. 1826, aff. Nieaud, V. Compét. adm., no 287).

586. 5° Lorsqu'il annule un jugement pour vice de forme, par exemple un jugement rendu pendant les vacances sur une affaire non sommaire, si, d'ailleurs, la cause est en état d'être jugée définitivement (Req., 13 juin 1815, 19 avril 1827) (3).

587. 6° Lorsqu'il annule un jugement qui ne contieut pas les conclusions prises à l'audience par l'une des parties: « Attendu que si le jugement doit être annulé, c'est le cas d'évoquer le fond, parce que l'infraction a été faite devant les premiers juges et que, dans ces circonstances, l'évocation est autorisée par l'art. 475 c. pén. » (24 janv. 1825, Toulouse, 1re ch.-M. Faydel, pr.-Aff. Terrisse).

588. 7° De même, 1° lorsqu'un jugement d'un tribunal de commerce a été rendu sur une demande formée contre un failli seul, autorisé à administrer ses biens, et non contre les commissaires des créanciers chargés de l'assister, et qui auraient dû être assignés avec le failli; que, sur l'appel, les commissaires interviennent, concluent à ce que le jugement de première instance soit infirmé, que la demande originaire soit annulée, et subsidiairement, qu'en cas de non-annulation, elle soit déclarée non recevable, une cour d'appel peut, en statuant sur l'appel et l'intervention, et en annulant le jugement seul comme rendu hors la présence des commissaires, évoquer la cause et juger le fond sans violer le principe des deux degrés de juridiction, et sans faire une fausse application de l'art. 473 c. pr. (Rej., 21 juin 1825) (4); – 2o Lorsqu'il est conclu par l'intimé, sur l'appel d'un jugement, à l'exécution de ce jugement, et, dans le cas où il ne serait pas déclaré exécutoire, à la condamnation au payement des dom

6 juillet 1810, art. 31; L. du 18 août 1810, art. 37). Sur l'appel, la cour de Paris infirma le jugement, et en même temps elle évoqua le fond et y statua. Pourvoi en cassation. Arrêt. LA COUR; Attendu que les juges ne perdent point leur caractère ni leur pouvoir pendant la durée des féries et vacations légales; que, lorsqu'ils négligent l'observation de ces féries et vacations, ils prononcent irrégulièrement; que cette irrégularité qui se rencontrait dans le jugement du tribunal de Meaux, du 16 sept. 1813, constituait un vice de forme ; que la cour d'appel de Paris, qui a infirmé ce jugement pour vice de forme, trouvant la matière disposée à recevoir une décision définitive, a pa, conformément a l'art. 475 c. pr. civ., statuer définitivement sur le fond, ainsi qu'elle l'a fait; - Rejette, etc.

Du 13 juin 1815.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, 1er pr.-Borel, rap.

2o Espèce :-( Aucante C. Riocourt.)—LA COUR ; —Attendu que la cour royale de Metz, saisie de l'appel du jugement définitif du tribunal de Charleville, irrégulier pour avoir été prononcé en vacation, a pu (l'infirmant à raison de ce) évoquer la cause et la juger au fond, dès qu'elle était en état, sans violer la loi sur les deux degrés de juridiction, d'après l'art. 475 c. pr., dont les termes du deuxieme paragraphe laissent aux cours la faculte illimitée d'évoquer et juger au fond par un seul et même arrêt les causes dont elles réforment les jugements définitifs, rendus en premier ressort, soit pour vice de forme, soit pour toute autre cause; Rejette. Du 19 avril 1827.-C. C., ch. req.-MM. Henrion, pr.-Gartempe, rap.

(4) Espèce: - (Ouvrard, etc. C. Séguin.) On disait, dans l'espèce, contre cette décision, qu'aucune évocation n'était possible, parce que toute la procédure ayant été frappée de nullité, il était censé n'y

mages-intérêts adjugés par ce jugement, la cour d'appel peut, en réformant le jugement, évoquer le fond (Req., 6 avr. 1826, aff. Viterbi, V. Souveraineté).

589. 8° Le droit d'évocation du fond appartient aux cours d'appel lorsqu'elles infirment, pour vices de formes ou autre cause, un jugement, même arbitral (Aix, 2 août 1826, aff. Journès, V. Arbitr., no 803. Nota. Cet arrêt se borne à rappeler l'art. 473, puis cette disposition reproduite, il ajoute : « que c'est ce qui a eu lieu dans l'espèce »); · Ou un jugement d'un tribunal de commerce (Colmar, 31 déc. 1831, aff. Thiebaud, V. no 582).

avoir jamais eu d'instance; qu'il est de principe que le juge d'appel ne peut faire que ce qu'aurait pu et dû faire le juge de première instance. Or, le juge de première instance aurait-il pu statuer en l'absence des commissaires de la faillite? Évidemment non; la cour royale l'a elle-même reconnu. Comment donc a-t-elle pu évoquer et juger l'affaire? On dira que les choses n'étaient plus dans le même état; que les commissaires des créanciers figuraient en appel : oui, sans doute, mais cela ne suffit pas, et c'est précisément pour se plaindre de n'avoir pas été appelés qu'ils sont intervenus devant la cour. Enfin les demandeurs n'ayant point défendu au fond devant les premiers juges, le jugement qui les avait déboutés de leur opposition était bien contradictoire, mais n'était point le jugement définitif dont parle l'art. 473 c. pr., en ce sens qu'il n'y avait pas eu de défense devant l'un et l'autre degré, de sorte que la cause ne pouvait évidemment être en état de recevoir une décision devant la cour d'appel, n'ayant pas été mise en état devant les premiers juges, et tous les jugements étant rendus par défaut, sans qu'il eût été conclu au fond.

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On a répondu à ce premier moyen pour le sieur Séguin: L'art. 475 autorise les cours royales à évoquer le fond, lorsqu'elles annulent des jugements de première instance pour quelque cause que ce soit. La cour de Paris n'a annulé que les jugements, elle n'a pas annulé la demande; en statuant sur le fond par le même arrêt, elle était dans les termes de l'art. 473.-On objecte que, d'après l'art. 494 c. com., la demande était nulle, et que la cour ne pouvait se dispenser de la declarer telle. C'est une erreur; car, 1o la faillite d'Ouvrard et Vanlerberghe était régie non par le code de commerce, mais par l'ordonnance de 1673, sous l'empire de laquelle elle s'était ouverte. Aussi est-ce d'après cette loi qu'ont eu lieu toutes les opérations, les vérifications des créances, l'homologation du concordat, etc. Or, l'art. 442 c. com. sur le dessaisissement du failli, et l'art. 494 sur les actions à former contre les agents et syndics, sont des dispositions toutes nouvelles; la demande n'était donc pas nulle. 2° Elle ne l'était pas davantage, par cela que le concordat qui à rétabli les faillis dans leurs affaires les a soumis à la surveillance des commissaires, puisque ce concordat a toujours été déclaré non obligatoire pour Séguin. D'ailleurs, dans tous les cas, il n'y aurait pas violation de l'art. 494 c. com., parce qu'il est constant que cet article ne dispose que pour le temps provisoire entre le jugement de faillite et le concordat: le concordat a pour effet de rétablir le failli dans ses affaires, et l'adjonction de commissaires ne change rien à cet effet (M. Pardessus, C. de droit comm., no 1246). -Mais enfin, lors même que la demande eût été nulle, la cour n'en aurait pas moins eu le droit de juger le fond; car l'art. 475 est une modification à la règle des deux degrés de juridiction, et cette modification a été faite dans l'intérêt des parties. Cet article s'applique à des cas où le fond n'a même pas éprouvé la discussion du premier degré, comme, par exemple, lorsqu'il s'agit d'un jugement interlocutoire, ou lorsque le premier juge s'est borné à se déclarer incompétent. Lors donc qu'en première instance le fond a été jugé, à plus forte raison la cour royale peut elle évoquer, encore que ce premier degré n'ait pas été valablement rempli. C'est ce que la cour de cassation a souvent jugé ( V. arrêts des 23 janv. 1811, 17 juin 1817, 6 déc. 1821 ). — On insiste et l'on prétend qu'il n'y avait pas lieu à évocation, parce que les commissaires n'ayant pas été parties en première instance, ils ne pouvaient être privés du premier degré de juridiction. Mais les commissaires sont intervenus en appel, et l'on sait que l'intervention en cause d'appel par ceux qui auraient eu le droit de jouir du premier degré de juridiction emporte nécessairement la renonciation à ce premier degré.-On objecte encore que les faillis n'ont pas euxmėmes joui du premier degré, et que le jugement qui les avait déboutés de leur opposition n'était pas le jugement définitif dont parle l'art. 473. Si les faillis se sont laissés juger par défaut, c'est à eux qu'ils doivent s'en prendre; le jugement n'en était pas moins définitif, et l'art. 473 n'est pas moins applicable aux jugements définitifs par défaut qu'à ceux contradictoires.-Arrêt (ap. délib. en ch. du cons.).

LA COUR; En ce qui touche la violation des lois de 1790, qui ont établi la règle des deux degrés de juridiction, et la fausse application de l'art.475 c. pr. civ.;-Attendu que, pour l'exécution des lois de 1790, il faut que toute demande principale soit formée devant des juges de première instance; mais qu'il n'est pas toujours nécessaire que ces demandes et les contestations accessoires ou incidentes auxquelles elles ont donné lieu soient définitivement jugées par les premiers juges; que, dans l'intérêt des justiciables, pour rendre l'administration de la justice plus prompte et moins dispendieuse, les juges supérieurs ont été autorisés ex

TOME XV.

590........9° Lorsqu'elles annulent une délibération du conseil de discipline, pour violation ou omission de formes prescrites (Caen, 8 janv. 1830, aff. Séminel, V. Avocat, no 409).

591. 10° Enfin l'art. 473 c. pr. est applicable en matière d'ordre. En conséquence, lorsqu'une cour d'appel infirme un jugement pour vices de forme, en ce que, par exemple, il n'y a eu ni rapport d'un juge-commissaire ni conclusion du ministère public (c. pr. 762), elle peut évoquer le fond (Req., 5 juin 1821) (1).

592. Il a été jugé, au contraire, que la cour qui annule un ju

pressément par l'art. 475 c. pr. à statuer sur le fond par voie d'évocation, toutes les fois que les circonstances suivantes se trouvent réunies: 1° lorsqu'il est intervenu, en première instance, un jugement, soit interlocutoire, soit définitif; 2o lorsqu'il y a lieu d'infirmer ce jugement pour vice de forme, ou pour toute autre cause; 3° lorsque la matière est disposée à recevoir une décision définitive sur le fond; 4° enfin, lorsque les juges supérieurs peuvent infirmer le jugement et rendre cette décision définitive par un seul et même jugement; que ces conditions exprimées dans les termes les plus généraux et qui ne présentent aucune équivoque, sont les seules que le législateur ait cru nécessaires pour conserver aux évocations tous leurs avantages, et prévenir l'abus qu'on en aurait voulu faire. Appliquant ces principes à la cause;-Attendu que Séguin avait formé au tribunal de commerce, contre Vanlerberghe et Ouvrard seulement, la demande qui a fait la base du procès; que ses conclusions lui avaient été adjugées définitivement par les jugements par défaut des 10 août 1818 el 6 janv. 1819; que, sur l'appel interjeté par Ouvrard et Vanlerberghe, les commissaires nommés à leur faillite sont intervenus; que, s'ils se sont fait un moyen de ce qu'on les avait privés du premier degré de juridiction, ils n'ont cependant pas demandé à être renvoyés devant les premiers juges pour y être statué avec eux sur la demande de Séguin; qu'ils ont, au contraire, en adhérant à l'appel et aux moyens de Vanlerberghe et Ouvrard, conclu à l'infirmation des jugements, de même que s'ils avaient été rendus avec eux, et demandé qu'en statuant au fond, la demande de Séguin fût annulée, subsidiairement, au cas où la nullité n'en serait pas prononcée, Séguin y fût déclaré non recevable; que les demandeurs ne peuvent donc pas dire qu'ils n'aient conclu que subsidiairement sur le fond, puisque c'était aussi sur le fond qu'étaient prises leurs conclusions principales à fin de nullité de la demande de Séguin, et qu'ils n'en ont pas pris d'autres; mais qu'en tous cas, pour être subsidiaires, ces conclusions et les discussions qui en ont été la suite ne donnaient pas moins lieu à l'application de l'art. 475 c. pr., puisqu'elles ont mis la cour royale en état de prononcer, et que, trouvant ainsi la matière disposée à recevoir une décision définitive avec toutes les partics, elle a, en effet, prononcé en même temps et sur l'appel des jugements qu'elle a infirmés, et sur le fond du procès qu'elle a réglé définitivement ;-Attendu que si, par suite de ces errements, les commissaires de la faillite ont été prives du premier degré de juridiction, ils ne sont pas fondés à s'en plaindre; en droit, parce que l'art. 473 c. pr. civ. modifie, en cette matière, le principe des deux degrés de juridiction; en fait, parce que c'est volontairement qu'ils y ont renoncé: 1° en n'usant pas de la faculté qu'ils avaient, dans leur système, de former, devant le tribunal de commerce une tierce-opposition aux jugements des 10 août 1818 et 6 janv. 1819; 2° en ne se bornant pas à intervenir dans l'instance pour demander le renvoi de la demande de Séguin, au tribunal de commerce, pour y subir avec eux le premier degré de juridiction, mais en intervenant sur l'appel des jugements qui avaient statué définitivement sur la demande en condamnation formée par Séguin, et en concluant, comme Ouvrard et Vanlerberghe, à ce que lesdits jugements fussent infirmés, et à ce que cette demande fût annulée, subsidiairement à ce que Séguin y fût déclaré non recevable; 3° enfin, parce qu'intervenir ainsi sur l'appel d'un jugement qui a prononcé sur le fond, c'est renoncer au premier degré, c'est consentir à être jugé, comme les autres appelants, par des tribunaux institués pour juger en dernier ressort; d'où il suit que la cour royale, loin d'avoir violé ou faussement appliqué les lois de 1790 et l'art. 473 c. pr. civ., s'est conformée à la lettre et à l'esprit de ces lois;-Rejette (*).'

Du 21 juin 1825.-C. C., sect. civ.-MM. Brisson, pr.-Poriquet, rap.Marchangy, av. gen., c. conf. -Scribe et Petit de Gatines, av.

-

(1) (Mireur C. Tissautier.) LA COUR; Attendu en la forme que l'arrét a adopté la nullité proposée d'après l'art. 762 c. pr., qui dispose : «Tout jugement en matière d'ordre doit être rendu sur le rapport du jugecommissaire et les conclusions du ministère public; » mais, en même temps, que l'arrêt ajoute que le premier degré de juridiction a été épuisé par la discussion en première instance des prétentions respectives des parties,

(*) Cette résolution, par laquelle la cour a voulu prévenir les nombreuses difficultés auxquelles donne lieu l'art. 473 c. pr., doit fier l'attention des jurisconsultes. Elle est contraire à l'opinion développée dans trois consultations délibérées dans la cause et en faveur du sieur Ouvrard, par MM. Toullier, Carré, Caillard de Kerbertin, Delacroix-Frainville, Bonnet, Gairal, Tripier, Dupin, Brunetière, Berriatde-Saint-Prix, Chignard, Lassis, Gaudry, Béra père, Boncenne et Guillemot. 34

gement émané d'un tribunal irrégulièrement composé, ne peut évoquer le fond (Bourges, 9 janv. 1809; Riom, 20 août 1825(1); Montpellier, 22 mars 1824, aff. Laguarigue, V. Organ. jud.), lorsque « la cause n'est pas en état de recevoir jugement au fond » (Grenoble, 1re ch., 27 juin 1825, aff. Clairefond); cette dernière solution est évidente: c'est le texte presque littéral de l'art. 473. 593. De même, une cour qui infirme un jugement pour vice de forme, comme pour irrégularité dans la composition du tribunal, n'est pas tenue d'évoquer le fond; elle peut, ou renvoyer la cause à d'autres juges, ou retenir le fond (Colmar, 11 fév. 1825, aff. Stroitz, V. Organ. jud.; 3 mars 1825, aff. Sutter; 25 mars 1825, aff. Syrgensthein).-V. n° 542.

594. Décidé toutefois, 1° qu'il en était autrement avant le code de procédure; le tribunal d'appel qui annulait un jugement pour vice de forme, devait nécessairement statuer sur le fond; il ne pouvait renvoyer les parties devant les premiers juges, sans violer le principe des deux degrés de juridiction; soit que l'annulation portàt sur un jugement de tribunal civil (Cass., 2 fruct. an 12 (2). Conf. Cass., 23 frim. an 2, M. Lyons, rap., aff. Chevalègre; Rej., 14 mess. an 7, M. Beaulaton, rap., aff. Niesse, etc.; 17 vend. an 8, aff. com. de Tigue, V. Commune, n° 2738; 24 prair. an 8, M. Borel, rap., aff. Collard; 24 brum. an 9, aff. Vandernool; 20 vend. an 11, M. Riolz, rap., aff. Jouffrau; 50 frim. an 11, M. Lasaudade, rap., int. de la loi, aff. Brault; 28 flor. an 11, M. Rupérou, rap., aff. Delpech); 2o Soit qu'elle portàt sur la sentence d'un tribunal de paix (Cass., 14 janv. 1807 (3); Conf., 14 avril 1807, M. Zangiacomi, rap., aff. Garesché); -3° Jugé aussi qu'un tribunal qui, sur l'appel, annule la décision d'un juge de paix comme illégalement rendue, en ce que ce juge n'a pas statué sur sa compétence qui était contestée, ne peut se dispenser de statuer lui-même sur la question de compétence (Cass., 1er avril 1807) (4).

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Du 5 juin 1821.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-De Ménerville, r. (1) 1re Espèce:-( Blondot C. Mouzat.) - Un jugement du tribunal de Nevers avait été rendu par un juge et deux avoués. -Appel.-On soutient que ce jugement est nul et que par suite l'affaire doit être renvoyée devant le tribunal de Nevers. Arrêt.

LA COUR; Considérant que la loi permet aux cours d'évoquer soit à cause de la litispendance, soit quand les premiers juges ont consommé leur droit; mais que, dans l'espèce, il n'y a pas en effet de jugement, puisque celui dont il s'agit est rendu par une majorité sans caractere; qu'ainsi l'affaire est, dans le fait, en même état qu'avant le jugement; - Déclare nul le jugement dont est appel; Renvoie la cause et les parties devant le tribunal de Nevers, etc.

Sallé, pr.

Du 9 janv. 1809.-C. de Bourges.-M. 2o Espèce: (Bathias C. Mathiron.) LA COUR;

Considérant que là où il n'y a pas de jugement émané de personnes ayant tout le caractère légal de juge, là le premier degré de juridiction n'est point censé épuisé; Renvoie, etc.

Du 20 août 1825.-C. de Riom, 2 ch.-M. Deval, pr.

(2) Espèce: (Michon C. les dames Descorailles, etc.) La cour d'appel de Lyon, par arrêt du 26 brum. an 10, avait annulé deux jugements de première instance, sur le fondement que les questions de fait et de droit n'y étaient pas posées, comme le prescrit l'art. 15 du tit. 5 de la loi du 24 août 1790, et elle avait en conséquence renvoyé la cause devant les premiers juges. - Pourvoi pour violation de la règle des deux degrés de juridiction. - Arrêt.

LA COUR; - Attendu les dispositions des lois du 1er mai 1790, et de l'art. 6 de celle du 3 brum an 2, de l'ensemble desquelles il résulte que l'ordre judiciaire actuel n'admet plus que deux degrés de juridiction, et que les cours d'appel doivent prononcer sur toutes les demandes formées devant les juges de première instance, lorsque ceux-ci n'y ont pas statué;

D'où il suit que celle de Lyon, en annulant pour défaut de forme les deux jugements ci-dessus énoncés, aurait dû statuer en même temps sur le fond, sans renvoyer les parties devant les premiers juges, pour y être statué par jugement nouveau, ce qui les exposait au risque d'être obligées de parcourir un nombre de degrés de juridiction plus étendu que celui déterminé par les lois ci-dessus citées;

Casse.

Du 2 fruct. an 12.-C. C., sect. civ.-MM. Maleville, pr.-Pajon, rap. (3) (Bouillat C. Ramboz.) - LA COUR; Vu les art. 10 et 12, tit. 3,

le juge supérieur qui infirme pour vice de forme doit évoquer le fond (Cass., 20 janv. 1808, M. Boyer, rap., aff. Brel). Mais cette dernière décision va trop loin: c'est une faculté et non une obligation absolue que l'art. 475 établit en ce cas pour le juge. — Et il a été très-bien jugé : 1° que le tribunal d'appel qui annule un interlocutoire du juge de paix, en ce que ce dernier avait ordonné que les témoins seraient entendus de nouvean, ne l'ayant pas été la première fois sur le lieu contentieux, peut évoquer le fond et statuer sur le tout par un jugement définitif (Req., 7 juin 1810, aff. Gosselin, yo Action poss., no 255);— 2o Qu'en cas d'infirmation d'une sentence du juge de paix en ce que, sur le déclinatoire proposé devant lui, il n'a pas statué par deux dispositions distinctes, l'une sur la compétence, l'autre sur le fond, le juge supérieur a pu évoquer le fond (Req., 3 juill. 1822) (3). 596. Aussi la partie qui, sur l'appel qu'elle a interjeté d'un jugement, pour vice de formes, a conclu au fond, n'est-elle pas recevable à se plaindre de ce que la cour, évoquant le fond (ce qu'elle avait en tout cas le droit de faire), ait jugé le tout par un seul et même arrêt (Rej., 4 mai 1819) (6).

597. Il n'est pas moins incontestable, et il a été jugé qu'une cour d'appel qui annule, pour vice de forme, un jugement qui a prononcé sur le fond, peut statuer à la fois sur les moyens de forme et sur ceux du fond (Grenoble, 24 janv. 1826) (7).

598. Si l'infirmation a lieu en ce que l'exploit introductif a été annulé mal à propos, peut-on évoquer? La négative enseignée par Talandier, p. 454, est repoussée, et avec raison, par M. Chauveau, no 1702, § 5, 1°. —Si, au contraire, l'infirmation est fondée sur ce que la demande en nullité de l'exploit introductif a été rejetée à tort, l'évocation peut-elle avoir lieu? « Non, dit M. Chauveau, no 1702, § 5, 2o; l'exploit étant déclaré nul, il n'y a plus d'instance; il serait contradictoire de juger le fond. » Cette opinion, qui s'écarte de celle qui précède, se justifie aux yeux de M. Chauveau par la distinction qu'il établit entre le cas où la cause de l'infirmation provient du juge et celui

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(4) (Madelaine C. Fontenilliat.) LA COUR Considérant qu'en supposant que le tribunal de Valognes eût pu annuler le jugement du juge de paix, sous le prétexte que celui-ci n'avait pas prononcé sur sa compétence, le tribunal aurait dù décider lui-même cette question de compétence, qui, dans son opinion, était restée indécise; Qu'en évitant de statuer sur cette question, il a obligé les parties à plaider de nouveau pour la faire juger, et par conséquent à parcourir plus de deux degrés de juridiction; D'où il suit qu'il a violé la loi du 1 mai 1790; Casse. Du 1 avril 1807.-C. C., sect. civ.-MM.Viellart, pr.-Zangiacomi, rap. (5) (Deleuil C. Forbin d'Oppède.)- LA COUR; — Attendu que le demandeur n'invoque comme moyen de cassation que la violation de l'art. 473 c. pr.; — Attendu qu'aux termes dudit article le tribunal d'appel ayant reconnu que la matière était disposée à recevoir une décision définitive, a pu, en infirmant, statuer en même temps sur le fond définitivement par un seul et même jugement; Rejette.

Du 5 juill. 1822.-C. C., sect. req.-MM. Lasaudade, pr.-Ménerville, r. (6) (De Bauffremont C. com. de Traves.) LA COUR; - Attendu, sur le premier moyen, que le demandeur avait conclu, devant la cour royale, à ce qu'en annulant la sentence et toute la procédure, la commune de Traves fut condamnée à lui délaisser les 260 arpents de bois dont il s'agit, avec restitution de fruits et dommages-intérêts, ce qui avait été nécessairement demander que le principal fùt évoqué, ce qui l'aurait renda non recevable à se faire un moyen de cassation de ce qu'il aurait été prononcé par évocation, lors mème que la cour royale n'y aurait pas été d'ailleurs suffisamment autorisée par l'art. 475 c. pr. ;-Rejette. Du 4 mai 1819.-C. C., sect. civ.-MM. Brisson, pr.-Carnot, rap. (7) (Durand C. Bardin.)—LA COUR ; Attendu que les premiers juges ont prononcé sur le fond de la contestation par le jugement dont est appel; que les parties ont conclu respectivement devant la cour, au fond, en même temps que les appelants ont demandé la nullité du jugement; qu'ainsi la cour, saisie, tant de la demande en nullité que de celle en distraction, peut, conformément à l'art. 475 c. pr. civ., statuer sur le fond en même temps que sur les moyens de forme.

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599. Il a été jugé : 1o que lorsque les premiers juges n'ont statué que sur un moyen de nullité proposé par le défendeur contre l'exploit introductif d'instance, la cour d'appel ne peut, en infirmant le jugement, statuer sur le fond du procès, qui n'a encore eu ni développement, ni instruction devant les premiers juges (Cass., 9 oct. 1811; Bruxelles, 3 fév. 1812 (1); Rennes, 22 juillet 1814, aff. Garbagny, V. Exploit).

600. 2o Qu'en infirmant un jugement qui a déclaré nul l'exploit introductif d'instance, la cour peut, sur les conclusions des parties, statuer sur le fond (Poitiers, 14 juill. 1819, aff. Labastière, V. Oblig. [offres réelles]).

601. 3° Que l'évocation du fond ne peut avoir lieu qu'autant que la nullité dont est atteint le jugement infirmé, portant sur le jugement seul et non sur toute la procédure, la cause se trouve en état de recevoir une décision définitive (Lyon, 16 juin 1843, aff. Burlot, V. Mariage). — V. ce qui est dit au paragraphe où l'on examine le cas où les affaires sont en état.

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(1) 1re Espèce: (Mens C. Lansberg.)--14 nov. 1807, assignation par le sieur Lansberg, au sieur Mens, devant le tribunal de commerce d'Anvers, en payement d'un solde de compte, montant à 3,043 fr. 58 c. - Mens soutient l'assignation nulle, comme n'énonçant pas la patente du demandeur (art. 37, l. du 1er brum. an 7). 1er déc. 1807, jugement qui annulle l'assignation, sans statuer au fond. Mais la cour d'appel de Bruxelles, par arrêt du 20 avril suivant, réformant le jugement déclare l'assignation valable, et ordonne aux parties de plaider au fond. Elle ordonne ensuite une enquête; puis, le 24 mai 1809, elle rend un arrêt par lequel elle condamne Mens à payer à Lansberg la somme de 3,045 fr. 58 c.-Pourvoi. --Arrêt.

LA COUR: - Vu la loi du 1er mai 1790; l'art. 17, tit. 2, de la loi du 24 août 1790; l'art. 7 de celle du 3 brum. an 2, et les art. 464 et 473 c. pr.;- Attendu que la cour d'appel de Bruxelles, qui n'était saisie que de l'appel du jugement du tribunal de commerce, qui avait déclaré nul l'exploit introductif de l'instance entre les parties, n'a pu retenir le fond de l'affaire qui n'avait encore eu ni développement ni instruction devant les premiers juges, sans outre-passer les limites de ses attributions, restreintes à l'appel qui lui était déféré;-Attendu que cette rétention du fond est une véritable évocation et un déni formel du premier degré de juridiction, assuré par la loi constitutionnelle à toutes les parties;-Attendu que ce déni de premier degré de juridiction produit une nullité radicale, absolue et d'ordre public, telle enfin qu'elle ne peut être couverte par aucune exécution subséquente et par aucun acquiescement;- Attendu qu'il n'est pas possible, dans l'espèce, de se placer dans l'exception établie par l'art. 475 c. pr., 1° parce que la matière retenue n'était pas disposée à recevoir une décision définitive, puisque le défendeur originaire s'était borné en primitive instance à opposer la nullité de l'exploit d'assignation, et n'avait pas même conclu au fond; 2° parce que la cour d'appel devait du moins, en se conformant à ce qui est prescrit par cet art. 475, statuer en même temps sur le fond définitivement par un seul et même jugement; ce qu'elle n'a pas fait, puisqu'au contraire l'instance qu'il a fallu instruire tout entière devant elle, s'est prolongée pendant plus d'une année, et a donné lieu à cinq arrêts consécutifs ; - D'où il suit que son arrêt du 20 avril 1808 a violé à la fois les lois prohibitives des évocations, les lois qui, en toutes affaires, établissent et garantissent deux degrés de juridiction; les lois qui limitent la juridiction des cours d'appel aux appels qui leur sont déferés, jusque-là même qu'il est défendu de former devant elles aucune nouvelle demande; d'où il suit encore que ce même arrêt a faussement appliqué l'art. 473 c. proc. civ.; d'où il suit enfin que le vice radical de ce premier arrêt, se communiquant à tous les autres qui n'en sont que la conséquence et l'effet entraine nécessairement la cassation du tout; Casse.

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Du 9 oct. 1811.-C. C., sect. civ.-MM. Muraire, pr.-Delacoste, rap. 2o Espèce: Attendu qu'il (Choisy C. Thieffry.) LA COUR; ne s'est agi devant le premier juge que de la validité ou de la nullité de l'exploit, conséquemment d'une exception préliminaire; d'où il suit que, si la cour retenait la cause, les parties seraient privées des deux degrés de juridiction, Met à néant le jugement dont est appel; - Emendant, Déclare valable l'exploit dont il est question; Renvoie les parties

--

devant le premier juge, pour procéder sur le fond. Du 3 fév. 1812.-C. de Bruxelles, 3 ch.

tit. 6, de l'ord. de 1667 porte en effet : « Enjoignons à tous juges, sous les mêmes peines, de juger sommairement à l'audience, les renvois, incompétences et déclinatoires qui seront requis et proposés, sous prétexte de litispendance, connexité ou autrement, sans appointer les parties, lors même qu'il en sera délibéré sur le registre, ni réserver et joindre au principal pour y être préalablement ou autrement fait droit. » — - On voit que cette disposition ne s'exprime pas taxativement pour les causes soumises à l'appel; elle est générale, et c'est de cette généralité même qu'on a conclu qu'elle était applicable à tous les cas, qu'il y ait appel ou que l'exception eût été élevée seulement en première instance; qu'en un mot, le juge d'appel ne pouvait statuer par voie d'évocation sur une contestation dont les premiers juges n'avaient point encore connu, puisqu'ils s'étaient bornés à prononcer sur l'exception d'incompétence, laquelle, aux termes des lois, devait être évacuée in limite litis. Aussi a-t-il été décidé que l'évocation est illégalement prononcée par le juge d'appel lorsqu'il annule un jugement qui s'est borné à statuer sur la compétence (Cass., 9 flor. an 3; 21 brum. an 10 (2); Cass., 21 vent. an 10, M. Aumont, rap., aff. Gendre C. Cabarrus; 27 fruct. an 11, aff. Grevin, V. n° 617; 7 frim. an 15, aff. Laureau, V. eod.), ou qui ordonne un renvoi pour cause de litispendance (Cass., 20 niv. an 11) (3), et que, par suite, il se conforme à la loi lorsque, se bornant à infirmer pour incompétence, il renvoie les parties à se pourvoir devant d'autres juges en première in

(2) 1re Espèce :-( Bergé C. Jannot. )—LE TRIBUNAL ;-Vu l'art. 6 du tit. 4 de la loi du 16 août 1790; -Attendu que les juges de Mirecourt en évoquant le principal sur lequel les juges d'Epinal n'avaient point prononcé et sur lequel les demandeurs en cassation n'avaient pas même conclu en première instance, ont privé les parties d'un degré de juridiction quoique l'appel ne les eút saisis que d'une question de compétence, et que les parties n'eussent pas consenti à être jugées sur le fond en premier et dernier ressort; Casse.

Du 9 flor. an 3.-C. C., sect. civ.-MM. Lalonde, pr.-Osmont, rap. 2o Espèce: (Manget C. Vauversin.)- LE TRIBUNAL (ap. délib. en ch. du cons.);-Vu la loi du 1er mai 1790, l'art. 17 du tit. 2 de la loi du 16 août 1790; Considérant que les demandes formées par la compagnie Manget, depuis le jugement du 3 fruct. an 8, devaient être soumises aux deux degrés de juridiction, d'après celui du 27 non attaqué, et qui porte que, attendu qu'il ne s'agit pas d'interpréter le jugement du 3 de ce mois, mais de déterminer un mode de liquidation sur lequel il n'a été statué par aucun tribunal; il n'y a lieu à référé, et renvoie sur le tout les parties devant qui de droit; » — Considérant que le tribunal de commerce avait agi d'après cette décision, en prononçant, par le jugement du lendemain 28, sur le mode de liquidation des ordonnances de l'an 5, et sur la compensation opposée par la compagnie Manget, mais que ce jugement ayant été rétracté par celui du 4 vend. suivant, par lequel le tribunal de commerce, faisant droit sur l'opposition de Vauversin, avait admis son déclinatoire, il ne restait plus, sur l'appel de ce dernier jugement, qu'une question de compétence à juger, et que c'est en effet la seule qui ait été agitée par la compagnie Manget; Que, pour se saisir du fond, le tribunal d'appel a supposé que son jugement du 27 fruct. an 8 contenait un renvoi direct au tribunal de commerce, tandis que ce jugement ne désigne pas le tribunal où les parties étaient renvoyées, ce qui a servi de prétexte à Vauversin pour s'opposer à l'exercice de la juridiction du tribunal de commerce et s'adresser au tribunal de première instance, lorsque la compagnie Manget saisissait l'autre; - Qu'il a imputé également au tribunal de commerce un déni de justice qui, dans aucun état de la législation, n'a autorisé les tribunaux d'appel à évacuer le premier degré de juridiction; - Qu'il s'est porté à évoquer le principal sans la demande d'aucune des parties, et lorsqu'au contraire la compagnie Manget insistait constamment et exclusivement sur la question de compétence, et que le tribunal de commerce n'avait, par le fait de Vauversin, statué lui-même et pu statuer que sur la compétence, en sorte qu'il n'est arrivé à la connaissance du fond qu'en contrevenant à l'autorité de la chose jugée par le jugement du 27 fruct., en privant les parties des deux degrés de juridiction qu'il leur assurait, et par une de ces évocations prohibées par la loi d'août 1790, et dont la législation ancienne, et notamment l'art. 13 du tit. 2 de l'ordonnance de 1673, avaient particulièrement cherché à garantir les juridictions commerciales, et y a prononcé sans que la compagnie Manget eût été défendue ni entendue;- Casse. Du 21 brum. an 10.-C. C., sect. civ.-MM. Maleville, pr.-Dunoyer, rap. (3) (Moynat C. Lange.)- LE TRIBUNAL; -Vu la loi du 1er mai 1790, Fart. 17 du tit. 2 de la loi du 24 août 1790, et l'art. 5 du tit. 6 de l'ord. de 1667; - Attendu que, dans la cause, il s'agissait d'un déclinatoire pour raison de litispendance; que la compétence du juge de paix était par conséquent contestée; que ce juge ne pouvait pas en même temps pro

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