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80.

REVUE CRITIQUE D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE.

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Archiv für die Geschichte deutscher Sprache und Dichtung. Revue mensuelle publiée à Vienne par J. M. WAGNER. Prix 16 fr.

La littérature allemande du moyen-âge, comme la littérature contemporaine, avait depuis longtemps ses organes particuliers; la revue dont nous venons d'écrire le titre se propose de tenir ses lecteurs au courant de ce qui concerne la période littéraire si importante qui s'étend du xve siècle jusqu'à l'époque actuelle; l'histoire des xvi" et XVIIe siècles, qui renferme encore tant de points obscurs, doit en particulier y être l'objet d'une attention toute spéciale. On ne peut qu'applaudir à ce programme, et les articles annoncés pour l'avenir nous montrent que la rédaction tient à le remplir avec conscience. Les noms de collaborateurs comme Hoffmann von Fallersleben, Haupt, Hildebrand, K. Hoffmann, Holland, H. Kurz, Liebrecht, W. von Maltzahn, Massmann, Mussafia, Esterley, Sachse, W. Scherer, A. Schoenbach, A. Wolf, Zacher, Zarnke, Zingerle, Zupitza, sont d'ailleurs une promesse et une garantie du succès qui attend cette nouvelle publication.

Voici l'indication des principaux articles que renferme le premier numéro : Contribution à l'histoire du drame latin aux xvi et xvIIe siècles par W. Scherer: Christophorus Brockhagius.

Meister Rennaus, poème allemand du xve siècle.

Enfin des Glanages par Hoffm. v. Fallersleben, etc.

On remarquera parmi les renseignements réunis sous ce dernier titre la lettre de Goethe au conseiller intime Schmauss; elle est écrite pendant la campagne de France et datée de « Jardin Fontaine devant les portes de Verdun, 10 septembre » 1792. » Le poète y parle des «< innombrables cocardes blanches » qu'il voit autour de lui, et dont «< beaucoup au moins, ajoute-t-il, sont portées de bon gré » et avec joie, » et il entretient son ami des espérances de l'armée envahissante. << Bientôt, dit-il, nous laisserons Verdun derrière nous pour marcher contre les >> rebelles; on en est arrivé à un tel point de trouble et de folie à Paris que les >> deux partis béniront certainement la puissance qui y rétablira le repos, n'im>> porte à quel prix. » L'événement, on le sait, vint bien vite le détromper et lui faire tenir un autre langage; mais on voit comment à l'occasion les publications de l'Archiv peuvent avoir pour nous un intérêt direct; nouvelle raison pour lui souhaiter la bienvenue et le recommander aux lecteurs de la Revue.

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C. J.

LIVRES DÉPOSÉS AU BUREAU DE LA REVUE.

BUCKLE'S Geschichte der Civilisation in England üb. von RITTER, 2° éd., 2 vol. (Berlin, Heimann). DANTE ALIGHIERI, Ueber die Monarchie, üb. von HUBATSCH (Berlin, Heimann). GÉRARD, Artistes de l'Alsace pendant le moyen-âge, t. I (Colmar, Barth; Paris, Aubry). HOFFMANN, de Hermeneuticis apud Syros Aristotelis, 2 éd. (Leipzig, Hinrichs). KOEHLER, Luther's Reisen (Eisenach, Bacmeister).

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Nogent-le-Rotrou, imprimerie de A. Gouverneur.

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1873

Sommaire: 81. Les Prophéties de Joel, tr. p. WÜNSCHE. 82. Œuvres complètes de saint Isaac d'Antioche, p. et tr. p. BICKELL, t. I.—83. HEYDEMANN, Catalogue des vases peints du Musée de Naples. 84. HUGUES, Antoine Court. Histoire de la restauration du Protestantisme en France au XVIII siècle. sade de Choiseul à Vienne en 1757 et 1758.

81.

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- 85. FILON, l'Ambas

Die Weissagungen des Propheten Joel, übersetzt u. erklært von D' Aug. WÜNSCHE. Leipzig, 1872. In-8°, vij-330 p. Prix: 8 fr.

Le livre de Joel, un des plus anciens des prophètes dont les écrits sont parvenus jusqu'à nous, présente de nombreuses difficultés. Selon un certain nombre de commentateurs, il se composerait de deux parties distinctes, sans rapport entre elles dans la première, Joel, à l'occasion d'une sécheresse et d'une invasion de sauterelles qui désolèrent la Judée, double malheur qu'il présente comme une punition de la négligence des Hébreux à observer la loi de l'Éternel, engage le peuple à la repentance, et lui annonce que, à cette condition, Dieu est disposé à lui pardonner et à donner à ses champs une vigueur nouvelle; dans la seconde qui se rapporte aux temps messianiques, le prophète promet à la famille d'Israël que Dieu va la venger de ses ennemis et juger toutes les nations réunies dans la vallée de Josaphat. D'autres commentateurs veulent que ces deux parties ne forment qu'une seule et même pièce, dans laquelle le prophète, après avoir dépeint la punition que Dieu a infligée à la famille d'Israël, lui annonce, si elle revient à l'Éternel, sa prochaine victoire et son élévation éternelle sur les autres peuples de la terre. M. Wünsche partage cette dernière opinion, tout en reconnaissant que le lien qui unit les deux parties est assez peu sensible.

Les commentateurs ne sont pas moins en désaccord sur la manière dont il convient d'entendre le double fléau dont parle le prophète. Les uns pensent que sous l'image de l'invasion des sauterelles et de la sécheresse, Joel a voulu parler de la dévastation du pays par des peuples voisins; d'autres prennent le récit des deux premiers chapitres à la lettre, et font remarquer que la sécheresse et les sauterelles sont des fléaux aussi redoutables pour la Judée que les ravages d'une armée ennemie. M. Wünsche se range à cet avis, et je suis disposé à croire qu'il a raison. Mais alors il devient fort difficile de rattacher les deux derniers cha

pitres aux deux premiers.

M. Wünsche pourrait bien donner encore plus de prise à la critique par son interprétation des deux premiers versets du chap. troisième (les versets 28 et 29 du chap. II, dans les éditions qui ne divisent le livre de Joel qu'en trois chap.), interprétation qui détermine celle de tout ce qui suit. Il voit dans les deux derniers chap. une prophétie relative à l'avénement du christianisme, et en parti16

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culier dans les deux premiers versets du chap. troisième, une annonce prophétique de l'effusion du Saint-Esprit sur les apôtres le jour de la Pentecôte. C'est bien ainsi que l'apôtre saint Pierre a entendu ces deux versets et les trois suivants dans Actes, 11, 16-20. Mais cette explication, pour si orthodoxe qu'elle soit, laisse à désirer au point de vue scientifique. M. Wünsche lui-même est obligé de reconnaître que la personne du roi idéal est contenue dans cet oracle implicite et non explicite (p. 60).

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82. Sancti Isaaci Antiocheni, Doctoris Syrorum, opera omnia, ex omnibus, quotquot extant, codicibus manuscriptis cum varia lectione syriace arabiceque primus edidit, latine vertit, prolegomenis et glossario auxit, D' Gustavus BICKELL, in Academia Monasteriensi prof. extraord. Pars I, Gissæ Sumptibus J. RICKERI, 1873. ix-307 p. Texte et traduction. Prix: 16 fr.

Voici le premier volume d'un ouvrage que nous savions, depuis longtemps, être en préparation et qui s'annonce comme devant être suivi d'une dizaine de volumes pareils. A supposer, en effet, que toutes les poésies de saint Isaac aient, en moyenne, l'étendue de celles qu'on vient de publier, ses œuvres complètes ne comprendront pas moins d'une douzaine de tomes semblables à celui que nous avons entre les mains. C'est là un simple détail qui a sa signification et qui suffit pour montrer que nous avons à faire à un des auteurs les plus renommés de la Syrie chrétienne. Comme ancienneté, saint Isaac nous reporte à la première moitié du v° siècle, c'est-à-dire, au premier âge d'or de la littérature araméenne; et, comme importance, il n'y a guère plus de quatre ou cinq écrivains qu'on puisse placer au-dessus de lui, Tous les auteurs venus après son époque ne tarissent pas en éloges sur son compte; ils citent fréquemment ses écrits; ils en recommandent la lecture, et un des meilleurs juges au point de vue du style, Jacques d'Edesse, le range parmi les auteurs classiques de la littérature syrienne'. Saint Isaac a beaucoup écrit, et il a écrit en particulier contre les deux grandes hérésies, qui, à son époque, séparèrent la plus grande partie de l'Orient du reste de l'univers chrétien. Il combat le nestorianisme et l'eutychianisme avec une précision de termes que pourraient lui envier des théologiens bien postérieurs à ces controverses, mais aussi avec une vigueur de langage, où l'on sent l'homme contemporain des faits qu'il raconte. Saint Isaac mourut peu de temps après le concile de Calcédoine, vers 460, si les documents que M. Bickell a eus entre les mains n'ont pas modifié les calculs d'Assemani. Nous ne pouvons que nous en rapporter au remarquable article de la Bibliotheca Orientalis 2, car il nous a été impossible de nous procurer la vie que le docte éditeur de saint Isaac a insérée dans un recueil de patristique. Cette vie nous est promise pour plus tard,

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1. Assemani: Bibl. orient. I, p. 477. Martin: Jacobi episcopi edesseni epistola de orthographid syriaca, Paris, 1869, p. x.

2. T. I, p. 207 et suiv.

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mais, malgré cette promesse, nous ne pouvons nous empêcher de regretter qu'elle ne figure pas en tête de la collection. C'eût été une excellente introduction, qui eût gagné plus d'un souscripteur à l'éditeur.

Le premier volume contient quinze poésies, dont la longueur varie, depuis quelques dizaines de vers, jusqu'à plusieurs centaines. L'une d'elles en a même 2140 c'est, on le voit, un petit poème. Toutes ces poésies appartiennent à ce genre de composition que les Syriens nomment Mimre et dans lesquelles n'entre aucune autre division que le vers lui-même. Sur les quinze poésies, une dizaine, au moins, roulent sur l'eutychianisme et le nestorianisme. Elles ne peuvent donc intéresser que des théologiens, car il n'y a pas un seul fait historique relaté làdedans.

Des poésies restantes, deux fixeront spécialement l'attention des amis des études sémitiques, nous voulons parler de celles qui sont relatives au pillage de Beith-Hour, par les Arabes de la Mésopotamie. Elles sont inscrites, dans la collection de M. Bickell, sous les nos XI et XII, p. 206-251.

Sans contenir précisément beaucoup de renseignements historiques, elles fournissent de précieux détails sur la religion des Arabes et démontrent que le prétendu monothéisme sémitique, dont on a tant parlé dans ce siècle, n'est qu'une pure invention des modernes. A côté de ces détails relatifs au culte idolâtrique ou polythéiste des Arabes et des Perses, les historiens de l'Église trouveront, pour leur compte, quelques tableaux de mœurs qui n'ont pas tous perdu leur actualité'.

Le texte syriaque, en général très-correct, ne présente qu'un nombre relativement peu considérable d'errata ou de fautes. Nous signalerons cependant les suivantes au docte éditeur des poésies de saint Isaac: page 4, vers 33, m'daran pour b'doran, 51, îth pour ath; 8, 131, sch'rih pour sch'dih?; 26, 57, maoudein pour maoude; 36, 62, Homo ou Hme pour Hom'ïo; 46, 286, peut-être faudraitil lire n'heth h'vo, pag'reh ethcast? 60, 138, coïo pour voïo; 139, bazquîquets pour baz'quipheh; ner'quou pour ner'quoun; voir, du reste, 76, $17; 78, 1 thoutzou pour tzouthou; 80, 21, în pour en; 82, 85 et 86, Omarnî, copharnî pour Omarno, copharno; 86, 64, P'saquounan pour P'saquoulan; 88, 107, Asch'quam pour Aschquaïn; 108, 584, t'eïnhi pour t'eïnoï; 116, 778, thilaph pour d'etilaph; 136, 1230, Doïesch pour Doresch; 138, 1259, D'man pour D'mok; 150, 1550, sath'roïotho pour Sthirotho; 162, 1852, b'naï pour b'noth; 1853, q'rouké pour q'roubê; 168, 1998, d'haïlo d'aloho, 'obed; 198, 447, m'rabe pour m'raba', voir vers 444; 200, 487, vam'loque pour vam'oque; 220, 318, menschîl

:

1. Est-ce que le tableau suivant, par exemple, ne pourrait point s'appliquer trait pour trait à ce qui se passait hier et à ce qui se passe aujourd'hui ? Nous citons la traduction latine Infames congregationes spectaculorum illorum rebus turpibus recreantur. Dedecus >> ibi habetur honor, denudatio delectatio. Fabula, quæ otiosos congregavit, eo majori plausu » excipitur, quo turpior est, eo magis laudatur, quo magis adulterium commendat, eo » magis amatur, quo lascivior est. Surgunt senes, ut videant, quomodo matrimonium "deridetur, et solum pedibus radunt in furore gaudii sui. Pueri spectaculis turpem volup »tatem edocentur, juvenes autem igne succenduntur ex enarratione adulteriorum », p. 229. On voit que Molière n'est pas le premier à avoir appris à rire d'un mari trompé.

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pour menschel; 226, 4, ath pour no; 254, 74, moth'ron pour mot'ron, voir p. 284, vers 182, 190; 254, 97, ide pour îdaïo; 266, 372, noke pour noketh, etc.up

Nous ne parlons pas ici de tout ce qui ne paraît être que variété orthographique ou archaïsme, comme, par exemple, les omissions du ioud et du vaou aux prétérits pluriels. Il y a quelques formes qui touchent de plus près à des divergences dialectiques, mais elles sont peu nombreuses: Citons houlofeh houlofaïk, etc.

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Sans avoir parcouru la traduction tout entière, il nous semble cependant que c'est la partie de l'ouvrage qui laisse le plus à désirer; cette remarque n'étonnera point les connaisseurs et nous sommes sûr d'avance, qu'elle n'offensera pas M. Bickell pour lequel nous avons une très-haute et une très-affectueuse estime. Il sait mieux que nous combien il est difficile de rendre exactement un texte poétique. Quelquefois notre opinion différerait peu de la sienne; souvent néanmoins la divergence serait complète. Citons deux ou trois exemples: << Non >> immutata est natura tua, in corpus quod meum non sit, nec mea natura à >> divinitate tua aliena, meruit, ut deus fieret» (p. 4-5, vers 47-70). Nous traduirions: : «<< Natura tua haud est immutata et tamen non incarnata est sine me, >> quemadmodum natura mea, sine divinitate tua, non meruit ut fieret Deus. >> - P. 127, vers 997, M. Bickell dit : « Si sententias aureas effingas pro iis, » quibus assueta est, non induces eam, ut mutet sententiam perfectam doctrinæ >> suæ. Assueta est enim sententiis crucis et recitat versus scripturæ, etiamsi à >> rege audiatur, non erubescit doctrinam suam. » M. Bickell nous semble s'être complétement mépris sur le sens de ce passage. Le poète joue sur les divers sens du mot Haouquo qui signifie, en général, un compartiment, une séparation quelconque, d'où un degré d'échelle, une cage, un verset, un feuillet de livre, etc. Il est question, en cet endroit, d'un oiseau, probablement de quelque perroquet, qui attirait la foule à Antioche, en chantant le Sanctus. Suivant nous, voici quel serait le sens : «< Lui feriez-vous une cage dorée en place de celle qu'il habite, >> qu'il ne consentirait point à changer la saine formule du trisagion. Il habite >> (l'oiseau) dans des cages (Haouquê) de bois, mais il sait réciter les sentences » (Haouque) des livres saints, etc. »

Indiquons encore rapidement quelques passages que M. Bickell fera bien de revoir dans sa traduction. Nous ne l'avons parcourue, disons-le de nouveau, qu'en partie. Nous appellerons donc l'attention du docte éditeur sur les endroits. suivants: 135, 1210; 167, 1960; 185, 100; 187, 166; 189, 220; 192, 320; 195, 350 et suiv. Il y a là un jeu de mots qui se continue pendant une longue partie de la pièce et qui roule sur les diverses significations des deux formes s'rah agir, faire, et sarah corrompre, altérer, violer, par exemple, une jeune fille : 197, 390 « Condemnatus in judicio scelestorum, quia interitus eorum ei >> placet (?) Il s'agit du démon et de la part qu'il prend aux crimes des méchants. Il est évident que voici le sens : « Il doit être condamné comme les » méchants parce qu'il se complait dans les meurtres qu'ils opèrent. A la p. 232, vers 107-108, il y a un passage extrêmement difficile. Au lieu de « pro abrasis » ad electionem in captivitatem abducti sunt ii qui disquisitionem exercent, » où

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