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faits en vue de la récolte pour que le privilége doive être admis (V. M. Pont, no 134). — Il a été décidé, cependant, que le privilége que l'art. 2102 c. civ. accorde aux sommes dues pour les semences et frais de récolte de l'année, sur le prix de cette récolte, par préférence même au propriétaire, ne s'étend pas aux fournitures de simples engrais, tels que poudres végétatives (Caen, 28 juin 1837) (1). Mais la solution ne peut être admise, et il a été décidé avec plus d'exactitude qu'on doit considérer comme faisant partie des frais de récolte le prix de barriques fournies pour loger une récolte de vin, et que ces frais doivent être prélevés préférablement au loyer du propriétaire du fonds (Bordeaux, 2 août 1831, aff. Montesquiou, V. Distribution par contrib., no 77).

295. Quant à la chose grevée du privilége, c'est le prix de la récolte de l'année. Le créancier de sommes dues pour semences ou frais de cette récolte ne serait donc pas préféré sur le prix des récoltes antérieures à celui de l'année; il ne pourrait avoir sur le prix de ces récoltes qu'une action personnelle et non privilégiée.-V. MM. Persil, p. 105, no 5; Rolland de Villargues, vo Privilége, no 88; Font, loc. cit., no 156.

296. Le second privilége dont il s'agit ici a pour objet de garantir les sommes dues pour ustensiles. Il est établi aussi, d'une manière générale, et a lieu non-seulement au profit de celui qui a vendu les ustensiles, mais encore de celui qui les aurait réparés et raccommodés, et cela sans distinction aucune entre le cas où le propriétaire, dont la créance est primée par ce privilége, a su, et celui où il a ignoré si le prix était encore dû à l'ouvrier qui a fait les réparations, ou au marchand qui a

sidérant qu'aux termes de l'art. 2102 c. civ., le privilège des métayers et colons sur les fruits de la récolte de l'année prime celui du propriétaire; -Que, suivant l'art. 2101 même code, le domestique a privilége sur tout le mobilier, et par conséquent sur les fruits de la recolie; - Que Foisy et Gauthier se sont présentés l'un et l'autre dans le temps de droit pour réclamer et faire valoir leur privilege; que, dans l'espèce, il n'est pas contesté qu'ils ont travaillé à la récolte de 1811, et que c'est à celui qui conteste le privilège à faire la preuve négative, en sorte que le privilège réclamé est constant; Considérant que le privilége, frappant sur la récolte même dont le prix est affecté au payement de la créance, ne pourrait être effacé que par l'enlèvement des fruits; que cet enlèvement ne doit pas être fait avant que le créancier privilégié soit payé et qu'il a intérêt de l'empêcher; Que l'acte de vente fait par le fermier da mobilier de la ferme et des fruits de la récolte affectés au privilége dont il s'agit ne peut avoir d'effet pour dépouiller les créanciers privilégiés, tant que les meubles et les fruits existent encore dans la ferme; le tribunal déboute la veuve et les enfants Goislard de leurs opposition et demande en nullité; ordonne qu'il sera passé outre à la poursuite de la saisie faite à la requête de Foisy et Gauthier, si mieux n'aiment, les Veuve et enfants Goislard, leur payer le montant de leurs créances, et les condamne aux dépens. » · Appel. Arrêt. LA COUR;Faisant droit sur l'appel interjeté par la dame de Villebréme et consorts du jugement rendu au tribunal de première instance de Châteaudun, le 27 fév. 1812, et adoptant les motifs des premiers juges, met l'appellation au néant;-Ordonne que ce dont est appel sortira son plein et entier effet, etc.

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Du 23 juin 1812.-C. de Paris, 2 ch.

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(1) (Duguey C. de Saint-Cricq.) — La cour; Considérant que l'art. 2102, § 1, 4 alinéa, ne confère expressément de privilege qu'aux semences et récoltes, et qu'en matière de privilége, tout est rigoureux ; -Que les fournitures faites par Duguey sont des poudres végétatives qui ne constituent que de simples engrais, et qu'on ne les peut ranger dans la classe des semences ou frais de récoltes, auxquels la loi attribue privilège, sans dénaturer la signification usitée de ces termes; - Qu'on objecte vainement que, par suite de l'emploi de ces engrais, la terre sur laquelle ils ont été placés, ainsi que les récoltes qu'elle a produites, ont obtenu une amélioration quelconque, parce que le législateur n'a point établi de privilége pour toutes les fournitures qui peuvent servir à améliorer la terre et les récoltes, mais seulement pour les semences et frais de récoltes; et qu'à défaut de texte bien précis, on ne peut suppléer au silence de la loi pour créer un privilége qu'elle n'a point expressément déterminé; - Considérant, en outre, que le comte de Saint-Cricq, en Jouant sa terre à Gohier, lui a nécessairement livré des fumiers et des pailles en quantité suffisante, ou que du moins Gobier, en acceptant la terre dans l'état où elle se trouvait, doit être regardé comme s'étant contenté de cet état, sous le rapport des engrais; et que le propriétaire n'a pas dû s'attendre que son privilége pour fermage pût se trouver primé par les frais de tous les engrais extraordinaires qu'il plairait à son fermier de placer sur sa terre ; que, dans l'espèce, il y aurait d'autant plus d'in

fait la vente.-V. MM. Duranton, t. 19, no 99; Mourlon, no 107; Pont, no 155.

297. Remarquons seulement, avec ces auteurs, que nous supposons en ceci que soit l'achat, soit les réparations des ustensiles a eu lieu pendant le bail. S'il s'agissait d'ustensiles apportés par le fermier à son entrée dans la ferme, il faudrait combiner ceci avec ce que nous avons dit plus haut à l'occasion du privilége accordé au propriétaire de la ferme pour ses loyers: celui-ci ne serait primé que s'il avait eu connaissance de la dette dont les ustensiles étaient grevés, soit au profit de l'ouvrier, soit au profit du marchand, lorsqu'ils ont été apportés dans la ferme.

288. Du reste, le privilége n'est établi que pour les sommes dues à l'occasion des ustensiles servant à l'exploitation; il ne protégerait donc pas la créance pour ustensiles de ménage. Mais en parlant d'exploitation, nous indiquons que le privilége ne doit pas être restreint aux sommes dues pour achat ou réparations d'ustensiles aratoires. Il se peut que la loi ait eu principalement en vue cette sorte d'ustensiles; mais elle n'a pas certainement exclu l'idée que le privilége puisse être étendu également aux sommes dues pour les ustensiles servant à une exploitation industrielle (Conf. M. Pont, no 135). · Aussi a-t-il été décidé que le privilége du charron, du maréchal et du bourrelier s'exerce de préférence à celui du locateur, sur le prix des ustensiles par eux fournis ou réparés, et cela sans qu'il y ait lieu à distinguer si les ustensiles s'appliquent à une usine ou s'il s'agit d'ustensiles aratoires (Amiens, 20 nov. 1837) (2).

299. Quant à la chose grevée du privilége, c'est le prix

convénients à les allouer qu'ils s'élèvent à une somme très-considérable, et qui absorberait presque en entier le produit de la récolte, sur lequel le propriétaire devait compter pour le payement de ses fermages; -Confirme, etc.

Du 28 juin 1837.-C. de Caen.-M. Pigeon de Saint-Pair, pr.

(2) Espèce (Briffe C. Romain.)-Le sieur de la Briffe n'étant pas payé des loyers du moulin qu'il avait loué au sieur Duvicquet, fit vendre les meubles de ce dernier.-Une contribution s'ouvrit. - Le charron, qui avait livré deux voitures neuves à Duvicquet, le maréchal qui les avait ferrées de toutes pièces, le bourrelier qui avait fourni les harnais, produisirent leurs mémoires, dans lesquels é aient compris en outre quelques travaux de réparation et d'entretien, et demandèrent à être colloqués par privilége sur le prix des objets vendus, entretenus ou réparés. -Le tribunal de Senlis accueille, le 27 avril 1837, cette demande en ces termes« Sur le privilége réclamé par la veuve Barbier, domestique, Bazin et François, garde-moulin :-Attendu que l'art. 2101, no 4. c. civ., qui s'applique incontestablement aux domestiques attachés à la personne, comprend encore naturellement, soit dans ses termes, soit dans son esprit, la personne employée à un service manuel dans une usine, et lui accorde le même privilége général ; Sur le privilége spécial réclamé tant par le marquis de la Briffe que par Romain et Boufflet: Attendu que le marquis de la Briffe, en sa qualité de locateur, jouit incontestablement du privilége spécial de l'art. 2102 c. civ., sur le prix de tout ce qui garnissait la maison et l'usine ou servait à son exploitation, et que, les objets fournis ou réparés par les autres créanciers pouvant être considérés comme des ustensiles de l'usine, sans en excepter les fers des chevaux, ces derniers créanciers ont droit également au privilége spécial du même art. 2102 sur le prix desdits objets; - Sur le rang à établir entre ces divers priviléges:- Attendu que, si l'art. 2105 préfère les priviléges généraux de l'art. 2101 aux priviléges particuliers sur les immeubles, ni cet article, ni aucun autre, ne leur accorde la même préférence à l'égard des priviléges particuliers sur les meubles; que, loin d'appliquer par analogie l'art. 2105 précité aux priviléges particuliers sur les meubles, ce qui supposerait un oubli du législateur, il vaut mieux penser que, s'il a gardé le silence à l'égard de ces priviléges, c'est qu'il a voulu les traiter différemment;-Qu'en effet, la préférence des priviléges généraux, à l'égard des priviléges particuliers sur les immeubles, peut s'expliquer par la modicité des créances de l'art. 2101, surtout lorsqu'elles sont probablement payées en partie sur les meubles, si on les compare à l'importance des immeubles, à celle des créances qui les frappent, et de la fortune probable des créanciers; tandis que la même préférence à l'égard des privilèges particuliers sur les meubles absorberait le plus souvent le gage de ces derniers, et leur ôterait toutes ressources pour des créances le plus souvent modiques en elles-mêmes, mais importantes eu égard à la fortune de ceux qui les réclament;-Que, si les privileges de l'art. 2101 sont appelés généraux, et s'appliquent à tous les meubles, ce n'est pas le signe d'une faveur particulière, mais oien le résultat nécessaire de ce que la cause de ces priviléges n'est relative à aucun meuble en particulier ;-Que, s'ils s'étendent sur les immeubles, on

même des ustensiles; c'est seulement sur le prix des ustensiles grevés de la dette, et non sur autre chose, que le créancier, c'est-à-dire l'ouvrier qui aura réparé ces ustensiles, ou le marchand qui les aura vendus, sera préféré au propriétaire du fonds. - Jugé, en effet, que le privilége pour fournitures et réparations d'ustensiles aratoires n'existe, par préférence au propriétaire de la ferme, que sur le prix des ustensiles fournis ou réparés, et non sur celui de tous les ustensiles qui garnissent la ferme en général (Cass. 12 nov. 1839) (1). A plus forte raison, les frais d'ustensiles aratoires ne constituent pas des frais de récolte, el, par suite, le privilége que la loi accorde à celui qui a fourni ou réparé ces ustensiles ne peut être étendu au prix de la récolte de l'année, par préférence au propriétaire de la ferme (même arrêt).

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en peut donner la même raison, et qu'on en peut même conclure qu'ils ne priment pas les priviléges particuliers sur les meubles, puisque, s'ils les primaient, ce recours sur les immeubles leur serait si rarement utile, qu'on n'eût sans doute pas songé à le leur accorder ; Attendu d'ailleurs que les art. 661 et 662 c pr. civ. n'accorderaient pas au propriétaire seul le droit de faire statuer en référé sur son privilege, et ne le dispenseraient pas également seul de contribuer aux frais de distribution, s'il ne venait qu'après une série entière de priviléges qui est représentée par quelques créanciers dans presque toutes les distributions, et que, par conséquent, on aurait pu oublier, comme on a oublié quelques priviléges préférés au propriétaire, mais qui se présentent rarement;Que si ces positions, dont le but n'est pas de fonder le droit, mais seulement d'en organiser l'exécution, n'ont pas précisément force législative dans la question, elles ne doivent pas moins y être prises en grande consideration; Attendu en outre que, si le privilége de l'art. 2101, no 4, invoque en sa faveur des motifs d'humanité, celui de location peut en invoquer avec plus de raison encore, puisque le défaut de sécurité pour les propriétaires, en les rendant plus exigeants sur tous les rapports, tournerait surtout au préjudice des locataires peu fortunés; -Attendu enfin que le privilége du locateur est préférable à celui de l'art. 2101, no 4, tant sous le rapport de l'utilité genérale que dans les principes de notre droit, où, relativement aux meubles, le nantissement jouit de la plus grande faveur, où le locateur trouve encore un droit de suite qui n'est accordé à aucun des priviléges spéciaux ;- Quant à ceux qui ont fourni, entretenu ou réparé des ustensiles pour l'usine, attendu qu'ils doivent être colloqués sur le prix de ces ustensiles de préférence au locateur, et, par une conséquence nécessaire, de préférence à ceux qui viennent après lui. »

Appel par le sieur de la Briffe. Il soutient que son privilége doit primer celui des intimės ;-Que, si le n° 4 de l'art. 2102 place le privilège du vendeur après celui du bailleur, les frais faits pour la conservation de la chose doivent aussi, et à fortiori, céder le pas à sa créance ;Que le privilége, tout exceptionnel, mentionné dans le quatrième alinéa du no 1 de l'art. 2102 ne concerne que les sommes dues pour ustensiles aratoires;-Que l'esprit et le texte de la loi commandent cette restriction, car la même disposition embrasse les sommes dues pour semences, les frais de récoltes et le prix d'ustensiles; - Que le motif de préférence est, en effet, le même, puisque les ustensiles ont également servi à produire la récolte sur laquelle s'exerce le privilége du locateur. -Les intimés ont répondu qu'ils invoquaient les nos 3 et 1 de l'art. 2102, et non le n° 4;-Que les frais conservatoires étaient préférables à toute autre créance; ils citaient l'exposé des motifs par M. Grenier; le Rép. de M. Merlin, vo Privilége, sect. 3, § 2, nos 6 et 16, et M. Troplong, des Priv. et hyp., nos 64, 65, 66, 166 et 175; ils disaient que la loi ne distingue pas la nature des ustensiles; — Que leur destination à une exploitation industrielle et rurale était indifférente; -Qu'on entendait par là non de simples meubles employés à des usages domestiques pour la seule commodité du locataire ou des besoins de sa personne, mais des instruments à l'aide desquels il exploitait le fonds; Qu'il était de l'intérêt des propriétaires d'usines que leurs établissements fussent maintenus en activité;-Que l'industrie méritait aussi protection; -Que, si la préférence accordée aux sommes dues pour les ustensiles l'était uniquement en vue de la récolte produite, ce privilége devait s'étendre même sur le prix des récoltes, tandis qu'il se borne au prix des ustensiles mêmes.-Arrêt.

-

LA COUR;-Attendu que les dispositions du no 1 de l'art. 2102 c. civ. ne sont pas restreintes aux seuls ustensiles aratoires, et qu'elles s'appliquent également à ceux des usines, surtout à un moulin, usine d'une location annuelle de plus de 4,000 fr.; Attendu que le dispositif du jugement dont est appel n'a rien statué positivement sur les fers à cheval, et que ce qui en est dit dans les motifs ne peut nuire aux droits de l'appelant lors du règlement définitif de la distribution, et qu'au surplus l'application de fers à cheval ne peut être considérée comme une opération conservatrice des chevaux, ni additionnelle à leur valeur ; que, conséquemment, elle ne saurait donner lieu à la division de leur prix dans

ART. 3.

Créance sur le gage dont le créancier est saisi. 300. Le n° 2 de l'art. 2102 accorde un privilége au créancier sur le gage dont il est saisi. En cela, cet article ne fait que reproduire les dispositions déjà écrites au titre du Nantissement, et notamment dans les art. 2073 et 2076, dont le premier dit que le gage confère au créancier le droit de se faire payer sur la chose qui en est l'objet, par privilége et préférence aux autres créanciers,» et dont le second ajoute que, «dans tous les cas, le privilége ne subsiste sur le gage qu'autant que ce gage a été mis et est resté en la possession du créancier, ou d'un tiers convenu entre les parties. » Inutile donc d'entrer ici dans des développements qui trouvent plus naturellement leur place sous le mot Nantissement. V. ce mot, nos 209 et suiv.

une distribution de deniers ; miers juges, confirme.

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Du 20 nov. 1837.-C. d'Amiens, ch. crim.-M. Poirriez, pr. (1) Espèce: (Roussel C. Roger.) Le sieur Laurent, fermier du sieur Roussel, lui devait pour 4,222 fr. de ferniages, mais il paraît qu'il était insolvable. Par deux actes des 10 et 19 nov. 1857, Laurent consentit la résiliation de son bail et céda à Roussel les chevaux, harnais et ustensiles aratoires composant la ferme, ainsi que les récoltés sur pied, le tout estimé à 3,789 fr., moyennant quoi Roussel le tint quitte des fermages qui lui étaient dus. Depuis ces conventions, et par exploit du 15 décembre de la même année, le sieur Roger, maréchal-ferrant, qui avait fait pour 700 fr. de fournitures de fer au sieur Laurent, a assigné Roussel, son cessionnaire, en payement de cette somme sur le prix de la cession, prétendant qu'il avait sur ce prix, comme représentant la récolte de l'année, ainsi que sur les harnais et instruments aratoires, le privilége spécial et préférable à celui du propriétaire, accordé par la loi pour les frais de récolte et le prix des ustensiles réparés ou fournis. - A quoi Roussel a répondu que, si celui qui a vendu ou réparé des ustensiles aratoires, a un privilége pour obtenir son payement, ce privilége doit être restreint au prix des instruments vendus ou réparés eux-mêmes; que, dans tous les cas, il ne peut être considéré comme ayant pour cause les frais de récolte, ni, par suite, être exercé sur cette récolte.

31 mars 1858, jugement du tribunal de Joigny qui, repoussant ce système de défense, condamne Roussel à payer à Roger, sur le prix de la vente à lui faite par Laurent, la somme de 700 fr., avec intérêts à compter du jour de la demande : - «Considérant que le mémoire de Roger ayant pour objet la réparation et la confection d'ustensiles et instruments d'agriculture et les ferrements des chevaux de labour pendant l'année 1837, il a droit, pour en recouvrer le montant, non pas seulement au privilége donné par le no 5 de l'art. 2102 c. civ. aux frais faits pour la conservation de la chose, mais bien au privilége accordé, par le n° 1 de cet article, sur les ustensiles faits ou réparés et sur les récoltes de l'année, lequel privilége passe avant tous les autres, et même avant celui du propriétaire de la ferme;-Considérant que la vente faite le 10 nov. 1837, par Laurent, fermier, à Roussel, des animaux, instruments et ustensiles aratoires qui garnissaient la ferme, et de la récolte des terres à lui louées, n'a pu lui transmettre ces objets que grevés du privilége de Roger, et que la créance dudit Roussel comme propriétaire, pour le montant de ses fermages, n'ayant droit qu'à un privilège postérieur à celui dudit Roger pour ses travaux et fournitures, il n'a pu opérer par cette vente, ni par l'acte du 19 novembre suivant, une compensation entre sa créance et le prix des objets par lui acquis au préjudice dudit Roger. » Pourvoi de Roussel, pour violation des art. 2093 et 2102, no 1, c. civ. Arrêt.

LA COUR; Vu les art. 2093 et 2102, no 1, c. civ.:-Attendu que, si, d'après ce dernier article, les sommes dues pour les frais de la récolté de l'année doivent être payés sur le prix de la récolte et celles dues pour ustensiles, sur le prix de ces ustensiles, par préference au propriétaire, il résulte de cette disposition même, 1° qu'on ne peut considérer comme frais de récolte les fournitures et réparations d'ustensiles aratoires, puisque c'est uniquement sur le prix de ces ustensiles que la loi attribue un privilège à celui qui les a faits ou réparés; 2o que ce privilége ne peut s'étendre sur le prix d'ustensiles, autres que ceux fournis ou réparés par celui qui réclame le privilége; Attendu que le jugement attaqué accorde à Roger, pour réparation et confection d'instruments d'agriculture et pour ferrements de chevaux de labour, un privilége, non-seulement sur le prix des ustensiles faits ou réparés, mais encore sur le prix de la récolte, au préjudice de Roussel, propriétaire de la ferme ; Attendu qu'en jugeant ainsi que Roger avait un privilege antérieur à celui du propriétaire, et, en condamnant, par suite, Roussel à payer à Roger la somme par lui réclamée avec intérêts du jour de la demande, le jugement attaqué a expressément violé les articles précités du code civil; - Sans qu'il soit besoin de statuer sur le deuxième moyen, casse.

Du 12 nov. 1839.-C. C., ch. civ.-MM. Boyer, pr.-Miller, rap.-Laplagne-Barris, 1er av. gén., c. conf.-Moreau, av.

301. Nous indiquerons sculement que lá condition nécessaire du privilége est que le créancier soit saisi du gage par une possession actuelle et réelle, et qu'il ne suffirait pas qu'il en eût une possession civile, feinte, simulée, précaire (Conf. M. Pont, no 137). — Jugé en ce sens que, lorsque l'art. 2102 c. nap. confère privilége au créancier sur le gage dont il est saisi, il n'entend pas parler d'un meuble placé sous les mains de la justice par voie de saisie, mais d'un meuble que le créancier détient à titre de nantissement; et que par conséquent le créancier premier saisissant n'a pu réclamer de privilége sur les meubles que sa saisie avait frappés (Bruxelles, 11 déc. 1806, aff. Danoot, V. nổ 147),

302. Ainsi, des papiers remis à un imprimeur pour l'impression n'étant pas entre ses mains à titre de gage, il s'ensuit que, si partie de ces papiers ont été livrés au propriétaire après avoir été imprimés, l'imprimeur ne peut, sur les papiers blancs restés dans ses magasins, réclamer un privilége pour ses frais d'impression: il n'aurait droit sur ces papiers, s'ils étaient imprimés, qu'à titre d'accession (Paris, 24 avril 1827) (1).

308. De même lorsque divers prêts sur gage sont faits au même emprunteur pour des opérations distinctes, quoiqué de même nature, chaque prêt forme une créance particulière, à la sûreté de laquelle chaque gage resté spécialement affecté, sans que le prêteur puisse faire servir le même gage à garantir le payement des avances faites pour les autres opérations (Bordeaux, 22 juin 1831) (2).—y. aussi vo Commissionn., no 153.

304. Il a été jugé au contraire que, si, les primes ou sommes payées par les jeunes conscrits ont été remises par la compagnie, à titre de dépôt entre les mains d'un tiers, jusqu'à l'accomplissement des engagements de la compagnie, les jeunes gens ont, à défaut par celle-ci de procurer des remplaçants, privilége sur les sommes déposées, et que ce privilége doit profiter à tous les jeunes gens, encore bien que leurs versements aient été partiels, s'ils ont eu lieu dans le méme but (Toulouse, 16 juin 1831, aff. faill. Charbonnier, V. Nantissement, no 148).

sédé par suite de perte ou de vol, le privilége subsiste et donne au créancier le droit de revendiquer aux mains de tous tiers possesseurs le gage qu'il aurait perdu ou qui lui aurait été volé. (V. MM. Persil, art. 2102, § 2, no 1; Duranton, t. 9, no 105; Valette, no 49; Pont, no 157; Mourlon, no 112). Il faut dire même, avec tous ces auteurs, à l'exception de M. Mourlon, que le droit de revendication prenant sa source dans l'art. 2279 c. nap., l'action durera pendant trois ans à partir de la perte où du vol, en quoi ce droit diffère de celui qui a été accordé au locateur, lequel a été renfermé par l'art. 2102, comme on l'a vu plus haut, dans le très-bref délai de quinze ou de quarante jours:

ART. 4. - Frais faits pour la conservation de la chosë.

806. Le quatrième privilége spécial énoncé dans l'art. 2102 est celui qui est conféré aux frais faits pour la conservation de la chose. Tout favorable qu'il est, et tout empreint qu'il est du caractère d'équité, ce privilége avait été omis dans les projets primitifs du code; c'est sur l'avis du tribunat que la créance des frais faits par la conservation dé la chose a été comprise parmi les créances privilégiées qu'énumère l'art. 2102 (V. M. Locré, t. 16, p. 224, 297, 314).

307. Par le mot frais, la loi a entendu parler de toutes les dépenses, de toutes les avances qui peuvent avoir été faites dans le but de conserver la chose, soit qu'il s'agisse d'un animal, soit qu'il s'agisse d'un objet inanimé (Tarrible, Rép. de M. Merlin, vo Privilége, sect. 3, § 2, no 10, et Grenier, t. 2, no 315; Pont, n° 139).

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308. Les mêmes auteurs enseignent avec raison, que le mot frais doit s'entendre également de toutes les dépenses qui ont pu être faites pour la conservation de la chose tant incorporelle que corporelle. Spécialement, un arrêt a pu, d'après l'appréciation des actes et des faits, considérer des avances de fonds comme ayant été faites pour la conservation d'une créance du débiteur, et, par suite, accorder au bailleur de fonds le privilége établi par l'art. 2102 c. nap. (Cass. 13 mai 1855, aff. Pellegrino. V. Faillite, no 1069).

305. Rappelons aussi en terminant que le privilége se maintient seulement tant que le créancier reste en possession du gage dont il est saisi. La dépossession lui fait donc perdre le privilege; mais cela s'entend de la dépossession volontaire. S'il est dépos-merciale, chargé par la sentence arbitrale qui l'a nommé de gé

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(1) Espèce:-(Didot C. synd. Dalibon.)-Jules Didot avait été chargé, par le libraire Dalibon, d'imprimer les œuvres de Rousseau. Partie de l'édition était imprimée et livrée, quand Dalibon est tombé en faillite. - Didot a prétendu que le papier blanc resté entre ses mains devait servir de gage et de privilége pour les frais d'impression qui lui étaient dus.- 1er mars 1826, jugement du tribunal de commerce de Paris, qui rejetle cette demande ; — « Attendu que la loi, en établissant, par l'art. 2102 c. civ., un privilége en faveur du créancier sur le gage dont il est saisi, a réglé, par les art. 2075 et 2074, les conditions auxquelles le gage ou nantissement devait être constitué; Attendu qu'aucune des conditions n'a été remplie par le sieur Jules Didot, et qu'en conséquence, il ne possédait pas les papiers blancs fournis par le sieur Dalibon, à titre de gage; Attendu que si l'ouvrier, l'artiste on l'artisan peuvent avoir droit d'accession sur les choses dont ils ont, par leurs mains-d'œuvre, augmenté la duréé ou la valeur, ce ne peut être que sur celles de cès choses demeurées en leurs mains; Attendu que Didot s'est dessaisi des papiers imprimés dont la façon forme aujourd'hui le montant de ses créances, et qu'il ne saurait avoir un privilége de façons sur des papiers qu'il n'a point imprimés; Attendu, d'ailleurs, que tout privilege doit être restreint dans son sens le plus étroit. >> - Appel. Arrêt. Adoptant les motifs des premiers juges, met l'appel au

LA COUR ; néant.

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Du 24 avr. 1827.-C. de Paris, 2e ch.-M. Cassini, pr. (2) (Barton et Guestier C. synd. Menier.)- LA COUR-Vu les pieces remises sur le bureau: - Attendu que l'expédition des trois navires, dont il est fait mention au procès, a réellement constitué trois operations distinctes; Attendu que, pour chacune de ces opérations, la maison Arbuthnot a fait à la maison Menier des avances qui ont formé autant de classes de dettes de cette dernière maison envers la première ; — Attendu que chaque dette a reçu pour gage l'expédition pour laquelle elle avait été contractée; — Attendu que ce serait donner au gage une destination autre que celle qui a été stipulée, et, par conséquent, éfendre un privilége hors des limites de la convention, que d'affecter une expédition au payement d'une dette différente de celle à la sûreté de laquelle elle doit servir; - Attendu que, lorsqu'il s'agit d'appliquer les moyens généraux d'extinction d'une obligation, un négociant peut se prévaloir de tous les articles de son crédit; mais qu'il n'en peut

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309. Jugé de même que le liquidateur d'une société com

pas être ainsi dans une espèce où ils ne forment pas un tout homogène; qu'il est indispensable de les distinguer les uns des autres, afin de n'attribuer le gage qu'aux créances pour lesquelles il a été spéciallement accordé ;

Attendu, en fait, que le navire le Jean-Pierre n'a été affecté qu'au payement de la traite de 25,000 fr.; qu'il suit, de là, que ce n'est qu'à raison de cette même traite que son chargement a pu être retenu à titre de gage; Attendu que Barton et Guestier sont consignataires représentant le propriétaire de la traite, et ont qualité suffisante pour en recevoir le montant; - Attendu qu'en condamnant Barton et Guestier à remettre la cargaison du navire le Jean-Pierre, à la charge, par le syndic de la faillite Menier, de payer préalablement la traite de 25,000 fr. et les frais légitimement dus, le tribunal a justement déterminé la mesure des obligations principales des parties.

Attendu que, par une

En ce qui touche les dommages-intérêts: suite immédiate et directe du refus qu'ont exprimé Barton et Guestier, sans l'appuyer sur aucun motif légitime de livrer les marchandises composant le chargement du navire le Jean-Pierre, le syndic de la faillite Menier frères est devenu passible des frais de nourriture et de gagés de l'équipage, qui, sans cette circonstance, auraient cessé d'être dus; que c'est là, pour la masse des créanciers, un préjudice dont Barton et Guestier doivent répondre; mais que leur responsabilité, à cet égard, ne peut être reportée au delà du 14 mai, jour où ils ont signifié un acte contenant opposition ou tierce opposition, en tant que de besoin, envers le jugement du 4 du même mois; que c'est mal à propos que Barton et Guestier ont fondé cet acte sur le prétendu droit qu'ils auraient eu de retenir le navire le Jean-Pierre, à titre de gage, non-seulement pour la traite de 25,000 fr., mais encore pour toutes autres créances de la maison Arbuthnot sur celle de Menier frères; que Barton et Guestier ont à s'imputer d'avoir, à l'aide d'un tel moyen évidemment inadmissible, arrêté l'exécution du susdit jugement du mai; Emendant quant au chef du jugement dont est appel, qui fixe au 10 mai l'époque à partir de laquelle les dommages-intérêts doivent être payés, déclare que lesdits dommages-intérêts ne doivent commencer et ne sont dus qu'à compter du 14 du même mois de mai; ordonne que le surplus du jugement, dont est appel, sortira son plein et entier effet.

Du 22 juin 1831.-C. de Bordeaux.-M. Roullet, 1o pr.

rer et d'administrer sous sa responsabilité personnelle jusqu'à la liquidation, est réputé agir tout aussi bien dans l'intérêt des créanciers de la société, non appelés à cette sentence, que dans celui des associés, surtout si la reddition de compte a eu lieu contradictoirement avec eux ; qu'en conséquence, il a un privilége à l'encontre de ces créanciers pour se faire indemniser des engagements qu'il a contractés en sa qualité de liquidateur (Paris, 16 déc. 1841) (1). Et que le créancier qui par des diligences antérieures à la faillite (événement par l'effet duquel la poursuite de son action se trouve remise entre les mains du syndic), a conservé le gage commun des créanciers, a droit d'être remboursé 'par privilége des frais qu'il a légitimement faits pour la conservation de ce gage (Rouen, 6 janv. 1842, aff. synd. Buron C. Brunel).

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310. Par suite encore, nous dirons avec M. Persil, Comm.

(1) Espèce: (Verdier et autres C. Herman-Delong.) - Une société en commandite formée à Paris, pour l'exploitation d'un fonds de boulangerie, entre le sieur Herman-Delong et autres, commanditaires, et le sieur Nielsen, gérant responsable, sous la raison Nielsen et comp., avait été dissoute par sentence arbitrale du 14 août 1839, renfermant nomination du sieur Herman-Delong, comme liquidateur, avec mission de gérer l'établissement social sous sa responsabilité personnelle, de le faire vendre, ainsi que tous ses accessoires, dans un délai déterminé, par-devant notaire, et en observant les formes de publication tracées par la sentence.

Cette sentence avait été rendue entre les associés seulement, et sans qu'aucun créancier y eût été appelé. Le sieur Herman Delong continua l'exploitation de la boulangerie sur un pied considérable; il contracta diverses obligations, à l'exécution desquelles il fut condamné personnellement et par corps; enfin, le 9 juill. 1840, longtemps après l'expiration du délai prescrit par la sentence du 14 août précédent, il fit procéder à la vente du fonds de boulangerie, lequel fut adjugé moyennant la somme de 48,000 fr. Ce prix, déposé à la caisse des consignations, fut aussitôt frappé de nombreuses oppositions. Le 3 oct. 1840, le sieur Herman-Delong assigna tant les associés que les créanciers de la liquidation devant le tribunal de commerce, pour recevoir son compte, et en même temps il demanda, devant le tribunal civil, la mainlevée des oppositions formées sur le prix déposé à la caisse des consignations, comme ayant pour seul résultat d'entraver son administration.

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Sur la contestation élevée contre cette dernière demande par les créanciers, intervint le jugement suivant, rendu en état de référé : - « Attendu que, si le sieur Herman-Delong est liquidateur de la société Nielsen et comp., sa qualité ne résulte que d'une sentence arbitrale dans laquelle les créanciers de ladite société n'étaient pas parties; - Attendu que, d'après l'art. 1022 c. pr. civ., les jugements arbitraux ne peuvent être opposés à des tiers; Que d'ailleurs un liquidateur ne représente que les associés, et ne peut être assimilé à des syndics, qui représentent les créanciers; — Qu'ainsi Herman-Delong n'a pas, dans le jugement arbitral dont il s'agit, un titre qui soit exécutoire contre les créanciers opposants, qui demandent qu'il soit procédé à une contribution sur les deniers dont Herman-Delong, en sa qualité de liquidateur, veut faire le recouvrement; Attendu que les difficultés sur lesquelles il s'agit de statuer ne sont donc pas relatives à l'exécution d'un titre exécutoire ou d'un jugement opposable aux adversaires d'Herman-Delong, ni même aux effets nécessaires d'une fonction reconnue par la loi, et dont il soit en possession d'une manière authentique ;- Par ces motifs, le tribunal dit qu'il n'y a lieu à référé. »

D'un autre côté, le tribunal de commerce, statuant sur le compte présenté par le sieur Herman-Delong, en prononça l'homologation par jugement du 14 juin 1841, et constata, au profit du liquidateur, une créance en reliquat. Le sieur Herman-Delong demanda à être colloqué par privilége pour le remboursement de cette créance, dans la contribution ouverte sur le prix frappé de saisie-arrêt, comme ayant agi, en sa qualité de liquidateur, dans l'intérêt des autres créanciers et pour la conservation du gage commun (c. civ., 2102). Cette collocation ne fut pas admise dans le règlement provisoire, par le motif que la qualité de liquidateur et de gérant des intérêts de la société dissoute n'avait pas été conférée au sieur Herman- Delong, contradictoirement avec les autres créanciers; que celui-ci, en traitant avec eux, était donc devenu purement et simplement leur débiteur; qu'ainsi il ne pouvait, à aucun titre, réclamer le privilége de l'art. 2102. Sur ce refus, le sieur HermanDelong a élevé un contredit par suite duquel il est intervenu, le 27 août 1841, un jugement du tribunal de la Seine ainsi conçu :- « Attendu que la sentence arbitrale du 14 août 1859 a declaré la société Nielsen dissoute, et a ordonné qu'il serait procédé à sa liquidation; Attendu qu'il résulte des circonstances de la cause que, dans l'espèce, le liquidateur a été le représentant non-seulement des associés, mais aussi des créanciers de la société; que les opérations auxquelles il s'est livré et les

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art. 2102, §5, no 1, que le privilége appartiendra au créancier qui aura prêté les sommes nécessaires à la conservation de la chose. Seulement nous ajouterons avec le même auteur, qu'il paralt résulter de l'art. 2103, nos 2 et 5, que, pour jouir de ce privilége, le créancier devra faire mention dans l'obligation de l'objet pour lequel les deniers ont été prêtés.

311. Mais, pour éviter des difficultés qu'il serait souvent impossible de lever, le privilége doit être rigoureusement restreint à la chose qui a été conservée, et ne peut être par conséquent étendu à un autre objet, sous le prétexte qu'il représente la chose conservée, ou bien qu'il n'est que la chose conservée elle-même, mais sous une nouvelle forme. C'est ainsi que la loi n'accorde la revendication au vendeur d'effets mobiliers non payés, que lorsque ces effets se trouvent dans le même état qu'à l'époque de la livraison (Persil, Comm., art. 2102, § 5, no 3, et Quest., t. 1,

engagements qu'il a contractés en sa qualité de liquidateur ont eu lieu dans l'intérêt de tous; que si Herman, nommé liquidateur, a été en même temps chargé de gérer et administrer le fonds de boulangerie dont il s'agit, c'est parce que cette gestion était une conséquence nécessaire de la liquidation; qu'en effet, l'un des premiers devoirs du liquidateur était de conserver la chose commune; que, pour conserver le fonds de boulangerie, qui était en activité, il y avait nécessité de l'exploiter, sous peine d'en laisser perdre presque toute la valeur; que, dans ces circonstances, la continuation du commerce auquel le liquidateur a été obligé de se livrer doit être considérée non comme une prolongation de la societé, mais comme un acte accessoire de la liquidation entreprise dans l'intérêt commun des créanciers et des associés; Attendu qu'en supposant que la qualité de représentant des créanciers ait pu être contestee à Herman-Delong avant la reddition de ses comptes, elle ne pourrait plus l'être aujourd'hui que ces comptes ont été rendus et approuvés contradictoirement avec ces mêmes créanciers; qu'en effet, la demande en reddition de compte a été formée contre Herman-Delong par Doussaine-Péan, l'un des créanciers antérieurs à la mise en liquidation; que, sur cette demande, Herman-Delong a mis en cause tous les autres créanciers, et leur a rendu son compte, dans lequel il a distingué les créances contre la société de celles contre la liquidation; qu'aucun des créanciers n'a demandé sa mise hors de cause et n'a opposé d'exception tendante à contester qu'Herman-Delong eût agi dans leur intérêt aussi bien que dans celui de la société; qu'enfin le jugement du 14 juin dernier, qui a homologué le compte du liquidateur, a été déclaré commun avec toutes les parties en cause ; que les créanciers de la société seraient donc aujourd'hui non recevables à élever une prétention contraire à celle qui a été implicitement consacrée par ce jugement; - Attendu qu'Herman-Delong ayant dans les circonstances qui viennent d'être rappelées, agi pour la conservation de la chose, a, aux termes de l'art. 2102 c. civ., un privilége sur le prix de cette chose pour tous les engagements qu'il a contractés en sa qualité de liquidateur; que le même privilége appartient aux créanciers envers lesquels il s'est obligé, sauf à déduire du montant de la collocation du liquidateur les sommes pour lesquelles les créanciers deniandent à être colloqués directement; Attendu d'ailleurs qu'en prenant l'engagement de gérer sous sa responsabilité, Herman-Delong a seulement consenti à donner aux tiers avec qui il contractait une garantie de plus, résultant de son obligation personnelle; mais qu'on ne saurait admettre qu'il ait par là renoncé à exercer contre la société les droits qui lui avaient été conférés comme liquidateur; — En ce qui touche la contestation de Paillard: - Attendu qu'il ne justifie pas qu'il ait été donné aucune suite à la demande formée par lui devant le tribunal de commerce; qu'ainsi c'est avec raison que, dans le règlement provisoire, il n'a été colloqué pour les intérêts de sa créance qu'à partir du jour de sa production;-Réforme le règlement provisoire en ce que M. le juge-commissaire a rejeté les demandes en collocation par privilége d'Herman-Delong et des créanciers de la liquidation; ordonne que ledit Herman-Delong, en sa qualité de liquidateur, et lous ceux des créanciers de la liquidation qui ont contesté le rejet prononcé contre eux, seront colloqués conformément à l'art. 2102, § 3 c. civ., savoir: Herman-Delong pour toutes les sommes dues par la liquidation et non attribuées directement aux créanciers contestants, et ceux-ci chacun pour le montant du rejet de sa collocation; - Maintient, en ce qui touche Paillard, le rejet de sa demande en collocation relative aux intérêts de sa créance; condamne Paillard aux intérêts de sa contestation; autorise les autres contestants à employer leurs dépens en frais accessoires et privilégiés de leurs créances, et l'avoué plus ancien en frais privilégiés de poursuite de contribution; autorise également le poursuivant à employer ses dépens, notamment le coût de la levee du présent jugement, en frais privilégiés de poursuite. » — Appel par les créanciers. Arrêt.

LA COUR;- Adoptant les motifs des premiers juges; - Confirme. Du 16 déc. 1841.-C. de Paris, 3e ch.-MM. Simonneau, pr.-Berville 1er av. gén., c. conf.-Durand-Saint-Amand, Horson et Paillet, av.

cbap. 5, et Favard, vo Privilége, sect. 1, §1, no 7; Pont, no 159).Ainsi, dans le cas d'échouement d'un navire, le privilége de celui qui a fourni des fonds au maître du navire pour sauver les marchandises, est restreint aux marchandises mêmes qui ont été sauvées, et ne s'étend pas aux créances que le maître du navire a lui-même, à raison du sauvetage, contre les propriétaires des marchandises sauvées (Bruxelles, 17 juin 1809) (1).

vent jouir sur le prix de vente des chevaux, du privilége, soit du no 3 de l'art. 2102 c. nap., soit de tout autre privilége (Amiens, 20 nov. 1837, aff. Briffe, V. no 298).

316. Il en est de même des honoraires payés par une partie à l'avocat. On a cité cependant, comme émanant de la cour de Paris un arrêt en date du 28 janv. 1843. lequel aurait décidé que les honoraires payés à l'avocat peuvent être considérés comme frais faits pour la conservation de la chose. Mais cette solution nous semble avoir été justement critiquée, «d'une part en ce que quelque éclairés que soient les conseils d'un avocat, ils ne peuvent pas créer le droit de la partie, qui est nécessairement pré

319. La loi ne dit pas quels sont les frais qui doivent être considérés comme faits pour la conservation de la chose. Mais il est évident qu'elle a eu en vue, comme le dit M. Pont, loc. cit., n° 140, les frais sans lesquels la chose eût péri ou aurait cessé de remplir sa destination. En ce sens, on a pu décider que le pré-existant, d'une autre part en ce que ces conseils, qui peuvent posé à la gestion d'une maison de commerce ou établissement de nouveautés a privilége sur les marchandises, non pour l'indemnité stipulée à son profit en cas de décès ou de faillite des commettants, mais pour les sommes qu'en vertu du contrat de préposition il a versées dans la caisse de cette maison confiée à sa surveillance, et qui ont servi à l'alimenter (Angers, 8 déc. 1848, aff. Bigot, D. P. 49. 2. 17).

313. Mais il en est autrement des avances faites par un mandalaire salarié, dans une entreprise commerciale; elles ne donnent pas droit au privilége accordé par l'art. 2102, § 3. c. nap., pour conservation de la chose (Req. 8 janv. 1839, aff. Delerre, V. no 193). — Jugé pareillement, que les fournitures faites à un pensionnat, alors qu'il est dirigé par un homme à la tête de ses affaires ne sont pas privilégiées sur l'établissement, dans le sens de l'art. 2102, § 3, comme ayant eu pour objet la conservation de la chose (Paris, 5 mars 1838, aff. Pothier, V. suprà, n°217).

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314. Ainsi encore, les professeurs n'ont pas de privilége pour leurs honoraires sur le prix de vente du mobilier de l'établissement auquel ils sont attachés: «Attendu qu'en principe les priviléges ne s'étendent pas; — Qu'ils se restreignent aux cas déterminés par la loi; - Que, dans les catégories qu'elle trace, les professeurs ne sont pas compris; que, d'autre part, les stipulations entre l'acquéreur et ses vendeurs n'expriment aucune préférence en faveur des professeurs; les payements que leur a faits Galaup n'étant placés dans aucun des cas d'exception, rentrent dans les règles ordinaires » (Toulouse, 7 déc. 1838, M. de Faydel, pr., aff. Galaup et autres C. Salze et autres).

315. De même la fourniture des fers des chevaux et leur ferrement ne peuvent être considérés comme conservatoires des chevaux, ou additionnels à leur valeur, et, par suite, ils ne peu

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(1) Espèce: (Basdebal C. Masset.) Degroof, propriétaire d'un navire échoué près de Saint-Valery, avait emprunté une somme à Masset, pour sauver les marchandises qui se trouvaient sur le navire. Après les avoir sauvées, Degroof les remet aux négociants à qui elles appartenaient. Il règle en même temps avec eux le compte de ce qui lui était dû. Quelque temps après, il cède cette créance à Basdebal. Avant l'échéance, Masset, bailleur de fonds, s'oppose à ce que la créance due á Basdebal lui soit payée; il soutient que le privilége que lui donne le 3 de l'art. 2102 c. civ. comme ayant fait des frais pour la conservation des marchandises, affecte non-seulement les marchandises sauvées, mais encore les sommes dues par les propriétaires par suite du sauvetage.-Jugement qui dit droit à son opposition. Appel. Arrêt. LA COUR; Attendu que le privilége qui pouvait compéter à l'intimé sur les marchandises qui se trouvaient à bord du navire de Degroof, n'est point passé sur les créances de Degroof à charge des propriétaires desdites marchandises, de sorte qu'il était sans qualité pour interposer entre les mains de ces débiteurs les saisies-arrêts dont il s'agit au procès, après la cession faite à l'appelant par Degroof; Par ces motifs, met l'appellation au néant, émendant, etc.

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Du 17 juin 1809.-C. de Bruxelles, 3e ch. (2) 1re Espèce:-(Musset, Sollier et autres C. Parandiez.)- LA COUR; -Considérant que, par convention du 3 oct. 1836, Parandiez a contracté, envers Musset aîné, Sollier et comp., un engagement d'après lequel il louait ses services à ladite compagnie pour remplacer aux armées la personne qui lui serait désignée par lesdits Musset et Sollier; que, par ce contrat, auquel Boursier n'a point comparu, l'intimé n'a eu pour débiteurs du prix qu'il mettait à son service que les sieurs Musset, Sollier et comp., dont il a suivi la foi et accepté la solvabilité; Considérant que le traité d'assurance par lequel la même compagnie s'est engagée à garantir Boursier de l'obligation de servir en personne ne contient le principe d'aucun droit au profit du remplaçant, puisqu'il n'y a point été appelé et que de ce contrat il n'est résulté aucun lien de droit entre TOME XXXVII.

bien tendre à mettre le droit en lumière, ne sont pas de nature. à le conserver, dans le sens de la loi, puisqu'il n'est pas possible de dire que sans eux, le droit eût péri et que la justice eût été impuissante par elle-même à le reconnaître et à le sanctionner. >> - V. M. Pont, no 140.

317. Il en faut dire de même en ce qui concerne les sommes dues par le remplacé au service militaire. Et il a été justement décidé que le remplaçant qui a traité directement avec une compagnie d'assurance militaire n'a pas de privilége sur les sommes encore dues à la compagnie par le remplacé (Paris, 16 août 1838; Cass. 13 janv. 1841 (2); - Conf. deux arrêts rendus à la même date du 13 janv. 1841, par la cour de cassation et par les mêmes motifs, aff. Bonnette et aff. Burgard).

318. Une compagnie d'assurance contre la grèle est-elle recevable à exercer un droit de privilége sur les récoltes du fermier, pour se rembourser du montant de la prime d'assurance et des frais qu'elle a faits à cette fin?- V. Assurances maritimes, nos 190 et suiv.

319. La loi ne confère expressément privilége qu'aux frais faits pour la conservation de la chose. A-t-elle voulu montrer par là l'intention de refuser ce bénéfice aux créanciers pour frais d'amélioration? Nous pensons que oui. En matière de privilége, tout est rigoureux (MM. Delvincourt, t. 3, p. 151, note 13; Persil, art. 2102, § 2, no 2; Duranton, t. 19, n° 115; Troplong, no 176; Valette, no 82; Mourlon, no 114; Pont. no 141).

320. Ainsi, l'ouvrier, et, par exemple, le blanchisseur à qui des tissus ont été remis pour les apprêter et les blanchir, n'a privilége que pour ses avances el main-d'œuvre relatives à ceux de ces tissus qui se trouvent encore entre ses mains; mais, s'il les a livrés en partie au fabricant sans exiger le payement de ses salaires, il a perdu son privilége sur la partie livrée. En consé

Boursier et Parandiez, qui sont demeurés étrangers l'un à l'autre; —
Considérant qu'on ne peut, sans abuser des termes de la loi, accorder à
Parandiez le privilége réservé par l'art. 2102, § 3, aux frais faits pour.
la conservation de la chose; qu'en effet il est vrai de dire que le rem-
plaçant n'a fait exactement son service que pour accomplir son obliga-
tion envers la compagnie, et non pour conserver à celle-ci sa créance
contre le remplacé, créance dont il ignorait le montant ou même l'exis-
tence; Sans s'arrêter ni avoir égard aux exceptions proposées par les
appelants; Infirme; - Au principal, déboute Parandiez de sa de-
mande.

Du 16 août 1838.-C. de Paris, 2 ch.-M. Hardoin, pr.
2o Espèce :

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(Syndics Musset et Sollier C. Sury.) LA COUR; Vu l'art. 2093 c. civ.; Attendu que les priviléges sont de droit étroit, et ne peuvent exister qu'en vertu d'une disposition expresse de la loi ; Attendu qu'aucune loi n'attribue au remplaçant pour service militaire Attendu un privilége sur le prix qui a pour cause ce remplacement; que l'art. 1798 c. civ. est inapplicable aux faits dont il s'agit au procès, et n'a pour objet que de déterminer dans quelle mesure les maçons, charpentiers et autres ouvriers qui ont été employés à la construction d'un bâtiment, ou d'au'res ouvrages faits à l'entreprise, ont action contre la personne pour laquelle les ouvrages ont été faits; Attendu qu'il n'y a pas lieu non plus à appliquer aux faits de la cause le no 3 de l'art. 2102 c. civ., qui met au rang des créances privilégiées sur certains meubles les frais faits pour la conservation de la chose, puisque l'on ne peut ni, d'une part, assimiler à une chose, soit la libération du service militaire, soit l'obligation à ce service, ni, d'autre part, assimiler à des frais, soit le prix stipulé pour remplacement, soit l'accomplissement du service fait en conséquence de ce remplacement; - D'où il suit que le jugement attaqué, en créant un privilége qui ne résulte d'aucune disposition de loi, a fo mellement violé l'art. 2093 c. civ.; Casse.

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Du 13 janv. 1841.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1er pr.-Renouard, rap.-Laplagne-Barris, 1er av. .gén., c. conf.-Moreau, av.

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