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PREUVES

ET

ÉCLAIRCISSEMENTS.

Da mihi Mæoniden, et tot circumspice casus;

Ingenium tantis excidet omne malis.

Ovid.

AVIS.

J'ai cru devoir rejeter les discussions de droit public dans des notes à la suite de mon ouvrage, pour éviter des longueurs. Mes recherches ne sont pas, à beaucoup près, aussi complètes qu'elles pourraient l'être. Je suis sans livres, et l'on ne m'a rendu que la moindre partie de mes papiers où se trouvaient les matériaux d'un ouvrage dont celui-ci ne devait former, pour ainsi dire, qu'un chapitre. Cependant, comme dans mes portefeuilles mutilés je trouve encore d'assez nombreux extraits des monuments de notre histoire, je placerai ici quelques preuves choisies entre une infinité d'autres, qui établiront que le système des ordres arbitraires est absolument incompatible avec nos lois, et qui démontreront la vérité des assertions, qui, dans l'ouvrage précédent, pourraient paraître hasardées à ceux qui n'ont pas fait une étude approfondie de notre histoire.

Au reste, je proteste hautement, relativement aux critiques qu'on pourrait faire de ces notes, que je ne les regarde point comme nécessaires pour étayer mes principes. Je sais que dans ces sortes de discussions, à toute citation on peut opposer une autre citation; que tout vieux titre peut être contredit, au moins dans ses interprétations; que les anciens usages sont presque toujours si confusément définis, qu'il est impossible de fonder sur eux un système sans réplique : mais les détails polémiques ne doivent jamais tenir que le second rang dans les écrits politico-philosophiques, si je puis me servir de cette expression, et les principes de la loi naturelle sont au premier. Une nation n'aurait pas moins de droits à une liberté stable et régulière, quand son droit public serait défectueux, mutilé, ou même anéanti; car la loi naturelle est la seule loi qu'il ne soit pas au pouvoir des hommes d'abroger. En général, les arguments de la raison l'emportent infiniment sur toute autre autorité, et rendent assez inutiles, en matière de politique ou de philosophie, les dissertations historiques sujettes à des disputes intermina7

M. II.

bles. On conviendra qu'il serait fort triste que la liberté et les priviléges d'une nation dépendissent de discussions grammaticales; or c'est à cela que se réduisent en dernière analyse presque toutes les questions de droit public. Cependant peutêtre ceux qui voudront lire ces notes trouveront-ils dans quelques-unes autre chose qu'une aride compilation,

PREUVES

ET

ÉCLAIRCISSEMENTS.

§ I.

Les lettres de cachet sont interdites par les lois les plus anciennes et les ordonnances de tous nos rois.

« Il (Louis XIV) ignorait qu'un grand nombre << d'ordonnances de ses prédécesseurs ont défendu « à tous juges d'avoir aucun égard aux lettres closes «< ou de cachet, qui seraient accordées sur le fait de <«< la justice. » (Première partie, chap. 1.)

Ce point de fait est incontestablement prouvé par une multitude d'ordonnances. J'ai dejà remarqué (note i, de l'Introduction) que la dénomina→ tion de lettres de cachet était assez moderne. M. de Montblin prétend que ce mot n'a été employé pour la première fois que dans l'ordonnance d'Orléans

de 1560.

Autrefois on ne distinguait que lettres patentes, lettres closes ou fermées, lettres de justice et lettres de grace. Toutes lettres non munies du grand sceau étaient closes ou fermées, et munies d'un scel particulier,

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