Page images
PDF
EPUB
[ocr errors][merged small][merged small]

Lui feul à la pitié toujours inacceffible,
Aurait cru' faire un crime et trahir Médicis,
Si du moindre remords il fe fentait furpris.
A travers les foldats il court d'un pas rapide;
Coligny l'attendait d'un vifage intrépide:
Et bientôt dans le flanc ce monftre furieux
Lui plonge fon épée, en détournant les yeux,
De peur que d'un coup d'oeil cet augufte vilage
Ne fit trembler fon bras, et glaçât fon courage.

Du plus grand des François tel fut le triste fort.
On l'infulte, on l'outrage encor après la mort.
Son corps percé de coups, privé de fépulture,
Des oifeaux dévorans fut l'indigne pâture;
Et l'on porta fa tête aux pieds de Médicis,
Conquête digne d'elle, et digne de fon fils.
Médicis la reçut avec indifférence

Sans paraître jouïr du fruit de fa vengeance,
Sans remords, fans plaifir, maitreffe de fes fens
Et comme accoûtumée à de pareils prèfens.

Qui pourrait cependant exprimer les ravages,
Dont cette nuit cruelle étala les images?
La mort de Coligny, prémices des horreurs,
N'était qu'un faible effai de toutes leurs fureurs.
D'un peuple d'affaffins les troupes effrénées,
Par devoir et par zéle au carnage acharnées
Marchaient, le fer en main, les yeux étincelans,
Sur les corps étendus de nos frêres fanglans.
Guise etait à leur tête, et bouillant de colére,
Vengeait fur tous les miens les manes de fon pére.
Nevers, Gondy, Tavanne, un poignard à la main,
Echauffaient les transports de leur zéle inhumain :
Et portant devant eux la lifte de leurs crimes
Les conduifaient au meurtre, et marquaient les
victimes.

Je ne vous peindrai point le tumulte et les cris,
Le fang de tous côtés ruiffelant dans Paris,

Le fils affaffiné fur le corps de fon père,
Le frère avec la foeur, la fille avec la mère,
Les époux expirans fous leurs toîts embrafés,

Les

د

Les enfans au berceau fur la pierre écrasés:

Voltaire.

Des fureurs des humains c'eft ce qu'on doit attendre;
Mais ce que l'avenir aura peine à comprendre,

Ce que vous-même encor à peine vous croirez,
Ces monftres furieux, de carnage altérés,
Excités par la voix des Prêtres fanguinaires
Invoquaient le Seigneur en égorgeant leurs frères;
Et le bras tout fouillé du fang des innocens,
Ofaient offrir à Dieu cet execrable encens.

O combien de Héros indignement périrent!
Rer el et Pardaillan chez les morts defcendirent,
Et vous, brave Guerchy, vous, fage Lavardin,
Digne de plus de vie et d'un autre deftin.
Parmi les malheureux que cette nuit cruelle
Plongea dans les horreurs d'une nuit éternelle,
Marfillac et Soubife au trépas condamnés,
Défendent quelque tems leurs jours infortunés.
Sanglans, percés de coups, et refpirans à peine,
Jufqu'aux portes du Louvre on les pouffe, on les
traîne;

Ils teignent de leur fang ce palais odieux,
En implorant leur Roi, qui les trahit tous deux.

Du haut de ce palais excitant la tempête,
Médicis à loifir contemplait cette fête;
Ses cruels Favoris d'un regard curieux
Voyaient les flots de fang regorger fous leurs yeux,
Et de Paris en feu les ruines fatales

Etaient de ces Héros les pompes triomphales.

Que dis-je? ô crime! ô honte! ô comble de

nos maux!

Le Roi, le Roi lui-même au milieu des bourreaux,
Pourfuivant des profcrits les troupes égarées,
Du fang de fes fujets fouillait fes mains facrées:
Et ce même Valois que je fers aujourdhui,
Ce Roi qui par ma bouche implore votre appui,
Partageant les forfaits de fon barbare frère,
A ce honteux carnage excitait fa colére.

Non qu'après tout Valois ait un coeur inhumain:
Z 3

Rare

Voltaire.

Rarement dans le fang il a trempé fa main,
Mais l'exemple du crime affiégeait fa jeuneffe,
Et fa cruauté même etait une faiblesse.

Quelques-uns, il eft vrai, dans la foule des morts
Du fer des affaffins trompèrent les efforts,

De Caumont, jeune enfant, l'étonnante avanture
Ira de bouche en bouche à la race future.
Son vieux père accablé fous le fardeau des ans,
Se livrait au fommeil entre fes deux enfans;
Un lit feul enfermait et les fils et le pére.
Les meurtriers ardens qu'aveuglait la colére
Sur eux à coups preffés enfoncent le poignard:
Sur ce lit malheureux la mort vole au hazard.
L' Eternel en fes mains tient feul nos deftinées,
Il fait quand il lui plait veiller fur nos années,
Tandis qu'en fes fureurs l' homicide eft trompé.
D'aucun coup, d'aucun trait Caumont ne fut frappé;
Un invifible bras armé pour fa défense,

Aux mains des meurtriers dérobait fon enfance;
Son pére à fon côté fous mille coups mourant,
Le couvrait tout entier de fon corps expirant,
Et du Peuple et du Roi trompant la barbarie,
Une feconde fois il lui donna la vie.

Cependant, que faifais-je en ces affreux mo mens?

Hélas! trop affûré fur la foi des fermens

Tranquille au fond du Louvre, et loin du bruit des

armes,

Mes fens d'un doux repos goûtaient encor les
charmes.

O nuit, nuit effroyable! ô funefte fommeil!
L'appareil de la mort eclaira mon réveil.
On avait maffacré mes plus chers domeftiques;
Le fang de tous côtés inondait mes portiques;
Et je n'ouvris les yeux que pour envifager
Les miens que fur le marbre on venait d'égorger.
Les affaffins fanglans vers mon lit s'avancèrent,
Leurs parricides mains devant moi se levèrent;

Je

Je touchais au moment qui terminait mon fort;
Je présentai ma tête, et j'attendis la mort.

Mais foit qu'un vieux refpect pour le fang de
leurs Maîtres

Parlât encor pour moi dans le coeur de ces traîtres,
Soit que de Médicis l'ingénieux courroux
Trouvât pour moi la mort un fupplice trop doux,
Soit qu'enfin s'affûrant d'un port durant l'orage,
Sa prudente fureur me gardât pour ôtage;,
On referva ma vie à des nouveaux revers,
Et bientôt de fa part on m'apporta des fers.

Coligny plus heureux et plus digne d'envie,
Du moins en fuccombant ne perdit que la vie;
Sa liberté, fa gloire au tombeau le fuivit.....
Vous frémillez, Madame, à cet affreux récit;
Tant d'horreur vous furprend; mais de leur bar-
barie

Je ne vous ai conté que la moindre partie.
On eût dit que du haut de fon Louvre fatal
Médicis à la France eût donné le fignal;
Tout imita Paris; la mort fans réfistance
Couvrit en un moment la face de la France.
Quand un Roi veut le crime, il est trop obéi:
Par cent mille affaffins fon courroux fut fervi
Et de fleuves Français les eaux enfanglantées,
Ne portaient que des morts aux mers épouvantées.

[blocks in formation]
[merged small][ocr errors]

Madame du
Bocage.

Madame du Bocage.

Marie Anne le Page du Bocage, aus Rouen ges bürtig, geft. 1760, machte sich durch verschiedene meistens poetische, Arbeiten rühmlich bekannt, vornehmlich durch den Versuch eines epischen Gedichts, La Colombiade, on la Foi portée au Nouveau Monde, in zehn Gefängen; und dies ser Versuch fiel glücklich genug aus, um einer, und selbst der einzigen Stelle neben Voltaire's Henriade nicht unwürz dig zu seyn. Auch ihr Verdienst ist hauptsächlich in Schönheiten des Detail und einem angenehmen Versbau zu suchen; denn der Plan und die Ausführung des Ganzen find noch sehr von der wahren epischen Vollkommenheit entfernt. Im dritten Gesange erzählt Colombo der Zama, Tochter eines Indischen Heerführers, die bisherigen Vorfälle seiner Reise, und den Abgang seiner Flotte, die gar bald vom Mangel und vom Scharbock viel Ungemach erlitt. Schon wollte sein Schiffsvolk fich wider ihn empören, als sie auf einmal Land entdeckten. Sie kommen zuerst an eine gefahr. volle, hernach aber an eine fruchtbarere Infel, und finden da, zu ihrem Erstaunen, einen verlaffenen Europåer, den fie mit sich nehmen. Colombo låfst diesen selbst seine Ge schichte der Zama erzählen.

LA COLOMBIADE; Ch. III.

De ces efprits troublés loins d'aigrir la fureur,
En flattant leurs défirs j'en modérai l'ardeur.
Avant que le Soleil eût fait place aux Etoiles,
Vers l' Europe, à pas lents, je dirigeois mes Voiles,
Dans notre effroi quel charme arrête nos Vaiffeaux!
L' Onde apport à nos yeux des branches d'arbrif-

feaux:

Les Nymphes de vos Mers, par nos pleurs ¡atten-
dries,

Nous préfentent les fleurs qu'enfantent nos prairies.
Vos Oifeaux, dont le vel fuit nos Arbres flottans,

Char

[ocr errors]
« PreviousContinue »