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Zachariæ, t. 3, p. 565 et 566). Dans le doute, dit ce dernier auteur, les biens de la femme doivent être réputés paraphernaux (Conf. Riom, 19 août 1851, aff. Bouchard, D. P. 52. 2. 269; V. aussi MM. Rodière et Pont, t. 2, no 396; Troplong, n° 3028; mais, en sens contraire, V. MM. Bellot des Minières, t. 4, p. 451; Rolland de Villargues, no 30; Paris, 1er août 1825, aff. Rousseau, V. no 178).

3192. Le code civil, en exigeant une constitution de dot pour rendre dotaux les biens de la femme, ne dit pas néanmoins que cette constitution devra être expresse. Nulle part le législateur ne se sert de cette locution ou de toute autre équivalente, relativement aux diverses manières dont la dot peut être constituée. Il admet même formellement une constitution implicite dans l'art. 1541, puisqu'il répute dotal, comme nous le verrons bientôt, tout ce qui est donné à la femme en contrat de mariage, sans qu'il soit nécessaire que cela soit expressément constitué en dot. Aussi les auteurs sont-ils unanimes sur ce point que, pour rendre les biens dotaux lorsqu'il y a déjà soumission au régime dotal, une constitution expresse n'est pas nécessaire. V. en ce sens MM. Duranton, t. 15, uo 338; Tessier, t. 1, p. 11; Zachariæ, t. 3, p. 565; Odier, t. 3, no 1062; Rodière et Pont, t. 2, no 383; Troplong, no 3029.

3193. De là cette première conséquence que la constitution de dot, pour être valable, n'a pas besoin d'être faite dans des termes sacramentels; que les mots constitution et dot peuvent ne pas être employés, conformément à la loi 23, D., De jure dotium quia in stipulatione non est necessaria dotis adjectio, eliam in datione tantumdem ducimus, et dès lors qu'ils peuvent être remplacés par des équivalents (V. en ce sens M. Duranton, t. 15, no 538). Cet auteur admet, il est vrai, comme équivalant à la constitution de dot l'apport d'un immeuble qui serait fait par la femme au mari pour supporter les charges du mariage, ou l'apport en mariage; il ne saurait évidemment y avoir le moindre doute sur la valeur de pareilles clauses. Comment admettre, en effet, que la définition de la dot ne puisse remplacer le mot dot (Conf. MM. Troplong, no 3031; Zachariæ, t. 3, p. 566, Riom, 1er juin 1809, aff. Lacolombe).-V. aussi sur la seconde clause, et dans le même sens, Toullier, t. 14, p. 64; Tessier, 1. 1, p. 15. — Décidé, en ce sens, que les sommes apportées en mariage par la future forment, sous le régime dotal, par la seule absence de toute stipulation contraire, un apport dotal (Caen, 18 mai 1842, aff. Chevrel, no 3197).-Des auteurs pensent même qu'il suffirait de la déclaration, faite dans le contrat de mariage, par la femme, qu'elle apporte un objet au mari ou même qu'elle apporte un objet sans faire mention du mari, pour rendre dotal l'objet apporté (V. en ce sens MM. Rodière et Pont, t. 2, no 383). -Ainsi jugé que la clause d'un contrat de mariage portant que la future apporte au futur époux les droits indivis dans la succession de son père, tant mobiliers qu'immobiliers, après déclaration expresse qu'ils adoptent le régime dotal, équivaut à une constitution expresse de dot, les biens apportés au mari ne pouvant être, dans ce cas, considérés comme paraphernaux (Req. 16 août 1843) (1).

3194. On considère généralement comme équivalant à une constitution expresse de la part des époux qui ont déclaré se soumettre au régime dotal, la clause par laquelle la femme constitue son mari son procureur général et irrévocable. Il en était ainsi autrefois, comme nous l'avons déjà fait observer (V. nos 3164, 3187), et il doit en être de même aujourd'hui, car rien ne peut

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(1) Dumesnil et Bellanger C. époux Mauger.) - LA COUR; - Attendu que le contrat de mariage des époux Mauger contient d'abord la déclaration expresse qu'ils adoptent le régime dotal, et en outre une clause portant que la future apporte au futur époux ses droits indivis dans la succession de son père tant mobiliers qu'immobiliers; Attendu que le sens de la clause d'apport était dominé par la déclaration expresse et préalable de l'adoption du régime dotal; qu'il fallait donc de toute nécessité que les biens apportés fussent considérés comme dotaux ou paraphernaux ; - Que, dès lors, la stipulation d'apport faite au mari sans restriction aucune a pu et du paraitre une manifestation suffisante de la volonté des parties d'imprimer aux biens immeubles qui sont l'objet du procès le caractère de biens dotaux, par exclusion du caractère paraphernal; qu'en le déclarant ainsi, Parrêt attaqué, loin de violer les articles de loi cités, les a sainement interprétés; - Rejette.

TOME XIV.

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mieux écarter l'idée de paraphernalité qu'une semblable constitution (V. en ce sens MM. Rodière et Pont, no 384, et Zachariæ, t. 3, p. 565-566). Ce dernier auteur répute dotaux de plein droit les biens dont la femme a déclaré conférer au mari l'administration et la jouissance.-Ainsi jugé, sous le code: 1° que l'intention de soumettre au régime dotal tant les biens présents que ceux à venir de la femme, peut résulter de l'ensemble du contrat de mariage; qu'il n'est pas besoin d'une constitution précise et formelle; qu'ainsi, le fait, de la part d'une femme qui a déclaré se marier sous le régime dotal, d'avoir, dans son contrat de mariage, constitué son mari pour son procureur irrévocable de ses biens présents et à venir, avec défense de les aliéner ou de les hypothéquer, indique suffisamment qu'il a été dans l'intention de la femme de soumettre tous ses biens, tant à venir que présents, au régime dotal (Grenoble, 27 fév. 1825, M. Dubois, pr., aff. Perrin C. Servé): telle est, selon M. Benoit, t. 1, p. 8, la jurisprudence constante de la cour de Grenoble; 2° Que, dans un contrat de mariage où le régime dotal est expressément adopté, la clause par laquelle, après une constitution de dot faite par ses parents à la future, celle-ci constitue (pour la recherche et exécution de tous ses droits, tant présents qu'à venir) son mari pour son procureur général et spécial, peut être interprétée en ce sens qu'elle frappe de dotalité les biens à venir comme les biens présents (Grenoble, 4 mars 1848, aff. Jourdan, D. P. 49. 2. 77); — 3° Que, bien que dans son contrat de mariage portant adoption du régime dotal, la future ne se soit constitué que ses biens présents, elle est réputée s'être constitué également ses droits à venir, si par une clause du contrat, elle a compris cette dernière sorte de droits parmi ceux << pour la recherche, régie et acquittement desquels elle institue son mari son procureur général, spécial et irrévocable; » alors surtout qu'une pareille interprétation du contrat est en harmonie avec ce qui est d'usage (c. civ. 1159) dans le pays où il a été rédigé (Grenoble, 13 juill. 1850, aff. Gallet, D. P. 52. 2. 172).— Inutile de faire observer que ces arrêts ne sont pas contraires à celui de la même cour que nous avons rapporté (suprà, no 3185), puisque la question n'était plus la même. Dans ce dernier arrêt, en effet, il s'agissait de savoir si la clause emportait soumission au régime dotal, tandis que, dans les autres, la soumission était expressément stipulée.

3195. La cour de Riom a fait aussi résulter la dotalité de cette circonstance, que la femme s'était constitué ses biens pour en jouir en commun avec son mari (Riom, 2° sect., 1er juin 1809, aff. Lacolombe C. Simon).

3196. La clause de remploi stipulée par la femme, en cas d'aliénation de ses propres, suffit-elle pour faire réputer dotaux les biens qui en sont l'objet ? On comprend que, sur l'interprétation d'une pareille clause, qui peut être conçue de diverses manières, et qui peut emprunter une signification différente aux autres clauses de contrat de mariage, il y ait variation dans la jurisprudence. - Ainsi, il a été décidé que la constitution en dot de tels ou tels biens par des époux qui se sont mariés sous le régime dotal peut résulter de termes équivalents et de l'intention des parties: il n'est pas besoin que le mot constitué soit expressément employé; et spécialement qu'elle résulte, quant aux biens à venir, de la déclaration contractuelle que la soumission au régime dotal ne sera point un obstacle à l'aliénation des biens immeubles à échoir à la future épouse, pourvu qu'il y ait remploi en sa faveur (Limoges, 28 mars 1838) (2).—Et, au con

Du 16 août 1843.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Pataille, rap.Delangle, av. gén., c. conf.-Ripault, av.

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(2) (Dame Parot C. Nivet, etc.) - LA COUR; Attendu que l'appel de la dame Mauriel-Parot a pour objet de faire annuler l'hypothèque par elle consentie aux sieurs Boudet et Beaulieu sur la maison de la rue Jauvion, comme portant sur un immeuble dotal; - Attendu que si, aux termes des art. 1391, 1392 et 1574 c. civ., il ne suffit pas, pour que les biens d'une femme soient dotaux, que les époux aient déclaré, en termes généraux, se soumettre au régime dotal, et qu'il soit nécessaire, en outre, que les biens auxquels on veut imprimer le caractère de dolalité aient été constitués en dot, il faut reconnaître aussi que ces mots constitués ne sont point sacramentels au point de ne pouvoir être rempla cés par des termes équivalents et qui ne laissent aucun doute sur l'intention des parties, les contrats de mariage étant soumis aux mêmes règles

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traire, on a jugé: 1° que la clause de remploi stipulée à l'égard de biens paraphernaux ne les rend pas dotaux (Lyon, 3 janv. 1838, aff. Dechavannes, V. no 3446).— Dans l'espèce, la distinction des biens dotaux et paraphernaux, comme le constate l'arrêt, était faite par le contrat de mariage, et il est évident, dès lors, que la clause de remploi ne pouvait changer la nature de ces derniers ;-2° Que la clause contractuelle stipulée par les époux mariés sous le régime dotal, que, « dans le cas où le mari toucherait quelques capitaux des biens de son épouse, recueillerait quelque succession de son chef ou aliénerait tout ou partie de ses biens, il serait tenu d'en faire le remploi en biens immeubles, pour tenir son nom, côté et ligne, » ne rend pas dotaux les biens présents et à venir de la femme, surtout si cette stipulation, rapprochée d'une clause de gain de survie mobilier, doit paraître destinée à limiter l'étendue de cette disposition; qu'en un mot, l'adoption du régime dotal par les époux, ne suffit pas pour soumettre à ce régime, et notamment pour rendre inalienables tous les biens de la femme: les seuls biens constitués expressément en dot sont affectés de dotalité (Caen, 2o ch., 14 nov. 1840, M. Binard, pr., aff. Cardel C. Arthur).-Dans l'espèce, la clause de remploi pouvait s'interpréter autrement que par l'intention de rendre les biens dotaux, et dès lors elle ne devait pas entraîner la dotalité des biens autres que ceux constitués en dot (V. aussi, en ce sens, Riom, 19 août 1851, aff. Bouchard, D. P. 52. 2. 269).—A plus forte raison, doit-on considérer la clause de remploi comme insuffisante pour rendre les biens dotaux et inaliénables, lorsque les époux n'ont pas adopté le régime dotal; - 3o Décidé en ce sens que lorsque, dans leur contrat de mariage, les futurs époux

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d'interprétation que les autres contrats; Et attendu que, dans le contrat de mariage des époux Parot, après la déclaration portée en l'art. 1, que les époux se soumettent au régime dotal, on lit dans l'art. 5 que celte soumission au régime dotal ne sera point un obstacle à l'aliénation des biens immeubles qui pourraient échoir à la future, pourvu qu'elle assiste aux ventes, et qu'il y ait un remploi de même nature opérer en sa faveur ; Qu'il est impossible de ne pas voir dans cette clause l'intention manifeste des époux d'imprimer aux biens à venir de la future le caractère de dotalité, puisque l'argumentation la plus subtile ne pourrait lui attribuer un autre sens; Que, dès lors, on ne saurait lui dénier ce caractère sans méconnaître la loi formelle du contrat; — Qu'ainsi, la maison de la rue Jauvion, étant échue à l'épouse Parot, postérieurement à son mariage, lui est dotale, et, conséquemment, n'a pu devenir l'objet d'une hypothèque valable; Attendu, d'ailleurs, qu'en admettant que, faute par l'épouse Parot de s'être constitué en dot ses biens futurs d'une manière spéciale et explicite, la maison de la rue Jauvion doive être réputée paraphernale, il y aurait lieu encore d'annuler l'hypothèque consentie par elle sur ladite maison; Qu'en effet, l'art. 5 du contrat de mariage porte expressément que les biens immeubles qui pourront échoir à la future ne seront aliénés qu'à charge de remploi, et que, si une pareille stipulation contient une dérogation au régime légal des biens paraphernaux, qui sont en général de libre disposition, elle n'en doit pas moins recevoir son accomplissement, puisqu'elle n'a rien de contraire à l'ordre public et aux bonnes mœurs ; Qu'ainsi, soit que la maison de la rue Jauvion soit considérée comme dotale, soit qu'elle soit réputée paraphernale, il y a lieu, dans ces deux hypothèses, d'annuler l'hypothèque consentie aux sieurs Boudet et Beaulieu ; Par ces motifs, la cour déclare ladite maison dotale à l'épouse Mauriel-Parot; annule, en conséquence, l'hypothèque.

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Du 28 mars 1838.-C. de Limoges, 1 ch.-M. Tixier-Lachassagne, pr. (1) (Pagès-Delglat C. époux Guiraud.) - LA COUR; - Attendu que, loin de contenir, outre la constitution de dot, la déclaration expresse que les époux se soumettaient au régime dotal, comme le prescrit l'art. 1392 c. civ., le contrat de mariage renferme la déclaration formelle qu'ils se marient sous le régime de la communauté, réduite aux acquêts; que, dès lors, suivant cet article et autres du code civil, les biens simplement constitués en dot n'étaient pas inaliénables; que, vainement, les intimés essayaient de faire résulter la soumission au régime dotal de la stipulation de remploi consignée dans le contrat de mariage; que ce n'est là qu'une sûreté dans l'intérêt de la femme vis-à-vis de son mari, mais qui ne portait aucune atteinte à la faculté d'aliéner, attribuée, de plein droit, à la femme non soumise au régime dotal; - Par ces motifs, disant définitivement droit aux parties, et sur l'appel de la dame Pagès, veuve Delglat, tutrice de ses enfants mineurs; — Réformant le jugement rendu par le tribunal de première instance de Pamiers, le 27 mai 1828, a déclaré et déclare valable la saisie-arrêt faite par ladite dame veuve Delglat, le 14 mars 1828, au préjudice de la femme Guiraud; ce faisant; l'autorise à poursuivre, aux formes de droit, la déclaration et la remise des sommes saisies, ordonne la restitution de l'amende, etc.....

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ont déclaré se marier sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, les biens constitués en dot ne sont pas inaliénables; on voudrait vainement faire résulter l'inaliénabilité de la stipulation du remploi consignée au contrat de mariage (Toulouse, 24 mars 1830) (1).

3197. On considère comme équivalente à une constitution de dot la clause par laquelle les époux qui ont adopté le régime dotal, déclarent se marier ou se prendre avec leurs biens et droits, ce qui emporte union des personnes et des biens autant que cette union peut exister sous ce régime (V. en ce sens MM. Tessier, t. 1, p. 12; Rodière et Pont, t. 2, p. 385; Troplong, no 3030). Toutefois, on ne doit considérer comme dotaux, en vertu de cette clause, que les biens présents, à moins qu'il n'y soit fait aussi mention des biens à venir (V. MM. Tessier et Rodière et Pont, ubi suprà). Le premier de ces auteurs cite à l'appui de cette opinion plusieurs arrêts de la cour de Bordeaux, du 11 fév. 1826 et du 7 juin 1834, rapportés dans le journal des arrêts de cette cour. C'était aussi la jurisprudence du parlement de Bordeaux.-Décidé en ce sens que le caractère essentiel de la constitution de dot, sous le régime dotal, est que l'objet auquel elle s'applique ait été apporté par la femme pour supporter les charges du ménage et cette condition se trouve remplie dans la clause par laquelle la future déclare « se marier avec tous les biens qui pourront lui échoir et dont le futur aura l'administration comme époux; » alors que la future s'est réservé de remporter, en cas de prédécès du mari, son apport mobilier ainsi que les capitaux de ses biens aliénés et non remplacés, en exemption de toutes dettes (Caen, 18 mai 1842) (2).

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Du 24 mars 1830.-C. de Toulouse, 2o ch. civ.-M. d'Aldéguier, pr. (2) Espèce: (Chevrel C. Fontaine.) — Le contrat de mariage, dans lequel les époux Fontaine ont déclaré se marier sous le régime dotal, porte la date du 22 août 1804, c'est-à-dire qu'il était postérieur dé quelques mois à la promulgation du code civil, et antérieur à celle du code de commerce. Le futur y prend la qualité de marchand horloger, et les articles principaux sont ainsi conçus: « Art. 1. Ledit sieur Fontaine épouse ladite demoiselle Née, avec les biens, droits et prétentions qui pourront lui échoir et appartenir des successions futures de ses père et mère et autrement, desquels biens, droits et prétentions, ledit sieur Fontaine aura la gestion et administration comme époux, mais en cas de vente ou aliénation de tout ou partie d'iceux, il en a, dès à présent, comme dès lors, consigné et remplacé les capitaux, sur tous ses biens présents et futurs, au profit de ladite future épouse, ou de ses héritiers ou ayants cause.» «Art. 2. Ladite demoiselle future épouse apporte en mariage les meubles, linges et hardes ci-après désignés... » — « Art. 4. Si le futur prédécède la future, celle-ci aura et prélèvera sur les biens de son époux prédécédé, non-seulement la susdite somme de 4,100 fr., à quoi ont été estimés les meubles et effets mobiliers, mais encore les capitaux de ses biens qui auraient été aliénés et non remplacés, le tout en exemption de toutes dettes contractées ou à contracter de la part du futur, et sera, la future, libre de retirer le mobilier désigné en l'art. 2 en nature, ou le montant de son estimation, ainsi qu'elle le jugera préférable. » — « Art. 5. Les futurs seront communs en tous biens, meubles et immeubles, qu'ils pourront acquérir pendant l'existence de leur mariage. » La succession du sieur Née père s'est ouverte en 1815; il ne fut point dressé d'inventaire, et aucun acte authentique ne constata la quotité du mobilier échu à la dame Fontaine.

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En 1857, le sieur Fontaine fut mis en faillite. - Le 12 mai 1840, la dame Fontaine fit prononcer sa séparation de biens, et elle assigna devant le tribunal de Cherbourg le syndic à la faillite de son mari, pour faire liquider ses droits et reprises. Elle réclamait: 1° les 4,100 fr. constatés par son contrat de mariage; 2° la moitié de la succession mobilière de son père; elle demandait à faire preuve, par commune renommée, de la consistance de cette succession. Les représentants Jehenne et Le Bas de Saint-Croix, porteurs d'une obligation de 13,000 fr. souscrite en 1824 et 1831, par les époux Fontaine au profit de leurs auteurs, s'opposèrent à ces réclamations de la dame Fontaine, et soutinrent: 1° que les biens de la dame Fontaine étaient de libre disposition, puisque le contrat de mariage ne contenait aucune constitution de dot; 2° que le mobilier échu à la dame Fontaine n'étant pas constaté par acte authentique, elle n'avait point d'hypothèque légale, aux termes de l'art. 551 c. com. 21 juill. 1841, jugement du tribunal civil de Cherbourg, qui rejette ce système, décide que les biens présents et à venir de la dame Fontaine étaient dotaux, et ordonne la preuve par commune renommée, demandée par elle. - Appel par ces créanciers. Arrêt.

LA COUR; Considérant, sur la première question, que l'inaliénabilité de la dot ne peut résulter, d'après les combinaisons des art. 1392, 1554 et 1574 c. civ., que de la double circonstance que les époux se sont soumis

3198. Tous les auteurs admettent comme renfermant une constitution implicite de dot, la clause par laquelle la femme, après avoir adopté expressément le régime dotal, se réserve comme paraphernal certain objet déterminé, inclusio unius est exclusio alterius (V., en ce sens, MM. Toullier, t. 14, p. 64; Duranton, t. 15, no 337; Tessier, t. 1, p. 15; Zachariæ, t. 3, p. 566; Rodière et Pont, t. 2, no 385; Troplong, no 3029). A quoi bon, disent tous ces auteurs, la réserve de certains biens paraphernaux, si, dans l'intention des futurs, les autres ne devaient étre dotaux? Jugé que la clause par laquelle une femme, en adoptant le régime dotal, se réserve comme paraphernal un seul de ses biens, frappe de dotalité tous les autres biens présents, lesquels deviennent, par suite, non susceptibles d'aliénation (Req. 16 nov. 1847, aff. Barjon, D. P. 48. 1. 46).

3199. Mais un arrêt a refusé de voir une constitution implicite dans la faculté que la femme se serait réservé d'aliéner certains biens; et il a été décidé qu'il ne suffit pas, pour que les biens d'une femme soient dotaux, que les époux aient déclaré en termes généraux se soumettre au régime dotal; qu'il est nécessaire, en outre, que les biens, auxquels on veut imprimer le caractère de dotalité, aient été constitués en dot, sinon par des lermes sacramentels, tels que le mot constitué, du moins par des

au régime dotal et que la femme s'est constitué ses biens en dot; - Considérant que par leur contrat de mariage, passé devant Nicollet, notaire à Cherbourg, les époux Fontaine ont déclaré adopter pour base de leurs conventions matrimoniales le régime dotal; que sur la première circonstance, il ne peut y avoir par conséquent de difficulté; - Considérant, en ce qui touche la seconde, que ce qui forme le caractère essentiel de la constitution de dot, est que l'objet auquel elle s'applique soit apporté par la femme pour supporter les charges du ménage (art. 1540 c. civ.); que c'est par là que la dot se distingue du paraphernal que la femme n'apporte point au mari, mais dont, au contraire, elle se réserve l'administration et la saisine, et qui, s'il peut étre atteint pour subvenir aux charges du ménage, ne l'est que par voie de contribution et sans aucune altération pour la femme du pouvoir qu'elle a toujours de l'administrer; Considérant que c'est d'après ce point de départ que, suivant l'art. 1541, tout ce que la femme se constitue, c'est-à-dire ce qu'elle apporte ou ce qui lui est donné en contrat de mariage, est dotal, s'il n'y a stipulation contraire; Considérant que la valeur de 4,100 fr., mentionnée en l'art. 2 du contrat de mariage de la dame Fontaine, a été, selon l'expression de cet acte, apportée en mariage par la future; que, dès lors, et par la seule absence de toute stipulation contraire, elle a formé un apport dotal, ce que ne contestent pas méme sérieusement les appelants;

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Considérant, en ce qui touche les biens échus à la dame Fontaine de la succession de son père, que leur constitution en dot ne peut exister qu'autant qu'elle ressort positivement de la teneur des pactions matrimoniales, mais qu'elle n'est assujettie à aucune formule sacramentelle; - Considérant que, dans l'art. 1 desdites pactions matrimoniales, la future déclare se marier avec tous les biens, droits et prétentions qui pourraient lui échoir des successions de ses père et mère et autrement, ajoutant que le fatur en aura l'administration comme époux ; qu'en plaçant ainsi ces mêmes biens dans la main de son mari, elle les affecte évidemment au support des charges du ménage, et par suite en opère la constitution dotale, ce qui est confirmé par la stipulation de société d'acquêts portée dans l'art. 5, dont l'effet étant de mettre à la disposition du mari tous les fruits des biens quelconques de la femme, achève d'exclure l'idée qu'elle ait voulu se réserver des paraphernaux; — Considérant que l'art. i suppose, il est vrai, la facalté pour les époux d'aliéner les biens de la femme à échoir, pendant le mariage; mais que cette faculté n'est stipulée qu'à la charge que les capitaux en seront dès à présent consignés ou remplacés, ou, ce qui est la même chose, hypothécairement affectés sur les biens du mari; -- Considérant que cette faculté, dérogatoire à l'inaliénabilité dotale qui forme le régime prédominant et l'union des deux époux, doit, comme toute dérogation, se renfermer dans le cas pour lequel elle est faite et qu'elle n'autorise pas la femme à se priver, par suite d'engagements qu'elle contracterait envers des tiers, de la garantie hypothécaire à elle promise par le contrat de mariage;

Considérant que l'art. 4 ne laisse aucun doute à cet égard quand on voit qu'il assure à la femme le remport des capitaux de ses biens aliénés et non remplacés de la même manière que celui du capital incontestablement dotal de 4,100 fr., en exemption de toutes dettes contractées ou à contracter de la part du futur ; Considérant que si, dans un contrat de mariage passé depuis qu'une application usuelle des art. 1392 et autres précités c. civ. en a rendu le sens familier à tous, une certaine obscurité dans les termes de dot pourrait faire naître le soupçon d'intenfions insidieuses au préjudice des tiers et devrait s'apprécier avec une rigoureuse sévérité d'interprétation, il n'en doit pas être ainsi dans l'espèce ot il s'agit de conventions arrêtées quelques mois seulement après la pu

termes équivalents et qui ne laissent aucun doute sur l'intention des parties; et, spécialement, que lorsqu'une femme, après avoir adopté d'une manière générale le régime dotal, se réserve, à l'égard de certains biens, la faculté de les vendre, aliéner et échanger, cette clause, alors même qu'elle se réfèrerait à des biens actuels, n'imprime pas cependant à ces biens le caractère de dotalité (Bordeaux, 3 août 1842) (1).—On ne saurait ce semble, souscrire à une pareille décision, car à quoi bon cette faculté réservée de vendre, d'aliéner et échanger certains biens, si ces biens n'étaient, sinon expressément, au moins dans l'intention des futurs époux, dotaux et inaliénables de droit. Le raisonnement et les motifs de décider sont les mêmes que pour la clause précédente.

3200. On décide aussi unanimement, par application de la même maxime inclusio unius est exclusio alterius, que lorsque la femme mariée sous le régime dotal, s'est expressément constitué en dot certains biens, ses autres biens sont paraphernaux. Telle était autrefois l'opinion de ceux-là même qui admettaient une constitution de dot tacite (V. Roussilhe, t. 1, p. 170 et suiv.). Telle était aussi la disposition de la coutume d'Auvergne (tit. 14, art. 8), qui ne réputait dotaux les biens que la femme avait au temps de ses fiançailles, qu'autant qu'il n'y avait pas dot

blication du titre du contrat de mariage entre des individus encore tout imbus du système dotal normand dans l'esprit duquel ils ont visiblement contracté ; Considérant que de ce que dessus il résulte que la décision du premier juge doit être confirmée en ce qu'elle a déclaré les engagements pris par la dame Fontaine, envers quelques-uns des appelants, une obligation aussi bien sur les valeurs à elle advenues pendant son mariage que sur son remport de 4,100 fr.;

Considérant, sur la deuxième question, qu'à l'époque où la dame Fontaine s'est mariée, le code civil lui promettait une hypothèque légale, avec le rang qu'il indique, suivant le cas, sur la fortune de son mari pour les biens qui lui écherraient pendant le mariage, pourvu qu'elle en établit d'une manière quelconque la consistance, mênie par la voie de la commune renommée; que l'on ne pourrait, en vertu de l'art. 551 c. com. (ancien titre des faillites sous l'empire duquel s'est ouverte la succession de son père) l'assujettir à des stipulations par actes authentiques, tels que des inventaires, sans lui enlever un droit acquis, ce qui serait positivement contraire au vou formel de l'art. 557 dudit code, au même titre; -Considérant que l'on objecte inutilement que la nécessité d'un inventaire ou autre acte authentique ne serait qu'une simple formalité dont la loi nouvelle aurait pu prescrire la condition, même aux femmes de commerçants anciennement mariées, pour être admises à l'exercice de leur hypothèque légale, car il est clair qu'une condition de cette espèce, dans la prévision de laquelle la femme n'a pu, au moment de son mariage, faire les stipulations propres à lui ménager la liberté d'action dont elle aurait besoin pour la remplir, serait une atteinte au fond du droit, d'autant plus injuste, que la loi n'a pris ici, dans l'intérêt des femmes, aucune des précautions protectrices dont elle les a environnées quand elle les a soumises à l'inscription, telles que la mise en demeure d'inscrire en cas de purge, et l'intervention des parents et amis autorisés à requérir cette mesure conservatoire pour elles; Considérant que le texte et l'esprit du code de commerce non moins que la raison, condamnent un système qui conduit à de pareilles conséquences; qu'en effet, quand l'art. 551 ne dispose que relativement à la femme dont le mari serait commerçant au moment du mariage; quand l'art. 555 maintient formellement sous la règle du droit commun la femme d'un mari, même fils de négociant, et devenu lui-même négociant, mais qui aurait eu au temps du mariage une autre profession que celle de négociant, n'est-il pas évident qu'ils n'ont eu en vue que la femme qui a pu savoir en se mariant à quelles rigueurs particulières l'exposait l'état de l'homme à qui elle unissait son sort, et qu'ils n'ont nullement entendu statuer, quant à la femme, à qui rien ne pouvait faire deviner qu'une législation future placerait un jour les femmes de commerçants dans une situation plus défavorable que celle des autres citoyens, par rapport aux garanties de conservation de leurs droits matrimoniaux; que sur ce point le jugement dont est appel doit donc encore être confirmé, et qu'il devient superflu, d'après les motifs qui précèdent, de s'occuper de la troisième question ci-dessus posée; Par ces motifs, confirme.

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Du 18 mai 1842.-C. de Caen, 1re ch.-M. Dupont-Longrais, pr. (1) (Gaussen C. Gueyraud.)-LA COUR; Attendu que la réserve de pouvoir les vendre, aliéner et échanger, peut s'appliquer indifféremment à des objets paraphernaux comme à des biens dotaux, en telle sorte qu'il y a doute sur la véritable intention de la future épouse, et qu'il n'est pas certain que, par la clause précitée, son intention ait réellement été d'imprimer le caractère de dotalité aux propriétés dont elle se réservait la disposition, sans dire taxativement, ni dans des termes équipollents, qu'elle entendait se les constituer en dot.

Du 3 août 1842.-C. de Bordeaux.

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particulière en contractant mariage. Il a été jugé en ce sens, 1° que la constitution d'une dot de 150,000 fr., reçue en argent avec faculté de rapporter cette somme à la succession du père de la future, si elle préférait la recevoir en immeubles, et de conserver la libre disposition de ce qu'elle recevrait au delà de la somme de 150,000 fr., autorise les époux à disposer des immeu. bles qu'ils ont ainsi reçus au delà de cette somme, sans qu'on puisse opposer qu'ils étaient protégés par leur dotalité (Req. 3 fructidor an 13) (1); 2° Que la constitution faite par la femme de tous ses biens et droits, ne comprenait autrefois que les biens présents, et que la constitution de la légitime n'embrassait pas le supplément de cette légitime (Nîmes, 9 mars 1819) (2); -3° Que, sous la coutume d'Auvergne, la femme qui se constituait en dot une somme d'argent, en déclarant que cette somme formait tout son avoir, excluait de la dotalité les immeubles qui pouvaient lui advenir postérieurement, par suite des droits dont elle avait l'exercice en se mariant (Req. 7 déc. 1830) (3).

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3201. L'art. 1574 c. civ., en disposant que les biens de la femme qui n'ont pas été constitués en dot, sont paraphernaux, rapproche de l'art. 1542, qui ne répute dotaux, lors même que la constitution embrasse tous les biens de la femme, que les biens présents, a mis ce principe hors de contestation dans notre droit moderne (V. en ce sens MM. Tessier, t. 1, p. 32; Duranton, t. 15, p. 371; Zachariæ, t. 3, p. 567). - Il a été décidé, en ce sens : 1o que la femme qui, par son contrat de mariage, a apporté en dot des valeurs mobilières, n'est pas fondée à soutenir que les immeubles qu'elle a recueillis dans la succession de ses parents sont dotaux, et, par suite, qu'ils ne peuvent être saisis (c. civ. 1554; Req. 15 mai 1822) (4);—2o Que la déclaration générale, faite par les époux, qu'ils entendent se marier sous le ré

(1) (Lacase C. Latour.) - LA COUR ;- Attendu que le contrat de mariage du 18 avril 1769, porte constitution dotale des biens de la succession paternelle qui fut fixée à 150,000 fr., mais avec cette convention que si la future recueillait au dela du montant de la dot constituée, elle en conserverait la libre disposition jusqu'à concurrence de 4,000 liv. de revenu; Attendu qu'il est constaté, en fait, que les biens recueillis de l'hérédité paternelle excédaient la somme de 150,000 liv., d'une valeur supérieure à celle de la métairie de Mignane qui faisait partie desdits biens; que d'après cela les juges ont pu legalement décider que cette métairie n'avait été frappée que d'une dotalité éventuelle, et qu'en effet elle avait cessé de faire partie des biens dotaux et était devenue libre entre les mains de la demanderesse par le fait de l'excédant de la constitution dotale; Attendu qu'il est reconnu, en fait, que la demanderesse avait formellement approuvé l'alienation, qu'elle avait été mise en possession de la dime donnée en échange de la métairie de Mignane; - Rejette.

Du 3 fruct. an 13.-C. C., sect. req.-MM. Muraire, pr.-Rousseau, rap. (2) (Mourgue C. Laune.) — LA COUR ; — Attendu que la constitution dotale doit être restreinte aux objets pour lesquels elle est exprimée;Attendu que Louise Mourgue, dans son contrat de mariage du 29 août 1762, ne se constitua de son chef que les biens et droits qu'elle avait à cette époque, el dont partie furent nommément désignés; que la constitution qui lui fut faite par son père pour lui tenir lieu de légitimes paternelle et maternelle, ne peut s'éte: dre au supplément d'icelles qui formait an bien à venir, de même que l'augmentation de dot qui lui avait été faite pendant son mariage, et ne saurait imprimer un caractère de dotalité à un supplément incertain encore; - A mis l'appel à néant.

Du 9 mars 1819.-C. de Nimes.-M. Espérandieu, pr.

(3) (Henry C. Jacquet et cons.)- La cour; Attendu que les filles Jouve, se mariant l'une en 1777, l'autre en 1783, et recevant une dot en argent, ont déclaré dans leurs contrats que ces sommes formaient la totalité de leur avoir, ce qui exclut toute prétention, de leur part, sur le domaine de Chavagnac; que la portion de propriété qu'elles auraient pu avoir alors ou acquérir depuis, auraient été pour elles un bien paraphernal, puisqu'il ne serait pas entré dans les constitutions de dot; qu'à ces titres, elles en auraient pu disposer sans l'autorisation de leurs maris, d'après la coutume d'Auvergne, dans le ressort de laquelle le domaine est situé; d'où il suit que la ce-sion qu'elles en ont faite personnellement en l'an 6 au prix de 500 fr., était valable; qu'au surplus, l'arrêt, en déclarant que la cession n'avait été attaquée en aucun temps utile par les voies légales, a suffisamment motivé le rejet des demandes par fin de nonrecevoir, et n'a violé aucune loi; - Rejette.

Du 7 décembre 1850.-C. C., ch. req.-MM. Favard, pr.-Hua, rap.Lebeau, av. gén., c. conf.- Garnier, av.

(4) (Poustis C. Darrié.)-LA COUR ;- Attendu que l'arrêt juge d'après le contrat de mariage de la dame Poustis qu'il ne lui avait été constitué en dot que des objets mobiliers; d'où suit que les immeubles saisis

gime dotal, ne suffit pas pour dotaliser tous les biens apportés par la femme, alors qu'elle est suivie d'une constitution spéciale de dotalité de son mobilier; qu'en un tel cas, il a pu être jugé, par appréciation de la clause, que cette constitution particulière était restrictive de la déclaration générale, et que les immeubles apportés par la femme étaient restés paraphernaux (Req. 9 juin 1829 (5); Conf. Grenoble, 7 fév. 1828, aff. N... C. N...).- Dans l'espèce de l'arrêt du 9 juin 1829, le tribunal de Guéret avait décidé, au contraire, qu'il résulte de la combinaison des art. 1391 et 1542, que la déclaration générale de la part des époux qu'ils se soumettent au régime dotal, suffit pour frapper de dotalité les biens présents de la femme, décision vraiment injustifiable. Ce qu'il y a à remarquer, surtout, dans l'arrêt du 9 juin 1829, et ce qui est critiqué par M. Duranton, t. 15, no 336, c'est la disposition par laquelle la cour de cassation semble faire dépendre la paraphernalité des biens non expressément constitués en dot, de cette circonstance qu'il y a une constitution particulière de dotalité. D'où l'on pourrait conclure, que cette circonstance ne se rencontrant pas, les biens de la femme, d'après l'opinion suivie par la cour de cassation dans cet arrêt, devraient être considérés comme dotaux.

3202. Dans le même sens, on a jugé: 1o que la simple déclaration qu'on entend se marier sous le régime dotal, ne suffit pas pour frapper de dotalité les biens futurs de la femme, autres que ceux spécialement constitués en dot, et les objets acquis de ces biens; qu'en conséquence, l'acquéreur d'un immeuble vendu par les époux, ne peut se refuser de payer son prix, jusqu'à justification, par le mari, d'un remploi solide, encore bien que cet immeuble aurait été acquis pour faire remploi de deniers échus à la femme par succession (Bordeaux, 20 janv. 1832) (6);

obvenus à la dame Poustis après le décès de ses père et mère, ne pouvaient être réputés dolaux; Rejelte.

-

Du 15 mai 1822.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-De Gartempe, r. (5) (Meunier C. Samié.) LA COUR; Attendu que, d'après les principes de la matière, qui déclarait paraphernaux tous les biens qui ne sont pas constitués en dot, la déclaration générale, faite par les époux qu'ils entendent se marier sous le régime dotal, ne pouvait pas suffire à elle seule pour dotaliser tous les biens apportés par la femme en mariage, lorsque cette déclaration générale était suivie d'une constitution particulière de dotalité du mobilier; Et que la cour royale, en jugeant que cette constitution spéciale était restrictive de la première déclaration, n'a fait qu'interpréter le contrat de mariage, et user ainsi d'un droit qui lui appartenait ;— Rejette le pourvoi contre l'arrêt de la cour de Limoges, du 4 août 1828.

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Du 9 juin 1829.-C. C., ch. req.-MM. Favard, pr.-Chauveau-Lagarde, rap.-Laplagne, av. gén., c. conf.-Blanc, av.

(6) Espèce: (Durand C. Lassou.) - En 1815, Anne Guilhem épouse le sieur Lassou; le contrat porte que les époux déclarent se marier sous le régime dolal. La future se constitne en dot des effets mobiliers estimés 800 fr. Depuis, la dame Lassou recueille diverses sommes dans les successions de ses père et mère; elle acquiert ensuite, avec son mari, une maison pour, suivant les termes de l'acte, faire emploi des deniers provenant des successions. En 1824, les époux Lassou vendent cette maison à Durand; celui-ci refuse de payer son prix, tant qu Lassou n'aura pas offert un bon et valable remplacement; il prétend que tous les biens de la dame Lassou, mariée sous le régime dotal, sont dotaux; que la maison vendue a ce caractère, et qu'il est tenu de surveiller le remploi du prix. Les époux Lassou répondent qu'il n'y a de dotaux que les biens expressément constitués en dot; que, dans l'espèce, on ne peut considérer comme tels que les effets énoncés dans le contrat de mariage: constitution speciale qui exclut tous autres biens, et principalement l'immeuble vendu à Durand, puisque c'est pendant le mariage seulement que la dame Lassou a recueilli les sommes dont partie avait servi à l'acquisition de l'immeuble. Le tribunal de Libourne condamne Durand à verser son prix. -Appel. — Arrêt.

LA COUR; Attendu que la déclaration que les époux Lassou ont faite d'une manière générale, dans leur contrat de mariage, qu'ils entendaient se marier sous le régime dotal, est sans influence quant aux biens par eux vendus à Étienne Durand; qu'en effet, ces biens n'ayant jamais été la propriété personnelle d'Anne Guilhem, épouse Lassou, ne peuvent lui avoir été constitués en dot; - Attendu qu'ils ne forment pas non plus des immeubles acquis des deniers dotaux, en vertu d'une stipulation qu'aurait pu renfermer le contrat de mariage des époux Lassou;-Attendu, en fait, que, le 5 janv. 1818, la vente de ces mêmes biens fut consentie par la veuve Jeanneau aux époux Lassou; que cet acte de mutation remis à Durand, comme titre de propriété, énonce qu'il « a eu lieu pour

2° Que lorsqu'une femme s'est constitué en dot une somme qui lui a été donnée par son père, si celui-ci vient à lui donner, pendant le mariage, une seconde somme pour supplément de sa légitime, ce supplément ne sera point dotal (Pau, 24 mai 1833)(1); -3° Que la déclaration faite par la femme, qu'elle se constitue en dot une certaine somme et des effets mobiliers, laisse en dehors de la dotalité les immeubles et les biens à venir (Limoges, 11 nov. 1846, aff. Boisselat, D. P. 47. 4. 174).

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3203. Outre la constitution résultant de l'emploi, dans le contrat de mariage, de termes équivalents, il existe encore une sorte de constitution implicite spécialement prévue par le légis- | lateur dans l'art. 1541 du code, c'est celle qui résulte de la donation faite au contrat de mariage. Il en était de même dans P'ancienne jurisprudence (V. n° 3187). Par cela même, en effet, qu'une donation est faite en contrat de mariage, elle est censée l'être pour supporter les charges qui naissent du mariage. Quasi nuptiarum sola mentio, comme le disait le président Favre (Cod. liv. 5, tit. 7, déf. 18), faciliùs inducat, ut qui mulieri donavit, de dote constituenda cogitasse videatur. Il n'est pas nécessaire aujourd'hui, comme autrefois, d'après la jurisprudence de certains parlements des pays du droit écrit, qu'il soit dit dans le contrat de mariage que la donation a été faite en faveur et contemplation du mariage ou pour en supporter les charges, il suffit qu'elle ait été faite en contrat de mariage, «< tout ce qui est donné à la femme en contrat de mariage, porte l'art. 1541, est dotal, s'il n'y a stipulation contraire » (V. MM. Tessier, t. 1, p. 15 et suiv.; Duranton, t. 15, no 334; Troplong, n° 3052). Sont dotaux, par suite, quels qu'ils soient, présents ou à venir, objet déterminé ou quote-part, tous les biens compris dans la donation (V. MM. Rodière et Pont, t. 2, no 380).

faire emploi des deniers provenant en partie de la vente d'un domaine que les époux Lassou ont consentie à Gagneau, suivant acte du 2 déc. 1817, lequel domaine avait été acquis par eux, et payé en partie de deniers appartenant à Anne Guilhem, épouse Lassou, qui les avait reçus de son frère, pour prix d'une cession de biens souscrite en 1816; » Que de cette reconnaissance qui vient d'être faite de l'origine des biens que Durand a acquis, il suit qu'ils ne sont point empreints de dotalité; que l'acquéreur ne court, sous ce rapport, aucun danger d'éviction; Met au néant l'appel, etc.

Da 20 janv. 1852.-C. de Bordeaux.-M. Poumayrol, pr.

(1) Espece:- (Lacabanne C. Hubert.)-En 1793, mariage de Jeanne Lacabanne avec Jouviron. Son père lui promet 1,500 fr. pour support des charges du ménage. Jouviron reconnaît, par acte public, avoir reçu cette somme du constituant ou de ses héritiers, et en outre 700 fr., pour supplément de légitime. Il contracte des dettes. Il en fait souscrire à sa femme une solidaire de 2,000 fr. Ses biens sont expropriés; sa femme, séparée de biens, est colloquée pour 2,232 fr., montant de la dot de 1,500 fr., da supplément de 700 fr. et des frais. Cette somme est saisie-arrêtée par le porteur de la créance solidaire. Une discussion surgit alors, dans laquelle la femme Lacabanne soutient que sa dot était inaliénable, que le supplément était lui-même dotal; enfin, que les intérêts de la dot en étaient un accessoire qui participait de sa nature; que, dès lors, la saisiearrêt était nulle, ayant pour cause le payement d'une obligation souscrite par la femme avant la séparation. Le créancier saisissant soutient, au contraire, que les 700 fr. n'étaient point dotaux, et qu'ils ne sont pas plus inalienables que les intérêts de la dot. Jugement qui admet ces pretentions. Appel.— Arrêt.

LA COUR ; Attendu que la dot a pour objet le support des charges du ménage, que le fonds dotal est essentiellement inalienable; qu'il est de principe que ce que la loi défend de faire d'une manière indirecte, ne peut pas être fait non plus ar des moyens détournés; or, comme il ne parait pas de l'acte d'emprunt dont il s'agit, que les sommes prétées aient eu pour objet le support des charges du ménage, et que, si l'on pouvait, pour l'exécution de cette obligation, saisir chaque année les intérêts de la dot, on les absorberait indéfiniment, et l'on rendrait, par là nécessaire et permise, en observant les formalités prescrites par la loi, l'aliénation de la dot; qu'ainsi on ne saurait autoriser la saisie de ces intérêts, sans tromper le vœu du législateur et violer indirectement les principes conservateurs des dots que la loi a consacrés; d'où il sait qu'il y a lieu à réformer le jugement en ce qu'il a validé la saisie et autorisé le prélèvement des intérêts de 1,500 fr. dont il s'agit; Déclare avoir été mal jugé en ce que le jugement a validé la saisie-arrêt dont il s'agit pour les intérêts de la dot de 1,500 fr.; procédant par nouveau sur ce chef, annule la saisie quant à ce, maintient le jugement pour le surplus.

Du 24 mai 1833.-C. de Pau.-MM. Charrite, pr.

(2) Espèce:-(Lepaysant C. Brard-Duclos.)- En 1779, la dame Le

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Il en est de même des biens que le donateur laissera à son décès. L'institution contractuelle n'est, en effet, qu'une donation par contrat de mariage, comprise dans l'art. 1341, et, dès lors, les biens qu'elle embrasse, et que la femme recueille durante matrimonio, doivent être réputés dotaux.-V. MM. Tessier, t. 1; p. 20 et suiv.; Troplong, no 3033.

3204. En ce sens, on a décidé, que la clause d'un contrat de mariage portant, après adoption du régime dotal, que la future se réserve ses biens paraphernaux pour en disposer en propriété et revenus, est applicable, non point aux biens constitués à celle-ci par son père pour subvenir aux charges du mariage, mais seulement à ses propres qu'elle n'a pas déclarés dotaux ; que par suite, est nulle la subrogation faite par la femme à l'hypothèque légale qui garantit les biens que son père lui a constitués (Bordeaux, 6 juin 1848, aff. Tessandier, D. P. 51. 2. 152). -– Jugé, sous l'empire de l'ancien droit, que la dotalité résulte encore de la promesse faite à la future par sa mère, en contrat de mariage, de lui garder sa succession immobilière; qu'ainsi la femme normande à qui sa mère, en la mariant, a fait une telle promesse, peut revendiquer un immeuble vendu par celle-ci, quoiqu'elle ait accepté sa succession mobilière, en vertu de la procuration de son mari: il importe peu que l'aliénation faite par la mère soit antérieure au contrat de mariage de la fille, si cette aliénation a eu lieu sans l'autorisation du mari ou de la justice, et si la ratification que la mère en a faite depuis son veuvage est postérieure au contrat de mariage qui contient promesse de garder succession immobilière (Rej. 11 mai 1824) (2).

3205. Il importe peu que la donation et l'institution contractuelle soient accompagnées d'une constitution spéciale de certains biens faite par la femme, ou d'une donation particulière

reculey, séparée de corps et de biens d'avec son mari, vendit, sans autorisation ni de celui-ci ni de la justice, le domaine de la Jouberie au sieur Lepaysant. Le 9 avril 1785, les sieurs et dame Lereculey marièrent leur fille au sieur Brard-Duclos, et, dans son contrat de mariage, ils promirent de lui garder leurs successions immobilières. Le 13 avril suivant, décès du sieur Lereculey.-Le 20 du même mois, sa veuve ratifia la vente qu'elle avait faite au sieur Lepaysant; mais cette ratification ne pouvait évidemment porter atteinte aux droits résultant de la promesse des sieurs et dame Lereculey de garder leurs successions immobilières à leur fille.Le 5 mai 1816, décès de la veuve Lereculey. La dame Brard-Duclos, en vertu d'une procuration notariée de son mari, du 14 mai 1816, recueillit au nom de ce dernier le mobilier de la succession de sa mère, et le vendit pour acquitter des loyers. En 1817, Brard-Duclos décéda. En 1818, sa veuve assigna les héritiers Lepaysant en nullité de la vente consentie par sa mère et de sa ratification du 20 avril; et, par acte du 18 janv. 1819, elle renonça à la succession de sa mère. Jugement qui déclara la veuve Brard - Duclos non recevable dans sa demande, par le motif que la ratification avait couvert la nullité, et que la veuve BrardDuclos ayant accepté l'hérédité de sa mère, avait renoncé aux effets de la promesse de garder la succession. - Sur l'appel, la cour de Caen, par arrêt du 20 fév. 1822, déclare nul le contrat de vente et maintient la veuve Brard-Duclos dans la propriété du domaine de la Jouberie.

Pourvoi des héritiers Lepaysant, pour violation de l'art. 244 de la coutume des Normandie, des art. 1085 c. civ. et 17 de l'ordon. de 1731, en ce que la cour royale avait admis l'action révocatoire de la veuve BrardDuclos, quoique cette veuve eût accepté la succession de sa mère et se fût ensuite rendu personnelles les obligations de celle-ci; ils invoquaient la règle quem de evictione tenet actio, eumdem agentem repellit exceptio. — Arrêt (ap. délib. en la ch. du cons.).

LA COUR; - Attendu que la validité de la promesse de garder succession, faite à la dame Duclos dans son contrat de mariage du 9 avril 1785, n'était pas subordonnée à d'autre condition que celle de sa survie; que, par le décès de la dame sa mère, la dame Duclos a été saisie, avec effet rétroactif audit jour 9 avril 1785, de tous les biens et droits immobiliers compris dans la promesse de garder, et spécialement, ainsi que l'arrêt l'a reconnu, du droit de faire révoquer la vente faite au sieur Lepaysant le 24 sept. 1779; que ce droit a eu, à compter dudit jour 9 avril 1785, et par conséquent longtemps avant la renonciation faite par la dame Duclos à la succession de sa mère, le caractère d'un bien dotal avec tous les priviléges d'inaliénabilité que la coutume accorde à ces sortes de biens; que de là il suit qu'en jugeant que la dame Duclos était, nonobstant l'adition de l'hérédité de sa mère par elle faite en vertu de la procuration de son mari, recevable à exercer contre les demandeurs l'action révocatoire de la vente du 24 sept. 1779, sauf leur recours sur les biens non dotaux appartenant à la dame Duclos, la cour royale a fait une juste application de l'art. 244 de la coutume de Normandie; - Rejette.

Du 11 mai 1824.-C. C., sect. civ.-MM. Brisson, pr.-Poriquet, rap.

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