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mari, il ne suit pas, comme nous l'avons dit déjà, qu'il doit être réputé propriétaire des immeubles acquis par la femme, et au nom de celle-ci. La femme a seulement à lui tenir compte du prix et non à faire rapport de l'immeuble (Toulouse, 17 déc. 1831, aff. Pailhac, V. no 3341-3°).

Il a été jugé : 1° qu'on doit entendre dans ce sens la disposition de la loi romaine Quintus Mucius (51, f., De donat. inter vir. et uxor.), d'après laquelle toute acquisition faite par la femme mariée était réputée avoir été payée des deniers du mari, jusqu'à preuve contraire, et que le mari ne doit pas être réputé propriétaire, lors même qu'il serait intervenu à l'acte d'acquisition (Montpellier, 29 mars 1841) (1);-2o Que, sous l'empire de la législation romaine, la femme n'étant frappée d'aucune incapacité, est propriétaire des immeubles qu'elle achète pendant le mariage; que, seulement, si elle ne peut fournir la preuve que les deniers employés à cette acquisition lui étaient propres, il y a présomption qu'ils émanent du mari, et en conséquence, elle est obligée à restituer le prix d'acquisition, soit au mari, soit à ses héritiers (Lyou, 11 mai 1848, aff. Buffaz, D. P. 49. 5. 121); 3° Que la femme conserve la propriété des biens qu'elle a acquis avec les deniers de son mari, soit pendant le mariage, soit depuis le décès de ce dernier; elle ne doit rapporter que le prix fixé par les actes d'acquisition (Toulouse, 9 janv. 1835, aff. Courbin, V. n° 3541).

3347. Il a été jugé cependant: 1° que les immeubles acquis par la femme qui ne possède point de biens extradotaux, sont réputés achetés des deniers du mari, et appartiennent, par conséquent, à ce dernier (Riom, 22 fév. 1809, aff. Lafont, V. suprà, n° 3088);-2° Que les acquisitions faites en commun par le mari

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n'avait pas d'action contre sa femme qui ne s'était pas dotée, mais contre ses père et mère, qui lui avaient constitué une dot; Sur le troisième moyen, tiré de la violation des art. 1554 et 1561 et autres du code civil, relatifs au régime dotal: Attendu que le contrat de mariage était la loi des parties; qu'en se soumettant au régime dotal, elles ont pu ne l'adopter qu'avec les modifications qui convenaient à leur position; que la femme a donc pu se réserver, comme elle l'a fait, la faculté expresse de vendre, aliéner, partager et échanger, avec l'autorisation de son mari, les immeubles acquis de ses deniers dotaux, et ceux qui pourraient lui échoir; que cette réserve conventionnelle est encore legale, puisque l'art. 1557 c. civ. dit que l'immeuble dotal peut être aliené, lorsque l'aliénation en a été permise par le contrat de mariage; et quant à l'acquisition que la femme a faite, conjointement avec son mari, de la maison située a Lyon, rue Sainte-Croix, qu'elle avait également capacité pour la faire ; que c'était encore en exécution du contrat de mariage que 75,000 fr. de la dot de la femme ont trouvé leur emploi dans cette acquisition; qu'ainsi elle a, dans cet immeuble, un droit de copropriéte, reconnu par le mari lui-même, lorsqu'il a formé contre elle une action en payement de la moitié du prix des grosses réparations qu'il y avait faites; - Par ces motifs, rejelte, etc.

Du 1er juill. 1829.-C. C., ch. req.-MM. Favard, pr.-Hua, rap.-Laplagne-Barris, av. gén., c. conf.-Odilon Barrot, av.

(1) (Fau C. Jourda.) — LA COUR; Attendu que, par divers actes des 20 brum. an 12, 26 mars 1806, 5 mai de la même année, 7 mai 1807 et 3 avril 1855, la dame Jeanne Durand a fait, pendant la durée de son mariage avec le sieur Jean Fau, plusieurs acquisitions d'immeubles en présence et avec l'autorisation de son mari; Attendu que le susdit mariage avait été contracté le 11 juillet 1790, sous l'empire des anciens principes, et notamment de la loi Quintus Mucius, en vigueur dans tous tous les pays de droit écrit;-Que, d'ailleurs, le principe de cette loi n'a pas cessé d'être applicable depuis la promulga ion du code civil; - Que la jurisprudence l'a admis non-seulement pour éviter la recherche d'un gain honteux pour la femme, mais encore pour empêcher qu'il fût fait indirectement fraude au principe qui interdit aux époux de se faire pendant le mariage des libéralités irrévocables, toutes les dispositions de ce genre étant nécessairement soumises à la revocation; Attendu que, si la participation du mari dans les actes fait disparaître le premier motif, elle laisse subsister le second, et qu'il y a d'autant plus lieu, dans l'espèce, de chercher avec quel argent Jeanne Durand a pu acquitter le prix des ventes, que Jean Fau a donné l'entière quotité disponible de ses biens à Gabriel, son fils aîné, dans le contrat de mariage de celui-ci, ce qui est une rétractation implicite des dons qu'il aurait faits indirectement à sa Lemme; Attendu que Jeanne Durand n'avait, d'après son contrat de mariage, qu'une dot de 542 fr., qui a été reçue par son mari;- Que si, vers l'an 11, une succession s'est ouverte en sa faveur, il n'apparaît pas qu'elle eût été tellement considérable, qu'elle eût pu lui fournir le moyen de faire des acquisitions; qu'aucune autre succession n'a été recueillie

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et la femme dans les pays de droit écrit appartenaient non aux deux époux conjointement, mais au mari seul qui était réputé avoir payé la totalité du prix (Rej. 11 janv. 1825) (2);—3° Qu'il en était ainsi à plus forte raison, lorsque la femme n'avait que des biens dotaux (Grenoble, 4° ch., 22 juill. 1811, M. Paganor, pr., aff. Boussod C. Chaffange).

3348. Lorsque, pour prévenir l'éviction des biens dotaux prononcée par jugement contre les époux, avec garantie contie le père de la femme, par lequel la dot a été constituée, le mari a payé une certaine somme au demandeur en éviction, lequel a renoncé au bénéfice de sa sentence, s'il arrive que le constituant, pour s'affranchir de l'action en garantie, délaisse un immeuble aux époux, c'est à la femme, à qui seule l'action en garantie appartenait, que cet immeuble, bien que reçu par le mari, apparlient en propre, comme cela est expressément décidé par la loi 16, Dig., De jure dotium, attendu que le payement opéré par le mari, n'attribue à celui-ci aucun droit de propriété sur l'immeuble délaissé, et ne lui donne qu'un droit de répétition contre sa femme.-Ainsi jugé sous la coutume de la Marche, régie par le droit romain (Limoges, 1re ch., 20 mars 1822, M. Gaujal, 1er pr., aff. Dumeyral C. Labetoulle).

3349. Si l'on admet que la femme ne doit compte au mari que des deniers qu'il est censé avoir fournis, il faut dire aussi qu'on ne doit prendre en considération que le prix fixé par les actes, et que les tribunaux ne peuvent ordonner une expertise pour déterminer ce prix (Toulouse, 9 janv. 1835, aff. Courbin, V. n° 5341).

3350. A l'égard d'acquisitions faites par la femme après le décès du mari, il a été jugé que les magistrats peuvent, en ap

par elle jusqu'en 1841;- Qu'ainsi, ladite Jeanne Durand, ou les mariés Jourda pour elle, sont dans l'impuissance de faire connaître la source où ladite Jeanne Durand a puisé les fonds qui ont servi à payer les acquisitions résultant des actes de l'an 12, de 1806 et de 1807; - Qu'il faut donc reconnaitre que c'est avec l'argent du mari que ces diverses sommes ont été payées; Attendu qu'il doit en être autrement du prix de l'acquisition faite par la femme Fau le 3 avril 1833;-Qu'elle à eu évidemment le moyen de le payer avec ses ressources personnelles, soit avec le produit des biens qu'elle avait recueillis dans la succession ouverte en sa faveur en l'an 11, soit à l'aide des autres biens dont elle avait hérité en 1851-Que, quant à cet acte, Jeanne Durand ne doit faire comptes à la succession de Jean Fau ni des biens achetés, ni du prix de l'acquisition;Et à l'égard des quatre actes précédents: Attendu que la femme ne peut être tenue de faire compte au mari que des sommes qu'elle a employées à son profit, au préjudice de la succession de ce dernier ; - Que c'est en son nom et pour son compte que les acquisitions ont été faites; qu'elle n'était pas incapable d'acquérir, et qu'on ne peut, sous aucun rapport, la priver, au profit de son mari, de son droit à la propriété des biens compris dans les actes dont il s'agit;- Attendu qu'il peut d'autant moins en être ainsi dans le cas particulier du procès, que, par l'effet de deux des susdits actes, ceux du 20 brum. an 12 et du 7 mai 1807, Jeanne Durand est devenue cessionnaire des droits successifs indivis entre elle et les cédants; Que, d'après l'art. 1408 c. civ., de pareilles acquisitions, eussent-elles été faites par le mari, doivent tourner au profit de la femme, sauf à celle-ci à rembourser le prix à la communauté; — Qu'en admettant que cette règle ne soit pas applicable au régime dotal, il est certain, du moins, que, sous ce régime, la femme n'est pas inbibée d'acquérir des propriétés ainsi indivises avec ses cohéritiers pour son propre compte, et que le mari qui autorise des contrats de ce genre, eût-il fourni les fonds, ne peut revendiquer la propriété des immeubles eux-mêmes, cette propriété n'ayant jamais passé sur sa tête; qu'ainsi, l'obligation de la femme est restreinte à faire compte à la succession de son mari du prix de ses acquisitions; - Par ces motifs, réformant, etc.

Du 29 mars 1841.-C. de Montpellier.-M. Viger, 1er pr.

(2) (Hérit. Jammarin C. Paret.) - LA COUR;-Attendu, sur le quatrième moyen, qu'à l'égard des acquisitions faites en commun par le mari et la femme dans les pays de droit écrit, la présomption légale était que le mari avait payé la totalité du prix, et qu'il était, en conséquence, devenu seul propriétaire;-Que, dans l'espèce, il n'a été prouvé ni que Marie Soyer eût payé aucune partie du prix, ni qu'elle eût été même par sa position à portée de faire aucun payement; - Qu'il a été enfin reconnu par la cour royale de Lyon que Marie Soyer ne s'était jamais fait reconnaître comme copropriétaire des biens vendus par l'acte du 10 janv. 1772;-Sans qu'il soit nécessaire de prononcer sur lesdites fins de nonre voir, rejette, etc.

u 11 janv. 1825.-C. C., sect. civ.-MM. Brisson, pr.-Vergès, rap.De Marchangy, av. gén., c. conf.-Champion et Odilon Barrot, av.

préciant les actes postérieurs de la femme, déclarer que les acquisitions, qu'elle a faites depuis ce décès, l'ont été en partie des deniers du mari, et limiter ses droits sur ces acquisitions d'après les bénéfices qu'elle a pu faire dans le commerce continué par elle depuis son veuvage (Toulouse, 9 janv. 1835, aff. Courbin, V. n® 3341).

3351. Il est deux cas exceptionnels où la loi présume faite avec les deniers du mari, et attribue à celui-ci l'acquisition faite au nom de la femme pendant le mariage.-1° L'art. 559 c. com. consacre cette présomption dans le cas de faillite du mari: les biens acquis par la femme doivent être réunis à la masse de l'actif du failli, comme lui appartenant, sauf à la femme de fournir la preuve du contraire. Cette présomption a lieu sous quelque régime qu'ait été formé le contrat de mariage; hors le cas prévu à l'art. 558 c. com., qui concerne les acquisitions faites en remploi d'immeubles provenant à la femme de successions ou donations (V. Faillite, no 1089). - Par exemple, il a été jugé que la propriété des immeubles acquis pendant le mariage par la femme d'un négociant, mariée sous le régime de la communauté, doit être attribuée au mari et profiter à ses créanciers, lorsque la femme ne prouve pas, de la manière prescrite par le code de commerce (art. 546 ancien code) que ses immeubles ont été acquis de ses propres fonds; mais il ne suffirait pas à la femme soit d'alléguer, soit même d'établir que le prix des acquisitions a été payé avec des deniers provenant d'une donation qui lui aurait été faite avant son mariage, ces deniers étant tombés, aux termes de l'art. 1401 c. civ., dans la communauté, et ayant par cela même cessé de constituer une propriété propre de la femme (Toulouse, 14 mai 1841) (1). 2° La loi du 5 sept. 1807, relative au privilége du trésor public sur les biens de ses compta

(1) (Pierrou C. Mathieu.) LA COUR ; En ce qui touche les acquisitions des 28 avr. 1831 et 24 oct. 1834 : Attendu que la femme Pierrou n'a pas fait connaître, en les passant, l'origine des deDiers constatée par un acte authentique, ni déclaré l'emploi qu'elle en faisait; que son mari étant à cette époque négociant, et étant ultérieurement tombé en faillite, la propriété des immeubles qui ont fait l'objet de cet achat devra être attribuée au mari pour profiter à ses créanciers si la femme ne prouve point qu'ils ont été acquis de ses propres fonds; Qu'elle allègue, il est vrai, qu'ils ont été achetés avec l'argent provenant de la cession qu'avait faite Pierrou de 12,000 fr. dont elle était donataire; mais que cette donation lui avait été faite par sa tante avant le mariage; qu'elle formait donc un actif mobilier qui, aux termes de l'art. 1401 c. civ., a composé un des éléments de la communauté; que l'argent en provenant devait servir non à constituer une propriété propre de la femme, mais à l'avantage commun; que le mari, chef de la communauté, devait dès lors employer pour elle ces fonds, et que, comme elle est affectée tant passivement qu'activement pour sa gestion, les biens qui ont formé l'actif de celle qui existait entre les époux Pierrou doivent tourner au profit des créanciers du mari; - Que les art. 545, 546 et 547 c. com. n'ont point dérogé aux règles tracées par le code civil relativement aux conséquences de l'administration de la communauté: qu'ils ont pour objet, sans doute, d'empêcher que les femmes ne soient dépouillées des immeubles qui leur appartiennent, soit qu'elles en fussent propriétaires avant de se marier, ou qu'ils leur soient échus postérieurement au mariage; mais que les conditions qui leur sont imposées pour prouver l'origine et la sincérité de la propriété font assez connaître que le but que s'est principalement proposé le législateur, c'est de prémunir les créanciers contre les fraudes par lesquelles leur débiteur, pour diminuer le gage de leur créance, aurait acquis sous le nom de son épouse les biens dont il aurait payé lé prix de ses fonds propres ; - Qu'aussi la femme qui n'a point, dans son acte d'acquisition, fait connaître d'où lui venaient les deniers dont elle faisait l'emploi, et qui ne peut pas produire un acte authentique qui en constate l'origine, doit voir la propriété des biens achetés en son nom attribuée au mari, à moins qu'elle ne prouve qu'elle a payé de son argent; mais qu'en ce cas, il ne suffit pas à celle qui est commune de dire qu'elle a employé à cet achat de l'argent qui lui appartenait avant son mariage, et qu'elle n'a point reçu de la communauté, puisque alors elle n'a sur ces derniers d'autres droits que ceux qu'elle pourra exercer à la dissolution de cette communauté; qu'ils ne peuvent par conséquent pas être considérés comme les fonds dont il est question dans les art. 546 et 547 précités, qui doivent être des propres de la femme pour que leur emploi puisse la rendre propriétaire des biens acquis pendant son mariage avec un négociant déclaré en faillite; que les premiers juges ont donc avec raison reconnu que la femme Nadal n'était pas recevable à revendiquer les immeubles acquis les 28 avr. 1831 et 24 oct. 1834; ;- Confirme. Du 14 mai 1841.-C. de Toulouse, 36 ch.-M. Martin, pr. (2) Espèce: - (Guery C. Aptot.) - Dans l'espèce de cette solution,

bles, considère (art. 4), dans l'intérêt du trésor, comme la propriété du mari, les immeubles acquis à titre onéreux, postérieurement à leur nomination, parleurs femmes, même séparées de biens, à moins qu'elles ne prouvent que l'acquisition a été faite de leurs propres deniers.

3352. Nous avons dit ci-dessus, que l'immeuble appartenait à celui des époux au nom duquel était faite l'acquisition, et par conséquent au mari s'il a acheté en son propre nom. Il en serait autrement si l'acquisition était faite en vertu d'une clause du contrat de mariage ordonnant l'emploi de la dot (V. à cet égard, infrà, ch. 6, du remploi). — C'est ainsi qu'il a été jugé : 1o qu'une acquisition d'immeubles, quoiqu'elle soit faite par lemari et en son nom, peut, d'après l'intention véritable des parties, être réputée faite pour le compte de la femme, comme si, par exemple, il y est stipulé qu'elle est faite en remploi du prix des biens dotaux aliénés (Grenoble, 4 mars 1848, aff. Jourdan, D. P. 49. 2. 77); - 2° Que l'immeuble acquis par le mari pour lui, ses héritiers et ayants cause, n'est pas moins réputé la propriété de la femme, si le mari a déclaré dans l'acte d'acquisition que le prix provenait des deniers dolaux, et lors surtout que la femme, dans le même acte, a accepté ce remploi (Req. 20 nov. 1823) (2); · 3° Que si deux époux, mariés sans contrat en pays de droit écrit, ont fait, depuis le code civil, des acquisitions conjointement et pour moitié chacun, ces acquisitions doivent être communes, même pour ce qui excède les apports de la femme, alors surtout que le mari a déclaré dans deux testaments consécutifs qu'il n'avait effectivement droit qu'à la moitié; que même la déclaration du mari, portant qu'une acquisition déterminée lui est propre, serait sans effet si l'acte public énonçait que l'acquisition avait été faite conjointement avec sa femme (Agen, 22 juin 1833) (3).

Arrêt.

consacrée par la cour de Caen le 22 mai 1822, on dirait que la veuve Aptot avait seulement un privilége sur l'immeuble en qualité de créancière, mais que la propriété reposait sur la tête de son mari, puisqu'il avait acquis pour lui ses héritiers et ayants cause. - Pourvoi. LA COUR; Attendu qu'en reconnaissant que le mari avait déclaré faire l'acquisition dont il s'agit des deniers propres de la femme pour lui servir de remploi, et que la femme avait accepté formellement ce remplacement, les juges n'ont fait qu'une juste interprétation des conventions des actes consentis par les parties; Rejette.

Du 20 nov. 1823.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Lasagni, rap. (3) Espèce : (Saint-Martin C. Pera.) - Jugement du tribunal de Condom, du 31 août 1832, conçu en ces termes : Attendu que le refus fait par les héritiers Pera aux héritiers Saint-Martin de leur délivrer la moitié des immeubles qui ont été acquis conjointement par les époux Pera pendant leur mariage, est pris de la règle de droit portant que ce que la femme mariée acquiert pendant son mariage est censé avoir été acquis des deniers du mari; que cette règle, consacrée par la jurisprudence, a sa source dans les lois 51, ff., 6, C., De donationibus inter virum et ux., lesquelles paraissent avoir eu pour objet d'arrêter le penchant qui pourrait porter les époux à se dépouiller l'un en faveur de l'autre, ne se mutuo amore spolient, et d'empêcher que la femme ne se procurât de l'argent par des moyens déshonnétes; -- Mais attendu que ces lois n'ont été reçues en France qu'avec des modifications dont on a, de tous les temps, reconnu la justice, et qui s'appliquent aux cas suivants : 1° lorsque la femme est riche et le mari pauvre; 2° lorsque la femme est marchande publique faisant un commerce séparément de son mari; 3o lorsque la femme a des paraphernaux; 4° lorsque les acquisitions ont été faites conjointement par la femme et par le mari; - Attendu en fait que, pendant la durée du mariage de feu Pera avec Marie Saint-Martin, il a été fait plusieurs acquisitions d'immeubles dans lesquelles ladite Saint-Martin est constituée partie contractante conjointement avec son mari;

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- Que, par ce seul fait, la femme se trouve dans l'une des exceptions de la loi Quintus Mucius (L. 51 précitée); Qu'ainsi, et sous ce premier rapport, les acquisitions dont il s'agit doivent avoir tout leur effet en faveur de la femme, parce que les énonciations des actes sont à l'abri de toutes simulations de donations faites successivement par le mari des sommes qui ont été employées respectivement en acquit desdites ventes; Attendu que, si la femme Pera, en apportant à son mari la somme de 3,000 fr. dont ce dernier a donné quittance, n'a pas fourni à son commerce une mise proportionnée aux bénéfices considérables qui ont été le résultat de leur commune industrie, il n'est pas moins rationnel de considérer cette mise comme un des éléments de la propriété qui a suivi leurs travaux; Attendu que, si les aveux et déclarations faits par feu Pera dans le testament du 13 juill. 1820, dans lequel il dit être pour moitié dans les acquisitions qu'il a faites avec son épouse, n'ajoutent rien aux clauses des contrats dans lesquels lesdites acquisitions sont énoncées avoir été faites en commun, ces aveux doivent néanmoins produire

3353. Aux termes de l'art. 1428 c. civ., lorsque le mari devient seul et en son nom personnel acquéreur ou adjudicataire de portion ou de la totalité d'un immeuble appartenant par indivis à la femme, celle-ci, lors de la dissolution de la communauté, a le choix de laisser l'immeuble à la communauté qui devient alors débitrice de la portion du prix revenant à la femme, ou de retirer l'immeuble en remboursant le prix à la communauté; ce qui s'appelle retrait d'indivision. On a demandé si cette faculté existait pour la femme mariée sous le régime dotal, ou, en d'autres termes, si l'art. 1408 n'était applicable que sous le régime de communauté (V. sur cette question la controverse et les autorités, suprà, no 832 et suiv.). — Il a été jugé que, sous le régime dotal, l'acquisition, par le mari, de la portion d'un immeuble appartenant

leur effet, ainsi que l'enseigne Lapeyrère, en disant : « Confession d'un testateur fait preuve contre lui à l'égard des héritiers, mais non pas contre ses créanciers; » →→ Attendu qu'on doit aussi considérer, par une raison contraire, la déclaration faite dans le testament du 16 déc. 1825 comme etant une contradiction avec le fait même constaté dans l'acte de vente de la terre dite des Plantous, lorsque le testateur dit qu'il entend que son epouse n'ait aucun droit de propriété sur cette pièce de terre, tandis que dans l'acte d'achat il stipule formellement comme coacquéreur avec elle;

Attendu qu'en rapprochant dans cette cause les faits et les principes généralement adoptés, on doit reconnaître que, s'il paraît clairement que le mari a eu connaissance des acquisitions faites par la femme, et qu'il les a approuvées ou qu'il est intervenu dans les actes d'acquisition ou de placement, la présomption de la loi, introduite par un principe d'honnêteté publique, perd toute sa force, parce qu'il est constant, d'après cette approbation ou cette intervention, que le mari savait très-bien que les deniers appartenaient à sa femme. « Sæpiùs, dit le président Faber, à senalu nostro prononciatum est cessare præsumptionem, sicut et si, præsente et consentiente, aut saltem patiente marito, mulier pecuniam numeratam dixerit eam suam esse. » C'est aussi d'après ces considérations qu'a été rendu l'arrêt du parlement de Toulouse, cité par M. Laviguerie, auteur d'un recueil d'arrêts inédits, quoique le mari eût déclaré dans le testament qu'il révoquait les déclarations faites en faveur de sa femme, comme ayant été simulées et dans la vue de la gratifier, et qu'il n'y eût aucune circonstance qui pût mener à faire connaître d'où la femme avait pu se procurer les sommes considérables que le mari lui avait reconnues; Attendu qu'en écartant dans l'hypothèse actuelle la résistance opposée par les héritiers Pera à la demande qui leur est faite, le tribunal a considéré que ces derniers sont d'autant moins favorables, qu'ils ne sont ni créanciers du défunt, ni héritiers à réserve; qu'ainsi aucun soupçon de fraude à leur égard ne peut être invoqué; Par ces motifs, etc. » Appel par les héritiers Pera. Adoptant un parti subsidiaire, ils ont prétendu que la femme ne pouvait jamais avoir droit aux acquisitions que jusqu'à concurrence de ses apports, et, par suite, aux seules acquisitions faites depuis leur versement jusqu'à leur épuisement; qu'en supposant que la confession contenue dans les testaments du mari dût produire quelque effet, elle ne pouvait embrasser les acquisitions qui lui étaient postérieures, au sujet desquelles il ne fallait pas avoir égard aux énonciations qu'elles avaient été faites conjointement, ces énonciations ne se trouvant pas confirmées.

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LA COUR; Attendu que les déclarations géminées du mari ne constituent ni une donation directe ni une donation déguisée; - Que, libre de disposer de la totalité de ses biens en faveur de sa femme, rien ne l'obligeait de recourir, pour la gratifier, au moyen détourné de la confession; Que ses héritiers, étant son image, et ayant sa représentation, ne sauraient être admis à attaquer cette confession, pas plus qu'il ne l'aurait été lui-même; Adoptant au surplus les motifs des premiers ju

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ges, etc. Du 22 juin 1833.-C. d'Agen, ch. corr.-M. Bergognié, pr.

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(1) (Lacombe C. Sarraute.) - LA COUR; Attendu que la dame Sarraute était propriétaire d'une partie de la métairie de Bourroussas; que la vente de cette métairie au sieur Sarraute comprenait, dès lors, la portion d'un objet indivis entre le vendeur et la dame Sarraute; - Attendu que, dans un cas semblable, le mari est censé avoir acquis la portion indivise de l'immeuble, dont le reste appartenait à sa femme, pour elle, et et non pour en devenir lui seul propriétaire. Cela résulte des dispositions de la loi 78, § 4, ff., De jur. dot., à la charge toutefois, par la femme, de rembourser au mari le prix de l'acquisition; Que si cette loi ne parle littéralement que des immeubles dotaux indivis, par identité de raison, on doit adopter sa décision, lorsqu'il s'agit de biens paraphernaux. Le mari, procureur né de sa femme, doit être considéré, toutes les fois qu'il s'agit des intérêts de sa femme, comme ayant agi pour elle seulement. D'ailleurs, en acquérant la partie d'un immeuble indivis avec sa femme, il a voulu plutôt faire un partage avec le propriétaire duquel il a acquis la portion indivise, que devenir lui-même propriétaire de cette partie. Cette décision, lorsqu'il s'agit de biens paraphernaux, a été adoptée par un arrêt du parlement de Toulouse, par un autre arrêt du même parle

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par indivis à sa femme, est censée faite pour le compte de celleci, sans qu'il y ait lieu de distinguer si cette propriété par indivis était paraphernale ou dotale (Toulouse, 19 janv. 1835) (1).

3354. Quant aux améliorations faites ou survenues au bien dotal, il a été jugé : 1o que les constructions et améliorations faites par le mari deviennent dotales comme le bien lui-même, et restent la propriété exclusive de la femme, sauf la récompense due par celle-ci à son mari ; qu'en conséquence, le mari ne peut, à raison de ses améliorations, être réputé copropriétaire du bien dotal, et comme tel avoir droit, en cas de vente faite conjointement par les époux, à une partie du prix de ce bien; et que, par suite, l'acheteur créancier du mari n'a pu compenser avec sa créance le prix de vente qu'il devait à la femme (Cass. 14 fév. 1843) (2);

ment, du 24 mars 1779, entre Ramond et Jammes; enfin par un arrêt de la cour, en date du 27 janv. 1814, entre Castex et autre Castex; — Disant droit sur la demande tendant à ce que la portion de la métairie de Bourroussas soit déclarée avoir été acquise par le mari, pour le compte de sa femme; - Ordonne que cette portion fera partie de la succession maternelle, à la charge, par cette succession, de faire compte à celle de Sarraute de la somme de 2,184 fr., prix de cette acquisition.

Du 19 janv. 1835.-C. de Toulouse.-M. Hocquart, 1er pr.

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(2) Espèce :-(Veuve Berne C. Mc Bruyn.) — La dame Berne avait formé sa demande en séparation de biens dès le 25 juin 1839. Me Bruyn intervint dans l'instance; il prétendit : 1o que les parcelles réunies au domaine principal en 1825 et 1826 constituaient une propriété distincte, appartenant au sieur Berne, et dont la valeur était entrée pour une portion dans le prix fixé en bloc; 2o que des améliorations faites au fonds dotal, il résultait, pour son débiteur, une copropriété dont le montant devait venir en déduction de sa propre créance. Les syndics intervinrent de leur côté, le 22 janv. 1840, pour demander l'attribution des intérêts courus depuis le 25 janv. 1832 jusqu'au 25 juin 1859, date de la demande en séparation de biens. La dame Berne demanda, dans le cours de l'instance, une provision de 10,000 fr. Cette provision lui fut payée le 15 mars 1840. 20 mai 1840, jugement qui nomme des experts à l'effet d'indiquer : 1° les impenses et améliorations faites par Berne à l'immeuble de sa femme; 2° la plus-value résultant de ces impenses; 3° l'augmentation de valeur apportée par le temps. Les experts ont opéré sur cette triple base, et le tribunal a rendu, le 16 janv. 1841, le jugement conçu dans les termes suivants : «Le tribunal: Sur la séparation de biens: - Attendu qu'il ne s'élève aucune difficulté sur le point de savoir si la demande de la dame Berne est fondée; - Sur la liquidation des droits de la dame Berne :Attendu qu'il est reconnu qu'au jour de la faillite de son mari, elle a reçu le mobilier de celui-ci en nature pour une somme de 1,380 fr., mais que cette délivrance n'a été consacrée, par un jugement du tribunal de commerce du 17 mai 1833, qu'à la charge par la dame Berne de désintéresser le propriétaire et autres créanciers privilégiés, ce qu'elle a fait; que ces créanciers ne figurent point au passif de la faillite; qu'ainsi la masse des créanciers a profité, en réalité, de cette somme de 1,380 fr., et ne peut l'imputer sur les reprises de la dame Berne ;-Attendu, quant au prix du pré vendu pendant le mariage, qu'il a été vendu 5,000 fr. par acte public auquel est intervenue la dame Berne; que l'art. 1436 c. civ. dispose formellement qu'il n'est dû récompense à la femme commune que du prix de ses immeubles porté aux contrats, quelque allégation qui soit faite sur le prix de l'immeuble vendu; qu'aucune raison ne se présente pour ne point faire application de cet article à la femme dotale; — Attendu, d'ailleurs, qu'on ne trouve dans l'espèce aucune contre-lettre, aucun document duquel il résulte que le prix porté au contrat ne fût pas le véritable; et qu'enfin la preuve testimoniale offerte par la dame Berne, de la fausseté de l'énonciation dudit prix de 5,000 fr., serait directement contraire à la disposition de l'art. 1341 c. civ.;

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» Sur la demande de la dame Berne en payement du prix de la vente du 25 janv. 1832: - Attendu que le payement n'est point refusé par le sieur Bruyn, qui se borne à opposer divers chefs d'imputations à compte; -Sur le premier chef, consistant en 10,000 fr. payés par lui à titre de provision; Sur le deuxième, soit 2,250 fr. payés lors de la vente à la dame Berne; Et le troisième, soit 11,000 fr. payés à M. Parent, vendeur Attendu que ces trois chefs ne sont pas contestés; Sur le quatrième, soit 4,400 fr. payés par Me Bruyn au sieur Gaudet: Attendu que, sur ce point, la dame Berne soutient que son engagement envers le sieur Gaudet était nul, comme celui qu'elle avait souscrit à Bruyn lui-même; qu'ainsi ce payement ne peut lui être imputé; - Attendu que si cet engagement pouvait être annulé, ce n'était pas là, dans tous les cas, une nullité de plein droit qui puisse être reconnue en l'absence du sieur Gaudet; que, jusqu'à ce que la dame Berne ait fait annuler ledit engagement et le payement qui en a été la suite, elle ne peut exiger un second payement de Bruyn et l'obliger à plaider pour elle avec le sieur Gaudet, pour faire prononcer en sa place la nullité des engagements qu'elle a contractés; Attendu, d'ailleurs, qu'en admettant que

2o Que si les bénéfices que la femme mariée sous le régimė

dotal a faits par son travail, son industrie où ses économies, ap

cette nullité fût prononcée, il y aurait encore à examiner si la dame Berne, qui a bien reçu les sommes qui ont été versées entre ses mains, et dont elle a fait tel usage que bon lui a semblé, n'a pas également bien reçu ce qui a été employé par elle à payer les dettes qu'elle avait précédemment contractées; que, si la cour de cassation a cru devoir annuler les payements par compensation faits au sieur Bruyn lui-même, c'est là une disposition déjà bien rigoureuse, et qu'il n'est pas possible d'étendre par induction à un payement réel fait à des tiers; Attendu qu'ainsi ce chef d'imputation doit être maintenu au profit de Bruyn;

» Sur le cinquième chef, soit le prix de la part de l'immeuble appartenant an sieur Berne: Attendu que cette portion, achetée par Berne au prix de 7,200 fr., a été estimée par les experts 9,933 fr. au jour de la vente passée à Bruyn; - Attendu que la dame Berne soutient que cette portion d'immeuble lui appartient par droit d'accession, à charge par elle d'en payer le prix porté au contrat authentique d'acquisition, ou qu'au moins elle est propriétaire de la moitié en vertu du contrat; Attenda que lorsqu'un mari a incorporé à la propriété de sa femme un immeuble voisin, et qu'au jour de la dissolution du mariage la femme rentre en possession de sa propriété, il peut y avoir lieu d'examiner si le mari a le droit de reprendre sa portion en nature, ou si la femme, en en payant la valeur, ne peut pas le retenir; mais que, dans l'espèce, la question ne se présente point ainsi; que les deux propriétés, celle de la femme et celle du mari, ont été également revendues; qu'il s'agit seulement de déterminer la part du prix qui revient à chacun des propriétaires; que la femme Berne, si elle était encore propriétaire, ne pourrait retenir la part de son mari qu'en lui tenant compte de sa valeur; qu'ainsi il ne lui est fait aucun préjudice en lui retenant cette valeur sur le prix total de l'immeuble, au profit dudit sieur Berne ou de ses créanciers; Attendu qu'elle n'est pas plus fondée au point de vue du contrat; qu'en effet, si le sieur Berne a stipulé qu'il achetait pour lui et sa femme, celle-ci n'a point paru audit acte; que l'immeuble a été revendu en sa présence, sans qu'elle ait déclaré, dans aucune circonstance, qu'elle entendait accepter l'acquisition faite par le mari en son nom; qu'ainsi la vente de 1852 a trouvé le mari exclusivement propriétaire de la part d'immeuble par lui achetée et, par suite, de la portion du prix qui afférait à cette propriété; - Altendu, quant à la contre-lettre portant un supplément au prix de l'acquisition faite par Berne, que c'est là une circonstance complétement indifférente; que le prix par lui payé est sans importance dans la cause; qu'il s'agit seulement de fixer la valeur de la propriété au 25 janv. 1832; que les experts ont dû, sans doute, dans les éléments de leur appréciation, faire entrer le montant du prix d'achat, mais que ce n'est là qu'une base d'estimation'; que, n'existât-elle pas, et le contrat même d'acquisition ne fût-il pas représenté, le fond du droit des parties n'en serait aucunement modifié;

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» Sur le sixième chef, soit les améliorations et les réparations faites par le sieur Berne : Attendu qu'en thèse générale, si les impenses ne produisent pas une plus-value égale à la dépense faite, la femme ne doit que ladite plus-value, mais que, dans l'espèce, l'amélioration excède, au contraire, les sommes avancées; qu'ainsi c'est faire reste de droit à la dame Berne, que de l'obliger seulement à tenir compte du prix des réparations elles-mêmes; - Attendu que les experts les ont estimées à la somme de 29,106 fr. 25 c.; que la dame Berne présente des comptes du maçon, du pépiniériste et du fontainier, montant à la somme de 12,000 fr., et soutient que c'est là toute la dépense faite; mais qu'il est évident qu'il y en a eu d'autres, et de nombreux ouvriers, et notamment des charpentiers, peintres, serruriers, à solder pour ce genre de réparations opérées; que rien n'établit, même pour les ouvriers dont les comptes sont représentés, qu'il n'y ait pas eu d'autres mémoires; qu'il y a lieu sur ce point à s'arrêter à l'estimation des experts;

» Sur le septième chef, soit le mobilier de la campagne :-Attendu qu'il est constaté par les actes qu'au jour où la dame Berne a partagé l'immeuble de Saint-Rambert avec son copropriétaire, cet immeuble contenait un mobilier appartenant à la dame Berne; Attendu que, par suite de l'espèce de transformation qu'a subie l'immeuble par les embellissements et agrandissements opérés par Berne, il est nécessairement arrivé que le mobilier primitif a été augmenté et embelli aussi par ses soins; qu'ainsi on ne peut déclarer que le mobilier existant au moment de la vente de 1832 fût le même que celui de 1819, et doit être tout entier attribué à la dame Berne; mais qu'il est impossible aussi de lui refuser une part dans le prix de ce mobilier dont une portion avait été par elle apportée en dot; qu'il s'agit seulement de déterminer cette portion, et qu'il semble juste d'admettre la même proportion pour l'accroissement du mobilier que celle qui est constatée pour l'immeuble; que le montant de cette part du prix allouée à la dame Berne contre Bruyn doit être retranché de ses reprises dotales ci-dessus fixées;

» Sur le buitième chef, soit les 15,415 fr. 75 c. du prix excédant l'évaluation faite par les experts : — Attendu que ceux-ci ont considéré cet excedant comme le résultat du succès des réparations et améliorations faites par le sieur Berne; qu'il serait peut-être plus vrai de considérer que, dans la position où Bruyn se trouvait vis-à-vis des mariés Berne, au

moment de la vente de 1832, il a dû être facilement conduit à donner un prix au-dessus de la valeur réelle de l'immeuble qu'il achetait; que cela résulte et des évaluations des experts et de toutes les circonstances de la causé; Attendu que, soit qu'on admette cette opinion, soit qu'on accueille celle admise par les experts, il en résulte toujours une plusvalue générale ou excédant de prix de 15,000 fr., s'appliquant à toute la propriété, et qu'on ne conçoit pas par quelle raison on refuserait d'en appliquer une part proportionnelle à la fraction de l'immeuble qui appartenait au sieur Berne; - Attendu qu'il suit de toutes ces considérations que le capital de 80,000 fr. dû par Bruyn au jour du contrat doit être diminué au moyen des chefs d'imputations ci-dessus rappelés, savoir : les sommes payées à Parent, à Gaudet et à la femme Berne elle-même, la valeur de la part de propriété appartenant au sieur Berne, celle de ses impenses et sa part proportionnelle dans le mobilier, dans l'excédant de prix sur la valeur réelle, et qu'il doit être encore diminué du montant de la provision payée à la dame Berne à la date où elle a été servie; - Altendu, quant aux intérêts du solde, que c'est là une question dans laquelle les syndics intervenants sont intéressés, et qu'il importe d'examiner avec les autres chefs de leurs prétentions;

>> En ce qui concerne lesdits syndics et leur intervention : - Attendu que Bruyn soutient qu'il y a chose jugée à leur égard, par le jugement du 21 mai 1834, non réformé quant à eux; que ce jugement les a renvoyes devant un juge pour débattre le compte entre Berne et lui; que, dès lors, ils ne peuvent qu'exécuter ledit jugement, et ne sont plus admissibles à attaquer l'acte de vente du 25 janv. 1832; Attendu que les moyens a l'aide desquels les syndics attaquent l'acte du 25 janv. 1832 sont complétement étrangers à ceux par eux présentés lors du jugement ci-dessus énoncé; qu'ainsi, aux termes de l'art. 1350 c, civ., on ne peut leur opposer l'exception de la chose jugée;

» Attendu, quant au moyen de nullité tiré par les syndics de ce que les obligations hypothécaires consenties à Bruyn par les époux Berne étaient des obligations de crédit dont la valeur n'a pas été soldée au jour de la souscription des engagements; que c'est là une nailité repoussée par la jurisprudence la plus constante, rejetée implicitement par le jugement de 1832, puisqu'il a ordonné qu'il serait fait compte de l'état du crédit accordé par Bruyn aux époux Berne; que, d'ailleurs, cette nullité même serait sans importance décisive dans la cause; que ce n'est point la validité des hypothèques consenties par Berne, mais celle de la compensation faite le 25 janv. 1832 qui est en question, et que, rigoureusement et en droit, cette compensation aurait pu s'appliquer à une créance chirographaire; - Attendu que cette compensation est attaquée, comme faile en fraude de la masse des créanciers de Berne; que, suivant les syndics, elle doit être annulée, parce qu'il est impossible d'admettre que Me Bruyn, qui était en communauté d'intérêts avec les époux Berne, qui tenait en quelque sorte les livres de leur commerce, ignorât, au 25 janv. 1852, l'état des affaires du sieur Berne dont la faillite a été déclarée quelques jours après et reportée par jugement au 31 oct. 1831, soit trois mois avant l'acte dont il s'agit;- Attendu, en droit, que, pour apprécier les actes faits à titre onéreux dans l'intervalle pendant lequel un jugement a fait remonter la faillite avant sa déclaration, la jurisprudence a constamment reconnu qu'il fallait examiner s'ils avaient été passés de bonne foi;

» Attenda que, pour examiner la question de bonne foi, il faut se reporter au jour où l'acte a été passé; que, dans l'espèce, Me Bruyn, qui compensait le prix de l'immeuble acquis par lui des époux Berne, avec ses créances, avait, au 25 janv. 1832, une hypothèque qu'il devait croire valable pour toutes ses créances contre la femme Berne, est une hypothèque pour une notable partie contre le mari; que, dès lors, eût-il cu connaissance de l'état de faillite du sieur Berne, la compensation qu'il opérait n'était à ses yeux qu'un mode de payement d'une créance hypothécaire qui ne pouvait, en apparence, porter aucun préjudice à la masse des créanciers; - Attendu que Bruyn considérait la femme Berne comme la principale venderesse; que si depuis, et par suite des décisions qui ont annulé les engagements de la femme Berne, ceux du mari dans l'acte du 25 janv. 1832 ont pris une importance que Bruyn a intérêt à rechercher, c'est là une circonstance bien postérieure à l'acte de vente et, par suite, étrangère à la bonne foi qui a présidé à son accomplissement; Attendu que les syndics ont eux-mêmes reconnu cette bonne foi, puisque, placés lors du jugement de 1834, en face de cet acte de 1852, ils ne l'ont point attaqué pour cause de fraude et en ont, au contraire, en quelque sorte demandé l'exécution; qu'ils ont, en effet, demandé à venir en compte des sommes compensées par ledit acte; que s'il n'y a pas là une fin de nonrecevoir absolue contre leur demande actuelle, il faut reconnaître qu'il y a une grande présomption de bonne foi en faveur d'un contrat, quand il a fallu huit années aux parties intéressées pour y découvrir des symptômes de fraude et de collusion; Attendu qu'il suit de ces considérations que la compensation faite, par l'acte du 25 janv. 1832, entre les créanciers de Bruyn et la part du prix due à Berne, l'a eté en pleine bonne foi; que si, en définitive, elle porte préjudice à la masse des créanciers, c'était là une conséquence iguorée des parties au jour du contrat, ignoréo

partiennent au mari, celui-ci n'a aucun droit à la plus-value qu'a | acquise la propriété de la femme, sans son fait et par la seule

des syndics eux-mêmes jusqu'à ce jour; qu'ainsi, cette compensation ne peut être arguée de fraude, et doit être maintenue.

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ments faits à son égard se trouvent annulés par l'arrêt de la cour de Dijon; Attendu que les reprises dotales qu'elle a été admise à faire valoir à l'ouverture de la faillite de son mari ne peuvent s'exercer que sur les ressources actives de Germain Berne à cette époque, et non sur les immeubles que ce dernier a possédés pendant le mariage, puisqu'ils ont été vendus légalement, et le prix payé et reçu avec purgation de l'hypothèque légale de la femme; Attendu, dès lors, qu'aucune compensation ne peut s'établir entre des reprises dotales non liquidées, avec un prix de vente reçu, et quittancé par le mari antérieurement, et lorsqu'il jouissait de toute l'intégrité de ses droits; - Adoptant, sur tous les autres chefs du procès les motifs des premiers juges, etc.»

Pourvoi de la dame Berne.-1° Violation de l'art. 1554 c. civ., fausse interprétation des art. 1456 et 1341 même code, en ce que l'arrêt attaqué a dénié à la dame Berne la faculté de faire preuve de la dissimulation de prix faite à son préjudice, dans le contrat de vente de son bien dotal. On oppose, dit Me Fichet, que la dame Berne ne se trouve pas dans l'un des cas spécifiés par la loi pour l'admission de la preuve testimoniale. Mais, la loi fait exception pour les cas de fraude, ainsi que le reconnaissent MM. Toullier, t. 12, no 345, et Duranton, t. 14, no 352, en traitant d'un cas identique à celui qui nous occupe.-La cour d'appel repousse la demande de la dame Berne, parce qu'elle ne produit point de contre-lettre. N'est-il pas évident que si ce moyen eût existé en sa faveur, elle n'aurait pas eu besoin d'en invoquer d'autres. Elle allegue précisément l'existence d'une contre-lettre écrite par M Bryun lui-même, mais qui se trouve entre les mains de celui-ci.

» Sur les intérêts du solde du prix dû par Bruyn à la femme Berne : Attendu que Berne doit être mis hors de débat quant à ce chef; qu'en effet, si ces intérêts sont dus à la femme Berne, il est évident, et Braya reconnaît lui-même qu'il n'y a aucun droit; que si, au contraire, ils appartiennent au sieur Berne, échus depuis la faillite, ces intérêts entrent dans la caisse syndicale; que Berne failli n'a pu payer, par préférence, un de ses créanciers ni compenser avec lui depuis le jugement qui a déclaré la faillite; qu'ainsi, dans aucun cas, Bruyn ne peut retenir les intérêts du solde dû par lui à la femme Berne; Attendu que la véritable question, sur ce point, est celle de savoir si ces intérêts doivent être comptés à la femme Berne ou aux syndics de la faillite de son mari; Attendu que, pour attribuer ces intérêts à la femme Berne, il faudrait admettre que la femme d'un failli n'est pas dans la nécessité de faire prononcer sa séparation de biens pour rentrer dans l'administration de ses biens, et que par le fait de la faillite seule, elle devient apte à gérer sa fortune et à recevoir ses revenus; - Attendu qu'il ne peut en être ainsi; que, jusqu'à sa demande en séparation de biens, la femme d'un failli reste sous l'empire de la règle générale qui rend la femme incapable; que seulement l'administration de ses biens passe du mari, qui est dépouillé de ses droits, à la masse de ses créanciers qui le représentent; Attendu qu'ainsi, en droit, les revenus de la femme Berne ont dû être perçus par les syndics de la faillite de son mari jusqu'au jour de sa demande en séparation; mais, d'autre part et en fait, il est démontré que c'est le sieur Berne qui a pourvu aux besoins du ménage depuis sa faillite; qu'en effet on rapporte des documents desquels il résulte qu'il a continué l'industrie qu'il exerçait avant sa faillite; et que, d'autre part, le sieur Berne, qui vivait dans un état d'aisance, qui possédait une propriété rurale toute de luxe, n'a laissé à ses créanciers aucune espèce d'actif, en sorte que tout démontre qu'il a soustrait à sa faillite des ressources à l'aide desquelles il a maintenu l'aisance de son ménage; qu'ainsi la seule rai-pensation de sa créance avec la portion du prix afférente au droit de coson qui pourrait faire attribuer à la femme Berne ses revenus avant la séparation de biens, et qui se tirerait de ce que le mari ne reçoit les revenus de sa femme qu'à charge de les employer au bien-être de la famille, ce qu'il ne peut faire après sa faillite, cette raison manque en fait dans la cause, en sorte que l'application de la règle du droit qui attribue les revenus de la femme aux créanciers de son mari jusqu'à sa séparation de biens, qui pourrait paraître sévère en thèse générale, conduit, dans l'espèce, à un résultat complétement équitable;

» Attendu, quant aux dépens, que les parties succombent respectivement sur divers chefs de leur demande ; que, cependant, la plus grande partie des réclamations de la femme Berne se trouve rejetée;

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2° Violation des art. 1457, 1993, 1999 c. civ., et en outre de l'art. 555 même code, en ce que l'arrêt attaqué a décidé que les améliorations faites par le mari au bien dotal constituaient à son profit une copropriété dont l'effet était de l'autoriser soit à rentrer dans ses droits lors de la vente du bien dotal, soit à déléguer la valeur des mêmes droits à ses créanciers, soit même de permettre à l'acheteur, créancier du mari, la com

propriété du mari.

3° Violation des art. 1457, 1993, 1999, 551, 712, 1121, 1179 c. civ. et de l'art. 7 de la loi du 20 avr. 1810, en ce que 1o la cour royale a refusé de considérer comme annexes d'un bien dolal participant de la nature dotale de cet immeuble, des parcelles de terrains ajoutées par les époux pendant le mariage, sous prétexte que le droit d'accession était inapplicable en ce cas ;-2o A l'égard du défaut de motifs, en ce que, lorsque la femme qui avait soutenu en première iustance que les annexes devaient lui appartenir par droit d'accession, s'étant trouvée, par suite du décès de son mari, arrivé durant l'intervalle, dans le cas d'invoquer devant la cour royale un autre moyen d'acquisition de propriété tiré d'une clause de gain de survie, insérée dans son contrat de mariage, l'arrêt attaqué s'est néanmoins borné à rejeter la demande de la femme, par l'adoption pure et simple des motifs des premiers juges, lesquels ne pouvaient évidemment s'appliquer aux conclusions prises devant la cour. 4° Violation de l'art. 1554 c. civ. en ce que l'arrêt attaqué a décidé que la faculté réservée par les époux dans leur contrat de mariage d'aliéner des immeubles dotaux emportait celle de les hypothéquer, ou du moins d'en déléguer valablement le prix à des créanciers bypothécaires.

5°, 6° Violation de l'art. 1540 c. civ., fausse application de l'art. 1549 même code, et violation de l'art. 1254 c. civ. La vente du bien dotal, a-t-on dit, avait été faite le 25 janv. 1832, à Me Bruyn, moyennant 80,000 fr.; sur celle somme, 2,500 ont été seulement touchés à cette époque par la dame Berne: restaient donc entre les mains de Me Bruyn 77,500 fr. dont les intérêts, depuis le jour de la vente, jusqu'au 25 juin 1859, jour de la demande en séparation de biens, ont dépassé 36,000 fr.

Or que résulte t-il du compte admis par l'arrêt attaqué? 1o Les intérêts, bien qu'ils fussent dotrux comme le capital lui-même, ont été attribués à l'actif de la faillite du sieur Berne, contrairement aux principes de la dotalité; 2° les intérêts des créances Parent et Gaudet ont été im

» Dit que la femme Berne est séparée de biens du sieur Berne, son mari, que ses droits dotaux sont liquidés à la somme de 15,800 fr., montant du trousseau et du mobilier constitués par son contrat de mariage, et du prix d'un pré vendu par elle et son mari durant le mariage, déduction faite d'une somme de 1,200 fr. à elle attribuee pour le mobilier par elle vendu, avec la maison de campagne, à Bruyn;-Que les 80,000 fr., montant de la vente du 25 janv. 1832, que la dame Berne réclame à Me Bruyn, sont réduits: 1° de la somme de 2,250 fr., à elle comptée lors du contrat; 2o de celle de 11,000 fr., comptée pour elle à Parent; 3° de celle de 4,400 fr. comptée à Gaudet; 4° de celle de 29,106 fr. pour améliorations faites par Berne; 5° de celle de 9,933 fr. pour valeur de la part de propriété de Berne; 6° de celle de 4,765 fr. pour sa part proportionnelle dans l'excédant du prix; 7° de celle de 2,145 fr. pour la part du mobilier lui appartenant; total 65,599 fr.; - Ce qui réduit le montant du prix dù par Bruyn, au jour du contrat, à 16,400 fr.; Et, à partir du 15 mars 1840, jour où il a compté une provision de 10,000 fr., à 6,400 fr.;-Condamne Bruyn à payer ladite somme de 6,400 fr. à la dame Berne; en outre, à lui payer les intérêts de la somme de 16,400 fr., depuis le 25 juin 1859, jour de sa demande en séparation de biens, jusqu'au 18 mars 1840, et, depuis ledit jour, les intérêts de 6,400 fr. jus-putés sur le capital de la vente, tandis qu'en admettant même que la failqu'a effectif payement; Condamne Bruyn à payer aux syndics de la faillite de Berne les intérêts de la somme de 16,400 fr., depuis le 25 janv. 1832 jusqu'au 25 juin 1859; Dit que les dépens seront mis en masse pour être supportés, un quart par Bruyn, un quart par les syndics de la faillite Berne, en leurdite qualité, et le reste par la dame Berne. » Le 11 fév. 1842, arrêt confirmatif de la cour de Lyon, ainsi motivé: - En ce qui touche la compensation prétendue par la femme Berne : Considérant que la vente de l'immeuble de Saint-Rambert a eu licu en 1852, et avant l'ouverture de la faillite de Berne; que celle vente, dont le prix a été payé comptant, soit en obligations solidaires, souscrites en faveur de Bruyn, acquéreur, soit en espèces, dont le contrat porte quittance, n'a jamais été attaquée et ne l'est pas même en ce moment; Attendu qu'en ce qui concerne Berne, tout ce qui touche à la vente et au payement du prix est consommé irrévocablement, et qu'il be s'agit dans l'instance actuelle que de régler entre la femme Berne et Bruyn le prix des parties de l'immeuble vendu en commun par les époux, et que Bruyn doit payer à la femme dotale, puisque les paye

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lite dût bénéficier des intérêts dotaux qui lui ont été attribués, c'était sur ces intérêts et non sur le capital dotal que devaient être imputés ceux des créances Parent et Gaudet qui étaient dettes du mariage; 3° le capital de ces mêmes créances Parent et Gaudet devait, d'après les règles de droit en matière d'imputation, être déduit sur les intérêts du capital dotal avant de les faire porter sur le capital lui-même; 4° enfin la provision de 10,000 fr. allouée à la dame Berne depuis la séparation de biens devait, d'après les mêmes règles, être imputée sur les intérêts du capital dota! produits depuis la séparation, au lieu d'imputer de prime abord cette provision sur le capital lui-même.

7° Autre violation de l'art. 1554, en ce que la cour royale a mis la moitié des dépens à la charge de la dame Berne, c'est-à-dire, a condamné cette dame à en imputer la valeur sur le capital dotal, seul bien qu'elle possède, alors que le procès dont il s'agit a pris naissance et a subi ses phases les plus importantes avant la dissolution de l'union conjugale et même antérieurement à la séparation de biens prononcée.

Tous ces moyens ont été combattus successivement par Me Bonjean,

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