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particulière en contractant mariage.

Il a été jugé en ce sens, 1° que la constitution d'une dot de 150,000 fr., reçue en argent avec faculté de rapporter cette somme à la succession du père de la future, si elle préférait la recevoir en immeubles, et de conserver la libre disposition de ce qu'elle recevrait au delà de la somme de 150,000 fr., autorise les époux à disposer des immeubles qu'ils ont ainsi reçus au delà de cette somme, sans qu'on puisse opposer qu'ils étaient protégés par leur dotalité (Req. 3 fructidor an 13) (1); — 2° Que la constitution faite par la femme de tous ses biens et droits, ne comprenait autrefois que les biens présents, et que la constitution de la légitime n'embrassait pas le supplément de cette légitime (Nîmes, 9 mars 1819) (2); -3° Que, sous la coutume d'Auvergne, la femme qui se constituait en dot une somme d'argent, en déclarant que cette somme formait tout son avoir, excluait de la dotalité les immeubles qui pouvaient lui advenir postérieurement, par suite des droits dont elle avait l'exercice en se mariant (Req. 7 déc. 1830) (3).

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gime dotal, ne suffit pas pour dotaliser tous les biens apportés par la femme, alors qu'elle est suivie d'une constitution spéciale de dotalité de son mobilier; qu'en un tel cas, il a pu être jugé, par appréciation de la clause, que cette constitution particulière était restrictive de la déclaration générale, et que les immeubles apportés par la femme étaient restés paraphernaux (Req. 9 juin 1829 (5); Conf. Grenoble, 7 fév. 1828, aff. N... C. N...).-Dans l'espèce de l'arrêt du 9 juin 1829, le tribunal de Guéret avait décidé, au contraire, qu'il résulte de la combinaison des art. 1391 et 1542, que la déclaration générale de la part des époux qu'ils se soumettent au régime dotal, suffit pour frapper de dotalité les biens présents de la femme, décision vraiment injustifiable. Ce qu'il y a à remarquer, surtout, dans l'arrêt du 9 juin 1829, et ce qui est critiqué par M. Duranton, t. 15, no 336, c'est la disposition par laquelle la cour de cassation semble faire dépendre la paraphernalité des biens non expressément constitués en dot, de cette circonstance qu'il y a une constitution particulière de dotalité. D'où l'on pourrait conclure, que cette circonstance ne se rencontrant pas, les biens de la femme, d'après l'opinion suivie par la cour de cassation dans cet arrêt, devraient être considérés comme dotaux.

3201. L'art. 1574 c. civ., en disposant que les biens de la femme qui n'ont pas été constitués en dot, sont paraphernaux, rapproché de l'art. 1542, qui ne répute dotaux, lors même que la constitution embrasse tous les biens de la femme, que les biens présents, a mis ce principe hors de contestation dans notre droit moderne (V. en ce sens MM. Tessier, t. 1, p. 32; Duranton, t. 15, p. 371; Zachariæ, t. 3, p. 567). - Il a été décidé, en ce sens : 1° que la femme qui, par son contrat de mariage, a apporté en dot des valeurs mobilières, n'est pas fondée à soutenir que les immeubles qu'elle a recueillis dans la succession de ses parents sont dotaux, et, par suite, qu'ils ne peuvent être saisis│tification, par le mari, d'un remploi solide, encore bien que cet (c. civ. 1554; Req. 15 mai 1822) (4); -2° Que la déclaration générale, faite par les époux, qu'ils entendent se marier sous le ré

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(1) (Lacase C. Latour.) — La Cour ; — Attendu que le contrat de mariage du 18 avril 1769, porte constitution dotale des biens de la succession paternelle qui fut fixée à 150,000 fr., mais avec cette convention que si la future recueillait au dela du montant de la dot constituée, elle en conserverait la libre disposition jusqu'à concurrence de 4,000 liv. de revenu: Attendu qu'il est constaté, en fait, que les biens recueillis de l'hérédité paternelle excédaient la somme de 150.000 liv., d'une valeur supérieure à celle de la métairie de Mignane qui faisait partie desdits biens; que d'après cela les juges ont pu légalement décider que cette métairie n'avait été frappee que d'une dotalité éventuelle, et qu'en effet elle avait cessé de faire partie des biens dotaux et était devenue libre entre les mains de la demanderesse par le fait de l'excédant de la constitution dotale; — Attendu qu'il est reconnu, en fait, que la demanderesse avait formellement approuvé l'aliénation, qu'elle avait été mise en possession de la dime donnée en échange de la métairie de Mignane; - Rejette.

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Du 3 fruct. an 43.-C. C., sect. req.-MM. Muraire, pr.-Rousseau, rap. (2) (Mourgue C. Laune.) - LA COUR ; — Attendu que la constitution dotale doit être restreinte aux objets pour lesquels elle est exprimée; Attendu que Louise Mourgue, dans son contrat de mariage du 29 août 1762, ne se constitua de son chef que les biens et droits qu'elle avait à cette époque, et dont partie furent nommément désignés; que la constitution qui lui fut faite par son père pour lui tenir lieu de légitimes paternelle et maternelle, ne peut s'étendre au supplément d'icelles qui formait un bien à venir, de même que l'augmentation de dot qui lui avait été faite pendant son mariage, et ne saurait imprimer un caractère de dotalité à un supplément incertain encore; - A mis l'appel à néant. Du 9 mars 1819.-C. de Nimes.-M. Espérandieu, pr. (3) (Henry C. Jacquet et cons.) — La Cour; Attendu que les filles Jouve, se mariant l'une en 1777, l'autre en 1785, et recevant une dot en argent, ont déclaré dans leurs contrats que ces sommes formaient la totalité de leur avoir, ce qui exclut toute prétention, de leur part, sur le domaine de Chavagnac; que la portion de propriété qu'elles auraient pu avoir alors ou acquérir depuis, auraient été pour elles un bien paraphernal, puisqu'il ne serait pas entré dans les constitutions de dot; qu'à ces titres, elles en auraient pu disposer sans l'autorisation de leurs maris, d'après la coutume d'Auvergne, dans le ressort de laquelle le domaine est situé; d'où il suit que la cession qu'elles en ont faite personnellement en l'an 6 au prix de 500 fr., était valable; qu'au surplus, l'arrêt, en déclarant que la cession n'avait été attaquée eu aucun temps utile par les voies légales, a suffisamment motivé le rejet des demandes par fin de nonrecevoir, et n'a violé aucune loi; - Rejette.

Du 7 décembre 1830.-C. C., ch. req.-MM. Favard, pr.-Hua, rap.Lebeau, av. gén., c. conf.- Garnier, av.

(4) (Poustis C. Darrié.)-LA COUR ;- Attendu que l'arrêt juge d'après le contrat de mariage de la dame Poustis qu'il ne lui avait été constitué en dot que des objets mobiliers; d'où suit que les immeubles saisis,

3202. Dans le même sens, on a jugé : 1o que la simple déclaration qu'on entend se marier sous le régime dotal, ne suffit pas pour frapper de dotalité les biens futurs de la femme, autres que ceux spécialement constitués en dot, et les objets acquis de ces biens; qu'en conséquence, l'acquéreur d'un immeuble vendu par les époux, ne peut se refuser de payer son prix, jusqu'à jus

immeuble aurait été acquis pour faire remploi de deniers échus à la femme par succession (Bordeaux, 20 janv. 1832) (6); ·

obvenus à la dame Poustis après le décès de ses père et mère, ne pouvaient être réputés dotaux; Rejette. Du 15 mai 1822.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-De Gartempe, г. (5) (Meunier C. Samié.) LA COUR; Attendu que, d'après les principes de la matière, qui déclarait paraphernaux tous les biens qui ne sont pas constitués en dot, la déclaration générale, faite par les époux qu'ils entendent se marier sous le régime dotal, ne pouvait pas suffire à elle seule pour dotaliser tous les biens apportés par la femme en mariage, lorsque cette déclaration générale était suivie d'une constitution particuEt que la cour royaie, en jugeant que cette constitution spéciale était restrictive de la première déclaration, n'a fait qu'interpréter le contrat de mariage, et user ainsi d un droit qui lui appartenait;-Rejette le pourvoi contre l'arrêt de la cour de Limoges, du 4 août 1828.

lière de dotalité du mobilier;

Du 9 juin 1829.-C. C., cb. req.-MM. Favard, pr.-Chauveau-Lagarde, rap.-Laplagne, av. gén., c. conf.-Blanc, av.

(6) Espèce :-(Durand C. Lassou.)- En 1815, Anne Guilhem épouse le sieur Lassou; le contrat porte que les époux déclarent se marier sous le régime dotal. La future se constitne en dot des effets mobiliers estimés 800 fr. Depuis, la dame Lassou recueille diverses sommes dans les successions de ses père et mère; elle acquiert ensuite, avec son mari, une maison pour, suivant les termes de l'acte, faire emploi des deniers provenant des successions. En 1824, les époux Lassou vendent cette maison à Durand; celui-ci refuse de payer son prix, tant qu Lassou n'aura pas offert un bon et valable remplacement; il prétend que tous les biens de la dame Lassou, mariée sous le régime dotal, sont dotaux; que la maison vendue a ce caractère, et qu'il est tenu de surveiller le remploi du prix.-Les époux Lassou répondent qu'il n'y a de dotaux que les biens expressément constitués en dot; que, dans l'espèce, on ne peut considérer comme tels que les effets énoncés dans le contrat de mariage: constitution spéciale qui exclut tous autres biens, et principalement l'immeuble vendu à Durand, puisque c'est pendant le mariage seulement que la dame Lassou a recueilli les sommes dont partie avait servi à l'acquisition de l'immeuble. Le tribunal de Libourne condamne Durand à verser son prix.-Appel. Arrêt.

LA COUR; Attendu que la déclaration que les époux Lassou ont faite d'une manière générale, dans leur contrat de mariage, qu'ils entendaient se marier sous le régime dotal, est sans influence quant aux biens par eux vendus à Étienne Durand; qu'en effet, ces biens n'ayant jamais été la propriété personnelle d'Anne Guilhem, épouse Lassou, ne peuvent lui avoir été constitués en dot; - Attendu qu'ils ne forment pas non plus des immeubles acquis des deniers dotaux, en vertu d'une stipulation qu'aurait pu renfermer le contrat de mariage des époux Lassou; -Attendu, en fait, que, le 5 janv. 1818, la vente de ces mêmes biens fut consentie par la veuve Jeanneau aux époux Lassou; que cet acte de mutation remis à Durand, comme titre de propriété, énonce qu'il « a eu lieu pour

2° Que lorsqu'une femme s'est constitué en dot une somme qui lui a été donnée par son père, si celui-ci vient à lui donner, pendant le mariage, une seconde somme pour supplément de sa légitime, ce supplément ne sera point dotal (Pau, 24 mai 1833)(1); — 3° Que la déclaration faite par la femme, qu'elle se constitue en dot une certaine somme et des effets mobiliers, laisse en dehors de la dotalité les immeubles et les biens à venir (Limoges, 11 nov. 1846, aff. Boisselat, D. P. 47. 4. 174).

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3203. Outre la constitution résultant de l'emploi, dans le contrat de mariage, de termes équivalents, il existe encore une sorte de constitution implicite spécialement prévue par le législateur dans l'art. 1541 du code, c'est celle qui résulte de la donation faite au contrat de mariage. Il en était de même dans ›’ancienne jurisprudence (V. no 3187). — Par cela même, en effet, qu'une donation est faite en contrat de mariage, elle est censée l'être pour supporter les charges qui naissent du mariage. Quasi nuptiarum sola mentio, comme le disait le président Favre (Cod. liv. 5, tit. 7, déf. 18), faciliùs inducat, ut qui mulieri donavit, de dote constituendâ cogitasse videatur. Il n'est pas nécessaire aujourd'hui, comme autrefois, d'après la jurisprudence de certains parlements des pays du droit écrit, qu'il soit dit dans le contrat de mariage que la donation a été faite en faveur et contemplation du mariage ou pour en supporter les charges, il suffit qu'elle ait été faite en contrat de mariage, « tout ce qui est donné à la femme en contrat de mariage, porte l'art. 1541, est dotal, s'il n'y a stipulation contraire » (V. MM. Tessier, t. 1, p. 15 et suiy.; Duranton, t. 15, no 334; Troplong, n°5052). Sont dotaux, par suite, quels qu'ils soient, présents ou à venir, objet déterminé ou quote-part, tous les biens compris dans la donation (V. MM. Rodière et Pont, t. 2, no 380).

faire emploi des deniers provenant en partie de la vente d'un domaine que les époux Lassou ont consentie à Gagneau, suivant acte du 2 déc. 1817, lequel domaine avait été acquis par eux, et payé en partie de deniers appartenant à Anne Guilbem, épouse Lassou, qui les avait reçus de son frère, pour prix d'une cession de biens souscrite en 1816; » Que de cette reconnaissance qui vient d'être faite de l'origine des biens que Durand a acquis, il suit qu'ils ne sont point empreints de dotalité; que l'acquéreur ne court, sous ce rapport, aucun danger d'éviction; Met au néant l'appel, etc.

Du 20 janv. 1832.-C. de Bordeaux.-M. Poumayrol, pr.

(1) Espece:- (Lacabanne C. Hubert.)-En 1793, mariage de Jeanne Lacabanne avec Jouviron. Son père lui promet 1,500 fr. pour support des charges du ménage. Jouviron reconnaît, par acte public, avoir reçu cette somme du constituant ou de ses héritiers, et en outre 700 fr., pour supplément de légitime. Il contracte des dettes. Il en fait souscrire à sa femme une solidaire de 2,000 fr. Ses biens sont expropriés; sa femme, séparée de biens, est colloquée pour 2,232 fr., montant de la dot de 1,500 fr., du supplément de 700 fr. et des frais. Cette somme est saisie-arrêtée par le porteur de la créance solidaire. Une discussion surgit alors, dans laquelle la femme Lacabanne soutient que sa dot était inaliénable, que le supplément était lui-même dotal; enfin, que les intérêts de la dot en étaient un accessoire qui participait de sa nature; que, dès lors, la saisiearrêt était nulle, ayant pour cause le payement d'une obligation souscrite par la femme avant la séparation. Le créancier saisissant soutient, au contraire, que les 700 fr. n'étaient point dotaux, et qu'ils ne sont pas plus inaliénables que les intérêts de la dot. Jugement qui admet ces prétentions. Appel.- Arrét.

LA COUR; Attendu que la dot a pour objet le support des charges du ménage, que le fonds dotal est essentiellement inaliénable; qu'il est de principe que ce que la loi défend de faire d'une manière indirecte, ne peut pas être fait non plus par des moyens détournés; or, comme il ne paralt pas de l'acte d'emprunt dont il s'agit, que les sommes prêtées aient eu pour objet le support des charges du ménage, et que, si l'on pouvait, pour l'execution de cette obligation, saisir chaque année les intérêts de la dot, on les absorberait indéfiniment, et l'on rendrait, par là nécessaire et permise, en observant les formalités prescrites par la loi, l'aliénation de la dot; qu'ainsi on ne saurait autoriser la saisie de ces intérêts, sans tromper le vœu du législateur et violer indirectement les principes conservateurs des dots que la loi a consacrés; d'où il suit qu'il y a lieu à réformer le jugement en ce qu'il a validé la saisie et autorisé le prélèvement des intérêts de 1,500 fr. dont il s'agit; — Déclare avoir été mal jugé en ce que le jugement a validé la saisie-arrêt dont il s'agit pour les intérêts de la dot de 1,500 fr.; procédant par nouveau sur ce chef, annule la saisie quant à ce, maintient le jugement pour le sarpias.

Du 24 mai 1855.-C. de Pau.-MM. Charrite, pr. (2) Espèce:-(Lepaysant Ç. Brard-Duclos.) En 1779, la dame Le

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Il en est de même des biens que le donateur laissera à son décès. L'institution contractuelle n'est, en effet, qu'une donation par contrat de mariage, comprise dans l'art. 1541, et, dès lors, les biens qu'elle embrasse, et que la femme recueille durante matrimonio, doivent être réputés dotaux.-V. MM. Tessier, t. 1, p. 20 et suiv.; Troplong, no 3033.

3204. En ce sens, on a décidé, que la clause d'un contrat de mariage portant, après adoption du régime dotal, que la future se réserve ses biens paraphernaux pour en disposer en propriété et revenus, est applicable, non point aux biens constitués à celle-ci par son père pour subvenir aux charges du mariage, mais seulement à ses propres qu'elle n'a pas déclarés dotaux ; que par suite, est nulle la subrogation faite par la femme à l'hypothèque légale qui garantit les biens que son père lui a constitués (Bordeaux, 6 juin 1848, aff. Tessandier, D. P. 51. 2. 152). — Jugé, sous l'empire de l'ancien droit, que la dotalité résulte encore de la promesse faite à la future par sa mère, en contrat de mariage, de lui garder sa succession immobilière; qu'ainsi la femme normande à qui sa mère, en la mariant, a fait une telle promesse, peut revendiquer un immeuble vendu par celle-ci, quoiqu'elle ait accepté sa succession mobilière, en vertu de la procuration de son mari: il importe peu que l'aliénation faite par la mère soit antérieure au contrat de mariage de la fille, si cette aliénation a eu lieu sans l'autorisation du mari ou de la justice, et si la ratification que la mère en a faite depuis son veuvage est postérieure au contrat de mariage qui contient promesse de garder succession immobilière (Rej. 11 mai 1824) (2).

3205. Il importe peu que la donation et l'institution contractuelle soient accompagnées d'une constitution spéciale de certains biens faite par la femme, ou d'une donation particulière

reculey, séparée de corps et de biens d'avec son mari, vendit, sans autorisation ni de celui-ci ni de la justice, le domaine de la Jouberie au sieur Lepaysant. — Le 9 avril 1785, les sieurs et dame Lereculey marièrent leur fille au sieur Brard-Duclos, et, dans son contrat de mariage, ils promirent de lui garder leurs successions immobilières. Le 13 avril suivant, décès du sieur Lereculey.-Le 20 du même mois, sa veuve ratifia la vente qu'elle avait faite au sieur Lepaysant; mais cette ratification ne pouvait évidemment porter atteinte aux droits résultant de la promesse des sieurs et dame Lereculey de garder leurs successions immobilières à leur fille.Le 5 mai 1816, décès de la veuve Lereculey. La dame Brard-Duclos, en vertu d'une procuration notariée de son mari, du 14 mai 1816, recueillit au nom de ce dernier le mobilier de la succession de sa mère, et le vendit pour acquitter des loyers. En 1817, Brard-Duclos décéda. En 1818, sa veuve assigna les héritiers Lepaysant en nullité de la vente consentie par sa mère et de sa ratification du 20 avril; et, par acte du 18 janv. 1819, elle renonça à la succession de sa mère. Jugement qui déclara la veuve Brard - Duclos non recevable dans sa demande, par le motif que la ratification avait couvert la nullité, et que la veuve BrardDuclos ayant accepté l'hérédité de sa mère, avait renoncé aux effets de la promesse de garder la succession. Sur l'appel, la cour de Caen, par arrêt du 20 fév. 1822, déclare nul le contrat de vente et maintient la veuve Brard-Duclos dans la propriété du domaine de la Jouberie.

Pourvoi des héritiers Lepaysant, pour violation de l'art. 244 de la coutume des Normandie, des art. 1085 c. civ. et 17 de l'ordon. de 1731, en ce que la cour royale avait admis l'action révocatoire de la veuve BrardDuclos, quoique cette veuve eût accepté la succession de sa mère et se fût ensuite rendu personnelles les obligations de celle-ci; ils invoquaient la règle quem de evictione tenet actio, eumdem agentem repellit exceptio. — Arrêt (ap. délib. en la ch. du cons.).

LA COUR; - Attendu que la validité de la promesse de garder succession, faite à la dame Duclos dans son contrat de mariage du 9 avril 1785, n'était pas subordonnée à d'autre condition que celle de sa survie; que, par le décès de la dame sa mère, la dame buclos a été saisie, avec effet rétroactif audit jour 9 avril 1785, de tous les biens et droits immobiliers compris dans la promesse de garder, et spécialement, ainsi que l'arrêt l'a reconnu, du droit de faire révoquer la vente faite au sieur Lepaysant le 24 sept. 1779; que ce droit a eu, à compter dudit jour 9 avril 1785, et par conséquent longtemps avant la renonciation faite par la dame Duclos à la succession de sa mère, le caractère d'un bien dotal avec tous les priviléges d'inaliénabilité que la coutume accorde à ces sortes de biens; que de là il suit qu'en jugeant que la dame Duclos était, nonobstant l'adition de l'hérédité de sa mère par elle faite en vertu de la procuration de son mari, recevable à exercer contre les demandeurs l'action révocatoire de la vente du 24 sept. 1779, sauf leur recours sur les biens non dotaux appartenant à la dame Duclos, la cour royale a fait une juste application de l'art. 244 de la coutume de Normandie; Rejette.

Du 11 mai 1824.-C. C., sect. civ.-MM. Brisson, pr.-Poriquet, rap.

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faite par le donateur ou l'instituant, elles n'en sont pas moins des donations faites en contrat de mariage, et les biens, quels qu'ils soient, qu'elles embrassent, sont dotaux, sauf un seul cas, celui où il y a stipulation contraire (art. 1541), c'est-à-dire clause expresse qui les déclare paraphernaux. La constitution ou la donation particulière ne saurait avoir cet effet (V. MM. Tessier, t. 1, p. 24, et Troplong, nos 3034, 3035). — Décidé, en ce sens, que lorsque, dans un contrat de mariage, la femme se constitue d'abord ses droits maternels et qu'à la suite de cette constitution se trouvent les mots de plus précédant une donation faite en faveur de la future épouse, pour soutenir les charges du mariage, ces mots de plus annoncent que ce qui va suivre est de la même nature que ce qui précède; et par suite, sont dotaux les biens compris dans la donation; alors surtout que la femme donnait procuration à son mari pour vendre les biens donnés (Agen, 4 uill. 1810, M. Lacuée, 1er pr., aff. Villes C. dame Descayrac). 3206. Est assimilée à la donation et à l'institution contractuelle la promesse de donner faite dans le contrat de mariage, en ce sens qu'elle rend dotaux les biens qu'elle comprend. Dans ce cas, en effet, promesse de donner ou d'instituer vaut donation ou institution (V. M. Tessier, t. 1, p. 26, 27 et les auteurs anciens par lui cités dans la note 42, V. aussi M. Troplong, n° 3036). N'est point contraire à cette opinion un arrêt de la cour de cassation qui décide que l'intention manifestée ou la promesse faite par un père dans une lettre à sa femme, de constituer une dot à leur fille, peut n'être considérée que comme un simple projet, alors, d'ailleurs, que lors du mariage de celle-ci, pour lequel on s'est dispensé du consentement du père éloigné de France, il n'a pas été dressé de contrat de mariage,... sans que cette décision tombe sous la censure de la cour de cassation (c. civ. 204, 1134);... Et que le moyen tiré de l'exécution volontaire de cette promesse de dot, par le payement des intérêts pendant plusieurs années, même après le retour du père en France, De peut être proposé pour la première fois en cassation (Req. 19 déc. 1842) (1).—Dans l'espèce, il s'agissait, en effet, non d'une promesse faile au contrat de mariage, mais d'une simple promesse par lettre missive, dont la valeur est appréciée d'après les circonstances et qui ne touche pas à notre question.

On doit encore assimiler à une institution contractuelle, la promesse d'égalité faite à la femme dans son contrat de mariage; cette promesse équivaut, selon M. Tessier, à une institution pour une portion égale à celle des autres enfants existants au décès du disposant. V. M. Tessier, t. 1, p. 28, V. aussi MM. Rodière et Pont. t. 2, no 282, et vo Disp. entre-vifs. 3207. Doit on considérer comme dotaux tous les biens donnés en contrat de mariage, quel qu'en soit le donateur? La loi ne

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(1) Espèce:-(Carlier C. Pecquet.) Le sieur Carlier avait demandé en mariage la demoiselle Pecquet, en l'absence du sieur Pecquet, son père, alors à la Nouvelle-Orléans. La dame Pecquet, chargée des pouvoirs de son mari, promit une dot de 150 000 fr., et il résulterait de plusieurs lettres du père, produites au procès, que cette promesse avait reçu l'agrément de celui-ci, et qu'il se proposait de la remplir. Ainsi, dans l'une de ces lettres, M. Pecquet écrivait à sa femme : « Tu pourras lui donner (à sa fille) jusqu'à 150,000 fr. de dot, en lui servant la rente à raison de 5 p. 100, etc.»- - Dans une autre : «M. d'Hermosa me dit que tu as promis 150,000 fr.; tu aurais pu décliner, mais je n'ai rien à dire là-dessus, je tiendrai ma parole. » Le mariage fut célébré sans production d'acte de consentement du sieur Pecquet père, auquel il fut suppléé par un certificat du consul de la Louisiane à Paris, portant que le sieur Pecquet était citoyen des États-Unis, et qu'il n'était pas besoin à la Louisiane du consentement des parents pour la validité du mariage d'enfants majeurs. A défaut de pouvoirs suffisants du père, aucun contrat ne fut dressé. Après le mariage, les époux Carlier habitèrent chez la dame Pecquet, et il paralt que pendant tout ce temps, ainsi que depuis le retour en France du sieur Pecquet père, les intérêts de la dot leur furent exactement servis. Cependant, des difficultés s'élevèrent entre le sieur Carlier et son beau-père; les époux Carlier prirent un logement séparé, et le sieur Pecquet fut cité en payement de 150,000 fr.. montant de la constitution de dot, telle qu'elle résultait de la promesse faite par la dame Pecquet, lors de l'absence de son mari, et renouvelée dans les lettres de celui-ci. Un jugement du tribunal de la Seine, du 19 mars 1841, rejeta "action du sieur Carlier par les motifs suivants :

«Attendu que la demande des sieur et dame d'Abaunza est fondée sur ce que le mariage par eux contracté l'aurait été sous la foi d'une promesse de constitution de dot de 150,000 fr.;- Mais attendu que l'obligation

fait pas de distinction: « tout ce que la femme se constitue ou qui lui est donné en contrat de mariage est dotal,» porte l'art. 1541. Il semblerait, dès lors, qu'on ne doit faire aucune distinction, et que les biens donnés à la femme par contrat de mariage, que ce soient des ascendants, des tiers étrangers ou le mari lui-même qui soient les donateurs, doivent être réputés dotaux. Pour les ascendants et les tiers, il ne saurait y avoir de difficulté; mais il n'en est pas de même lorsque c'est le mari qui, par contrat de mariage, donne à sa femme. Sans doute, une telle donation rentre dans les termes de l'art. 1541, mais il faut reconnaître qu'elle n'est pas dans son esprit. Quel est, en effet, le motif qui a fait réputer dotaux les biens donnés à la femme par contrat de mariage? C'est que de tels biens sont censés donnés pour supporter les charges du mariage et, par suite, constitués en dot. Peut-on, lorsque la donation émane du mari, admettre une pareille présomption? Quoi, le mari qui a et possède des biens, les donnerait à sa femme à titre de dot pour s'en assurer l'administration et la jouissance! Et si la donation est de biens présents et à venir, ils ne seraient jamais possédés à titre de dot, puisqu'ils ne deviendraient biens de la femme, et comme tels susceptibles d'être dotaux, qu'au cas de survie de la donataire, c'est-à-dire qu'à la mort du mari, ou à la dissolution du mariage, alors qu'il n'y aurait plus de dot possible. Cette donation peut bien d'ailleurs avoir eu pour cause le mariage, mais elle n'est pas, à proprement parler, en faveur du mariage, en faveur des époux et de leur famille future; et ce qui le prouve, c'est que, à la différence des donations faites en faveur du mariage, elle n'est point transmissible aux enfants issus de ce mariage, en cas de décès de l'époux donataire ou de la femme, avant le mari donateur (art. 1093).—Cet article répond à l'argument de certains auteurs qui supposent qu'une telle donation peut être faite en faveur de la descendance future. Les objets donnés par contrat de mariage par le mari à la femme ne sont donc pas donnés en faveur de la famille, mais seulement en faveur de la femme et ils doivent, par suite, être réputés paraphernaux et non dotaux.-V. dans ce sens MM. Tessier, t. 1, p. 15, note 38; Odier, t. 3, no 1071; Troplong, no 3037.- En sens contraire, MM. Duranton, t. 15, no 334; Rodière et Pont, t. 2, no 380.

3208. A plus forte raison, le gain de survie constitué par le mari à la femme, par contrat de mariage, ne fait il pas partie de la dot. Il n'échoit, en effet, à la femme qu'au décès du mari, et par suite à une époque où il ne peut plus servir à supporter les charges du ménage, ce qui fait le caractère essentiel de la dot.-Décidé, en ce sens, qu'un gain de survie constitué par contrat de mariage à la femme mariée sous le régime dotal, est aliénable et saisissable durant le mariage (Aix, 19 janv. 1844) (2). -Jugé encore que le gain de survie fait par un mari à sa femme

de cette dot ne pourrait résulter que d'une promesse absolue et sans condition, émanée, soit du sieur Pecquet, soit de la femme, et en vertu des pouvoirs donnés à celle-ci; - Attendu, quant à la promesse faite directement par Pecquet, qu'elle ne constitue que la simple manifestation des intentions du père de famille, subordonnée, quant à la réalisation, aux conditions qu'il eût pu exiger dans le contrat réglant les conditions civiles du mariage; Attendu, quant à la promesse qui a pu être faite par la dame Pecquet, que cette promesse ne peut avoir aucun caractère définitif, puisqu'elle n'a pas cru pouvoir, en conséquence de cette promesse, faire rédiger un contrat de mariage, sans outre-passer le mandat à elle donné; d'où il suit que, si les sieur et dame Pecquet peuvent être liés dans le for intérieur, ils ne sont néanmoins tenus par aucune obligation qui puisse servir de base à une action civile. »Sur l'appel, arrêt confirmatif de la cour de Paris du 10 juin 1841, avec adoption de motifs. Pourvoi du sieur Carlier, pour violation des art. 1134 et 1338 c. civ.- Arrêt.

LA COUR ;- Sur le premier moyen: -Attendu que la cour royale, après avoir apprécié, comme elle en avait le droit, les aits et les documents de la cause, a déclaré qu'il n'en résulte pas que les époux Pecquet se soient engagés, par une convention obligatoire, à constituer une dot à leur fille; d'où il suit que sa décision, uniquement basée sur une appréciation de faits non sujette à contrôle, n'a pu violer la disposition de l'art. 1134 c. civ.; Sur le second moyen :-Attendu qu'il n'a pas été produit devant la cour royale, et qu'il ne saurait être utilement présenté, pour la première fois, devant la cour de cassation; -Rejette, etc.

Du 19 déc. 1842.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Mesnard, rap.Delangle, av. gén., c. conf.-Piet, av.

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(2) (Veuve Camet C. demoiselle Magnard.) LA COUR; -Considérant qu'aux termes de l'art. 1540 c. civ., lá dot est le bien que la femme apporte au mari pour supporter les charges du mariage; -Con

mariée sous le régime dotal, ne fait pas partie de la dot et ne saurait, sans une stipulation expresse à cet égard, participer à son inaliénabilité (Limoges, 15 juill. 1850, aff. Dubayle, D. P. 51. 5. 185).

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3209. Ne doit-on pas au moins réputer dotaux les biens donnés par le mari à la femme en contrat de mariage, lorsque la constitution dotale embrasse tous les biens présents et à venir de la femme ? Dans ce cas, les biens donnés sont dotaux, non en vertu de la donation, mais comme tous les autres biens appartenant à la femme lors du mariage, ou acquis depuis par elle à un titre quelconque, en vertu de la constitution générale dans laquelle ils sont compris. Aussi plusieurs des auteurs qui repoussent la dotalité des biens donnés par le mari, résultant de la donation seule, l'admettent-ils dans notre hypothèse (V., en ce sens, MM. Tessier, t. 1, p. 16, note 38, et Odier, t. 3, no 1071). Mais M. Troplong, no 3039, dans ce cas-là même, n'admet pas la dotalité des biens donnés par le mari, et voici la raison qu'il énonce :—« La stipulation de dotalité de tous les biens présents et à venir ne saurait évidemment comprendre que les biens autres que ceux qui, par le contrat de mariage, ont le caractère de paraphernaux. - Il est bien vrai, en adoptant l'opinion que nous avons suivie, que les biens donnés par le mari à la femme be sont pas dotaux et, par suite, sont paraphernaux, mais uniquement par cette raison qu'ils ne sont pas constitués en dot, qu'ils ne peuvent être censés apportés pour soutenir les charges du mariage. Néanmoins, devant la volonté expresse de la femme, qui déclare apporter ou confier au mari, à titre de dot, tous ses biens d'où qu'ils proviennent; qui déclare implicitement ne vouloir rien se réserver en paraphernal, il nous paraît difficile de lui réserver, en quelque sorte malgré elle et contrairement à sa volonté expresse, les biens donnés par le mari, par cela seul qu'ils auront été donnés par contrat de mariage; car, dans l'espèce, s'ils eussent été donnés pendant le mariage, nul doute qu'ils fussent dotaux. Ce qu'ajoute le savant magistrat : « Il y a exception pour les biens qui, par la destination que leur donne le contrat de mariage, ne sont pas biens dotaux, ne sont pas apportés au mari, et sont nécessairement et virtuellement exceptés,» ne nous paraît pas plus concluant; car dire que les biens donnés par le mari, à raison de la destination que leur donne le contrat, ne sont pas dotaux, c'est affirmer précisément ce qui est en question, ces biens, s'ils ne reçoivent pas cette destination de la donation, la recevant de la clause qui contient la constitution générale.

3210. En Navarre, outre la dot apportée par la femme au mari, il y avait aussi une dot apportée par le mari aux parents de la femme, et qui lui était constituée par ses parents ou par son frère, chargé comme on sait, sous l'empire du droit féodal, de doter ses frères et sœurs cadets. En récompense de cette dot, le mari avait un droit de coseigneurie sur tous les biens et possessions patrimoniaux et avitins de la femme (cout. de Navarre, rub. 24, art. 8). Ces biens étaient ce que l'on nommait vincles, ou engagés. Mais étaient-ils dotaux et inaliénables, lorsqu'ils étaient compris dans une institution d'héritiers faite au profit de la fille même en faveur et contemplation de mariage? Telle est la question qu'avait à juger la cour de Paris et qu'elle a résolue négativement, en se fondant sur la disposition de la coutume de Navarre qui permettait aux époux d'user et de disposer de moitié de ces biens, en leurs nécessités, comme vrais maîtres et seigneurs, mais contrairement au jugement du tribunal de la Seine dont était appel. Elle a jugé, en conséquence, que sous l'empire de la coutume de Navarre, et malgré l'influence du droit écrit dans cette province, sidérant que la délivrance de la chose ou le payement de la somme qui fait l'objet d'un gain de survie, ne peut avoir lieu au profit de la femme, qu'après la dissolution du mariage arrivée par suite du décès du mari; que le gain de survie ne peut donc jamais être apporté par la femme au mari, pour supporter les charges du mariage, d'où il suit qu'une donation de cette espèce ne saurait être considérée comme faisant partie de la constitution dotale; - Par ces motifs; - Met l'appellation au néant, ordonne que ce dont est appel sortira son plein et entier effet, condamne l'appelante à l'amende et aux dépens.

Du 19 janv. 1844.-C. d'Aix, 1′′ ch.-M. Lerouge, pr.

(1) Espèce: (Favrat C. Benit.)- En l'an 8, contrat de mariage de Castelbourg et de Marie Favrat.—Aucune dot n'est constituée, cependant le pere promet verbalement de lui en donner une. - Le 6 mars 1807, en

lorsque la femme se mariait sans constitution de dot, et qu'au contraire la dot était apportée par le mari à la femme héritière présomptive de ses père et mère, avec stipulation au profit du mari du droit de coseigneurie sur les biens patrimoniaux de la femme, les biens recueillis par les époux n'étaient pas frappés de dotalité, et, par suite restaient aliénables (Paris, 11 mai 1843, M. de Chanteloup, pr., aff. Caisse hypothécaire C. Delyne).

3211. Sous l'empire du droit romain et de la jurisprudence des pays de droit écrit, la dot pouvait être constituée et augmentée pendant le mariage. Aujourd'hui, comme nous l'avons déjà fait observer, d'autres principes se trouvent consacrés sur ce point. D'après les art. 1394 et 1395, les conventions matrimoniales doivent être rédigées avant le mariage et ne peuvent recevoir aucun changement après la célébration: le législateur a mis la règle relative à la constitution de dot en harmonie avec les dispositions générales, en décidant, par l'art. 1543, que « la dot ne peut être constituée ni même augmentée pendant le mariage.»> La dot doit donc être constituée expressément ou implicitement dans le contrat de mariage (art. 1541), et antérieurement à la célébration du mariage; si elle lui était postérieure, elle serait non avenue. Il en serait de même, aux termes de l'art. 1543, de toute augmentation. Nous avons déjà donné les motifs de cette disposition, no 3190. Mais, comme on le voit, la dernière partie de l'article, qui prohibe l'augmentation de la dot, ne doit pas être entendue en ce sens que l'étendue de la fortune dotale de la femme ne puisse s'agrandir après le mariage. Ce serait mettre l'art. 1543 en contradiction avec l'art. 1542, qui permet la constitution des biens à venir. L'art. 1543 doit être interprété en ce sens qu'on ne peut, par une convention postérieure au mariage, étendre la dotalité à des biens qui, d'après le contrat de mariage, devraient être paraphernaux (V. MM. Duranton, l. 15, no358; Rolland de Villargues, 6, 150, no 34; Tessier, t. 1, p. 43 et suiv.; Troplong, no 3057,3058).-Et il importerait peu que la dot fût augmentée par la femme elle-même ou par des tiers: la règle est générale et absolue. Un donateur peut bien mettre à sa donation telle condition qu'il lui plaît, mais cette condition ne doit pas être contraire aux lois; sinon elle est réputée non écrite (c. civ., art. 900). Or, la condition de dotalité qui serait mise à une donation faite à la femme pendant le mariage, et qui aurait pour effet d'augmenter la dot pendant le mariage en réputant dotaux des biens non compris dans la constitution dotale, serait évidemment contraire à la loi (art. 1543).—« Il n'y a, comme le remarque M. Troplong, que le contrat de mariage qui puisse faire une dot. »-C'est en ce sens que se prononcent la plupart des auteurs (Conf.MM.Tessier, t. 1, p. 47; Merlin, Rép., vo Dot, § 2, n° 14; Toullier, t. 14, no 63; Duranton, t. 15, no 359, Odier, t. 3, no 1098; Bellot des Minières, t. 4, p. 37; Benoît, t. 1, no 29; Zachariæ, t. 3, p. 567; Troplong, no 3058).-M. Seriziat, no 25, tout en reconnaissant, avec les auteurs qui précèdent, l'invalidité d'une pareille clause quant à la dotalité des biens donnés, veut néanmoins qu'on l'interprète en ce sens que le donateur a eu l'intention de transmettre à la femme la propriété de la chose, faire profiter le mari de l'usfruit, enfin frapper d'inaliénabilité l'objet de la donation, et la maintenir comme telle.-Il a été jugé, contrairement à l'opinion qui précède, que, bien que la constitution de dot doive être faite avant le mariage, cependant elle est valable lorsqu'elle a lieu pendant le mariage, si elle est l'exécution d'une promesse faite à cette époque (Req. 24 juin 1813)(1). Mais il importe de remarquer que la promesse faite dans le

vertu de cette promesse, une dot de 16,000 fr. est faite par le sieur Favrat; il paye 4,000 fr., le surplus est payable dans un an. - Le sieur Castelbourg cède les 12,000 fr. restant au sieur Benit et à l'échéance réclame cette somme du sieur Favrat. Opposition de ce dernier, il soutient qu'il n'a pu pendant le mariage constituer une dot à sa fille et que l'acte en est nul. Le sieur Benit oppose que cet acte se rattache à une promesse abtérieure au code civil, et qu'elle a eu lieu pendant le mariage, parce que le sieur Castelbourg, avait été obligé de rejoindre précipitamment les drapeaux.-Jugement, et sur appel, arrêt de la cour de Lyon du 23 août 1812, qui déclare valable l'acte du 6 mars 1807; - Pourvoi. — Arrêt. LA COUR; - Attendu que la constitution de dot dont il s'agit n'est autre chose que l'exécution d'une promesse permise à l'époque où elle a été faite; Rejette.

Du 24 juin 1813.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Vallée, rap.

contrat de mariage l'avait été à une époque où la constitution de dot pendant le mariage était permise.

3212. Mais si le donateur ne peut pas rendre dotaux des biens non compris dans la constitution de dot, peut-il au moins attribuer à l'objet donné quelqu'une des qualités des biens dotaux? Ainsi pourrait il faire un don à la femme en attribuant au mari l'administration et l'usufruit de la chose donnée? Sans contredit il le pourrait aucune disposition légale ne s'y oppose.V. en ce sens Zachariæ, t. 3, p. 567, in fine.

3213. Ainsi encore le donateur pourrait-il apposer à la donation faite pendant le mariage la condition que les biens Jonnés seraient inaliénables? Une telle clause serait-elle vaiable et quel sens faudrait-il y atlacher? Il n'y a pas que les biens dotaux, sous le régime dotal, nous l'avons déjà dit, qui puissent être frappés d'inaliénabilité; cette inaliénabilité peut être stipulée sous tout autre régime (V. n° 180); et pourquoi dès lors un tiers donateur ne pourrait-il pas mettre à sa donation la condition d'inaliénabilité des biens donnés pendant le mariage? Aucune disposition légale ne le défend, la partie de l'art. 138 du projet de code civil, laquelle déclarait nulle toute convention pareille, ayant été retranchée de ce dernier article qui a formé depuis l'art. 1535. Telle est l'opinion de MM. Duranton, t. 15, no 360; Odier, t. 3, no 1100, et Seriziat, no 25. Outre l'absence de toute prohibition à ce sujet dans notre code, on invoque, en faveur de cette opinion, les lois romaines qui permettaient de mettre la condition d'inaliénabilité aux donations comme aux contrats (V. L. 7, C., De reb. alien. non alienandis), et l'on ajoute cette considération que, au moyen d'ine pareille clause, les tiers ne pourront être trompés; car elle sera inscrite dans le titre même en vertu duquel la femme est propriétaire, titre qu'ils devront toujours se faire représenter (V. M. Duranton, ubi suprà).-M. Troplong, qui repousse, comme nous l'avons déjà dit, la clause d'inaliénabilité appliquée aux biens des époux sous tout autre régime que le régime dotal, ne l'admet pas non plus sous ce dernier régime pour les biens autres que ceux constitués en dot. Il écarte d'abord l'autorité des lois romaines par cette considération que les substitutions fidéicommissaires étant admises en droit romain, les prohibitions d'aliéner l'étaient à plus forte raison. Puis M. Troplong explique la disposition de ces mêmes lois romaines en disant que, dans un grand nombre de cas, le donateur pouvait avoir intérêt à ce que les choses données ne fussent pas aliénées; et, dans ces mêmes cas, il admet la validité de la clause d'inaliénabilité en droit français, dans l'intérêt et en faveur du donateur seul.-De là, passant aux stipulations d'ina liénabilité faites au profit de la future par un tiers dans le contrat de mariage, il continue en ces termes : « Et remarquez que si la condition de ne pas aliéner est imposée en contrat de ma. riage par un donateur à une fille qu'il dote, elle ne rendra pas l'immeuble dotal. Cet immeuble restera paraphernal, puisque la femme en aura la jouissance, et qu'il ne sera pas donné au mari pour soutenir les charges du ménage » (no 3059). Ainsi, d'après cette opinion, qui, du reste, n'est pas celle qu'on a posée en commençant ce numéro et qu'on ne relève ici que parce qu'une erreur pourrait se propager à la faveur du nom célèbre de son auteur; d'après cette opinion, disons-nous, ne serait pas dotal l'immeuble donné en contrat de mariage, lorsque le donateur aura imposé par le même contrat à une fille qu'il dote la condition de ne pas aliéner, et un tel immeuble serait paraphernal! Mais que devient alors l'art. 1541 qui répute dotal de plein droit tout ce qui est donné à la femme en contrat de mariage? L'effet de la condition serait donc de dédotaliser ou de rendre non dotal ce qui l'est déjà. Si l'immeuble est donné par contrat de mariage à une personne qui a déclaré se marier sous le régime dotal, il est de plein droit dotal; et s'il est dotal, il est de plein droit inaliénable, sauf stipulation contraire. La clause d'inaliénabilité ne feralt, ce semble, que confirmer ce qui existe déjà. Aussi tous les auteurs qui se sont occupés de la question supposent-ils que la donation avec prohibition d'aliéner a eu lieu pendant le mariage, et non de la part de celui qui dote la future. - Mais revenons à la clause d'inaliénabilité insérée dans une libéralité faite à la femme pendant le mariage. Il est certain que l'inaliénabilité des biens n'est pas envisagée d'une manière assez favorable dans notre système de législation civile, pour qu'il soit

possible de la faire résulter d'une clause autre que celle insérée dans un contrat de mariage. C'est ce contrat qui est la loi de la | famille; c'est lui qui doit en régler les intérêts, et c'est pour cela qu'il est permis d'y déroger à certains principes, à certaines règles, en considération de ces intérêts. Mais à l'égard de la faculté de disposer et de la liberté des héritages, elle ne peut être nivelée que dans les cas taxativement prévus par la loi (V. nos 560 et vis Dispos. entre-vifs, Obligation, Propriété).—Toutefois, notre code permettant de stipuler pour autrui, lorsque telle est la condition d'une stipulation que l'on fait pour soi-même, ou d'une donation que l'on fait à un autre (art. 1121), et permettant également les substitutions fideicommissaires de la part de certaines personnes (les père et mère et les frères et sœurs) au profit des descendants jusqu'au deuxième degré exclusivement du donataire (art. 1048, 1049), par des dispositions entre-vifs ou testameniaires, il semble qu'il devrait être permis également aux mêmes personnes, de stipuler cette inaliénabilité dans leur intérêt ou dans celui de leur famille. On ne saurait dire évidemment qu'il n'y a pas intérêt pour eux dans ce cas, et que, par cette raison, la clause ne doit pas produire d'effet. Il en serait de même du cas où le donateur stipulerait qu'on ne pourra aliéner sans sa permission.

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3214. Si une telle clause n'est valable qu'en tant qu'elle est stipulée dans l'intérêt du donateur, l'intérêt étant la mesure des actions, c'est le donateur seul qui aura action pour faire rescinder l'aliénation qui aurait été faite au mépris d'une pareille clause. La femme qui a aliéné ne l'aurait pas, car elle n'a pas été introduite dans son intérêt, et supposé qu'elle l'eût été, elle aurait manqué, selon M. Troplong (V. no 3059, 3061, 3062), de lien de droit. Inutile d'examiner ici la question de savoir si, en droit romain, une telle clause donnait une simple condictio ou une actio rei persecutoria au donateur. Nous ferons seulement remarquer que, dans la loi 7, C., De alienis rebus non alien., Justinien assimile complétement la défense d'aliénation résultant d'une clause insérée dans un testament ou dans un contrat, à celle qui résulte de la loi, et leur donne les mêmes effets. Le code civil tranche la question, dans l'art. 954, en attribuant au donateur, dans le cas d'inexécution de la condition, l'action révocatoire, non-seulement contre le donataire, mais contre les tiers détenteurs des immeubles donnés; c'est ce que reconnaît M. Troplong lui-même (nos 3061, 3062).

3215. La règle de l'art. 1543, d'après laquelle la dot ne peut être augmentée pendant le mariage, s'opposerait-elle à ce que l'on pût comprendre dans la dot l'usufruit qui viendrait se réunir pendant le mariage à la nue propriété d'un fonds que la femme possédait et s'était constitué en se mariant? La loi 4, D., De jure dotium, décidait que cette accession de l'usufruit ne devait pas être considérée comme la constitution d'une nouvelle dot, mais comme une augmentation de l'immeuble dotal, semblable à celle qui se ferait par alluvion. Si proprietati nudæ in dotem datœ ususfructus accesserit, incrementum videtur dotis, non alia dos, quemadmodum si quid alluvione accesserit. Aujourd'hui la pleine propriété de l'immeuble devrait aussi être réputée dotale; car la femme qui se constitue une dot, manifeste la volonté d'apporter quelque chose à son mari pour supporter les charges du mariage; or quelles ressources le mari pourrait-il puiser pour l'entretien du ménage dans une nue propriété inaliénable? (V. MM. Benoit, t. 1, no 67; Rolland de Villargues, 6, 151, no 38; Proudhon, Usufruit, nos 1923, 2011 et 2683; Tessier, cod., nos 98 et suiv.; Zachariæ, t. 3, p. 568, no 2, in fine). Mais n'y aurait-il pas tout au moins à excepter le cas où l'usufruit finirait par la renonciation de l'usufruitier à son droit, et ne devrait-on pas considérer cette renonciation comme un moyen indirect d'augmenter la dot?

3216. La même décision ne saurait être adoptée non plus dans le cas inverse, c'est-à-dire lorsque la dot a consisté seulement dans l'usufruit d'un immeuble, et que la nue propriété de ce même immeuble vient à échoir à la femme pendant le mariage, à moins que les biens à venir n'aient été enveloppés par la constitution de dot. Dans cette hypothèse, la chose constituée par le contrat suffit pour remplir le vœu de la loi. On ne peut donc pas supposer la même intention aux époux,

8217. De même, les accroissements naturels survenus aux biens dotaux, tels que les alluvions, les accrues, ne doivent pas

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