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sitions de cette ordonnance, de rejeter tout appel des jugements | arrêté du directoire exécutif, du 9 mess. an 4, recourir aux leis

par défaut. M. Merlin, Quest. de droit, vo Appel, § 1, no 9, attribue à l'attachement que portait à cette jurisprudence M. Thouret, avocat au parlement de Rouen, rédacteur et rapporteur de la loi du 24 août 1790, le silence que cette loi garde sur l'appel des jugements par défaut, et la disposition de la loi du 14 oct. 1790 qui défendait l'appel de toutes les sentences rendues par défaut dans les justices de paix. Mais cette dernière loi ne concernant que les juges de paix, et celle du 24 août 1790 ne renfermant aucune dérogation à l'ordonn. de 1667, la jurisprudence du parlement de Rouen se trouvait en opposition avec la nouvelle organisation judiciaire.

231. Aussi la cour de cassation l'a-t-elle formellement condamnée, et adoptant une règle uniforme tant que l'ordonnance de 1667 a été en vigueur, elle a jugé qu'avant le code de procédure civile, mais depuis la suppression des parlements, l'appel des jugements par défaut devait être reçu même par les tribunaux du ressort de ceux des ci-devant parlements, qui n'admettaient que la voie de l'opposition (Cass., 12 vend. an 9; 11 pluv. an 10) (1). 232. Elle a jugé même qu'on pouvait aussi appeler d'un jugement par défaut qui déboulait de l'epposition à un premier jugement par défaut (Cass., 1er therm. an 11) (2).—M. Merlin, qui portait la parole dans cette affaire, a établi que la loi nouvelle ne s'étant point prononcée, il fallait, ainsi que l'avait décidé un

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(1) 1re Espèce:-(Semillard C. hérit. Letellier.) — Un jugement du tribunal de l'Orne avait déclaré le sieur Semillard non recevable à appeler d'un jugement par défaut du tribunal de Verneuil, sur le motif qu'il n'avait pas d'abord recouru à la voie de l'opposition. Pourvoi. Jugement.

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LE TRIBUNAL; Vu, 1° la loi du 16 août 1790, art. 12 du tit. 2; 2° la loi du 12 oct. même année, art. 5; 5o la loi du 6 mars 1791, art. 34; el enfin l'ordonnance de 1667, art. 12 et 17 du tit. 27; - Attendu que l'application de la loi du 12 oct. 1790, en ce qu'elle autorise à suivre, en matière de procédure, les formes actuellement existantes, se trouve déterminée par la disposition de la loi du 6 mars 1791, laquelle ne parle que de l'ordonnance de 1667 et des règlements postérieurs; ce qui ne doit s'entendre que de ces sortes de règlements faits par les anciens tribunaux, pour avoir force de loi tant que l'autorité législative ne les désapprouvait point, ou de ces usages qui, sans être directement contraires à l'ordonn. de 1667, ne faisaient que suppléer à son silence; Attendu que l'usage dans lequel était le ci-devant parlement de Rouen, de ne point recevoir l'appel d'un jugement de première instance rendu par défaut, sauf l'opposition, ne paraît point avoir été appuyé d'aucun arrêt de règlement; Attendu que cet usage ne peut point être regardé comme ayant été une conséquence nécessaire de l'abrogation de l'art. 6 du tit. 14 de l'ordonn. de 1667, résultant de l'usage universel qui s'était introduit d'admettre l'opposition aux jugements par défaut de première instance, et de l'approbation que l'autorité publique avait donnée à cet usage, et qui est prouvée par la lettre que le chancelier d'Aguesseau avait écrite, le 7 juin 1716, au ci-devant parlement de Bordeaux, et par les lettres patentes adressées au ci-devant parlement de Normandie, le 18 juin 1769; que tous les tribunaux qui admettaient l'opposition n'en avaient point conclu, comme les tribunaux de la ci-devant Normandie, que la voie de l'appel dut être refusée; en sorte que la partie qui se croyait lésée par un jugement de première instance rendu contre elle par défaut, avait la faculté de choisir entre la voie de l'opposition et celle de l'appel ;- Que l'usage contraire dans lequel était le ci-devant parlement de Rouen, de n'admettre que l'opposition, contenait une double violation des lois alors existantes, 1° en ce qu'il interdisait une faculté qui était de droit, par cela seul qu'elle n'était interdite par aucune loi; 2° en ce qu'il rejetait un appel qui se trouvait autorisé par la disposition générale des art. 12 et 17 du tit. 27 de l'ordonnance de 1667; Atendu que, d'après les lois nouvelles qui ont interdit aux tribunaux actuels de prendre directement ou indirectement aucune part à l'exercice du pouvoir législatif, d'empêcher l'exécution des lois et de faire aucun règlement, les tribunaux qui ont succédé au ci-devant parlement de Rouen n'ont pas pu se permettre de conserver un usage contraire à l'ordonn. de 1667, et qui n'était fondé sur aucun règlement qui eût l'approbation, au moins tacite, du pouvoir législatif; qu'en se le permettant le tribunal civil de l'Orne a commis un excès de pouvoir, et est contrevenu aux lois précitées, notamment à celle du C mars 1791, laquelle n'autorise les tribunaux qu'à suivre l'ordonnance de 1667 et les règlements postérieurs ; Casse.

Du 12 (et non du 24) vendém. an 9.-C. C., sect. civ.-MM. Liborel, pr. d'âge.-Tronchet, rap.

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anciennes. Or, pour connaître quelle était la loi ancienne qui devait être appliquée, une distinction était nécessaire : dans les provinces, telles que le ressort du parlement de Flandre, ой l'ordonn. de 1667 n'avait pas été reçue, il faut suivre la maxime contumax non appellat, tirée des lois 13, § 4, C., De judic.; 1, C., Quor. appellat. non recipiunt, et nov. 82, ch. 5.-Mais dans les contrées où, comme dans la Belgique, l'ordonn. avait été publiée, il n'en pouvait être de même, puisque l'art. 5, tit. 14 de cette ordonn., qui ne permettait que l'appel contre les sentences par défaut, n'avait été modifié par l'usage qu'en ce sens que l'opposition était aussi ouverte, mais non pas que l'appel fút interdit. Par ces motifs, M. Merlin conclut à la cassation (Quest., vo Opposition aux jug. par déf., § 2; V. aussi Répert., au mot Appel, § 1, sect. 5).

233. Le code de procédure civile a établi, sur ce point, une règle précise. On demandait bien, lors de la discussion de ce code, le retour aux anciens principes, c'est-à-dire que l'appel ne fût admis, en aucun cas, au profit de la partie défaillante qui aurait laissé passer, sans former opposition, le délai qui lui était imparti à cet effet. C'était l'avis de plusieurs tribunaux d'appel, et même du tribunal de cassation. Mais ce système ne fut pas accueilli. Les rédacteurs du code admirent, en principe, que la voie de l'opposition était la plus simple et la plus utile aux par

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se sont pourvus en cassation. Ils ont invoqué l'art. 34 de la loi des 6 et 27 mars 1791, qui voulait que l'ordonnance de 1667 fût suivie jusqu'à la révision de la procédure, et l'art. 3, tit. 35, de cette ordonnance, qui n'accordait l'opposition que contre les jugements rendus en dernier ressort, disposition qui n'avait pas été abrogée par les règlements postérieurs. — Jugement.

LE TRIBUNAL; - Vu l'art. 34, 1. 6 mars 1791; l'art. 5, tit. 55, de l'ordonnance de 1667; l'art. 12, tit. 27, de la même ordonnance;-Attendu que les lois ci-dessus rapportées n'ont permis d'attaquer, par la voie de l'opposition, les jugements par défaut, que lorsqu'ils ont été rendus en dernier ressort; Attendu que les jugements rendus par défaut, en première instance, sont compris dans les dispositions générales qui ont établi la voie de l'appel envers les jugements de premier ressort, sans distinction des jugements contradictoires ou par défaut; Attendu que, quoique l'usage et la jurisprudence de plusieurs des ci-devant parlements eussent étendu jusqu'aux jugements rendus en première instance par défaut la faculté de se pourvoir par opposition, que la loi n'avait établie qu'envers les jugements rendus en dernier ressort, i ne s'ensuit pas qu'on puisse interdire à ceux qui ont été condamnés par défaut, en première instance, la voie de l'appel qui leur est accordée par les lois;

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Attendu qu'en déclarant Dutertre non recevable dans son appel, par cela seul que le jugement contre lequel il s'était pourvu était rendu par défaut, le tribunal de la Manche a créé une fin de non-recevoir qui n'était établie par aucune loi, et qu'il a privé le demandeur de la faculté d'appeler, qui lui était accordée par les lois; d'où il suit qu'il a commis un excès de pouvoir, et contrevenu aux lois ci-dessus citées, notamment à celle du 6 mars 1791, laquelle n'admet que les formes de procédure autorisées par l'ordonnance de 1667 et par les règlements postérieurs ; Casse, etc. Du 11 pluv. (et non du 11 niv.) an 10.-C. C., sect. civ.-MM. Liborel. pr.-Audier, rap.

(2) Espèce :- (Rostaer C. Mulder) Le 29 frim. an 8, jugement par défaut qui déboute Rostaert de son opposition à un précédent jugement, également rendu par défaut, au profit du sieur de Mulder.-Appel par Rostaert. Le 11 frim. an 9, jugement du tribunal d'appel de Bruxelles, qui déclare l'appel non recevable; « Attendu que l'art. 14, tit. 10, de la loi du 24 août 1790 n'introduit ou n'admet formellement la voie d'appel que des jugements contradictoires, à ces mots, nul appel d'un jugement contradictoire ne sera signifié; qu'il n'est aucune disposition dans les lois nouvelles, concernant la forme de plaidoirie, qui accorde ou introduise l'appel d'un débouté d'opposition, accordé sur défaut et pour le profit du défaut; Qu'à défaut de disposition des lois nouvelles sur ce point, le juge doit y former son opinion d'après les dispositions des lois locales, ou les principes admis par l'usage dans la matière; - Que, dans les usages et principes reçus en Flandre, il n'échoit pas d'appel d'une pleine contumace prononcée par le juge. Pourvoi. Jugement. Le Tribunal;-Vu l'art. 5, tit. 4, de la loi du 24 août 1790;-Allenda que la généralité de ces termes, toutes affaires, comprend nécessairement celles dans lesquelles il y a opposition à un jugement par défaut, et ne permet conséquemment de les juger en dernier ressort que lorsqu'elles sont au-dessous de la valeur qui est déterminée dans ledit art. 5;-Attendu que l'art. 14, loin de prohiber l'appel des jugements par défaut, l'autorise au contraire, même après le délai de trois mois; Casse, etc.

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Du 1er therm. an 11.-C. C., sect. civ.-MM. Vasse, pr.-Riolz, rap.

tles, en ce qu'elle leur permettait d'instruire leur affaire devant les premiers juges. Cependant, bien qu'ils aient accordé le droit d'opposition, et qu'ils l'aient même placé au premier rang, les rédacteurs du code n'ont pas voulu que ce fût la seule ressource aissée aux parties, et à côté de ce droit d'opposition, ils ont placé celui d'appel. C'est ce qui résulte de l'art. 455 c. pr. On peut donc appeler aujourd'hui des jugements par défaut; mais, remarquons-le bien, les deux voies, l'opposition et l'appel, ne peuvent pas être cumulées; car, aux termes de l'article précité, « les appels des jugements, susceptibles d'opposition, ne sont point recevables pendant la durée du délai de l'opposition. » Ainsi, le droit d'opposition est accordé par la loi comme le moyen qui doit être employé, et non pour qu'on ait le choix de prendre cette voie ou d'interjeter appel. Si le délai pour l'opposer est expiré, la loi présume que la partie condamnée n'a point été à portée ou à temps de fournir ses moyens d'opposition, et elle lui conserve encore la ressource de l'appel (V. Exposé des motifs, no 15). Sur l'expiration des délais de l'opposition et la recevabilité de l'appel qui en est la conséquence, V. infrà, le ch. 5, sect. 5. 234. Mais les règles que nous venons d'indiquer, règles établies par l'art. 455 c. pr. pour les jugements par défaut émanés des tribunaux civils de première instance, sont-elles applicables, soit aux jugements des tribunaux de commerce, soit aux sentences des juges de paix?

En ce qui concerne les jugements des tribunaux de commerce, la négative n'est pas douteuse. En effet, l'art. 645 c. com. établit formellement une exception, en faveur de ces jugements, aux règles que nous avons rappelées. Cet article, après avoir parlé des jugements, soit contradictoires, soit même par défaut, rendus en matière commerciale, ajoute que l'appel pourra être interjeté le jour même où le jugement aura été rendu. Or, en disposant ainsi, sans distinguer entre les jugements contradictoires

(1) 1re Espèce: (Varin C. Caquot.) LE TRIBUNAL; - Ouï, etc.; Casse et annule le jugement du tribunal du district de Sainte-Menehould, du 26 juillet 1791, parce qu'il n'a pas déclaré les Caquot non recevables dans leur appel, ce qui est contraire à l'art. 4 du tit. 3 de la loi du 14 oct. 1790, concernant les compétences et les juridictions des juges de paix, qui porte: « La partie opposante qui se laisserait juger une seconde fois par défaut sur son opposition, ne sera plus reçue à former une opposition nouvelle, et les tribunaux de districts ne pourront, dans aucun cas, recevoir l'appel d'un jugement de juge de paix lorsqu'il aura été rendu par défaut. >>

Du 3 mai 1793.-C. C., sect. civ.-MM. Thouret, pr.-Coffinhal, rap.

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2 Espèce (Trubert C. Guillot.) LE TRIBUNAL donne défaut, etc.; Attendu que le tribunal du district de Tonnerre a pris connaissance du fond en prononçant la confirmation de la sentence du juge de paix d'Ancy-le-Franc; - Casse le jugement, comme contraire à l'art. 4, tit. 3, L. 14 oct. 1790. Du 6 frim. an 2.-C. C., sect. civ.-M. Coffinhal, rap. 3o Espèce :- -(Masselin C. Morel. )- LE TRIBUNAL; Considérant 1° que les questions ont été posées lors du jugement du 16 vendémiaire an 4, et que le vœu de la loi a été rempli; - 2o Que l'opposition formée par Masselin au jugement du 29 vent. an 3 ne l'a point été en vertu d'une cédule obtenue d'un juge de paix; Que n'étant pas revêtue de cette formalité, prescrite impérieusement par la loi, elle n'était susceptible d'aucun effet; 3° Que l'appel émis par Masselin du jugement du 29 vent. n'était pas recevable, par la raison qu'on ne peut appeler d'un jugement du juge de paix rendu par défaut, que lorsqu'il a jugé une instance qui était périmée de droit et dont l'action était éteinte; tel est le vœu de l'art. 4, tit. 3, et 7, tit. 7, de la loi du 14 oct. 1790, portant règlement pour la procédure de la justice de paix, ainsi conçus: Art. 4. «..... et le tribunal de district ne pourra, dans aucun cas, recevoir l'appel d'un jugement du juge de paix, lorsqu'il aura été rendu par défaut, si ce n'est qu'il fût en contravention à l'art. 7 du tit. 7 ci-après. » Art. 7. « Les parties seront tenues de mettre leur cause en état d'ètre jugée définitivement au plus tard dans le délai de quatre mois, à partir du jour de la notification de la citation, après laquelle l'instance sera périmée de droit, et l'action éteinte; le jugement que le juge de paix rendrait ensuite sur le fond serait sujet à l'appel, même dans les matières où il a droit de prononcer en dernier ressort, et annulé par le tribunal de district. »Rejette. Du 28 floréal an 5.-C. C., sect. civ.-MM. Chabroud, pr.-Lion, rap.

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et les jugements par défaut, en matière commerciale, il est clair que cet article s'écarte de l'art. 455 c. pr., qui défend d'appeler d'un jugement rendu en matière civile, tant que dure le délai de l'opposition.- Au surplus, V. infrà, ch. 5, sect. 5, art. 1. 235. Mais, relativement aux sentences émanées des juges de paix, il en est tout autrement.

A cet égard, l'appel était formellement interdit par la loi du 14-26 octobre 1790. Cette loi avait, en effet, maintenu, pour les jugements par défaut des juges de paix, la règle admise dans l'ancienne jurisprudence française jusqu'à l'ord. de 1667, et empruntée au droit romain, contumax non appellat. Les art. 3 et 4, tit. 3, de la loi précitée, étaient très-formels sur ce point : ils n'admettaient la faculté d'appeler d'un jugement par défaut que dans ce seul cas, qui était prévu par l'art. 7, tit. 7 de la même loi, celui où le juge de paix aurait jugé après la péremption d'instance; dans tous les autres cas ils excluaient l'appel, et ne laissaient que la voie de l'opposition; encore même fallait-il que l'opposition fût formée en vertu d'une cédule du juge, sans quoi elle ne produisait aucun effet (Rej., 28 flor. an 5, aff. Masselin; V. le numéro suivant, 3o esp.). D'ailleurs, la cour de cassation à toujours ramené à l'observation de cette loi les tribunaux qui s'en écartaient.

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236. Elle a constamment jugé, en effet, que, sous la loi du 14 oct. 1790, la décision par défaut des juges de paix n'était pas susceptible d'appel (Cass., 3 mai 1793, 6 frim. an 2; Rej., 28 flor. an 5; Cass., 16 prair. an 13) (1).

237. Et que l'appel d'un jugement par défaut d'un tribunal de paix était non recevable, même quand il avait été précédé d'un jugement préparatoire rendu contradictoirement (Cass., 13 therm. an 11) (2). — Secùs, si le jugement avait été précédé d'un jugement contradictoire sur la compétence (Req., 11 vent. an 9) (3). 238. Mais, sauf cette dernière exception, la jurisprudence

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(2) Espèce (Pierre Guyonnet C. Charles Guyonnet.)- Le 7 messidor an 9, Pierre Guyonnet fait assigner Charles Guyonnet, son frère, devant le tribunal de paix du canton d'Aulnay, en payement de 63 fr. Le 9 du même mois, jugement contradictoire qui, sur la dénégation de Charles Guyonnet, admet son frère à prouver par témoins que cette somme lui était due en vertu d'un traité verbal. Des témoins sont entendus. - Le 21, du même mois, jugement par défaut contre Charles Guyonnet, qui le condamne au payement des 63 fr. - Appel de ces deux jugements. Le 15 niv. an 10, le tribunal de Saint-Jean-d'Angely admet l'appel, sur le fondement que le jugement préparatoire étant, comme contradictoire, sujet à l'appel après la prononciation du jugement définitif, rendait ce dernier jugement lui-même susceptible d'appel, parce que l'un n'étant que la suite de l'autre, l'infirmation du jugement préparatoire entraînait nécessairement celle du jugement définitif. Pourvoi. Jugement. LE TRIBUNAL; Vu l'art. 4, t. 3, de la loi d'oct. 1790, portant établissement de procédure en justice de paix; - Et attendu que cet article défend expressément d'appeler, en aucun cas, de tout jugement par défaut rendu en justice de paix, et qu'il n'admet d'autres exceptions à cette défense générale que le cas où ce jugement aurait statué au mépris de la péremption acquise; auquel cas seulement il autorise l'appel de ce jugement, même dans le cas où il serait rendu en dernier ressort; D'où il suit que cet article rejette toute autre exception, et par conséquent celle où ce jugement par défaut serait précédé d'un jugement préparatoire, quoique contradictoire, qui, comme tel, était sujet à l'appel; - Attendu que, dans l'espèce, le jugement attaqué a reçu l'appel d'un jugement par défaut rendu par un juge de paix; Et que la circonstance que ce jugement était la suite d'un jugement préparatoire rendu contradictoirement, et sujet à l'appel, ne pouvait pas former une exception en faveur de l'appel de ce jugement par défaut, puisque la loi n'admet d'autre exception que celle d'un jugement intervenu, nonobstant la péremption acquise; D'où il suit qu'en recevant l'appel de ce jugement par défaut, les juges, dont le jugement est attaqué, ont violé l'art. 4, tit. 3, de la loi d'oct. 1790; Casse, etc.

Du 15 therm. an 11.-C. C., sect. civ.-MM. Maleville, pr.-Babille, rap. (3) Espèce (Rigault C. Lechevalier.)- En l'an 3, Rigault s'engage à construire une maison pour Lechevalier. Une contestation s'étant élevée sur le payement, Rigault assigne Lechevalier devant le juge de paix en payement d'un bon de 74 liv. et d'une somme de 807 liv. Lechevalier décline la compétence du juge de paix, en ce que, 1° il ne s'agit pas d'ouvrages faits à la journée, et 2° en ce que la demande excède 100 liv. Jugement du juge de paix qui retient la cause; puis, 8 mess.

CHAP. 2, SECT. 2, ART. 1, § 1. était constante, et il en résultait qu'un tribunal qui, dans son jugement, reconnaissait que la loi lui défendait de recevoir l'appel des jugements par défaut des justices de paix, ne pouvait déclarer qu'il avait été bien jugé, ni condamner l'appelant à l'amende (Cass., 8 fruct. an 2) (1). Aujourd'hui, on peut appeler des jugements par défaut rendus par les juges de paix, comme on le verra par les numéros suivants; mais la question jugée dans cette espèce pourrait se représenter dans le cas où l'on porterait, soit à un tribunal, soit à une cour, l'appel d'un jugement rendu en dernier ressort. L'appel devrait être déclaré purement et simplement non recevable, et le tribunal supérieur excéderait évidemment ses pouvoirs en décidant qu'il avait été bien jugé en première instance. Mais il nous semble que l'appelant devrait être condamné à l'amende; l'art. 471 ne distingue pas, et ne devrait pas distinguer entre le cas où l'appelant est repoussé par une fin de non-recevoir, et celui où il est déclaré mal fondé dans son recours. L'amende est la peine de l'appel téméraire; elle est prononcée contre tout appelant qui succombe, et on n'aperçoit aucune raison d'en affranchir l'appelant dans le cas dont il s'agit. On trouvera cependant, vo Peine, une décision qui paraît contraire à cette opinion. M. Poncet, Traité des jugements, t. 1, p. 514,, après avoir dit que l'on pourrait penser qu'en cas où l'appel serait non recevable comme interjeté tardivement, l'appelant ne devrait pas être condamné à l'amende, ajoute que ce n'est là qu'une simple probabilité fort contestable.

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239. Quoi qu'il en soit, le code de procédure a entraîné un changement absolu dans la jurisprudence. Les tribunaux, en se fondant sur ce que l'art. 16 de ce code déroge à la loi du 14-26 octobre 1790, par cela seul qu'il n'en a pas reproduit la disposition, ont jugé que l'on peut aujourd'hui appeler des jugements par défaut rendus par le juge de paix (Cass., 8 août 1815 et 7 nov. 1820) (2). Et cette doctrine, qui est unanimement suivie par les auteurs (V. MM. Merlin, Quest., v° Appel, § 1, no 11; Carré, Lois de la proc. civ., et son annotateur Chauveau, quest., 76; Berriat Saint-Prix, p. 412, note 29; Favard de Langlade, t. 1, p. 168;

an 6, second jugement par défaut qui condamne Lechevalier. - Appel.
Fin de non-recevoir contre l'appel. - 8 pluv. an 7, jugement du tri-
bunal de l'Yonne qui reçoit l'appel et met le jugement au néant pour in-
compétence et excès de pouvoir. Pourvoi par Rigault pour violation
des art. 3 et 4, tit. 3, de la loi du 15 oct. 1792, en ce que la voie de
l'opposition était la seule ouverte pour faire réformer un jugement par
défaut du juge de paix, alors même qu'il s'agit d'un jugement définitif
sur la compétence, la loi ne faisant aucune distinction. - Jugement.
LE TRIBUNAL;
Considérant que le jugement de la justice de paix du
canton de Tonnerre, du 8 mess. an 6, dont l'appel a été reçu par le ju-
gement attaqué, était en même temps contradictoire et définitif relative-
ment à la compétence; - Qu'alors l'appel en était recevable, et que par
suite, le jugement attaqué n'a point contrevenu à la loi en recevant cet
appel; Rejette.

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Du 11 vent. an 9.-C. C., sect. req.-MM. Muraire, pr.-Cassaigne, rap. (1) Espèce: - (Int. de la loi. Brouart C. Paille.) - Jean Paille, maçon, avait fait citer le sieur Brouart devant le juge de paix de Marigny, en payement de 240 fr. pour fournitures qu'il prétendait lui avoir faites. - Jugement par défaut qui condamna Brouart. Celui-ci appela devant le tribunal civil du Blanc, qui prit en considération l'article de la loi de 1790, défendant de recevoir l'appel du jugement par défaut, et cependant déclara qu'il avait été bien jugé, et condamna l'appelant à l'amende. Pourvoi pour excès de pouvoir. - Jugement.

LE TRIBUNAL; Attendu qu'en statuant sur l'appel du jugement par défaut d'un juge de paix, le jugement du trib. du district du Blanc, du 15 flor. dernier, à contrevenu à l'art. 4 du tit. 3 de la loi des 14 et 18 oct. 1790, qui porte: « Les tribunaux de district ne pourront, dans aucun cas, recevoir l'appel d'un jugement du juge de paix, lorsqu'il aura été rendu par défaut; » Casse, etc.

Du 8 fructid. an 2.-C. C., sect. civ.-MM. Lalonde, pr.-Viellart, rap. (2) 1TM Espècé è —(Sallenave C. Chegaray.)—Le 3 août 1810, la dame veuve Sallenave et son fils formèrent une demande au possessoire, contre le sieur Chegaray, devant la justice de paix de Bayonne. Le 15 août, jugement par défaut, qui leur adjuge leurs conclusions en réintégrande. -Le 18 août, ce jugement est signifié au sieur Chegaray. Le 25 août, appel au tribunal civil de Bayonne. On oppose que ce n'était point par la voie de l'appel, mais par la voie de l'opposition, qu'il fallait attaquer ce jugement, suivant l'art. 4, tit. 3, de la loi du 14-26 oct. 1790.-Le sieur Chegaray soutient que cette disposition a été abrogée par les art. 16 et 445 c. pr. Le 8 sept. 1813, jugement en dernier ressort, qui le dé

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Pigeau, Comm., t. 1, p. 34; Thomine-Desmazures, t. 1, p. 75 ; Boitard, t. 2, p. 405; Bioche, Dict. de proc., v° Appel, no 44; Augier, Encycl. du jug. de paix, vo Appel, no 5), a été mise dans tout son jour dans le réquisitoire sur lequel a été rendu l'arrêt du 7 nov. 1820, réquisitoire que nous reproduisons ici dans ses parties saillantes. « La question, a dit M. le proc. gén., ne faisait point de difficulté sous l'empire de la loi du 26 oct. 1790 parce que cette loi contenait une disposition expresse qui prohi bait l'appel des jugements rendus par défaut en justice de paix. Et elle ne doit pas non plus en faire aujourd'hui, par une raison inverse, c'est-à-dire parce que cette disposition n'a pas reparu dans le code de procédure civile. Le législateur, en la supprimant, a cru sans doute qu'elle avait plus d'inconvénients que d'avantages, et surtout qu'en établissant une théorie extraordinaire, elle heurtait trop fortement les principes du droit commun. Cette observation acquerra une nouvelle force, si l'on fait attention que le code de 1807 a reproduit, presque mot pour mot, la loi du 26 oct. 1790, quant aux oppositions; qu'ainsi c'est bien volontairement, et avec intention, que la disposition particulière dont il s'agit n'a pas été renouvelée. » — M. le proc. gén., après avoir transcrit le texte des art. 5, 4 et 5 de la loi de 1790, des art. 21 et 22 du cod. proc., continue ainsi : « L'art. 22 du code reproduit donc littéralement l'art. 4, titre 3 de la loi du 26 oct., avec cette différence notable que la dernière moitié de l'article se trouve supprimée. Comment ne pas sentir que c'est volontairement que cette suppression a eu lieu? La disposition finale de l'art. 4 était trop frappante pour que le législateur, en 1807, ne l'ait pas prise en considération; et comment supposer qu'il a fait la suppression avec l'idée que les tribunaux regarderaient la disposition comme sous-entendue? Une disposition aussi capitale et aussi contraire au droit commun pouvait-elle être livrée à la merci du raisonnement? Que l'on fasse attention encore que la loi du 26 oct. laissait la faculté d'appeler d'un jugement par défaut, au moins dans un cas, celui prévu par l'art. 7, tit. 7 de la même loi; et, dans le système que nous combattons, l'appel serait non rece

clare non recevable dans son appel, sur le fondement que le code de proc. n'ayant pas autorisé en termes exprès l'appel des jugements par défaut des juges de paix, il fallait interpréter son silence par les lois antérieures, et notamment par la loi du 26 octobre 1790, qui avait interdit l'appel de ces jugements. Pourvoi. — Arrêt.

LA COUR; Vu les art. 16 et 443 c. pr.;- Attendu que l'art. 16 c. pr. autorise suffisamment l'appel des jugements rendus par défaut dans les justices de paix, par cela seul qu'en déterminant le délai après lequel l'appel des jugements des juges de paix ne sera plus recevable, il ne fait aucune distinction entre les jugements contradictoires et les jugements par défaut; que, d'ailleurs, l'art. 443 da même code (applicable aut tribunaux civils, comme tribunaux d'appel des justices de paix) achève de mettre dans tout son jour la pensée du législateur, lorsqu'il énonce, sans aucune restriction, que le délai de l'appel des jugements par défaut courra à compter du jour où l'opposition ne sera plus recevable; qu'ainsi le tribunal civil de Bayonne a expressément violé la disposition des art. 16 et 443 c. pr. en déclarant le sieur Chegaray non recevable dans son appel; -Casse, etc.

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Du 8 août 1815.-C. C., sect. civ.-MM. Brisson, pr.-Poriquet, rap. 2o Espèce: :-- (Int. de la loi. Mariaux.) - LA COUR; Vu les art. 16 ct 443 c. proc. civ.; Attendu que le livre 1 de ce code a pour objet de régler tout ce qui concerne la juridiction des juges de paix, el que les dispositions de ce livre forment la loi à suivre dans cette matière ; · Allendu que la disposition de l'art. 4, tit. 5, de la loi du 26 oct. 1790, qui interdisait dans tous les cas l'appel d'un jugement du juge de paix rendu en défaut, établissait une règle exorbitante du droit commun que cette disposition n'a point été reproduite dans le code de proc. civ.; -Altendu, au contraire, que l'art. 16 ci-dessus cité, en déterminant, d'une manière générale et sans distinction des jugements contradictoire s et des jugements en défaut, le délai après lequel l'appel des jugements de s juges de paix ne serait pas recevable, autorise par là même l'appel de s uns et des autres dans ce délai, et que l'art. 443 ne laisse aucun doute à ce sujet, puisque, sans faire aucune différence entre les jugements des tribunaux civils et les jugements des justices de paix, il fixe l'époque laquelle commence à courir le délai de l'appel des jugements par défaut; qu'ainsi le tribunal civil de Clamecy a formellement violé ces deux articles en déclarant le sieur Mariaux non recevable dans son appel; Faisant droit sur le réquisitoire du proc. gén. ; Casse et annule dans l'intérêt

de la loi.

Du 7 nov. 1820.-C. C., sect. civ.-MM. Desèzé, 1er prés.-Trinquelague, rap.-Cabier, av. gén., c. conf.

vable dans tous les cas sans distinction. Ainsi, dans l'économie de la loi du 26 oct., voilà deux dispositions bien distinctes. Le jugement est-il en dernier ressort, cela n'empêchera pas d'appeler, si le juge de paix a jugé après la péremption d'instance; le jugement est-il par défant, cela ne fera pas non plus obstacle à l'appel. Mais, comme le code de proc. civ. ne contient qu'une disposition unique renfermée dans l'art. 15, il suit que les jugements par défaut dont le code de proc. civ. ne parle pas, restent soumis à la prétendue règle générale que l'on a cru trouver dans ce code. Ainsi le code de proc. civ. sera encore plus sévère que la loi du 26 octobre... >>

Nous conclurons donc, avec la jurisprudence et les auteurs, que l'art. 455 code, proc. contient une disposition commune aux jugements par défaut des tribunaux de première instance et à ceux des juges de paix. Par cela même nous estimons que si, dans les espèces jugées par la cour de cassation, les 8 août 1815 et 7 nov. 1820, il avait été constant en fait que l'appel avait été interjeté avant l'expiration du délai d'opposition, la décision de la cour aurait dû être différente. Car, dès qu'on admet en principe que les jugements par défaut des justices de paix sont soumis à l'appel, on ne voit pas pourquoi on refuserait d'appliquer le principe d'après lequel l'appel n'est pas recevable pendant le délai de l'opposition, et les autres règles qui n'auraient rien de contraire à la procédure spéciale des justices de paix.

240. Suiyons maintenant le principe ainsi entendu dans ses applications.

Et, d'abord, rappelons qu'il y a deux espèces de défauts, celui que prononce le juge contre le défendeur qui ne comparaît pas sur l'assignation donnée par le demandeur; c'est le défaut proprement dit: et celui que le défendeur obtient contre le demandeur faute par ce dernier de comparaître sur l'assignation donnée par lui-même; il porte plus particulièrement le nom de défautcongé. Le code de proc. ne distingue point entre ces deux sortes de défauts; cependant ils sont essentiellement distincts par leur nature.

L'opposition est autorisée pour l'un et pour l'autre. Mais le demandeur qui n'a point profité du délai de l'opposition, peut-il, comme le défendeur défaillant, se pourvoir par appel?-L'ancienne jurisprudence et celle qui était suivie sous la loi de 1790 ne l'y admettaient pas. Le défaut du demandeur était regardé non pas comme une renonciation à son droit, mais comme un désistement de l'instance qu'il avait introduite; et on attribuait à ce défaut le même effet qu'à la péremption, par un motif qui n'est pas sans force; à savoir que permettre au demandeur de prendre la voie de l'appel, après avoir laissé passer celle de l'opposition, ce serait lui donner la faculté de priver le défendeur de la garantie des deux degrés de juridiction.

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(1) 1 Espèce (Fransoj C. Florio.).-Le sieur Fransoj avait assigné les frères Florio devant le tribunal de première instance de Verceil.—Il ne comparut pas, ni son avoué pour lui, au jour indiqué pour la cause. Le tribunal prononça un jugement de défaut-congé au profit des défendeurs. Fransoj laissa passer le délai de l'opposition, et interjeta un appel que les frères florio soutinrent non recevable. - Arrêt. LA COUR; Attendu que le jugement en appel n'est qu'un jugement en défaut, portant congé des sieurs Florio, de la demande formée contre eux par le sieur Fransoj; Attendu que, par ce jugement, le tribunal de première instance n'a dû ni pu rien préjuger sur le fond des demandes du sieur Fransoj; - Que celui-ci, après avoir laissé écouler le délai pour former opposition audit jugement, ayant cru pouvoir en interjeter appel, s'est évidemment mépris sur l'intelligence de l'art. 455 c. proc.; car la disposition de cet article ne peut jamais recevoir d'application, lorsque le jugement par défaut ne contient qu'un congé au profit du défendeur ou une déclaration de l'abandon de l'instance faite par le demandeur; Qu'en effet, le sieur Fransoj n'est appelant du susdit jugement qu'en ce qui touche le défaut de congé; car, n'ayant déduit aucun grief, il l'a reconnu juste et régulier en cette partie, et il n'a pu interjeter appel d'aucun chef, parce que le jugement ne porte que le défaut et le congé; Qu'il suit de là que, par l'assignation donnée à la requête du sieur Fransoj, par son exploit d'appel aux sieurs Florio, pour comparaitre par-devant cette cour, le sieur Fransoj n'a pu saisir la cour de la connaissance d'une affaire qui n'a pas encore éprouvé le premier degré de juridiction; Déclare qu'elle est incompétente pour statuer sur les fins et conclusions des parties. Du 23 août 1809.-C. de Turin, 1re chamb.

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241. Cependant la question, sous l'empire du code de procédure, a donné lieu à une controverse très-vive et a fait naître les opinions les plus divergentes.

D'une part, on a soutenu que lorque le défendeur prend un défaut-congé contre le demandeur, les juges ne décident rien sur le fond de la contestation, puisque le demandeur est absent et que le défendeur ne fournit aucun moyen. Dans ce système, l'absence du demandeur constitue comme une renonciation à la demande; par suite le défaut-congé prononcé contre lui exclut toute possibilité d'appel, sauf à lui à renouveler sa demande, sans quoi, dit-on dans ce système, on donnerait au demandeur un moyen facile de priver le défendeur du second degré de juridiction. Telle est l'opinion de MM. Favard, Rép., vo Jugement, sect. 1, §5, no 9; Carré, Analyse, t. 1, quest. 515, et t. 2, quest. 1434; Boncenne, t. 3, p. 16 et suiv.; Tallandier, de l'Appel, no 75; Coffinière, Encycl. du dr., yo Appel, no 57.

242. Il a été jugé, dans le sens de ce système, que le demandeur ne peut point appeler d'un jugement portant défautcongé contre lui (Turin, 23 août 1809; Bruxelles, 26 avril 1810 (1). Conf. Besançon, 4 déc. 1816, aff. N... V. jugement par défaut). 243. D'une autre part, dans un système également absolu en sens contraire, on soutient que le demandeur qui a laissé rendre contre lui un jugement par défaut, est, de même que le défendeur qui s'est laissé condamner par défaut, recevable à interjeter appel de ce jugement, lorsqu'il le fait après le délai de l'opposition (Nimes, 14 nov. 1825; Poitiers, 14 fév. 1837 (2); V. aussi Orléans, 30 août 1809, N....., vo Jugement par défaut). C'est en ce sens que se prononcent MM. Merlin, Quest. de droit, v° Appel, § 1, no 11, 3o; Pigeau, Comm., t. 1, p. 350; DemiauCrouzilhac, sur l'art. 154; Souquet, Dict. des temps légaux, introd., no 207; Armand Dalloz, Dict. gén., 1re part., vo Jugement par défaut, no 21, et 2° part., v° Appel, nos 75-77; Rivoire, Tr. de l'appel, no 62.

244. Enfin, dans un système intermédiaire, on soutient que l'appel n'est recevable que sous certaines modifications. M. Thomines-Desmazures dit en ce sens, no 183: « Le défaut-congé ne suppose que l'abandon de l'instance; il s'accorde sans examen du fond; il ne serait pas convenable d'autoriser le demandeur à priver le défendeur d'un degré de juridiction. Cependant, nous ferions difficulté, à raison de ce qu'aucun article de loi n'a prononcé cette fin de non-recevoir, dans le cas où le demandeur ne pourrait intenter un nouvelle action, à cause de la prescription encourue depuis son assignation; comme aussi lorsque le jugement par défaut ne se bornerait pas à donner congé de l'action, mais la déclarerait mal fondée, nous estimons que l'appel serait admissible, puisqu'en ce cas, il offrirait un véritable intérêt, ou

LA COUR

--

ses cohéritiers en partage de succession. Au jour de l'audience, il ne comparut point, ni son avoué pour lui. Le tribunal de Nivelle donna défaut, et renvoya les défendeurs de la demande. Appel par Jardinot.— Arrêt. Attendu que le jugement dont appel, tout en renvoyant de l'action, n'est qu'un simple congé ét déclaration de l'abandon de l'instance, qui n'empêche pas que l'appelant puisse renouveler la demande; que le juge n'a rien jugé relativement au différend des parties; déclare l'appel non recevable; condamne l'appelant aux dépens.

Du 26 avril 1810.-C. de Bruxelles; 2 ch.

(2) 1re Espèce: (Vincent C. Saugues.)- LA COUR ; — Attendu qu'aux termes de l'art. 445 c. pr., tout jugement par défaut est appelable; que tout appel saisit le juge supérieur de la connaissance de la demande formée devant le juge inférieur, ainsi que cela s'évince de l'art. 464 du même code; que, dès lors, le juge d'appel doit statuer sur la demande de l'appelant, s'il la trouve en état de recevoir jugement, etc. Par ces motifs, déclare l'appel recevable, et, statuant au fond, etc.

Du 14 nov. 1823.-C. de Nimes, 3° ch.-M. de Trinquelague, pr.

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2 Espèce: (Labrillantais C. Lemogne.) LA COUR; Attendu que, par le jugement de défaut-congé du 29 novembre 1825, les défendeurs ayant été renvoyés avec dépens de la demande qui leur était formée par Labrillantais, celui-ci a pu considérer ce jugement comme lui faisant grief, et chercher à se pourvoir par les voies de droit contre ledit jugement; Attendu que les délais de l'opposition étant passés, Labrillantais a pu se pourvoir par appel;-Par ces motifs, dit Labrillantais recevable dans son appel, etc.

---

Du 14 février 1837.-C. de Poitiers, 1 ch.-MM. Moyne, 1er pr. 2o Espèce: — (Jardinot C. ses cohéritiers.) -- Le sieur Jardinot assigna Gaillard, 1o av. gén.-Pervinquière, Greleau et Calmeil, av.

que le préjudice ne serait pas autrement réparable. » Cette dis- | posée, d'ailleurs, d'une manière toute générale, dans l'art. 455 du tinction a été adoptée par d'autres auteurs.-V. MM. Berriat-Saintc. de pr. Prix, 6o édit., t. 1, p. 288, note 14; Bioche, Dict. de proc., vo Appel, no 43, et Chauveau sur Carré, Lois de la proc. civ., quest. 617 et 1566 bis à la note.

245. Entre ces divers systèmes, le second nous semble le meilleur. Dire avec les partisans du premier qu'admettre la voie d'appel ce serait autoriser le demandeur à supprimer le second degré dejuridiction, c'est tomber dans une méprise évidente. Car le premier degré est observé par l'effet du jugement qui est intervenu sur la demande portée devant le tribunal. Le jugement est par défaut, sans doute; mais la loi n'a dit nulle part que le premier degré ne serait réputé rempli que tout autant que le demandeur viendrait soutenir et justifier sa demande. En définitive, le jugement de défaut-congé, fondé sur la maxime actore non probante reus absolvitur, ne diffère en rien de tous ceux qui rejettent une demande comme non justifiée. C'est là une raison décisive contre le système selon lequel l'appel ne devrait jamais être admis à l'égard de ces sortes de jugements. Ajoutons qu'elle s'élève également contre le troisième système, qui n'admet l'appel que dans le cas où le défendeur a requis que la demande fùt déclarée mal fondée; et l'écarte, au contraire, lorsque le tribunal s'est borné à prononcer le défaut-congé proprement dit, lequel suppose seulement l'abandon de l'instance et le désistement par le demandeur. « Cette distinction, dirons-nous avec M. A. Dalloz, - loc. cit., est arbitraire..... Pourquoi supposer de la part du demandeur un désistement qu'il aurait eu intérêt, pour éviter des frais, de donner avant le jugement, s'il avait eu réellement la volonté de se désister? Et si ce désistement ne doit pas se présumer, il est évident qu'il n'y a pas à argumenter de la prétendue acceptation de ce désistement par le défendeur, quand❘ celui-ci, sans prendre de conclusions précises sur le mérite de l'action intentée contre lui, a simplement requis et obtenu un jugement qui le renvoie de la demande en donnant congé contre le demandeur. Ce renvoi est implicitement, mais nécessairement motivé, sur ce que la demande n'est pas justifiée et, par conséquent est légalement mal fondée. »

Nous estimons donc que l'appel est recevable dans tous les cas, contre le jugement de défaut-congé, comme on le soutient dans le second des systèmes ci-dessus exposés; et que la loi n'ayant fait aucune distinction entre les divers jugements par défaut, celui dont il s'agit ici tombe sous l'application de la règle

(1) (Lahr C. Rosvinch.) LA COUR ; Considérant que le jugement ayant été signifié à l'avoué de Mathieu Lahr le 31 mars 1812, et à sa personne le 2 avril suivant, afin de faire courir le délai pour se pourvoir, Lahr y a formé opposition, par requête d'avoué à avoué, le 1er du même mois d'avril; que l'effet de cette opposition, signifiée avant qu'il fût permis, d'ailleurs, à Lahr d'appeler, a été de ressaisir le tribunal de Luxembourg de la connaissance de la contestation; qu'il ne lui était dès lors pas permis de l'en dépouiller par l'appel qui a été interjeté, par exploit du 11 juin suivant; Par ces motifs, Déclare Labr non recevable dans son appel; Le condamne en l'amende et aux dépens de la cause d'appel, etc.

Du 30 avril 1813.-C. de Metz.-M. Voysin, 1er pr.

(2) Espèce: - (Lanson C. de Coinces.) De Coinces réclame la propriété d'un terrain possédé par Lanson. Celui-ci oppose différentes fins de non-recevoir tirées des titres produits par de Coinces. I oppose aussi la possession trentenaire. 18 déc. 1807, jugement du tribunal de Romorantin, qui ordonne que l'instance sera instruite par écrit et nomme un rapporteur. 27 mai suivant, autre jugement qui déclare Lanson non recevable dans sa fin de non-recevoir, et admet la preuve par lui offerte. Appel du premier chef par Lanson. Arrêt infirmatif qui ordonne qu'un plan sera dressé, et que les titres seront adaptés. L'exécution de l'interlocutoire du 27 mai 1808 est reprise devant le tribunal. Jugement qui rejette la demande en forclusion formée par de Coinces. Enquête. De Coinces demande une prolongation de délai pour achever son enquête. 28 juillet 1809, jugement par défaut, faute de plaider, qui accorde cette demande. 19 août, ordonnance sur référé qui rejette l'opposition formée par Lanson à la continuation d'enquête, et fondée sur une nouvelle forclusion. Devant le tribunal, Lanson reproduit sa demande en forclusion; elle est rejetée par jugement du 22 juin 1810, qui ordonne que les parties feront diligence pour faire statuer sur la demande principale à l'audience du 29 suivant, pour tout délai, sans même qu'il soit besoin d'avenir ni de signification. 29 juin, jugement qui donne défaut contre

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246. Mais, soit qu'il s'agisse du défaut-congé, soit qu'il s'agisse d'un jugement de défaut prononcé contre le défendeur, il faut toujours que les délais de l'opposition soient expirés de telle sorte que le premier degré de juridiction soit désormais épuisé, pour que la partie puisse recourir à l'appel. Relevé avant l'expiration de ces délais ou avant qu'il eût été statué sur une opposition formée, l'appel devrait être nécessairement écarté par fin de non-recevoir; et même cette fin de non-recevoir serait de telle nature, d'après les auteurs, qu'elle devrait être suppléée d'office (V. en ce sens, MM. Thomines-Desmazures, t. 1, p. 694, et Chauveau sur Carré, Lois de la proc. civ., quest. 1636 ter). En effet, comme le dit ce dernier auteur, la fin de nonrecevoir tient ici à l'ordre des juridictions, et à cette règle absolue qui veut que le second degré ne puisse être abordé par les parties avant qu'elles aient épuisé le premier (V. Degrés de juridiction). Et d'ailleurs, la voie de recours la plus simple doit, tant qu'elle demeure ouverte, être préférée à une voie plus compli quée.

247. Cependant, il importe de le remarquer, la règle posée par le législateur dans l'art. 455, règle qui subordonne l'exercice de la faculté d'appeler à l'expiration du délai de l'opposition, doit être entendue avec quelque réserve. En effet, l'intention évidente de la loi a été d'empêcher que deux voies ordinaires d'attaquer les jugements fussent simultanément ouvertes. Il résulte bien de là qu'en principe, la partie qui a formé l'opposition ne peut en abandonner la poursuite pour prendre la voie de l'appel (Metz, 30 avril 1813 (1); Conf. Lyon, 14 déc. 1810, aff. Tissot, vo Désist.); puisque le but du législateur ne serait pas atteint si, après avoir formé opposition au jugement, la partie pouvait, sans attendre le résultat de l'opposition, prendre la voie de l'appel.

248. Et c'est encore en ce sens qu'il a été décidé que, dans une instance non instruite par écrit, le jugement par défaut, faute de conclure et de plaider, eût-il été même précédé d'un jugement contradictoire qui fixé l'audience à laquelle il doit être rendu sans avenir ni signification, est un jugement par défaut susceptible d'opposition; dès lors, l'appel qui en a été interjeté dans le délais de l'opposition est non recevable (Req., 30 avril 1812) (2).

249. Cela s'applique même au cas où l'on prétend que le jugement a été incompétemment rendu (Paris, 27 mars 1813) (3),

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Lanson et son avoué faute de plaider, et adjuge au sieur de Coinces sa
demande. Appel par Lanson dans le délai de l'opposition du jugement du
28 juill. 1809, de ordonnance sur référé du 19 août, et des jugements
des 22 et 29 juin 1810.- 6 janv. 1811, arrêt de la cour d'Orléans, qui
déclare l'appel non recevable contre le jugement du 29 juin, comme inter-
jeté dans ies délais de l'opposition, et décide que ce jugement ayant ac-
quis l'autorité de la chose jugée, il est inutile d'examiner le mérite de
l'appel quant aux autres jugements. Pourvoi. — Arrêt (apr. dél.).
- Considérant, sur le premier moyen, qu'il résulte de l'exa-
men des pièces du procès que le jugement définitif rendu par le tribunal
de Romorantin, le 29 juin 1810, a été prononcé à l'audience par défaut,
faute de conclure et de plaider, et qu'aux termes de l'art. 455 c. pr. civ.,
il ne pouvait pas être interjeté appel de ce jugement pendant la durée du
délai de l'opposition, d'où il suit qu'en déclarant le demandeur non rece-
vable dans son appel interjeté prématurément et contre le vœu de la loi, la
cour impériale d'Orléans a fait une juste application de l'art. 455 c. pr.
civ.;
- Rejette.

LA COUR;

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Du 30 avril 1812.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Rinier, rap.

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-

(5) Espèce (Beaudoin C. Eu.) Beaudoin, poursuivi devant le tribunal de commerce par la demoiselle d'Eu, en payement d'un billet de 3,500 fr. qu'il avait souscrit au profit de cette dernière, en déclarant vouloir l'employer dans son commerce, soutint qu'il n'était ni négociant ni marchand, et demanda son renvoi.-22 sept. 1812, jugement qui rejetto sa demande et le condamne, faute de plaider au fond, par défaut et par corps, au payement dudit billet. Beaudoin mit opposition à cette dernière partie du jugement, et obtint un sursis, en déclarant qu'il allait s'inscrire en faux contre ce billet. Postérieurement, il interjeta appel, pour incompétence, du jugement du tribunal de commerce, et demanda subsidiairement qu'il fut sursis à toute instruction sur l'appel, jusqu'à ce qu'il cût été statué sur son inscription de faux. — Arrêt.

LA COUR; — Attendu qu'il ne s'agit que de l'incompétence, et que l'appelant a lui-même acquiescé au jugement, à cet égard, en formant oppo

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