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(Cass., 29 mars 1825) (1); 5° Que lorsque le refus de

Opposition de la part des créanciers de l'ancienne société et de Thomas afné, fondée: 1° sur ce que ce dernier ne devait pas être déclaré en faillite, ou qu'au moins l'ouverture de sa faillite n'aurait pas dû être reportée à une époque antérieure à l'arrêt du 27 juin 1829, qui avait validé le traité de 1828; 2° Sur ce que l'actif de l'ancien commerce devait demeurer distinct du patrimoine de Thomas aîné.

Mais par jugement du 6 janv. 1830, le tribunal de Romans, rejetant toutes ces demandes, statua: 1° que l'ouverture de la faillite serait reportée au 2 oct. 1828, jour auquel Thomas aîné avait cessé ses payements; 2° Qu'il n'y avait lieu à distinguer le patrimoine de Thomas aîné de celui de l'ancien commerce, attendu la confusion qui s'était opérée, et, d'ailleurs, parce qu'en droit les créanciers de l'ancien commerce ne pouvaient jouir d'aucun privilége.

Appel par les créanciers de l'ancien commerce. Ils ont soutenu que la déconfiture de Thomas aîné n'avait été que le résultat du traité du 9 sept. 1828 et de l'arrêt de la cour qui l'avait déclaré valide; que jusqu'à Parrêt, Thomas aîné avait eu une fortune réelle et un crédit certain; qu'il avait continué jusqu'à l'arrêt toutes ses opérations, et qu'il avait constamment fait des payements et opéré des rentrées considérables; - Qu'au surplus, il n'était nullement impossible de distinguer le patrimoine de Fancien commerce, et que, quand même cette distinction ne pourrait pas s'opérer pour le tout, il y aurait injustice à ne pas l'opérer en partie pour les objets qui étaient demeurés distincts. - Arrêt.

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LA COUR; Attendu qu'aux termes de l'art. 437 c. com., tout commerçant qui cesse ses payements est en état de faillite; Attendu que, suivant les dispositions de l'art. 441 du même code, l'époque de la faillite se fixe soit par la retraite du débiteur, soit par la clôture de ses magasins, soit par la date de tous actes constatant le refus d'acquitter ou de payer des engagements de commerce, mais qu'en suivant le § 2 du même article, les actes mentionnés ci-dessus ne constatent néanmoins l'ouverture de la faillite que lorsqu'il y a cessation de payements ou déclaration du failli;

Attendu que de la combinaison de ces deux articles il résulte que c'est principalement à la cessation de payements que doit se reconnaître le caactère de la faillite, soit que le fait soit constaté par des protêts ou une déconfiture notoire qui Le permette plus au débiteur de remplir ses engagements, en lui enlevant tout le crédit dont il pouvait jouir; Attendu, dès lors, que la position de fortune d'un négociant, découverte après la déclaration de faillite, ne doit point être prise en considération pour en fixer l'ouverture, surtout lorsque, travaillant sur son crédit ou la confiance que sa fortune présumée inspirait, il a continué ses opérations commerciales; Attendu que les constitutions d'hypothèques qu'il aurait consenties, les délégations de payements sur des débiteurs, quelque nombreuses qu'elles fussent, ne pourraient être regardées comme des actes propres à fixer l'époque de l'ouverture de la faillite, alors surtout qu'elles ont lieu au profit des créanciers légitimes et dont les créances sont échues, si postérieurement à ces mêmes constitutions d'hypothèques, à ces délégations de payements, le débiteur a continué son commerce et a inspiré assez de confiance pour le continuer; Attendu qu'on ne saurait considérer comme une cessation de payements de nature à déterminer l'ouverture de la faillite, le refus fait par un négociant d'exécuter un traité qu'il croit nul comme étant le fruit de l'erreur où il aurait été jeté en souscrivant;

Attendu, en fait, que Thomas aîné, après avoir souscrit le traité du 9 sept. 1828, en faveur des créanciers de son frère, après avoir commencé de l'exécuter pendant vingt-deux jours par le payement de sommes assez considérables, s'aperçut ou crut s'apercevoir qu'il avait contracté un engagement au-dessus de ses forces, et prétendit qu'il avait été induit en erreur sur la fortune active et passive de Thomas Philippe; - Attendu que le 2 octobre, cessant entièrement tous payements de cette nature, il adressa une circulaire aux créanciers de son frère, pour leur annoncer qu'il ne voulait plus se charger de la liquidation des affaires de son frère, et qu'il cesserait dès ce jour de faire les payements concernant cette liquidation; Attendu que nonobstant cette circulaire, il continua son commerce particulier, régla avec ses créanciers personnels, leur constitua des hypothèques et leur fit diverses délégations; - Attendu qu'on ne peat imputer à fraude de pareilles délégations de payements, de pareilles constitutions d'hypothèques, faites à des créanciers légitimes dont les créances étaient échues, et qui, pour la plupart, créanciers de l'ancienne société, étaient payés avec des valeurs qui avaient appartenu à l'ancienne société; Attendu que, si, sur le refus de Thomas atné, une instance s'est introduite, si des protêts ont été faits contre Thomas aîné, ces protêts, qui n'étaient occasionnés que par le fait de la liquidation des affaires de Thomas Philippe, et tenaient à l'instance introduite sur le refus de Thomas aîné de continuer la liquidation des affaires de son frère, et de se considérer comme personnellement obligé, ces protêts, ainsi que le refus, ne peuvent être considérés comme cessation de payements, alors qu'il y avait litige sur la question de savoir si Thomas aîné était tenu des dettes de son frère;

Attendu qu'il résulte des livres de commerce de Thomas aîné, livres régulièrement tenus, et de sa correspondance, que jusqu'au moment de Farrêt de la cour qui a décidé la question contre lui, il a continué toutes

payer a eu lieu pour des motifs qui sont étrangers à l'idée

ses opérations commerciales, acheté, vendu des marchandises, opéré des rentrées, fait des payements, et enfin toutes les opérations de son commerce; Attendu, dès lors, que jusqu'au moment de cet arrêt il a joui de son état de commerçant, et qu'on ne peut attaquer les actes par lui faits pendant cet intervalle; Attendu que ce n'est que par l'arrêt de la cour du 27 juin 1829, que Thomas aîné a été légalement en mesure de payer la dette par lui contractée au profit des créanciers de son frère, et qu'a été légalement constaté son refus de l'acquitter: que ce n'est donc que dès ce jour qu'a véritablement éclate sa faillite, et que c'est à dater de ce jour que l'ouverture doit en être constatée;

Attendu que l'effet de toute société est de donner à cette même société le caractère d'un être moral qui peut, qui doit même être considéré indépendamment des personnes qui la composent, qui a son actif et son passif propres, d'où il résulte que tout ce qui se fait en dehors de lui, ne peut l'atteindre, et que les dettes particulières de l'un des sociétaires ne peuvent le grever, et que pourtant, chacun des créanciers de cette même société a sur son actif un privilége que ne peuvent lui disputer les créanciers personnels des divers sociétaires; - Attendu que ces principes découlent des dispositions des art. 1852 et 1872 c. civ., et que leur application doit avoir lieu, alors que tout est distinct et séparé entre les intérêts sociaux et les intérêts des sociétaires, alors qu'on peut voir bien évidemment deux personnes bien distinctes et bien différentes: la société d'une part, et les individus sociétaires de l'autre;- Mais, attendu que, lorsque la société est dissoute et que l'un des associés, s'étant chargé de la liquider, a confondu l'avoir social dans le sien, il n'y a plus alors possibilité de distinguer les actifs respectifs, et les créanciers de la société ont alors à s'imputer de n'avoir pas demandé, conformément à ce qui se pratique dans les séparations des patrimoines, la séparation des actifs respectifs: celui de la société et celui des sociétaires ;

Attendu, en fait, que Thomas aîné, après avoir opéré par acte public, le 3 avril 1828, au tribunal de commerce de Romans, la dissolution de la société qu'il avait contractée depuis longues années avec Thomas Philippe, bien qu'il eût fait faire un inventaire pour connaitre les valeurs actives et passives de la société Thomas frères, renouvela avec plusieurs des créanciers de cette société les titres qu'ils avaient contre elle; qu'il s'empara des marchandises qui en provenaient, et les fit entrer dans son commerce particulier; Attendu, dès lors, qu'il a dû s'opérer entre son avoir et celui de la société une confusion telle qu'il serait impossible aujourd'hui de les distinguer; Attendu, d'ailleurs, que les créanciers au procès ont tous obtenu de Thomas aîné des obligations hypothécaires, qu'ils ont des lors reconnu Thomas aîné pour leur débiteur personnel, et que cette novation qui s'est opérée ne leur permet plus de demander le privilége de la séparation des masses.

Par ces motifs La cour joint les instances pendantes devant elle sur les appels émis envers les jugements rendus par le tribunal de commerce de Romans, le 10 janv. 1850, et par le tribunal civil de Valence, le 2 juin suivant; et, statuant sur le tout par un seul et même arrêt, met les appellations et ce dont est appel au néant, et par nouveau jugement, déclare que l'ouverture de la faillite de Thomas aîné ne remontera qu'à la date de l'arrêt du 27 juin 1829; déclare bonnes, valables et régulièrement intervenues les délégations opérées par Thomas aîné, au profit des sieurs Ollivier, Bottu, Lachesserie, etc., et dont le transport a été dénoncé avant l'ouverture de la faillite; déclare, en conséquence, nulle et sans effet l'opposition formée par les syndics provisoires des faillites Thomas,, dans les mains des débiteurs délégués; déclare les créanciers de Thomas. aîné non recevables dans leur demande en nomination de liquidateurs de l'ancienne société Thomas frères; ordonne, en conséquence, que les livres des diverses sociétés Thomas seront remis entre les mains des syndics. Du 1er juin 1831.-C. de Grenoble, 2 ch.-M. de Noaille, pr.

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(1) (Mancel C. Patinot, etc.) — La cour (après dél. en ch. du cons.); Vu les art. 437 et 441 c. com.; Considérant que la cour royale de Paris, en fixant l'ouverture de la faillite du sieur Mancel au 29 sept. 1820, s'est principalement fondée sur les actes extrajudiciaires qu'il fit signifier, à cette époque, en réponse aux sommations qui lui avaient été faites par buit négociants, au nombre desquels était le sieur Patinot; Que, cependant, dans ces divers actes, le sieur Mancel avait élevé une prétention extrêmement grave, en s'opposant à l'exécution qu'on tenterait de donner aux marchés dont s'agit au procès;-Qu'il avait soutenu : 2° que ces marchés à terme consistant en livraison d'eaux-de-vie troissix, ou en payement de différences de prix, étaient nuls; 2° que le prix de ces eaux-de-vie n'était devenu hors de toute proportion avec la valeur réelle, que parce que ceux à qui la livraison devait en être faite s'étaient emparés de tous les trois-six existant en France; qu'au lieu de considérer comme cessation de payements des prétentions aussi sérieuses, il eût fallu les apprécier; - Que cette appréciation était d'autant plus nécessaire, qu'en faisant abstraction de ces marchés, il a été reconnu que le sieur Mancel était bien loin de se trouver dans un état d'insolvabilité; -Qu'il est en effet établi, tant par le jugement de première instance que par l'arrêt attaqué qui en a adopté les motifs, que, depuis le mois de

d'insolvabilité, il n'entraîne pas la faillite (Bruxelles, 18 mars 1828, aff. Becuwe, V. no 67). - Mais, si la contestation du débiteur n'avait pour objet que de reculer sa chute, et si, déjà mis en défaut par quelques-uns de ses créanciers, il n'élevait une contestation que pour retarder l'événement de son désastre, on devrait décider autrement.

75. Peut-on déclarer en faillite le commerçant qui n'a qu'un créancier unique? Pour la négative, on peut dire que la faillite n'est pas une individualité, qu'elle est un état; que comme état elle a des effets tout particuliers, soit vis-à-vis du failli, soit à l'égard de ses créanciers, soit même en ce qui concerne l'intérêt public; qu'à ce titre elle est régie par une législation spéciale qui, par exemple, ne répute commerçant que celui qui fait son habitude du commerce. D'où la conséquence que, pour un si grand résultat, il faut une grande cause, ce qui rend presque inconcevable qu'il soit produit par un créancier unique. Ce créancier peut agir par la voie ordinaire, et s'il y a lieu pour le ministère public d'exercer des poursuites, il agit sans qu'il soit nécessaire de provoquer l'état de faillite. On ajoute, dans le même sens, que cette législation toute spéciale est inapplicable dans l'espèce. Le juge-commissaire, les syndics ne seraient plus que des fonctionnaires sans fonctions: le concordat, l'union de viennent inutiles pour un seul créancier et pour une seule créance. Le législateur n'a pu vouloir que l'on recourût à ces formalités compliquées alors que tous les intérêts divergents s'accordent mieux par le recours aux voies ordinaires.

Mais il est facile de répondre que si la loi considère la faillite comme un état, elle a pris soin d'en déterminer l'élément constitutif, la cessation de payements. Or, l'élément qui constitue cette cessation, n'est pas du tout le nombre des créanciers à payer, mais bien la position du patrimoine et la situation réelle du commerçant débiteur, et, par suite, c'est à tort qu'on puise un argument à pari dans l'art. 1 c. com. relatif à la qualité de commerçant. D'où la conséquence que, si un seul créancier se présente, et si le payement de sa créance lui est refusé; si à ce refus de payement se joint la retraite du commerçant débiteur, la clôture de ses magasins et l'abandon total de ses affaires, alors la déroute entière de ces mêmes affaires et la ruine de son patrimoine, et ainsi l'impossibilité de payer, non pas temporaire et accidentelle, mais absolue et complète, étant notoire et manifeste, la cessation de payements existe; alors le créancier non payé, quoique unique, sans devoir s'enquérir s'il en existe ou non encore d'autres, est en droit de provoquer la declaration de faillite du commerçant, son débiteur, et les tribunaux sont, selon les sept. 1820 jusqu'au 24 janv. 1821, le sieur Mancel a continué le commerce et a payé des sommes considérables pour faire face à ses autres engagements; Que la cour royale a été d'autant moins fondée à considérer les prétentions sérieuses élevées par le sieur Mancel, comme une véritable cessation de payement, qu'elle a déclaré elle-même que ledit sieur Mancel pourrait toujours faire prononcer la nullité des marchés dont il s'agit, s'il y avait lieu; - Considerant que l'arrêt qui a déclaré le marché fait avec le sieur Patinot, valable, n'a été rendu que le 19 janv. 1821; Que la condamnation isolée, prononcée par cet arrêt, ne se porte qu'à la somme de 17,432 fr. 25 c., tandis qu'il a été reconnu que, dans le temps intermédiaire, le sieur Mancel, bien loin d'être dans un état d'insolvabilité, remplissait, au contraire, tous les autres engagements de son commerce, en payant des sommes considérables; —Qu'aussi n'est-ce pas cette condamnation isolée, mais bien la réunion de tous les marchés à terme, quoique essentiellement contestés, qui a servi de base à la cour royale pour faire remonter l'insolvabilité du sieur Mancel et l'ouverture de sa faillite au 29 sept. 1820; - Qu'en le décidant ainsi, la cour royale de Paris est contrevenue aux art. 457 et 441 c. com.; Casse. Du 29 mars 1825.-C. C., sect. civ.-MM. Brisson, pr.-Vergès, rap.Cabier, av. gén., c. conf.-Rochelle et Nicod, av.

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(1) 1re Espece: (Lauzet C. Serron.) - La veuve et les héritiers Serron, uniques créanciers du sieur Lauzet, marchand corroyeur, ont fait rendre contre leur débiteur, le 7 fév. 1840, un jugement par défaut, qui le déclarait en état de faillite. — Sur l'opposition de Lauzet, ce jugement a été rétracté par le tribunal de commerce, sur le motif qu'il ne pouvait y avoir lieu de déclarer la faillite d'un commerçant qui n'avait qu'un seul créancier, puisque, en un tel cas, les diverses phases de la faillite, et notamment le concordat et le contrat d'union, étaient inexécutables. - Appel des héritiers Serron.29 mai 1840, arrêt infirmatif de la cour d'Orléans qui maintient la déclaration de faillite.

Pourvoi de Lauzet, pour fausse application et violation des lois concernant la faillite et ses effets, notamment de l'art. 457 c. com.-Arrêt.

circonstances, dans le devoir de la prononcer. Par la déclaration de sa faillite, le debiteur perd son état libre et commercial, pour tomber dans un état d'interdiction; mais ce changement d'état est la suite nécessaire, d'une part, de la qualité de commerçant qu'il lui a plu de s'attribuer, et de l'autre du droit acquis à son créancier qui a contracté avec lui en cette qualité.-Dans le cas d'un créancier unique, dit-on, on ruine un commerçant sans aucun avantage, soit pour l'ordre public, soit pour ce même créancier; mais on peut observer que, dans ce cas même, l'intérêt tant de l'ordre public que du créancier unique paraît évident. Entre un débiteur integri status qui jouit de l'administration volontaire et libre de ses droits et de ses biens et un débiteur mis en interdit sur les uns et sur les autres, la différence est très-grande. Le premier pouvant faire ce que bon lui semble, peut facilement soustraire sa personne, ses actes et ses biens tant à son créancier qu'à la justice, tandis que l'autre, mis sous la main de la loi spéciale et de la justice, ne peut rien faire, ne peut rien cacher; le payement est rendu moins difficile à l'égard du créancier, et en cas ou de crime ou de délit, la vindicte publique peut bien plus facilement être satisfaite.

Sans doute, en cas d'une créance unique, point de commissaires, de syndics, de concordat, d'union; mais de ce que ces agents et, en général, toutes les prescriptions de la loi spéciale pour l'ouverture, la marche et la clôture de la faillite, ne sont pas nécessaires, ou, en d'autres termes, de ce que les procédures sont devenues plus expéditives et plus simples, la faillite ne sera-t-elle pas susceptible d'être déclarée, quoiqu'il soit incontestable et incontesté que le débiteur commerçant se trouve en état flagrant de cessation de payements, telle qu'elle est fixée par la loi? Le législateur n'a dû regler et il n'a réglé que les cas ordinaires; le cas extraordinaire d'un créancier unique rentre dans la disposition générale de la loi, quoiqu'il rende étrangères plusieurs dispositions nécessaires pour les cas ordinaires; ce qui répond, peut-être, à l'argument tiré de l'emploi au pluriel du mot payements dans l'art. 437. Encore une fois, c'est parce que c'est le cas qui arrive le plus fréquemment que le pluriel se trouve dans la disposition de la loi. C'est, au surplus, dans ce sens que s'est prononcée la jurisprudence. En effet, il a été jugé qu'il y a lieu de déclarer la faillite d'un commerçant qui est en état de cessation de payement, encore bien qu'il n'ait qu'un créancier unique, sauf à ne pas appliquer dans ce cas les dispositions du titre des faillites qui sont inconciliables avec l'existence d'un seul créancier (Req., 7 juill. 1841; Cass., 6 déc. 1841; Rouen, 22 juin 1842 (1); Pau, 26 août 1824, aff. Rancès, V. no 384; ColLA COUR; Attendu, en droit, que tout commerçant qui cesse ses payements est en état de faillite (art. 437 c. com.); que la cessation de payements, dans le sens de la loi, fixé par le rapprochement des art. 457, 441 et 449 c. com., ne résulte point du nombre des créanciers, mais bien de la situation réelle du commerçant débiteur; que si, au refus de payement, même envers un créancier unique, se joignent la retraite du commerçant, la clôture de ses magasins et l'abandon totale de ses affaires, alors la déroute et la ruine entière de ces mêmes affaires, et ainsi l'impossibilité de payer, non pas temporaire et accidentelle, mais absolue et complète, étant notoires et manifestes, on ne peut n'y pas voir cessation de payements, et ce créancier, quoique unique, sans s'enquerir s'il en existe ou non encore d'autres, est en droit de provoquer la déclaration de la faillite du commerçant son débiteur, et les tribunaux sont, selon les circonstances, dans le devoir de la prononcer; que si, par cette declaration, le débiteur perd civilement son état, cette perte est la conséquence nécessaire, d'une part, de sa qualité de commerçant, et, d'autre part, du droit acquis à son créancier, qui a contracté avec lui en cette qualité; qu'enfin, si dans le cas de déclaration de faillite sur la demande d'un créancier unique, plusieurs dispositions que la loi prescrit pour l'ouverture, la marche et la clôture de la faillite, demeurent sans effet, les procédures, devenues ainsi plus expéditives et plus simples, ne sont pas inconciliables avec la nature commerciale de l'affaire, les qualités commerciales des parties, les obligations du débiteur et les droits du créancier; Et attendu qu'il est constant et reconnu, en fait, par l'arrêt attaqué, que Lauzet, demandeur en cassation, marchand corroyeur de profession, était commerçant; que la créance des mariés Serron était commerciale; qu'elle n'a point été payée; qu'à l'époque où le payement en devait être effectué, le débiteur non-seulement avait tout à fait quitté son commerce, mais qu'il avait même quitte la ville où il l'avait exercé; et que, lors de la saisie pratiquée par les mariés Serron, le produit de la vente des effets saisis a été inférieur au montant de la creance privilégiée du bailleur de la boutique abandounée par Lauzet;—

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mar, 19 avr. 1842, aff. Ambroise Walch C. Jenny; Bourges, 21 mai 1842, M. Aupetit, pr., aff. Gouyon C. Perrot).-MM. Massé, no 204; Esnault, t. 1, no 82; Bédarride, no 58; Renouard, t. 1, p. 269, et Lainné, p. 38, enseignent la doctrine suivie par ces derniers arrêts. La cessation de payements, dans ce cas, résulte d'un concours de circonstances qui démontrent la ruine entière des affaires du débiteur et son impossibilité de payer, non pas temporaire et accidentelle, mais absolue et complète (même arrêt du 6 déc. 1841), comme, par exemple, lorsqu'au refus de payer le créancier unique, se joignent la retraite du débiteur, la clôture de ses magasins et l'abandon total de ses affaires (même arrêt, du 7 juill. 1841).

Que, dans ces circonstances, en décidant qu'il y avait eu cessation de payements de la part de Lauzet et que les mariés Serron, quoique ses créanciers uniques, avaient eu le droit d'en faire déclarer la faillite, l'arrêt attaqué n'a violé ni l'art. 437 c. com. invoqué par le demandeur, ni aucune autre loi; - Rejette.

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Du 7 juill. 1841.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Lasagni, rap. 2o Espèce : — (K.... C. W........) · Une somme de 401,000 fr. avait été prétée par la dame K.... au sieur W.... Celui-ci éprouve, à ce qu'il paraît, des pertes dans des spéculations de bourse. Il s'était retiré du commerce et avait liquidé avec ses créanciers, lorsque la dame K...., toute seule, a voulu le faire déclarer en faillite. Etait-elle recevable dans sa prétention? — Le tribunal de commerce de la Seine a adopté la négative par jugement du 27 déc. 1837, ainsi conçu :—« Attendu que si l'art. 437 c. com. stipule que tout commerçant qui cesse ses payements est en état de faillite, il est évident que la loi a voulu que dans ce cas la position de tous les créanciers d'un commerçant fût déterminée pour fixer les droits de chacun; mais qu'il n'y a aucun motif à déclarer une faillite alors qu'il n'existe qu'un seul et unique créancier, puisque ce créancier peut toujours agir contre son débiteur; — Attendu, en fait, qu'il n'est pas justifié que W.... ait d'autres créanciers que la dame K...., quelle que soit d'ailleurs l'origine ou la nature de sa créance; Qu'elle ne justifie d'aucun es poursuites exercées contre W.... par qui que ce soit, alors qu'il était encore commerçant; d'où il suit la présomption que la dame K.... était seule et unique créancière de W....;-Par ces motifs, déclare la dame K.... purement et simplement non recevable, quant à présent. »> Appel par la dame K.... Pour le sieur W.... intime, M. Teste soutenait le bien jugé de la sentence attaquée. D'après le texte de l'art. 457 c. com., il faut, a-t-il dit, que le négociant ait plusieurs payements à faire et non un seul; les autres dispositions du même titre supposent foutes une masse de créanciers; soit qu'il s'agisse de la nomination des agents et des syndics, de la vérification des créances, soit qu'il faile procéder au concordat ou au contrat d'union (art. 444, 456, 495, 501, 471,514, 519, 527, 562, 558); partant, la loi a en vue une masse de créanciers. En se pénétrant de l'esprit qui a dicté la loi sur les faillites; on reconnait qu'elle a eu un double but, celui de protéger tous ceux qui ont des droits sur les biens du failli, et aussi celui d'adoucir le sort d'un débiteur malheureux et de bonne foi. Sous le premier point de vue, dès qu'une seule personne se présente, les dispositions de la loi deviennent superflues, puisqu'il n'y a pas de collision d'intérêts à craindre; aucun créancier ne sera certainement avantagé au détriment de l'autre. Pour le débiteur, la présence d'une seule personne armée de tous les priviléges du code en matière de faillite serait une menace perpétuelle et un mal que Phumanité réprouverait. M. de Ségur proclamait dans l'exposé des motifs du titre des faillites, que le but du législateur sur ce point était d'offrir à tout négociant honnête et malheureux de se tirer de la position incertaine et cruelle où l'ancienne législation le laissait. Ainsi, les syndics ont la faculté de lui accorder un sauf-conduit. Par le concordat, il arrive à une libération complète et son avenir n'est pas perdu. Comment obtenir co sauf-conduit d'un seul creancier irrité et voulant obliger son débiteur même à l'impossible? Quant au concordat, les obstacles sont encore plus sérieux; c'est un traité consenti entre les créanciers délibérants et le débiteur falli, à la la majorité déterminée en nombre et en sommes ; la loi a done prévu le cas ou certains créanciers se montreraient trop exigeants, et alors elle n'a pas voulu que la faillite fût pour le failli un lien éternel; elle ne l'a pas abandonné à toutes les rigueurs de créanciers impitoyables. Pourquoi ce vœu d'humanité et de raison resterait-il sans effet dans la position où nous sommes placés?-M. Teste ajoutait que l'action de la dame K..., n'était nullement entravée; qu'elle pouvait poursuivre, ce qu'elle n'aurait pas pas la faculté de faire en cas de faillite.

Le 30 mai 1838, arrêt de la cour de Paris, sous la présidence de M. Hardouin, qui confirme en adoptant les motifs des premiers juges. Pourvoi.-Arrêt.

LA COUR; Vu l'art. 457 du code de commerce; Attendu que la cessation de payements dans le sens de la loi fixé par le rapprochement des art. 437, 441 et 449 du code de commerce ne résulte point du nombre des créanciers, mais bien de la situation du commerçant débiteur; que, si au refus de payement, même envers un créancier unique, se joi

76. La faillite est un état qui intéresse l'ordre public, et dont les créanciers et le débiteur ne peuvent empêcher la constatation et les conséquences légales. Ils n'ont pas le droit de s'opposer à l'accomplissement des formalités prescrites par la loi pour en découvrir les causes et les caractères; autrement l'action de la justice serait paralysée et la fraude serait souvent impunie, ce qui serait essentiellement contraire aux vues du législateur. C'est par application de ce principe qu'il a été jugé, sous le code de 1807, que la cession de biens volontaire et même judiciaire ne faisait point obstacle à ce que le tribunal de commerce déclarât postérieurement la faillite, quand il avait appris la cessation de payements (Metz, 30 mars 1833) (1).

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gnent toutes les circonstances qui, comme dans l'espèce, démontrent la ruine entière des affaires et l'impossibilité de payer, non pas temporaire et accidentelle, mais absolue et complète, on ne peut ne pas y voir une cessation de payements; et ce créancier, quoique unique, sans s'enquérir s'il en existe ou non encore d'autres, est en droit de provoquer la déclaration de faillite de son débiteur, et les tribunaux sont dans le devoir de la prononcer; que si, par cette déclaration, le débiteur perd civilement son état, celte perte est la conséquence nécessaire, d'une part, de sa qualité de commerçant, et, d'autre part, du droit acquis à son créancier qui a contracté avec lui en cette qualité; qu'enfin, si dans le cas de déclaration de faillite sur la demande d'un seul créancier, plusieurs dispositions que la loi prescrit pour l'ouverture, la marche et la clôture de la faillite, demeurent sans effet, les procédures, devenues ainsi plus expéditives et plus simples, ne sont pas inconciliables avec la nature de l'affaire, les obligations du débiteur et les droits du créancier; Casse. Du 6 déc. 1841.-C. C., ch. civ.-MM. Rupérou, f. f. de pr.-Piet, rap. 3 Espèce: (Frik C. Terwangue.) LA COUR; Attendu, en droit, que tout commerçant qui cesse ses payements est en état de faillite; que l'état de faillite ne résulte donc pas du nombre des créanciers, mais Lien de la situation réelle du commerçant débiteur; - Attendu que lorsque la cessation de payements est absolue et complète, tout créancier a le droit de provoquer la déclaration de la faillite de son débiteur commerçant, et que l'exercice de ce droit ne peut être paralysé par le fait, presque impossible d'ailleurs à vérifier, que le poursuivant serait l'unique créancier du débiteur; - Qu'en effet, la loi qui fait dépendre l'état de la faillite de la seule cessation de payements, est générale, absolue, et ne peut être éludée par une circonstance accidentelle qui, d'après le texte comme d'après l'esprit de la loi, n'altère pas le caractère de la faillite; que si quelques-unes des formalités indiquées par la loi ne peuvent alors être observées, ces formalités ne sont pas constitutives de la faillite, et leur absence n'en detruit pas la base essentielle, la cessation de payements; - Attendu, en fait, qu'il est constant au procès que Terwangne était commerçant, qu'il avait entièrement cessé toute espèce de payements, et que les appelants étaient ses légitimes créanciers; qu'ils avaient donc le droit de provoquer la déclaration de sa faillite, et qu'elle devait être déclarée par le tribunal de commerce de la Seine; Donne défaut contre Trwangne, et, pour le profit, réformant, Déclare ledit Terwangne en état de faillite, etc.

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Du 22 juin 1842.-C. de Rouen. aud. solen.-M. Gesbert, pr.

(1) Espèce: (Dureteste C. Thibout. )- Le sieur Thibout avait fait cession volontaire, par un traité du 16 août 1816, dans lequel on nommait un sieur Lavenette syndic, et on chargeait Me Dureteste, notaire, de faire les ventes, mais toujours à la requête de Lavenette et du consentement de Thibout. Cet acte devait être soumis à l'approbation de tous les créanciers; quelques-uns refusèrent leur adhésion. - Le sicur Thibout, qui était detenu, se pourvut à l'effet d'obtenir le bénéfice de cession judiciaire; il y fut admis par jugement du 28 août 1816.- Me Dureteste poursuivit la vente des biens cédés, mais sans remplir les formalités prescrites par l'art. 904 c. pr. Plusieurs adjudications eurent lieu à la requête de Lavenette, mais malgré l'opposition de Thibout. Sur la demande de ce dernier, un jugement du 4 août 1823 annula deux de ces ventes, et ordonna que Dureteste rendrait ses comptes. Le 13 oct. 1826, jugement du tribunal de commerce qui déclare la faillite de Thibout. Le sieur Mollet, nommé syndic définitif, forma une action contre divers adjudicataires, afin de faire déclarer commun avec eux le jugement du 4 août 1825, qui n'avait statué qu'à l'égard de deux ventes. Ces adjudicataires répondirent par une tierce opposition incidente au jugement déclaratif de faillite, qu'ils soutinrent nul et dans tous les cas périmé faute d'exécution dans les six mois. Ils invoquèrent au fond la prescription de dix ans, fondée sur l'adjudication qui faisait leur titre, et subsidiairement ils formèrent une demande en garantie contre Lavenette, qui lui-même actionna Me Dureteste en arrière-garantie.

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Le tribunal de Vouziers rejeta la tierce opposition et l'exception tirée de la péremption : « Considérant que la cession de biens volontaire et même judiciaire, ne faisait pas obstacle à ce que le tribunal déclarat la faillite de Thibout, quand il a appris la cessation de ses payements; Que le jugement de mise en faillite ne saurait être considéré comme périmé

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77. Le chapitre du code de 1807 correspondant à celui dont nous allons nous occuper, était intitulé: De l'ouverture de la faillite. Dans les premières rédactions du projet de la loi nouvelle, on lisait : De la déclaration et de l'ouverture de la faillite; mais on a supprimé du titre les mots ouverture de la faillite qu'on avait fait disparaître de la rédaction définitive de la loi. Cette suppression est à regretter, car la déclaration et l'ouverture de la faillite ont, ainsi que l'a fait remarquer M. Renouard, des règles distinctes qui ne sont pas suffisamment précisées. Le jugement déclaratif emporte ouverture de plein droit; mais l'ouverture peut être reportée à une époque antérieure à sa déclaration (art. 441). — Le mot déclaration est pris par le législateur dans deux acceptions différentes. Dans quelques articles il exprime la confession faite par le failli au greffe du tribunal qu'il a cessé ses payements, tandis que, dans d'autres articles, la déclaration s'entend du jugement qui proclame l'existence de la faillite.-Nous allons parcourir successivement les règles tracées par le code de commerce en ce qui concerne: 1° la déclaration que le failli est tenu de faire de la cessation de ses payements, déclaration qu'il doit faire suivre du dépôt de son bilan; 2o le jugement déclaratif que le tribunal de commerce prononce; 3° la fixation de l'époque à laquelle remonte la cessation de payements.

78. 1° Déclaration du failli.— Aux termes du § 1 de l'art. 438 de la loi nouvelle, « tout failli est tenu, dans les trois jours de la cessation de ses payements, d'en faire la déclaration au greffe du tribunal de commerce de son domicile. Le jour de la cessation de payements est compris dans les trois jours. » On avait proposé avec raison de substituer à ces mots : tout failli, ceux-ci: tout

pour défaut d'exécution dans les six mois de son obtention; que ces sortes de jugements ne sauraient être assimilés aux jugements par défaut ordinaires; que l'exécution de ces jugements ne peut se reconnaître à aucun des signes indiqués par l'art. 159 c. pr. civ. ; que, d'ailleurs, la péremption étant une véritable peine, infligée par la loi à la négligence du créancier en faveur du débiteur, il ne pourrait appartenir à un agent, en restant dans une inaction volontaire ou forcée, de détruire un état de choses qui existe en vertu d'un jugement, au détriment des créanciers qui en supporteraient seuls la peine, et à l'avantage du failli, qui de cette manière se trouverait rehabilité; — Considerant que la tierce opposition formée par les acquéreurs contre le jugement du tribunal de commerce du 13 oct. 1826, n'est pas recevable; qu'en effet, cette demande est formée devant le tribunal civil, actuellement saisi de la contestation entre les parties, qui n'a pas rendu le jugement contre lequel elle est formée, et qui conséquemment est incompétent pour en connaître : Que, d'ailleurs, l'annulation du jugement déclaratif de faillite ne changerait rien à leur position, Thibout étant actuellement dans la cause et ayant évidemment, dans le cas de cette annulation, le droit de former la demande intentée par Mollet, etc. >>

Le tribunal, statuant au fond, déclare le jugement du 4 août 1825 commun aux autres acquéreurs des biens vendus: « Considérant que les effets de la cession volontaire sont différents de ceux de la cession judiciaire, puisque la cession judiciaire lie tous les créanciers et même le failli, et que la cession volontaire ne saurait être obligatoire que pour ceux qui y ont concouru ou adhéré; que le jugement qui admet le failli au bénéfice de la cession judiciaire a donc pour effet d'annuler le traité de cession volontaire; que les formalités exigées pour arriver à la vente des biens du failli, en vertu de cette cession, étant une garantie accordée par la loi, tant au débiteur qu'à ceux de ses créanciers qui n'en avaient pas trouvé de suffisantes dans la cession volontaire, ces formalités doivent être observées scrupuleusement, et leur inobservation entraîne la nullité des ventes faites en leur absence, encore que la loi ne l'ait pas exprimé positivement; que l'inobservation de toutes ces formalités rend nulles les ventes qui ne pouvaient plus être validées que par le consentement des époux Thibout; - Que les adjudicataires ont acquis, malgré l'opposition de Thibout et de tiers qui n'avaient aucun droit de vendre; qu'ils ne

commerçant; mais, sur l'observation que le négociant qui se présente pour déclarer sa faillite est réellement failli (ce qui n'est pas exact, car le déclarant peut s'être trompé sur son état véritable et venir, avant le jugement, rétracter sa déclaration), la proposition n'eut pas de suite. La loi a fixé un délai si court (trois jours), pour empêcher certains créanciers de s'assurer par fraude un payement intégral et pour que les tiers soient promptement avertis. Remarquons, avec M. Bédarride, t. 1, n° 30 bis, qu'il n'y a aucune rigueur à resserrer ainsi le failli, car il doit connaître sa position.

79. C'est au greffe du tribunal de commerce de son domicile ou au greffe du tribunal civil jugeant commercialement que le failli doit faire sa déclaration. On comprend l'importance qu'il y a à fixer le siége de la faillite, puisqu'il règle la compétence. Par application de cette disposition, à laquelle il n'est pas fait d'exception, il a été jugé que le commerçant français qui a fondé deux maisons de commerce, dont une principale, dans une colonie française, et l'autre, comme comptoir et succursale de la première, dans la France continentale, ne peut être légalement déclaré en faillite que dans la colonie où se trouve le siége de son principal établissement; qu'en conséquence, le jugement de déclaration de faillite rendu par les juges du lieu de la succursale, doit être déclaré nul ainsi que les opérations qui l'ont suivi, et que les créanciers regnicoles, porteurs d'engagements contractés en France, doivent être renvoyés, pour la déclaration de faillite et ses suites, devant les juges de la colonie, et subir ainsi les différences de législation qui peuvent résulter du régime colonial (Req., 18 août 1841) (1). C'est, en effet, au lieu où il a son principal établissement, qu'aux termes des art. 102 et suiv. c. civ., doit être fixé le domicile d'un négociant, et qu'en conséquence doit être placé le domicile de la faillite. Il en est ainsi dans le cas même où la nature des spéculations commerciales du failli exige sa résidence dans un lieu autre que celui où il a son domicile (Nancy, 26 avril 1827, aff. Germain Thomas, V. sect. 15). - Il a été jugé que le lieu du domicile commercial d'un marchand, et, par suite, celui devant le tribunal duquel il est tenu de faire sa déclaration de faillite, résulte de l'ensemble des circonstances suivantes, à savoir: qu'il paye patente en ce lieu, qu'il y a ses bureaux, sa caisse, qu'il y figure parmi les notables de sa profession, qu'il y a passé un grand nombre d'actes authen

pouvaient ignorer ces vices; qu'ils n'avaient donc pas juste titre en leur faveur et, par conséquent, n'avaient pu prescrire; Et, sur la demande en garantie et en arrière-garantie, condamne Lavenette à indemniser les acquéreurs du préjudice qu'ils éprouvent; et considérant que Lavenette, habitant de la campagne, sans instruction et sans intérêt personnel dans cette affaire, agissait sous l'assistance, la direction et dans l'intérêt du notaire; qu'il résulte des faits de la cause qu'il n'était que son instrument, condamne celui-ci à garantir le sieur Lavenette de toutes les condamnations contre lui prononcées, etc. » — Appel des acquéreurs et de Du

reteste.

- Arrêt.

LA COUR; Adoptant les motifs, etc., met les appels au néant. Du 30 mars 1833.-C. de Metz.-M. Humbert, pr. (1) (Lecaudey. )— LA COUR; Attendu qu'il y a lieu à règlement de juges par la cour de cassation, lorsque deux jugements statuant d'une manière contradictoire entre les mêmes parties et sur un même fait, émanent de deux tribunaux qui ne ressortent pas de la même cour royale; Attendu qu'il est reconnu en fait que les frères Lecaudey, après avoir formé une maison de commerce à la Pointe-à-Pitre (fle de la Guadeloupe), ont établi plus tard un comptoir dans la ville de Bordeaux, et qu'ils ont annoncé dans les circulaires qu'ils firent distribuer à cette occasion, que ce comptoir ne serait que la succursale de leur maison principale ;-Allendu que la maison Lecaudey frères, ayant suspendu ses payements, a été déclarée en faillite par deux jugements émanés des tribunaux de Bordeaux et de la Guadeloupe; Attendu que, lorsqu'il n'existe qu'une seule maison de commerce, il ne peut y avoir qu'une faillite, et qu'elle doit être déclarée dans la ville où se trouve le siége du principal établissement; Attendu que, dans l'espèce, ce principal établissement ayant été reconnu être à la Guadeloupe, et la Guadeloupe étant une colonie française, les parties qui ont traité avec une maison établie dans cette colonie, ont su que le règlement de leurs droits serait fait par les juges de leurs débiteurs; que, dès lors, c'est illégalement que la poursuite de la faillite a eu lieu à Bordeaux; Déclare nulles les poursuites dirigées devant le tribunal de commerce de Bordeaux et tout ce qui en a été la suite; et, faisant droit à la demande en règlement de juges, renvoie les parties procéder devant le tribunal de la Pointe-à-Pitre.

-

Du 18 août 1841.-. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Bayeux, rap.

tiques où il dit avoir ce domicile, enfin, qu'il y a aussi souscrit des actes de commerce (Req., 3 avril 1844) (1). — V. Domicile. Mais il ne suffirait pas qu'un commerçant eût établi une maison de débit dans un lieu autre que celui du siége primitif de ses affaires (où il fait fabriquer les produits débités) pour qu'il fût réputé avoir son domicile dans ce dernier lieu; en l'absence d'une déclaration de changement de domicile, cette maison n'est réputée être que l'accessoire du premier établissement du commerçant, lequel détermine par suite le tribunal où doit être prononcée la faillite (même arrêt).

80. A peine avons-nous besoin de faire remarquer, avec M. Renouard, t. 1, p. 250, que la déclaration du failli n'attribue pas compétence au tribunal au greffe duquel elle a été faite; car il ne peut appartenir au failli de choisir ses juges. S'il a changé de domicile postérieurement à la cessation de ses payements, et antérieurement à sa déclaration au greffe, on considère comme son domicile celui qu'il avait à l'époque de la cessation de payements. Il a été jugé qu'au cas où le failli n'avait pas de domicile fixe, la faillite peut être déclarée par le tribunal du lieu où il a manqué à ses principaux engagements (Limoges, 27 janv. 1823, aff. Gélys, V. no 376).-V. plus bas sect. 15 et v° Compét. civ. des trib. d'arr., nos 135 et suiv.

81. Le 2 de l'art. 438, porte « qu'en cas de faillite d'une société en nom collectif, la déclaration contiendra le nom et l'indication du domicile de chacun des associés solidaires. » On voit que la loi ne s'occupe ni des sociétés en commandite, ni des sociétés anonymes non plus que de celles en participation. La raison de son silence à cet égard est facile à saisir. Dans les sociétés en nom collectif, en effet, tous les associés sont tenus solidairement, sur tous leurs biens, de toutes les dettes de la société. Il en résulte que tous les associés tombent en faillite quand la société vient à cesser ses payements. Il est donc indispensable que leur nom soit compris dans la déclaration au greffe.-M. Pardessus n'admet pas cependant que la faillite d'une société en nom collectif entraîne nécessairement celle de chaque associé. Suivant cet auteur (nos 1060 et 1111), l'effet d'une telle déclaration de faillite est seulement de mettre en prévention de faillite tous les membres de cette société ; mais ces associés peuvent avoir, dans leur fortune personnelle, bien au delà de ce qui est nécessaire pour la libérer; et puisqu'en vertu de la solidarité, ils sont tenus de toutes les dettes, ils peuvent se présenter pour les acquitter. En faveur de cette opinion, on peut ajouter que le caractère essentiel de la faillite est la cessation de payements, et que tant que les associés ne cessent point personnellement leurs payements, ils ne sont pas en faillite. Chaque associé peut avoir une maison de commerce à lui, entièrement indépendante de la société; il peut avoir des biens considérables, égaux ou supérieurs en valeur au passif de la société, et on ne saurait, sans injustice, les dessaisir de l'administration de tous leurs biens par le jugement qui déclare en faillite la société dans laquelle ils n'ont mis qu'une partie de leurs biens. M. Bravard, Manuel de droit comm., édit. de 1840, p. 525, dit aussi : « De ce que la loi ordonne l'apposition des scellés au domicile de chaque associé, il ne faut pas

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(1) (Faillite Durand.)- LA COUR ; Attendu qu'aux termes de l'art. 438 c. com., le failli est tenu, dans les trois jours de la cessation de ses payements, d'en faire la déclaration au greffe du tribunal de commerce de son domicile;-Attendu qu'il résulte des pièces produites devant la cour, que le sieur Durand, tombé en faillite, avait son domicile commercial à Paris; que, dès lors, c'était au greffe du tribunal de commerce de cette ville qu'il devait faire la déclaration de la cessation de ses payements; Attenda que ce domicile est constaté, notamment par la circonstance que le sieur Durand, marchand de bois et successeur de son frère, y payait sa patente, y avait ses bureaux, sa caisse et ses chantiers, y figurait parmi les notables de sa profession ; qu'il a passé à Paris un grand nombre d'actes authentiques dans lesquels il s'est déclaré domicilié à Paris; que toutes les poursuites commerciales, même celles suivies par les créanciers demeurant à Montargis, ont été dirigées contre lui, en lui faisant donner assignation à Paris; qu'enfin parmi les actes de commerce souscrits par le sieur Durand, et aussi produits devant la cour, il n'en est pas un seul constatant que le sieur Durand aurait souscrit de tels actes à Montargis dans le ressort du tribunal de commerce de cette ville; sans avoir égard aux procédures suivies devant le tribunal de commerce de Montargis, lesquelles sont déclarées nulles et non avenues, renvoie la cause et les parties devant le tribunal de commerce de la Seine, pour y procéder suivant les TOME XXIV.

conclure que chacun de ces associés soit par cela même persone nellement en faillite; car l'être moral société est parfaitement distinct de chacun des associés, lesquels ne peuvent être considérés personnellement comme faillis qu'autant qu'ils ont personnellement cessé leurs payements... sans quoi, par cela seul que la société dont ils font partie serait en faillite, il faudrait non-seulement faire apposer les scellés à leur domicile particulier, mais les mettre tous en état d'arrestation, les soumettre tous aux incapacités que la faillite fait naître, du moins jusqu'à ce qu'ils se fussent fait réhabiliter; et cela ne serait pas moins contraire, ce me semble, à la raison qu'au véritable esprit de la loi » (Conf. MM. Malepeyre et Jourdain, Sociétés comm., no 29). Suivant cette théorie, il a été jugé que la faillite d'une société n'entraîne pas la faillite individuelle d'un associé, à moins qu'il ne soit personnellement en état de cessation de payements, alors d'ailleurs qu'il n'est pas constaté qu'il était commerçant avant l'existence de la société (Paris, 26 mars 1840) (2).

En faveur de l'opinion contraire, on dit que l'art. 438 exige qu'en cas de faillite d'une société en nom collectif, sa déclaration de cessation de payements contienne le nom et l'indication du domicile de tous les associés solidaires, agissant ainsi, à l'égard de chacun d'eux, comme en ce qui concerne tout failli; que l'art. 458 veut qu'on appose les scellés au domicile de chaque associé solidaire, ce qui est bien leur enlever en fait l'administration de leurs biens, mesure que la loi n'ordonne pas à l'égard des commanditaires ni des débiteurs solidaires non associés ; qu'enfin l'art. 531 suppose l'état de faillite de chaque associé solidaire quand il décide « qu'en cas de faillite d'une société de commerce, les créanciers pourront ne consentir de concordat qu'en faveur d'un ou de plusieurs des associés. » Si l'on conservait quelques doutes sur la question, il suffirait, ajoute-t-on, de se reporter à la discussion à laquelle donna lieu l'art. 531, à la chambre des députés. « Le code de commerce se laisait sur les faillites, dit M. Renouard, rapporteur. Il s'en rapportait aux principes du droit commun sur la solidarité, sans permettre en aucun cas aux créanciers de traiter diversement plusieurs associés, encore que leur conduite méritât des conditions différentes. Un associé pouvait être absent pendant que ses coassociés dilapidaient l'actif; il pouvait être de bonne foi lorsque des actes frauduleux ou insensés engageaient et perdaient sa maison; sa fortune particulière, celle de sa femme ou de sa famille, pouvaient, en dehors de l'actif social, acquitter une forte part de la dette; et, devant toutes ces considérations, l'application rigoureuse des principes absolus de la solidarité et de l'unité fictive de la personne sociale empêcherait d'adoucir en rien sa position individuelle. Souvent cette rigueur blessait l'équité et nuisait aux créanciers. Il est juste d'accorder faveur à celui des associés qui, par une meilleure conduite, a mérité d'être distingué des autres, et qui peut offrir à ses créanciers des avantages particuliers. » Dans la séance de la chambre des députés, du 4 avril 1838, l'opinion à laquelle nous croyons devoir nous ranger fut développée et prévalut. La raison nous paralt justifier complétement la disposition de la loi. La distinction qu'on voudrait introduire entre les associés et la société

derniers errements; déclare le présent arrêt commun avec le sieur Durand, etc. Du 3 avr. 1844.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Jaubert, rap.Chégaray, av. gén., c. conf.-Morin et Nouguier, av. (2) Espèce : (Gault C. Dulot.) · La société Gault et comp. est déclarée en faillite. Les créanciers personnels de Gault demandent leur collocation au passif de la faillite.-Jugement qui les déclare non receva. bles, attendu que leurs créances sont étrangères à la société. Dulot, l'un des créanciers, forme contre Gault une demande tendante à faire déclarer la faillite de celui-ci.-Jugement du tribunal de commerce qui la déclare. -Sur l'appel, Gault soutient qu'avant l'existence de la société, il n'était pas commerçant, et que, d'ailleurs, ses créanciers n'ont exercé aucunes poursuites qui puissent témoigner qu'à leur égard il fût en état de cessation de payements. — Arrêt.

LA COUR; Considérant qu'en supposant que Gault fût personnellement commerçant à l'époque où il a contracté la société Gault et comp., il n'est pas établi qu'à l'égard de ses propres créanciers il soit en état de cessation de payements; -A mis et met l'appellation et ce dont est appel au néant;-Déboute Dulot de sa demande tendante à faire déclarer Gault personnellement en faillite, etc.

Du 26 mars 1840.-C. de Paris, 2 ch.

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