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qu'il soit nécessaire de les désigner par une qualification particu- | lière, on s'est borné à l'employer au lieu de couserver la rédaction plus prolixe des premiers projets. -Du reste, si la mission des premiers syndics a pris fin avant la quinzaine, un seul rapport pourra suffire.

468. Ce n'est plus au ministère public que les syndics doivent remettre leur rapport sur l'état apparent de la faillite, ainsi que le voulait l'ancien art. 488. On a cru devoir stimuler le zèle des syndics en soumettant leur travail à la révision du jugecommissaire. Dans la séance de la chambre des députés du 2 avril 1838 (V. Mon. du 3), on attaqua vivement cette innovation, par laquelle on compromettrait, disait-on, le caractère du juge-commissaire, en engageant à l'avance son impartialité et son indépendance. Mais on ne crut pas devoir céder à ces observations. L'expérience avait fait reconnaître que les rapports des agents ou des syndics étaient le plus souvent incomplets ou trompeurs, et l'on crut trouver un remède à cet inconvénient dans la surveillance éclairée du juge commissaire, qui est tenu, dans le cas où le mémoire à fournir par les syndics ne lui a pas été remis dans le délai fixé par l'art. 482, d'en avertir le ministère public, et de lui indiquer les causes du retard pour que celui-ci puisse agir en conséquence.

469. Nous estimons, au surplus, avec MM. Pardessus, n° 1163, et Esnault, loc. cit., que si, dans l'opinion du jugecommissaire, ce retard ou défaut absolu d'envoi d'un memoire, sans donner lieu à l'application de la loi pénale, était le résultat d'une négligence grave, le juge-commissaire devrait provoquer le remplacement des syndics. Les créanciers peuvent aussi se plaindre au juge-commissaire de ce retard qui leur préjudicie. D'un autre côté, lorsque les syndics invoquent des motifs légitimes pour justifier le retard qu'ils ont apporté à la confection de leur rapport, le juge-commissaire doit leur accorder un nouveau délai, dont il fixe la durée. Cela ressort de la rédaction de l'art. 482 qui veut que le juge-commissaire fasse connaître les causes du retard apporté par les syndics. M. Renouard, t. 1, p. 477, émet un avis conforme à cet égard.

470. Si le failli désire prendre communication de ce mémoire, on ne peut s'y opposer. Il est en droit d'y faire des réponses justificatives, sans préjudice de la plainte qu'il peut porter au juge-commissaire, et par suite au tribunal, pour les allegations mensongères qui seraient portées au rapport. Il a été jugé, avec raison, que les syndics qui, par suite d'erreurs graves commises dans leur rapport au ministère public sur l'état de la faillite, et d'opinions inconsidérées sur le caractère de cette faillite, ont occasionné des poursuites criminelles en banqueroute frauduleuse contre le failli, lequel a été ensuite acquitté, peuvent être condamnés à des dommages-intérêts envers ce même failli (Req., 14 déc. 1825, aff. Rebattu, V. no 437). MM. Pardessus, no 1164, et Esnault, t. 2, no 332, présentent sur ce point une doctrine conforme, qui n'est, du reste, que l'application du principe général contenu en l'art. 1382 c. civ. (V. Obligations). Mais il faudrait que l'intention de nuire ou l'imprudence eussent un caractère bien marqué pour que la responsabilité des syndics put être atteinte.

471. Une dernière mesure qui a pour objet d'atteindre les fraudes, encore trop fréquentes dans les faillites, est écrite dans l'art. 483 de la nouvelle loi, qui porte : « Les officiers du ministère public pourront se transporter au domicile du failli et assister à l'inventaire. Ils auront, à toute époque, le droit de requérir communication de tous les actes, livres ou papiers relatifs à la faillite. » C'est un devoir pour les magistrats dont il est question dans cet article, de ne rien négliger pour constater les délits ou les crimes qui, sans leurs investigations, pourraient demeurer impunis, abrités qu'ils sont sous l'apparence du malheur. ART. 3.-Vente des marchandises et meubles.-Recouvrements. Actes conservatoires.

472. Après la confection de l'inventaire, l'administration des

(1) Espèce : (Langlet C. Ripart et Alonzet.) · Les frères Langlet étant tombés en faillite, les sieurs Ripart et Alonzet, leurs débiteurs d'une somme de 2,806 fr., y tombèrent eux-mêmes. Ceux-ci convoquent leurs créanciers: la majorité accède à une remise de 50 p. 100, sous la condition expresse que le consentement sera unanime. Les syndics provi

syndics commence : les pouvoirs de la masse, ceux du failli passent sur leur tête, en vertu du jugement qui les a nommés. C'est pour rendre cette administration possible qu'aux termes de l'art. 484 c. com., « l'inventaire terminé, les marchandises, l'argent, les titres actifs, les livres et papiers, meubles et effets du débiteur, seront remis aux syndics, qui s'en chargeront au bas dudit inventaire. » — C'est par une déclaration au bas de la minute de l'inventaire que les syndics constatent la réception de tous les objets qui y sont décrits. Et comme, suivant ce qui a été dit au no 460, l'inventaire est rédigé en double minute, le juge commissaire doit veiller à ce que la reconnaissance des syndics soit consignée sur chacun des doubles de l'inventaire, et notamment sur celui qui doit rester déposé au greffe. C'est ce que MM. Lainné, p. 149, et Bédarride, no 368, observent également. 473. Les syndics doivent s'occuper, immédiatement après la remise qui leur est faite en vertu de l'art 484, de procéder à la liquidation de la faillite. Le recouvrement des dettes actives est l'acte le plus important de cette liquidation. Aussi l'art. 485 leur prescrit-il de continuer à y « procéder sous la surveillance du juge-commissaire.»-D'après l'ancien art. 492, les recouvrements étaient subordonnés à l'autorisation du juge commissaire. Le législateur de 1838 a laissé aux syndics une plus grande latitude à cet égard, mais en faisant toutefois un appel spécial à la surveillance du juge-commissaire.

474. Puisque les syndics sont chargés d'opérer les recouvrements, ils ont qualité pour donner toute quittance. C'est ce que porte expressément l'art. 471. — Il a été jugé, en conséquence, que les débiteurs du failli peuvent leur faire des offres réelles dans les cas où ils auraient pu en faire à leur créancier (Req., 11 mai 1825, aff. Divrande, V. n° 1172).

475. En cas de faillite des débiteurs du failli', les syndics doivent se présenter aux réunions de ses créanciers, procéder aux vérifications et affirmations de créances, produire aux ordres et contributions et remplacer le failli dans toutes les opérations de ces nouvelles faillites. Seulement, lorsqu'il se présente des difficultés graves, ils doivent, comme le fait remarquer M. Pardessus, n° 1172, demander l'autorisation du juge-commissaire, et, s'il y a lieu, celle du tribunal.-Il a été jugé, au surplus, que le failli peut intervenir dans la contestation engagée entre son débiteur et le syndic de ses créanciers, lors surtout qu'il s'agit de règlement de compte courant et que cette intervention doit particulièrement être accueillie en appel, lorsque les premiers juges, en reconnaissant la créance du faili, lui ont enjoint d'en affirmer la sincérité (Bruxelles, 21 juin 1820, aff. Godsal, V. n° 238-2°). On pourrait d'autant moins critiquer le mérite de cette solution aujourd'hui que l'art. 443 accorde positivement aux tribunaux le droit d'autoriser le failli à intervenir dans les instances engagées par ou contre ses syndics.-V. no 241.

476. De ce que les syndics ont capacité suffisante pour poursuivre le recouvrement des sommes dues au failli, fiut-il conclure qu'ils peuvent faire remise aux débiteurs du failli et que ce dernier est tenu de respecter l'accord intervenu entre ses syndics et son débiteur? Nous ne le pensons pas. Le mandat conféré aux syndics est relatif à l'administration de la faillite, aux rentrées de deniers, mais la loi ne les autorise aucunement à faire l'abandon des droits du failli. Toutefois, comme il peut y avoir intérêt pour la masse à ce qu'on fasse remise à un débiteur d'une partie de sa dette, afin d'assurer la rentrée du surplus, les syndics pourraient, selon nous, se faire autoriser par le juge commissaire ou par le tribunal, suivant les circonstances, à faire remise d'une partie de la dette. Ce serait alors par une transaction que cette remise aurait lieu, conformément à l'art, 487 c. com. et suivant ce que nous dirons prochainement (V. no 523). Déjà, sous le code, il avait été décidé, dans notre sens, que la remise partielle consentie par les syndics provisoires d'une faillite au profit d'un débiteur du failli ne peut être attaquée par ce dernier, alors que ces syndics ont eu soin de se faire autoriser par le tribunal (Paris, 21 déc. 1824) (1).

soires, après s'être fait autoriser par le tribunal, souscrivent ce traité. Le 27 janv. 1824, ces syndics rendent compte de tout ce qu'ils ont fait; il est passé un concordat avec les frères Langlet, qui le signent sans faire de réserves contre la remise, el qui cependant assignent, le 30 mars suivant, les sieurs Ripart et Alonzet en payement de l'intégralité des 2,806 fr.

477. On a vu au no 442 que les syndics sont tenus de verser à la caisse des dépôts et consignations l'excédant de ce que les recouvrements fournissent, après que le juge-commissaire a arbitré les sommes nécessaires pour les dépenses et les frais que néce-site l'administration de la faillite (V. aussi no 570). Mais, outre qu'il arrive souvent que les recouvrements opérés par les syndics ne sont pas suffi-ants pour faire face aux dépenses et aux frais qu'occasionne la faillite, il peut y avoir lieu aussi, dans l'intérêt de la masse des créanciers, de se défaire des objets sujets à déperissement ou dispendieux à conserver. C'est pourquoi l'art. 486 porte que << le juge-commissaire pourra, le failli entendu ou dûment appelé, autoriser les syndics à procéder à la vente des effets mobiliers ou marchandises. » — Ainsi, d'après cet article, l'autorisation du juge-commissaire est nécessaire aux syndics pour procéder à la vente; et cette autorisation est purement facultative de la part de ce magistrat, qui ne doit l'accorder qu'après avoir examiné s'il est réellement de l'intérêt de la masse de réaliser promptement l'actif. 478. Toutefois il a été décidé, d'une part, qu'aucune disposition de la loi n'autorise le juge à faire surseoir à la vente de marchandises d'un failli jusqu'à l'époque où il pourrait être forme un concordat ou contrat d'union (Bruxelles, 2 ch., 12 mars 1836, aff. Delianson C. ses syndics provisoires; V. cependant no 486); et, d'autre part, que le juge-commissaire est seul compétent pour autoriser les syndics à proceder à la vente des effets mobiliers et marchandises, et pour régler le mode de vente, et que ce droit n'appartient pas au juge des référés, encore bien qu'antérieurement à la faillite, il aurait prescrit des mesures provisoires qui n'auraient pas reçu exécution (Paris, 4 janv. 1849, aff. Gilbert, D. P. 49. 5. 194.)—La vente autorisée par l'art. 486 ayant pour objet de faire rentrer des fonds afin d'assurer la marche de la faillite, le juge-commissaire est seul à même d'apprécier l'urgence d'une telle vente. Aussi ne nous paraît-il pas qu'on puisse étendre à d'autres qu'à ce magistrat l'attribution dont parte l'art. 486.—Enfin, le code de 1807 était muet sur le point de savoir si le failli serait entendu. On a vu que la disposition citée de l'art. 486 lève toute incertitude à cet égard,

479. Quant au mode de vente des objets mobiliers appartenant à la faillite, il a donné lieu à de fréquentes contestations entre les courtiers de commerce, les commissaires-priseurs et autres officiers publics chargés de ces ventes.—Ainsi, il a été jugé, sous le code de 1807, que les courtiers seuls, à l'exclusion des commissaires-priseurs, avaient droit de procéder à la vente publique

Cette demande est rejetée par jugement du 20 septembre : « Attendu, y est-il dit, qu'il re suite du rapport fait par les syndics, lors du concordat, que lesdits Langlet ont eu connaissance des différents arrangements fails par les syndics dans l'intérêt de la masse, et qu'ils ont signé le concordat sans faire aucune réserve. » — Appel.

Arrêt.

LA COUR; Faisant droit sur l'appel interjeté par Langlet du jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 20 sept. 1824; Considérant que la remise consentie par les syndics provisoires de la faillite Langlet à Ripart et Alonzet, débiteurs de ladite faillite, l'a été régulièrement, sans fraude et dans l'intérêt de la masse des créanciers pour lesquels ils agissaient; — Met l'appellation au néant. Du 21 déc. 1824.-C. de Paris, 2 ch.-M. Cassini, pr..

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(1) (Radez C. Mallet, etc.)-LA COUR ( après délib. en ch. du cons.); Vu les art. 1 et 2 de la loi du 27 vent. an 9, 89 de la loi du 28 avril 1816 et 492 c. com.;- Attendu que la loi du 27 vent. an 9, portant création des commissaires-priseurs-vendeurs de meubles à Paris, leur a conféré exclusivement le droit de faire les prisées de meubles et les ventes publiques aux enchères d'effets mobiliers, avec interdiction à tous particuliers et à tous autres officiers publics de s'immiscer dans lesdites opérations; - Que l'art. 492 c. com., en autorisant les syndics provisoires de faillite à procéder à la vente des effets et des marchandises du failli aux enchères publiques, par l'entremise des courtiers et à la bourse, a dérogé au privilége exclusif que la loi antérieure du 27 vent, an 9 avait établi en faveur des commissaires-priseurs, et habilité les courtiers de commerce à faire des ventes pub iques aux enchères; Mais que cette faculté nouvelle, conferée aux courtiers de commerce sans aucune expression dont on puisse induire, en leur faveur, une attribution exclusive, n'a pas dépouillé les commissaires-priseurs d'un droit légal et acquis, droit qui a pu cesser d'être privatif, sans cesser à la fois d'être inhérent à la nature même de leur institution;-Attendu qu'aucun privilége ne peut être établi que par une disposition précise de la loi, et qu'il n'y a, dans l'art. 492 c. com., aucune disposition qui confère un privilége aux courtiers de commerce; - Que, dans cet état de la législation, la cour royale de Douai, en déclarant que c'est sans droit et sans

tant des marchandises que des effets mobiliers d'un failli, et que, lorsque les syndics d'une faillite, autorisés par l'art. 492 c. com. à faire vendre, soit publiquement, soit à l'amiable, les marchandises et effets mobiliers du failli, avaient adopté la voie de vente publique, ils ne pouvaient se refuser à employer le ministère des courtiers de commerce (Douai, 2o ch., 20 août 1825, M. Dupont, pr., aff. Radez C. Mallet). Mais, sur le pourvoi formé contre cet arrêt, il fut décidé, en sens contraire, que l'art. 492 c. com. (ancien), en autorisant les syndics provisoires d'une faillite à faire vendre les effets et marchandises du failli aux enchères publiques, par l'entremise des courtiers et à la bourse, avait bien dérogé au privilége exclusif établi par la loi du 27 vent. an 9 en faveur des commissaires-priseurs; mais qu'il ne les avait pas dépouillés du droit légal et acquis de procéder à ces ventes; que leur droit avait pu cesser d'être privatif ou exclusif, saus cesser d'être inhérent à la nature de leur institution, et qu'il y avait lieu de casser l'arrêt qui accordait aux courtiers une attribution exclusive (Cass., 27 févr. 1828)(1).-M. Pardessus, t. 4, p. 309, s'était prononcé pour l'opinion favorable aux commissaires-priseurs; mais M. Boulay-Paty, t. 1, p. 211 et 301, refusait aux commissaires-priseurs tout droit de procéder aux ventes publiques. La loi, voulant faire disparaître les soupçons de partialité et trancher la plupart des contestations, a imaginé de faire determiner par le juge-commissaire la classe d'officiers publics dont le ministère sera employé. « Il décidera, dit l'art. 486, § 2, si la vente se fera, soit à l'amiable, soit aux enchères pu bliques, par l'entremise de courtiers ou de tous autres officiers publics préposés à cet effet. » L'article ajoute : « Les syndics choisiront, dans la classe d'officiers publics déterminée par le juge-commissaire, celui dont ils voudront employer le ministère. »

480. Sous le code de 1807, c'était aux syndics de la faillite et non au juge-commissaire qu'il appartenait de nommer les officiers ministériels chargés de vendre les meubles et les immeubles du failli (Paris, 27 fév. 1813 (2).—Conf. 26 mai 1813; Paris, 2 ch., aff. Mercier C. min. publ.). La décision devrait encore être la même aujourd'hui par application de l'art. 486-2o précité. Seulement, le choix de la classe dans laquelle les syndics pourrout designer un officier ministériel est réservé au juge-commissaire. 481. Mais le juge-commissaire peut-il désigner, en dehors des courtiers et des commissaires-priseurs, une autre classe d'officiers publics dans laquelle les syndics choisiront celui qui devra procéder à la vente? La négative résulte de la discus

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qualité que les commissaires-priseurs Mallet et Révillion ont procédé à la vente du mobilier garnissant l'auberge du failli Gay, en leur faisant défense de recidiver, et en les condamnant, pour avoir fait cette vente, aux dommages-intérêts du courtier de commerce Radez, accordé aux courtiers de commerce un privilége qui ne leur est pas conféré par l'art. 492 c. com., et dénié aux commissaires-priseurs un droit que leur confèrent les lois de leur création; - D'où il résulte, tout à la fois, violation de l'art. 492 c. com. et des lois des 27 vent. an 9 et 28 avril 1816;— Casse l'arrêt de la cour de Douai, du 20 août 1825.

Du 27 fév. 1828.-C. C., ch. civ.-MM. Brisson, pr.-Quéquet, rap.Joubert, av. gén., c. conf.-Petit de Gatines et Dalloz, av.

(2)) Espèce: (Fromont C. min. pub.)-17 déc. 1812, ordonnance du juge-commissaire de la faillite Suzanne, qui commet, pour procéder à la vente des meubles et immeubles du failli, les sieurs Metzanger et Boucher. - Le sieur Froment, syndic définitif de la faillite, pensant que c'était à lui à nommer les officiers ministériels qui devaient procéder à cette vente, se pourvut devant le tribunal de commerce de la Seine contre la nomination faite par le juge-commissaire. — 20 janv. 1813, jugement qui, « attendu que toutes les dispositions de la loi établissent le juge-commissaire surveillant des opérations de la faillite, et que, dans tous les cas où il décide, les syndics sont soulagés de lear responsabilité; maintient les nominations faites par le juge commissaire, etc., et déboute le syndic des fins de sa requête. » — Appel par le syndic. Arrêt.

LA COUR ; — Considérant que les syndics d'une faillite, représentant la masse des créanciers, exercent sous leur responsabilité et sans limitation, les droits qui appartiennent à chacun d'eux; Que le choix des officiers ministériels est une des attributions du syndicat; - Qu'au surplus, les tribunaux de commerce, aux termes de l'art. 442 c. pr. civ., ne peuvent connaître de l'exécution de leurs jugements, et que, comme juges d'exception, ils n'ont de compétence que dans les cas spécialement déterminés par la loi; Emendant, etc.

Du 27 fév. 1813.-C. de Paris, 1 ch.-M. Tripier, av.

sion législative et d'une circulaire du ministre, du 26 déc. 1843 (D. P. 44. 2. 50., note); M. Bédarride, no 379, reconnaît au contraire au juge-commissaire un droit facultatif non susceptible de recours. La question est controversée dans la jurisprudence (Voy. D. P., eod.). Elle est examinée avec étendue vo Vente publ. de meubles. C'est là aussi qu'on trouvera la conciliation de l'art. 486 c. com. avec l'art. 2 de la loi du 25 juin 1841, duquel il résulte que les courtiers de commerce, dans les lieux où il en existe, n'ont d'attributions que pour la vente des marchandises seulement, et qu'à l'égard du mobilier du failli il ne pourra être vendu aux enchères que par le ministère des commissaires-priseurs, notaires, huissiers ou greffièrs de justice de paix, conformément aux lois et règlements qui fixent les attributions respectives de chacun d'eux.-M. Esnault, no 339, fait très-bien remarquer que les officiers publics qui procèdent aux ventes après faillite doivent se garder de toute complaisance coupable en faveur des tiers, car la loi leur applique en ce cas les peines de la complicité (art. 7 et 8 de la loi citée).

482. Au reste, le failli ne peut s'opposer à la vente de ses meubles jusqu'a ce que la remise des effets que lui réserve la loi ait été effectuée (Paris, 29 avr. 1812, aff. Devinck, V. no 206-5o).

483. Par une application du principe en vertu duquel les actions individuelles des créanciers sont suspendues par l'état de faillite du débiteur, il faut reconnaître qu'un simple créancier ne peut être autorisé à poursuivre la vente du mobilier, dans le cas où les syndics ne procéderaient pas dans un délai déterminé. Cette vente ne pourrait surtout être autorisée par le juge des référés, même en faveur d'un créancier porteur d'un litre exécutoire, car il est incompétent à cet égard. Il a été jugé ainsi sous le code de 1807: « Considérant, porte l'arrêt, que la question de savoir si Clave avait le droit de faire procéder à la vente du mobilier du failli, était hors des attributions du juge du référé; infirme» (Paris, 3 ch., 25 mars 1830, M. Lepoitevin pr., aff. synd. Duval C. Clave). Mais les créanciers peuvent recourir au juge-commissaire pour que ce magistrat invite les syndics à agir conformement aux intérêts de la masse.

484. Comme les ventes dont il s'agit ont pour objet, non pas d'arriver à une liquidation finale du passif de la faillite, mais de faire rentrer des fonds soit pour pourvoir aux frais qu'occasionne l'administration, soit pour réaliser l'actif, il est convenable, dit fort bien M. Pardessus, n° 1170, qu'elles soient faites au comptant; les crédits que les syndics accorderaient en dehors de ceux d'usage, sans autorisation expresse du juge-commissaire, seraient à leurs risques et périls.

485. Si le failli était un agent de change, un courtier, un notaire, un huissier ou tout autre officier ministériel pour lesquels la loi admet le droit de présenter un successeur, les syndics pourraient user de cette faculté à sa place. Dans le fait, le gouvernement admet cette présentation de la part des créanciers, quoique à la rigueur il aurait pu s'y refuser. Mais nous croyons, avec M. Pardessus, loc. cit., qu'une autorisation de justice est indispensable, et comme le titre et la clientèle dont il s'agit ne sont pas des objets commerciaux, les syndics, après avoir consulté le juge-commissaire, doivent s'adresser au président du tribunal civil, statuant en référé, lequel fixe le prix de la cession de la charge, d'accord avec la chambre de la corporation de cet officier ministériel.

486. Remarquons bien que la faculté accordée par l'art. 486 de vendre les marchandises et les effets mobiliers n'est qu'une exception et non une règle générale pour toutes les faillites. La pensée du législateur a été, en effet, de maintenir autant que possible les choses en un tel état que le failli puisse, en cas de concordat, reprendre la direction de son commerce. Or, il est impossible au failli de se remettre utilement à la tête de ses affaires, et par conséquent de se mettre en mesure de satisfaire aux clauses du concordat, alors qu'il est dans la nécessité de se procurer de nouvelles marchandises à un moment où il a perdu son crédit et ses ressources. C'est pourquoi l'autorisation du jugecommissaire est exigée pour que les syndics puissent procéder à la vente dont il est question.

487. L'art. 486-2o n'accorde la faculté de vendre que l'actif mobilier. Les immeubles ne peuvent être vendus par les syndics qu'après la formation de l'union, ainsi que nous l'expliquerons

sous l'art. 534. Le juge-commissaire ne peut donc pas autoriser les syndics à vendre les immeubles de la faillite avant celle époque il ne le pourrait pas alors même que le failli donnerait son consentement à une pareille vente, car les biens du failli sont le gage des créanciers et il n'a pas la disposition d'un tel gage: l'art. 486 ne permet que la vente du mobilier; il indique ainsi clairement qu'il entend laisser les immeubles en dehors de cette exception (Conf. MM. Pardessus, n° 1171, et Goujet et Merger, vo Faillite, no 371). Mais ne devrait-on pas décider autrement et admettre le droit de vendre les immeubles dans l'hypothèse où le concours des créanciers se joindrait à celui du failli et du juge-commissaire pour en provoquer l'aliénation ?— Pour la négative, on peut dire que le failli est incapable et que son consentement à une pareille vente ne saurait l'obliger. Toutefois, il nous paraît plus conforme aux principes de reconnaître la validité d'une aliénation faite dans les conditions que nous venons de supposer. Le failli, en effet, n'est incapable que par rapport à ses créanciers. On a vu que, nonobstant le dessaisissement dont il est frappé, il s'oblige tres-valablement vis-à-vis des tiers qui peuvent agir contre lui, pourvu qu'il n'en résulte aucun préjudice pour la masse. Or, si cette masse consent à un acte du failli, elle ne peut plus l'attaquer: rien ne s'oppose plus à ce que le failli soit traité comme toute personne capable. Dans notre espèce, la vente des immeubles sera donc valablement faite. Mais remarquons que les créanciers seuls, qui auront autorisé la vente, seront non recevables à l'attaquer. Les dissidents ne sauraient être liés par la majorité.

488. Reconnaissons, du reste, avec M. Pardessus, que l'interdiction de vendre les immeubles ne s'étendrait pas à la location, si le bail était sur le point d'expirer. Mais ce n'est que dans des cas rares, et avec l'autorisation de justice, que les syndics peuvent faire des baux d'immeubles par anticipation, et la juridiction civile pourrait seule autoriser de tels actes (arg. art. 487).

488. Quand le produit des ventes fournit des sommes supérieures à celle que le juge-commissaire arbitre être nécessaire pour l'administration de la faillite, l'excédant est versé à la caisse des dépôts et consignations, comme celui des recouvrements. - V. nos 442 et 570.

490. « A compter de leur entrée en fonctions, les syndics, porte l'art. 490, seront tenus de faire tous actes pour la conservation des droits du failli contre ses débiteurs (tels, par exemple, que des saisies-arrêts entre les mains des débiteurs du failli).— Ils seront aussi tenus de requérir l'inscription aux hypothèques sur les immeubles des débiteurs du failli, si elle n'a pas été requise par lui; l'inscription sera prise au nom de la masse par les syndics, qui joindront à leurs bordereaux un certificat constatant leur nomination. » — Cet article ne dit pas par qui doit être fourni le certificat constatant la nomination des syndics. L'ancien art. 499 ordonnait de joindre aux bordereaux un extrait du jugement de nomination. Les premiers projets de la nouvelle loi indiquaient que le certificat en question serait donné par le greffier, et, dans l'usage, c'est ce fonctionnaire qui le délivre. Si l'article ne fait pas mention des mots du greffier, c'est parce qu'ils furent omis dans le projet de 1838 et qu'on ne songea pas à les retablir (Conf. M. Renouard, t. 1, p. 495). Il est bien évident que le défaut de ce certificat ne pourrait être une cause de nullité de l'inscription qui aurait d'ailleurs été régulièrement prise, car il n'est requis que pour prémunir le conservateur des hypothèques contre les surprises qu'on pourrait faire à sa bonne foi.

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491. M. Lainné fait observer avec raison qu'il convient, pour que le failli puisse se prévaloir, en cas de concordat, des inscriptions prises sur ses débiteurs, qu'elles soient faites au nom de la masse, comme exerçant les droits et actions du failli, et qu'en outre il soit stipulé, dans l'acte de concordat, que le failli est et demeure subrogé dans tous les effets de ces inscriptions. « Avec ces précautions, dit M. Lainné, p. 163, non-seulement le failli profitera de l'inscription, mais, en justifiant au conservateur des hypothèques, de l'extrait du concordat et du jugement d'homologation, il pourra faire changer l'élection de domicile, et donner mainlevée, s'il y a lieu, sans qu'il soit besoin du secours des syndics. >>

492. Les syndics étant tenus d'accomplir tous actes conservatoires, ils doivent poursuivre le recouvrement des billets dus

an failli et dont l'échéance est arrivée (V. no 473). Ils doivent présenter à l'acceptation ceux qui sont soumis à cette formalité. A defaut d'acceptation ou de payement, ils doivent faire protester et exercer ensuite le recours contre les endosseurs.

493. M. Bédarride, no 411, examine la question de savoir si, dans l'hypothèse où des valeurs commerciales auraient été transmises en compte courant par des correspondants du failli, ceux-ci pourraient, en cas de non-payement, en exiger le retour pur et simple sous l'obligation d'en créditer le failli, et il la résout par la négative. - La question est très-controversée, nous l'avons résolue en ce sens v° Compte courant, nos 45 et suiv.V. cependant en sens contraire un arrêt récent de la cour de Paris, du 12 janv. 1851, aff. Gouin, D. P. 51. 2. 75.

494. Aux termes du dernier alinéa de l'art. 490, les syndics sont tenus, en outre, de prendre inscription, au nom de la masse des créanciers, sur les immeubles du failli dont ils connaissent l'existence. L'inscription est reçue sur un simple bordereau énonçant qu'il y a faillite et relatant la date du jugement par lequel ils ont été nommes. Cette disposition a fait naître une

des difficultés les plus graves de la matière. On demande quel est le but et l'effet de cette inscription. Suivant quelques auteurs, notamment MM. Pardessus, no 1168, et Bédarride, t. 1, no 416,

(1) (Devaux C. Vivier-Deslandes.) - LA COUR ;-...Considérant qu'on oppose vainement, en ce qui touche les immeubles, l'inscription prise par les syndics Vivier; que cette inscription, prise en vertu de l'art. 500 c. com., ne confère aux créanciers aucun droit d'hypothèque, et n'a d'autre effet que de donner un plus grand degré de publicité à la faillite; qu'ainsi, son existence ne saurait nuire aux droits des créanciers de la succession Vivier père...

Du 20 août 1832.-C. de Bourges, 1 ch.-M. Mater, 1er pr.

(2) Espèce: (Syndics Deleutre et Mantel C. dame Deleutre.) — 16 juill. 1809, contrat de mariage du sieur Delentre fils, alors négociant et associé du sieur Mantel, avec la demoiselle Gueymard-Dupalais. —- Les époux adoptent le régime dotal, et le sieur Deleutre père intervient à l'acte pour consentir au profit de sa future belle-fille, une hypothèque spéciale sur son moulin de l'Épi, ayant pour objet de garantir la dot. - En 1824, décès de Deleutre père. Ses biens sont partagés entre ses trois enfants, et le moulin de l'Epi écheoit à Deleutre fils, négociant.

3 janv. 1831, faillite de la maison Deleutre et Mantel. Le 15 du même mois, la dame Deleutre prend inscription pour la première fois sur le moulin de l'Épi. Le 24 janvier suivant, les agents de la faillite prenDent une inscription semblable, au nom de la masse des créanciers, conformément à l'ancien art. 500 c. com.

Les syndics définitifs ont poursuivi la vente du moulin de l'Épi qui a été adjugé pour un prix de 80,000 fr. reste entre les mains des adjudicalaires. Par exploit du 27 juin 1833, ils ont assigné la dame Deleutre pour voir dire qu'elle n'avait aucun droit d'hypothèque sur l'immeuble dont il s'agit, parce qu'il n'appartenait pas au failli lors de la célébration de son mariage (ancien art. 551 c. com.), et pour voir ordonner, par suite, la radiation de l'inscription par elle prise.-La dame Deleutre a répondu que l'art. 551 précité ne s'applique pas aux immeubles survenus au mari commercant par donation ou succession, mais seulement aux immeubles par lui acquis pendant le mariage; que, dans tous les cas, le moulin de l'Épi, ayant été hypothéqué à la dé enderesse par Deleutre père, n'avait pu arriver à Deleutre fils que grevé de cette hypothèque conventionnelle.

19 oct. 1833, jugement du tribunal d'Avignon qui déclare que la dame Deleutre n'a pas droit à une hypothèque légale, et que, quant à l'hypothèque conventionnelle que lui avait consentie son beau-père, elle est sans effet, faute d'avoir été inscrite avant la faillite. Le 25 fév. 1834, la dame Deleutre a interjeté appel de ce jugement, et, le même jour, elle a pris incription tant sur les biens de son mari que sur ceux de Deleutre père et de ses héritiers. — 9 juill. 1834, arrêt infirmatif de la cour de Nîmes, qui maintient l'inscription du 15 janv. 1851.-Mais cet arrét, déféré à la censure par les syndics, est cassé le 23 août 1837 (V. no 531-7°), et la cour de Montpellier, saisie par renvoi, rend, le 22 mai 1838, un arrêt qui confirme le jugement du tribunal d'Avignon, et toutefois donne acte à la dame Deleutre des réserves expresses par elle faites pour obtenir la séparation des patrimoines de son beau-père et de son mari. Dès le 2 déc. 1837, la dame Deleutre avait introduit, tant contre les syndics que contre les acquéreurs du moulin de P'Épi, une action tendant à cette séparation de patrimoines. En conséquence de cette action, elle demandait à être payée sur le prix dudit moulin considéré comme propriété de Deleutre père, du montant de sa dot mobilière s'élevant à 45,000 fr., le tout par préférence aux créanciers de la faillite de Deleutre fils. Elle invoquait comme ayant conservé le privilége de la séparation, son inscription du 25 fév. 1834, et, en outre, une inscription nouvelle par elle prise le 24 juill. 1838.

elle n'a pour objet que de rendre plus notoire l'état de faillite et d'empêcher que les immeubles soient vendus à l'insu et au préjudice de la masse, sans pouvoir lui conférer un droit hypothécaire contre les créanciers postérieurs à la faillite. Sous l'empire du code, il était de doctrine et de jurisprudence que l'inscription ordonnée par l'art. 500 ne créait aucun droit hypothécaire en faveur des créanciers. C'est ce qu'enseignaient MM. Locré, Esp. du c. com., art. 500; Pardessus, loc. cit., et Troplong, Hypoth., t. 3, no 651. Il avait été jugé, dans ce sens, que l'inscription prise par les syndics, en vertu de l'art. 500, ne conférait à la masse des créanciers aucun droit hypothécaire; qu'elle était ordonnée dans le but unique de multiplier les avertissements à donner au public (Liége, 30 avril 1842, 1re ch., aff. Deglain C. Francotte). Par suite, cette inscription n'établissait, an profit des créanciers chirographaires du failli, aucun droit de préférence sur les biens advenus par succession à leur débiteur, au préjudice des créanciers de la succession, et n'empêchait pas ceux-ci de demander la séparation des patrimoines, encore qu'ils n'eussent pas pris inscription dans les délais de l'art. 2111 c. civ. (Bourges, 20 août 1832) (1). Depuis la loi de 1838, il a été décidé dans ce sens, mais pour des espèces nées sous le code de 1807 (Req., 22 juin 1841) (2). En conséquence de cette

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27 janv. 1840, arrêt de la cour de Nîmes qui infirme un jugement du tribunal d'Avignon qui avait déclaré cette demande non recevable et mal fondée. Cet arrêt, qui fait connaitre les diverses exceptions des syndics, est ainsi conçu : -- « Attendu que la dame Deleutre a acquis un droit d'hypotheque sur le moulin de l'Épi par son contrat de mariage en date du 16 juill. 1809, acte par lequel son beau-père lui assurait sur cet immeuble la reprise de sa dot et de toute somme qui serait touchée de son vivant par son fils au nom et dans l'intérêt de l'appelante; Qu'au décès du sieur Deleutre père, arrivé en 1824, et par suite du partage de sa succession, son fils aîné est devenu propriétaire de l'immeuble hypothéqué à sa femme par le contrat de mariage ci-dessus relaté; Que Delentre fils étant tombé en faillite, sa femme a formé contre les syndics de la masse une action qui a pour objet de faire séparer du patrimoine du faili la portion qui lui est advenue du patrimoine de son père, débiteur originaire de l'appelante, afin qu'elle puisse exercer ses droits hypothécaires sur cet inimeuble ainsi séparé du restant de la masse de la faillite; Qu'à cet effet, la dame Deleutre a pris inscription sur le moulin de l'Épi, à la date des 25 fév. 1834 et 24 juill. 1858; - Que, pour repousser cette demande en séparation de patrimoine, les syndics opposent en première ligne à la dame Deleutre l'autorité de la chose jugée, qu'ils font résulter de ce que le but de la demande est d'arriver à exercer les droits hypothécaires sur un immeuble ayant autrefois appartenu au sieur Deleutre père, tandis qu'un jugement en date du 10 déc. 1834, confirmé par un arrêt du 20 juin 1838, aurait décidé qu'il ne compétait a la dame Deleutre aucun droit hypothécaire sur les biens de la masse, soit qu'ils provinssent de Deleutre fils, soit qu'ils provinssent du chef de Deleutre père ; - Attendu, sur cette première exception, qu'aux termes de l'art. 1351 c. civ., diverses conditions sont nécessaires pour constituer l'autorité de la chose jugée; qu'il faut notamment que la chose demandée soit la même, que la demande soit formée par les parties et contre elles en la même qualité; que, dans la cause évacuée par l'arrêt de la cour de Montpellier, l'objet de la demande des syndics était d'obtenir la radiation d'une inscription prise en 1831 par la dame Deleutre sur une partie des biens de la faillite; — Que, dans la cause actuelle, l'objet de la demande formée par la dame Deleutre est d'obtenir la séparation des patrimoines de son beau-père et de son mari; — Que l'objet des deux demandes est donc different; - Que, dans la première procédure, la dame Deleutre défendait comme créancière du failli son mari; que, dans la cause actuelle, elle demande comme créancière de Deleutre, son beau-père; Que les parties n'agissent donc pas dans la même qualité; que l'arrêt de la cour de Montpellier, dont on invoque les termes à l'appui de l'exception proposée, préjuge lui-même cette question d'autorité de la chose jugée dans un sens contraire à celui que veulent lui donner les syndics, puisqu'on y lit qu'il n'entend rien décider quant à la demande en séparation de patrimoines, déjà formée alors par la dame Deleutre à laquelle il réserve, à cet égard, tous ses droits, réservant en même temps aux syndics leurs exceptions contraires; - Qu'ainsi, il n'y a pas lieu de s'arrêter à cette première exception;

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>> Quant à l'exception de prescription que l'on fait résulter de ce que l'appelante ne réclamant pas par sa demande en séparation de patrimoines, l'immeuble même provenant du chef de Deleutre père, mais seulement le prix de cet immeuble, sa demande ne porterait plus que sur la revendication d'un objet mobilier, et que, comme teile, elle seraitprescrite faute d'avoir été intentée dans le délai fixé par l'art. 880 c. civ., premier alinéa; qu'il est généralement admis, et que les premiers juges eux-mêmes ont admis que le créancier du défunt pouvait exercer la demande en

doctrine, il a été reconnu que les créanciers hypothécaires d'une succession échue à un commerçant déclaré plus tard en état de

séparation des patrimoines sur le prix de l'immeuble aliéné, mais non payé, comme il l'aurait exercée sur l'immeuble lui-même; que ce raisonnement ne peut reposer que sur cette considération, que le prix représentant un immeuble, ressort comme lui nature d'immeubles, et qu'alors en lui appliquant, en tant qu'immeuble, le § 2 de l'art. 880 c. civ., il serait contradictoire de lui appliquer en même temps la prescription, que le § 1 du même article n'a établie que pour les objets mobiliers; Qu'il faut donc admettre que l'action en séparation de patrimoines peut s'exercer sur le prix comme il paraissait s'exercer sur l'immeuble, même aussi longtemps que l'on peut en constater l'existence entre les mains de l'héritier, le § 1 de l'art. 880 ne s'appliquant qu'aux objets mobiliers qui étaient tels au moment de l'ouverture de la succession, et non pas aux prix des immeubles aliénés depuis le décès de l'auteur, soit par l'héritier, soit par ses représentants; qu'ainsi il y a lieu de repousser le moyen de prescription admis par le tribunal;

>> Quant à l'exception tirée de la novation que l'on fait résulter de ce que, dans divers actes et dans plusieurs circonstances, la dame Deleutre aurait accepté l'héritier pour son débiteur, et que, par suite, elle ne serait plus recevable, aux termes de l'art. 879 c. civ., à exercer son recours sur les biens du défunt : - Attendu que la novation en pareille matière est une renonciation de la part du créancier du défunt à ses droits acquis; Que, dès lors, on ne doit pas la supposer facilement de sa part, et qu'elle ne doit être admise que lorsque les actes qui sont relevés contre lui ne peuvent s'expliquer que par l'intention où il était d'accepter pour débiteur l'héritier à la place du défunt; - Que le créancier du défunt qui reçoit ou qui exige de l'héritier le payement des intérêts des sommes qui lui sont dues hypothécairement sur les immeubles de la suc cession, ne doit pas être considéré comme ayant voulu nécessairement faire novation à son titre, puisque rien ne prouve qu'il ait entendu recevoir ces interêts de l'héritier payant en son nom personnel et comme héritier, plutôt qu'en sa qualité de détenteur des immeubles hypothéqués à la créance; Que les diverses circonstances révélées par le tribunal de première instance, telles que la production de ses titres dans l'ordre ouvert sur l'héritier, les poursuites dirigées contre le même héritier en payement du capital des sommes pour lesquelles on exerce aujourd'hui sur les biens du défunt l'action en separation de patrimoines, que toutes ces circonstances devraient en général entraîner la novation; mais qu'il ne faut pas, dans l'appréciation de ces circonstances, faire abstraction des faits speciaux et particuliers de la cause; Qu'il faut considérer que ma lame Deleutre n'était pas seulement créancière du défunt, mais qu'elle l'était aussi et en même temps de l'héritier; que ce dernier même était son debiteur principal, comme ayant reçu le montant de sa dot, tandis que Deleutre père n'était que son débiteur subsidiaire comme caution de son fils; - Que, dans une pareille position, la dame Deleutre a pu exercer toutes les voies légales pour se faire payer du montant de sa créance par son débiteur principal, sans qu'on puisse lui opposer ces poursuites comme une novation à sa créance et une renonciation au recours qui lui compétait virtuellement sur les biens hypothéqués par la caution, dans le cas de non-payement par le débiteur principal des sommes à elle dues; Qu'il y a donc lieu encore de rejeter l'exception tirée de la novation;

> En ce qui concerne le moyen tiré de ce que l'immeuble sur lequel porte la demande en séparation de patrimoines, se trouvant aujourd'hui grevé d'hypothèques du chef de l'héritier, antérieures par leur inscription aux inscriptions prises par la dame Deleutre les 25 fév. 1834 et 24 juill. 1838, cette dame, alors que son action serait déclarée recevable, n'en pourrait cependant retirer aucune utilité: Attendu que la dame Deleutre reconnaît elle-même que, n'ayant pas fait inserire sa demande en séparation de patrimoines dans les délais fixés par l'art. 2111 c. civ., il ne lui compete plus aucun privilége sur les biens du défunt Deleutre ;Qu'aussi ce n'est que par la voie hypothécaire qu'elle poursuit son action sur les immeubles qui ont été affectés comme sûreté de sa dot dans le contrat de mariage du 16 juill. 1809, et qui se trouvent encore entre les mains de l'héritier de la caution; Que n'ayant plus sur ces biens qu'une simple action hypothécaire, elle se trouve soumise, quant à l'exercice de ce droit, à l'ordre des inscriptions prises non-seulement du chef de Deleutre père, mais encore du chef de son héritier; - Attendu que les syndics de l'héritier failli ont pris inscription au nom de la masse sur tous les biens de Deleutre fils, notamment sur le moulin de l'Epi, objet de la demande en séparation de patrimoines; que cette inscription est à la date du 24 janv. 1831; - Que, par sa date, elle primerait de beaucoup les inscriptions non annulées de la dame Deleutre, et que celle-ci, dès lors, n'arrivant plus pour se faire payer qu'après les créanciers de son mari, n'aurait sur les biens qu'un recours complétement inutile; Qu'il y a lieu d'examiner ici si l'inscription que les syndics prennent au nom de la masse sur les biens de la faillite, en vertu de l'art. 300 c. com., est une véritable inscription conférant à la masse des droits hypothécaires, ainsi que le prétendent les intimés, ou si cette inscription n'est qu'une simple formalité exigée seulement pour donner plus de pu

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faillite, qui n'avait pas pris inscription du vivant de leur débiteur, ni dans les six mois de son décès, afin de conserver le pri

blicité à la faillite, mais ne conférant aucuns droits nouveaux à la masse des créanciers, ainsi que le soutient l'appelante ; · Attendu que l'art. 2148 c. civ. a déterminé les formalités à remplir dans la rédaction des inscriptions hypothécaires ordinaires, et que plusieurs d'entre elles ne peuvent pas être observées dans l'inscription prescrite par l'art. 500 c. com.; - Qu'ainsi, on n'y désigne pas les noms, prénoms, domiciles des inscrivants; qu'on n'y indique pas la somme pour laquelle on inscrit, ni la date et la nature de l'acte en vertu duquel l'in-cription est requise; que les syndics ne représentent même au conservateur aucun titre, ni en original ni en brevet, leur donnant droit à s'inscrire ; Que, sous le rapport de la forme déjà, il y a des différences importantes entre l'inscription hypothécaire ordinaire et celle que prennent les syndics, en vertu de l'art. 500 c. com.; Attendu, quant aux effets de cette inscription, qu'il est de principe que l'inscription par elle-même n'est pas l'hypothèque; qu'elle ne fait que constater vis-à-vis des tiers l'existence d'une bypothèque consentie dans un acte antérieur; qu'ainsi l'inscription prise par les syndics, en vertu de l'art. 500 c. com., ne saurait créer à elle seule des droits hypothécaires au profit de la masse; que, dans la cause, tous les créanciers composant la masse de la faillite de Deleutre fils sont des créanciers chirographaires; que, dès lors, l'inscription prise en leur nom le 24 janv. 1831 n'a pas pu leur assurer l'exercice d'un droit d'hypothèque que ne leur assurait pas le titre dont ils étaient porteurs; Que la masse des créanciers d'une faillite n'étant que les créanciers pris collectivement, ne peut pas avoir d'autres droits que ces créanciers eux-mêmes, et que si chacun d'eux pris individuellement n'est que créancier chirographaire, on ne peut pas de la réunion de tous ces chirographaires faire un même créancier ayant des droits hypothécaires; Qu'il serait d'ailleurs contraire à l'économie de la loi sur les faillites, et notamment aux art. 443 c. com. et 2146 c. civ., que des créanciers qui n'étaient que chirograpbaires avant la faillite pussent requérir un droit d'hypothèque après cette époque; Qu'on oppose vainement que ce droit que l'on refuse aux créanciers du failli, on l'accorde cependant à sa femme dont les inscriptions, comme celles prises par les syndics, sont postérieures à la faillite; - Qu'en effet, la femme ne s'est pas fait inscrire comme creancière de son mari, mais bien sur un immeuble ayant appartenu à son débiteur personnel, Deleutre père, immenble qu'elle retrouve dans les mains de ce dernier; Qu'il est juste qu'avant d'être employés à payer les dettes de l'h ritier, les biens provenant de l'auteur soient d'abord employés à solder les créanciers de celui-ci; Qu'ainsi, le droit et l'équité se reunissent pour assurer à la dame Deleutre le recouvrement de ses créances dotales sur l'immeuble que son beau-père lui avait affecté dans ce but par son contrat de mariage de 1809. » Pourvoi des syndics. Arrêt.

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LA COUR; - Attendu Sur le premier moyen, tiré de la novation : que, pour décider qu'il n'y avait pas eu de novation dans l'espèce actuelle, la cour de Nimes s'est fondée sur des actes dont elle a fait une juste interprétation;

Sur le deuxième et le troisième moyen qu'on faisait résulter : 1o de la prescription; 2° d'une prétendue violation de l'autorité de la chose jugée: - Attendu, sur la prescription, qu'il est de principe et de jurisprudence que l'exception portée par l'art. 880, quant aux immeubles qui se trouvent dans la main de l'heritier, s'applique eg lement à la partie de ces immeubles, vendue et non payée, et qu'en fait, il était encore dû à la succession du sieur Deleutre père, une somme de 45 000 fr. quand l'action de la dame Deleutre a eu lieu; Et quant au moyen tiré de la violation de la chose jugée: - Attendu que l'arrêt attaqué ayant justement décidé que sur les trois identités dont la réunion est nécessaire pour constituer l'autorité de la chose jugée, deux, celle de l'identité de cause et do l'identité de qualité, manquaient absolument, la cour de Nimes a dû, comme elle l'a fait, refuser de reconnaitre l'autorité de la chose jugée qui faisait la base de ce moyen;

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Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l'art. 500 c. com. :- Attendu, en droit, qu'une inscription n'a pour but et pour effet que de conserver une hypothèque quand elle existe en vertu d'actes préalables; de lui faire obtenir la préférence de rang sur les hypothèques à l'égard desquelles cette formalité n'a pas été observée, mais non de créer, par elle-même, cette hypothèque qui ne peut être le résultat que d'une convention, d'une loi expresse ou d'un jugement ayant acquis l'autorité de la chose jugée;

Attendu que, dans l'espèce, la masse des créanciers du sieur Deleutro fils n'avait en sa faveur aucun de ces moyens de prétendre droit sur les immeubles de son débiteur, de préférence surtout aux hypothèques qui, longtemps avant la faillite, avaient été légalement concédées sur les biens du sieur Deleutre père, lesquels n'avaient pu passer, à titre de succession, dans les mains du sieur Deleutre fils, que chargés des bypothèques qui les grevaient avant l'ouverture de cette succession;

Attendu que, si l'art. 500 c. com. enjoint aux syndics des faillites de prendre inscription au profit de la masse des créanciers, rien ne prouve que ce même article ait nécessairement attaché à cette inscription la vertu,

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