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1827, aff. Planel, V. au numéro suivant);—2o Que, pareillement, aff. de Beauchamp, vo Prescr. civ., no 1126);—3° Qu'il en est de lanotification de son contrat d'acquisition, faite par le tiers acqué-même du payement fait par ce tiers acquéreur, entre les mains du reur aux créanciers inscrits, ne préjuge rien sur la validité des titres de ces créanciers, et n'emporte pas renonciation à la prescription qui pourrait leur être opposée (Bordeaux, 15 janv. 1835,

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Que cette notification ne fait contracter au tiers détenteur aucune obligation personnelle de laquelle les créanciers puissent exciper, pour exiger indéfiniment de lui le payement de leurs créances, quels qu'en soient le montant, le mérite et la validité, et qu'elle ne l'empêche nullement de se prévaloir de tous les moyens existant en sa faveur pour repousser les créanciers, surtout lorsque, comme dans l'espèce, il a déjà payé le prix de son acquisition à son vendeur; Considérant que le but principal de l'art. 2180, relatif à la prescription de l'hypothèque, est de favoriser la propriété et de punir la négligence des créanciers, et que ce serait éluder l'intention du législateur que d'admettre des interruptions ou prolongations de temps pour prescrire, que la loi n'a pas formellement indiquées; - Qu'il suit de ces moyens que Sainte-Maure était dans le cas d'invoquer la prescription de l'art. 2180 c. civ. contre Mion-Bouchard, et que cette prescription aurait dû être accueillie... >> Pourvoi de Mion-Bouchard, pour fausse application des art. 2180, 2181 et suiv. c. nap., en ce que l'arrêt attaqué a refusé de voir, dans la notification du contrat, faite par le tiers détenteur aux créanciers inscrits, une obligation personnelle envers eux, prescriptible seulement par trente ans. - L'arrêt attaqué, dit-on, a confondu les règles relafives à la prescription des hypothèques, avec celles qui fixent le mode de purger la propriété. La transcription du contrat et sa notification aux créanciers n'ont pas le même objet. La première constitue l'une des conditions de la prescription des hypothèques; elle ouvre un moyeu d'arriver à l'affranchissement de l'immeuble, d'après les règles tracées dans le ch. 7 et dans l'art. 2180 c. nap.; la seconde, au contraire, vise à un autre but, la purge de l'immeuble hypothéqué; c'est là un nouveau moyen d'arriver à l'affranchissement de la propriété; mais les règles à suivre, en pareil cas, sont tracées dans le ch. 8, qui n'offre aucune relation avec le ch. 7, relatif à la prescription. La transcription et la notification ne peuvent donc être confondues. Si le tiers acquéreur veut prescrire par dix ans, c'est à la transcription qu'il doit se borner. Dès qu'il entre dans la voie de la purge par la notification, il est censé renoncer à la prescription décennale. Il y a plus: la notification aux créanciers constitue, de la part du tiers acquéreur, un véritable engagement envers eux, engagement qui ne peut s'éteindre que par la prescription ordinaire de trente ans. En effet, cette notification doit contenir, aux termes de l'art. 2184, la déclaration de l'acquéreur qu'il est prêt à acquitter, sur-le-champ, les dettes et charges hypothécaires, jusqu'à concurrence seulement du prix. Or n'est-ce pas là s'obliger personnellement à payer le prix aux créanciers inscrits? Et, si ceux-ci gardent le silence et ne forment pas de surenchère, ce silence n'équivaut-il pas à un consentement de leur part, qui rend l'obligation parfaite? De ce moment, les créanciers ne peuvent plus être accusés de négligence, car ils ont dù compter sur le contrat nouveau intervenu entre eux et l'acquéreur. Leur position est bien différente de celle du véritable propriétaire de l'immeuble vendu, lequel reste toujours soumis à la prescription de dix ans. La raison de cette différence est que le propriétaire, qui a souffert une dépossession, ne peut sauver ses droits que par une action en réintégration; tandis que les créanciers peuvent très-bien se contenter de l'obligation personnelle, prise par l'acquéreur, d'acquitter entre leurs mains le prix qu'il doit à leur débiteur. A l'appui de ce système, le demandeur invoque trois arrêts des cours de Grenoble et de Bourges, en date des 20 janv. 1832, 22 mai 1838 (suprà, nos 2147, 2377) et 30 août 1833, aff. Long, vo Prescr. civ., no 1089-5o. Arrêt (apr. dél. en ch. du cons.). LA COUR; Attendu que l'art. 2180 c. civ. établit, au profit du tiers détenteur, qui possède en vertu d'un juste titre, la prescription, par dix et vingt ans, des priviléges et hypothèques qui grèvent l'immeuble par lui acquis; — Qu'aux termes de cet article, cette prescription commence à courir du jour où le contrat a été transcrit sur les registres du conservateur; Qu'aucune disposition de loi ne déclare que la notification que le nouveau propriétaire fait, postérieurement à la transcription, dans les termes de l'art. 2184 c. civ., emporte, de sa part, soit une renonciation à la prescription qui avait commencé à courir à son profit, soit une reconnaissance de la dette hypothécaire emportant renonciation tacite; - Attendu, d'ailleurs, que, quand on pourrait considérer la notification comme une renonciation à la prescription qui a déjà commencé à courir au profit de l'acquéreur, l'art. 2220 c. civ. ne permettrait pas de la regarder comme formant, d'avance, renonciation à se prévaloir de la nouvelle prescription que la negligence et l'inaction des créanciers inscrits pourraient lui laisser acquérir par la paisible possession de l'immeuble pendant dix autres années qui auraient suivi la notification; - Que l'arrêt attaqué juge, en fait, que plus de dix années s'étaient écoulées, non-seulement depuis la transcription, mais encore depuis la notification, lorsque les premières poursuites de MionBouchard ont été intentées; Attendu, enfin, qu'aucun texte de loi ne

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créancier hypothécaire, sur le prix d'un autre immeuble, passible également de l'hypothèque de ce créancier, ce payement n'impliquant nullement la reconnaissance, par le tiers acquéreur, de l'hy

déclare que la notification aura l'effet de substituer l'action personnelle, et, par suite, la prescription trentenaire, à l'action réelle, et, par suite, à la prescription spéciale, dont la durée est réglée, pour l'extinction des priviléges et hypothèques, par l'art. 2180, à l'égard du tiers détenteur possédant en vertu d'un juste titre; - Qu'en jugeant, par suite, que, l'hypothèque de Mion-Bouchard étant éteinte, d'après le n° 4 de l'art. 2180 c. civ., il n'y avait lieu, de sa part, à provoquer l'ouverture de l'ordre, et à demander collocation pour un titre qu'il avait laissé éteindre par sa négligence, l'arrêt attaqué n'a fait qu'une juste application des art. 2180 et 2265 c. civ., et qu'il n'a violé aucune loi ; — Rejette.

Du 6 mai 1840.-C. C., ch. civ.-MM. Boyer, pr.-Legonidec, rap.Tarbé, av.-gén., c. conf.- Dupont-White et Piet, av. 2o Espèce (Marquet et autres C. de Lenferna.) LA COUR; Considérant qu'aux termes de l'art. 2180 c. civ., les priviléges et hypothèques s'éteignent par la prescription; que, quant aux biens qui sont dans la main d'un tiers détenteur, cette prescription lui est acquise par le temps réglé pour celle de la propriété à son profit, mais à dater seulement du jour où son titre a été transcrit sur le registre du conservateur; Considérant que, le 24 sept. 1818, de Lenferna a acquis de Claude-François Marquet deux pièces de prés, situées, l'une dans l'arrondissement d'Avallon, l'autre dans l'arrondissement de Clamecy; que le prix de cette acquisition a été payé comptant; qu'ayant fait transcrire son titre au bureau des hypothèques d'Avallon, le 3 oct. 1818, et à Clamecy, le 19 du même mois, la prescription introduite, en sa faveur, contre les créanciers hypothécaires a commencé à courir du jour de cette transcription, et qu'elle lui est acquise si, pendant les dix ou vingt ans qui l'ont suivie, aucunes poursuites hypothécaires n'ont eu lieu de la part des créanciers, et s'il n'est survenu quelque circonstance particulière qui l'ait interrompue;-Que ce n'est que par la signification de l'exploit du 3 avr. 1859 qu'ont commence les poursuites hypothécaires des créanciers inscrits; - Qu'il résulte des pièces produites que Pierre-Lazare Marquet, auteur des appelants, est décédé le 7 oct. 1828; qu'à cette époque, la prescription était acquise au profit de Lenferna, à l'égard de l'immeuble situé à Avallon, dans l'étendue du ressort de la cour royale de Paris, dans lequel ressort habitait Marquet; mais qu'il n'en est pas de même à l'égard du pré situé dans l'arrondissement de Clamecy, dans l'étendue du ressort de la cour royale de Bourges ; qu'à son décès, PierreLazare Marquet ayant laissé, comme héritier pour un quart, par représentation de son père, Hippolyte Marquet, son petit-fils mineur, la prescription n'a pu courir au préjudice des droits de ce dernier, qui, dès lors, est fondé à demander le maintien de la collocation, à son profit, pour le quart des deux tiers ou deux douzièmes de la somme de 854 fr. 32 c., mais seulement sur la somme de 1,200 fr. et accessoires appliqués, par la ventilation, à l'immeuble situé dans l'arrondissement de Clamecy; — Qu'en vain les appelants prétendent-ils que, par la notification de son contrat aux créanciers inscrits, avec offre de payer son prix, de Lenferna a contracté un engagement qui le rend personnellement debiteur envers eux de ce prix, et que l'effet de cette obligation personnelle est d'étendre la prescription à trente ans ;-Qu'aucune disposition de la loi n'a donné à la notification, faite dans les termes de l'art. 2184 c. civ., l'effet d'empêcher la prescription créée en faveur du tiers détenteur par l'art. 2180 du même code; Que cette notification ne peut être considérée, soit comme une renonciation, de la part du tiers détenteur, à se prévaloir de la prescription qui avait commencé à courir à son profit, soit comme une reconnaissance de la dette hypothécaire, emportant renonciation tacite et substitution de l'action personnelle à l'action réelle; - Que la transcription et la notification n'ont, de la part du tiers détenteur, d'autre but que de parvenir à purger la propriété par lui acquise des hypothèques existantes sur cette propriété; qu'elles ne sont, relativement aux créanciers, qu'un avertissement que la propriété affectée à leur créance a changé de mains, et qu'ils doivent prendre les précautions nécessaires pour assurer et conserver leurs droits sur l'immeuble, dont la valeur de meurera définitivement fixée au prix stipulé dans le contrat, à défaut de surenchère, de leur part, dans le délai et les formes prescrites; qu'en faisant transcrire et notifiant son contrat, le tiers détenteur ne reconnait ni la validité des créances, ni celle des inscriptions; qu'il ne contracte, à l'égard des créanciers, aucune obligation personnelle dont ils puissent exciper pour exiger indéfiniment de lui le payement de leurs créances, quels qu'en soient le montant, le mérite et la validité; que, dès lors, il conserve toujours le droit de se prévaloir de tous les moyens militant en sa faveur pour repousser leurs prétentions, notamment de la prescription qui a commencé à courir du jour de la transcription; Confirme, etc.

Du 5 fév. 1843.-C. de Bourges, ch. cor.-MM. Dubois, pr.-Raynal, av. gen., c. contr.-Thiot-Varenne et Chénon, av,

pothèque sur les autres immeubles (même arrêt); -4°... Et que, quand bien même on pourrait considérer la notification, faile par l'acquéreur aux créanciers inscrits, comme une renonciation à la prescription de dix ans qui a déjà commencé à courir à son profit, on ne pourrait la regarder comme formant, d'avance, renonciation à se prévaloir de la nouvelle prescription décennale que la négligence ou l'inaction des créanciers inscrits aurait laissée s'accomplir depuis cette notification (arrêt précité du 6 mai 1840).

2524. Nous avons déjà exprimé l'opinion, vo Prescr. civ., no 70, que nous croyions cette doctrine préférable à celle de Grenier et de M. Troplong. Et ceci n'est point contraire à ce que nous avons dit suprà, no 2156, que l'effet de la notification, faile par l'acquéreur aux créanciers inscrits, en exécution des art. 2183 et 2184 c. nap., et non suivie de surenchère, était d'engager cet acquéreur envers ces créanciers, de le rendre leur débiteur personnel et direct; car nous n'avons parlé ainsi qu'au point de vue de l'action en délaissement. Mais cette notification et l'offre de payement qui l'accompagne n'impliquent nullement, de la part de l'acquéreur, la reconnaissance de la validité des titres des créanciers, la renonciation à se prévaloir contre eux des moyens ou exceptions qu'il peut avoir à opposer à l'action hypothécaire; ne lui font pas perdre, en un mot, sa qualité de tiers détenteur, d'obligé seulement à raison de l'immeuble qu'il détient, et non sur ses biens personnels, jusqu'à concurrence de son prix, et non pour la totalité des dettes hypothécaires (V. également Prescr. civ., no 928. — Conf. MM. Duranton, t. 20, no 321; Martou, des Priv. et hyp. (suivant la loi belge), t. 4, no 1365).—« La notification du contrat d'acquisition, dit ce dernier auteur, l'offre de payer le prix, la provocation à surenchérir, sont conditionnelles, en ce sens que l'effet en est subordonné à la conservation du droit d'hypothèque des créanciers notifiés; elles ne préjugent rien sur la validité des créances ou des garanties hypothécaires qui y sont attachées; elles n'enlèvent à l'acquéreur aucune des exceptions qu'il pourrait avoir à opposer en temps et lieu. Il doit notifier son contrat indistinctement à tous les créanciers inscrits; car il ne peut pas, au moment de la notification, se faire juge de l'existence des droits annoncés par l'inscription. La notification ne vaut donc pas reconnaissance des hypothèques éteintes par la prescription. >>

2525. Lorsque la créance hypothécaire est conditionnelle ou à terme, le tiers détenteur peut-il prescrire, avant l'arrivée du terme, ou l'accomplissement de la condition? Le plus fort argument pour la négative se tire de l'art. 2257, ainsi conçu : «La prescription ne court point, à l'égard d'une créance qui dépend d'une condition, jusqu'à ce que la condition arrive; à l'égard d'une action en garantie, jusqu'à ce que l'éviction ait lieu; à l'égard d'une créance à jour fixe, jusqu'à ce que ce jour soit arrivé. » On tenait, néanmoins, dans l'ancienne jurisprudence, que le tiers détenteur prescrivait contre le garanti, avant le trouble, et contre le créancier conditionnel, pendente conditione, parce que ces derniers pouvaient toujours agir pour la conservation de leurs droits : c'est même pour cela, dit Lebrun, des Successions, liv. 4, ch. 1, no 83, que l'action en simple déclaration d'hypothèque a été inventée (V. aussi Rousseau de Lacombe, vo Prescrip., sect. 2, no 6; Loiseau, du Déguerp., liv. 3, ch. 2, no 18; Pothier, des Hyp., ch. 3, § 6). La question a été ainsi jugée par un arrêt du grand conseil, rapporté au t. 1 du Journal du palais. L'ancienne jurisprudence s'éloignait, en cela, des lois romaines (Voy. L. 7, § 4, C., Depræsc. trig. vel quad. ann.; L. 3, §3, C., Commun. deleg.).-Les auteurs modernes, au moins pour le plus grand nombre, ont suivi la même doctrine (V. notamment Toullier, t. 6, nos 527 et 528, 2e éd.; Grenier, t. 2, no 518; Battur, t. 4, no 775; Duranton, t. 20, no 312; Troplong, t. 4, nos 886 et 887; Rolland de Villargue, vis Hyp., no 646, et Prescr., no 434; Zachariæ, § 214, note 2, et § 772, note 11; Proudhon, de l'Usufr., t. 4, nos 2130 et s.; Marcadé, sur l'art. 2257, no 2; Demante, Rev. crit. de jurispr., 1854,t. 4, p. 455. - Contrà, Maleville, sur l'art. 2257; Vazeille, de la Prescr., no 301; Martou, t. 4, no 1353). M. Persil, qui avait, d'abord, émis un sentiment contraire, est revenu ensuite à cette opinion, Rég. hyp., art. 2180, no 37. C'est également l'opinion que nous avons adoptée dans notre première édition. La question, néanmoins, nous avait

paru difficile. « Cette raison, disions-nous, que la prescription doit courir (contre le créancier hypothécaire, au profit du tiers détenteur), parce qu'aux termes de l'art. 1180 c. nap., «<le créancier peut, avant que la condition soit accomplie, exercer tous les actes conservatoires de son droit, » n'est peut-être pas trèspéremptoire; car elle pourrait être invoquée par le débiteur, vis-à-vis de son créancier, comme elle l'est par le tiers détenteur; et cependant l'art. 2257 suspend le cours de la prescription, tant que le terme ou la condition ne sont pas encore arrivés. Mais il en est une autre qui aurait plus de poids dans notre esprit, c'est que l'art. 2257 ne s'applique qu'à la prescription de la créance et nullement à celle de l'hypothèque; qu'ainsi, à défaut d'un texte précis qui ait décidé le contraire, il faut se rattacher à l'ancienne jurisprudence, à laquelle il est d'autant moins présumable que les auteurs du code aient voulu apporter quelque changement, qu'on y reconnaissait le principe consacré par l'art. 2257, et que cela n'avait point empêché de permettre au tiers détenteur de prescrire contre le créancier hypothécaire, pendente conditione. » C'est cette dernière considération surtout qui nous a fait persister, dans la présente édition, dans l'opinion que nous avions embrassée-V. vo Prescr. civ., no 755.

· Mais on

Nous devons dire, pourtant, qu'il y a des arrêts récents rendus en sens contraire. Nous avons cité, vo Prescrip., no 1156, trois arrêts de la cour de cassation qui ont jugé, en principe, que l'art. 2257 c. nap. était applicable au tiers détenteur, comme au débiteur lui-même (Cass. 4 mai 1846, aff. Binos-Guran, D. P. 46. 1. 255; Rej. 24 fév. 1847, aff. Wagner, D. P. 47. 1. 99; Req. 17 janv. 1855, aff. Vavin, D. P. 53. 1. 151). A ces trois arrêts, il faut en ajouter deux autres, l'un de la cour de Pau, du 1er fév. 1847, rendu sur renvoi, après cassation, aff. Binos-Guran précitée, D. P. 57. 2. 60, et l'autre de la cour de Besançon, du 19 déc. 1855 (V. no 2526-1o). peut écarter l'autorité des arrêts de la cour de cassation, qui n'ont pas été rendus en matière d'hypothèque, qui sont relatifs à des droits conditionnels auxquels ne s'applique pas cette action spéciale qu'on appelle, en droit, l'action en déclaration d'hypothèque. Il faut écarter, par la même raison, l'arrêt de la cour de Pau. Il y a même un considérant de cet arrêt qui prouverait que la cour ne regarderait pas comme applicable à l'hypothèque le principe qui fait la base de sa décision: - « Attendu, porte l'arrêt, que l'art. 2257 n'est pas seulement applicable entre les parties contractantes, mais opposable aux tiers détenteurs, alors surtout que ces tiers ne tiennent leurs droits que de celui qui ne pouvait valablement aliéner; ....qu'il en serait autrement, si le tiers procédait en vertu de droits particuliers, indépendants du titre de vente, qui seraient alors régis par les règles du droit commun; mais que, dans l'espèce, les tiers acquéreurs ne représentaient que leur vendeur et ne sauraient avoir plus de droits qu'il n'en a lui-même, etc. » On va voir, d'ailleurs, que la cour de Pau n'a pas même persisté, sur le principe général, dans l'interprétation qu'elle donne ici de l'art. 2257.Il ne reste plus alors, pour la doctrine contraire à la nôtre, que l'arrêt de la cour de Besançon.

2526. Cet arrêt décide: 1o que la prescription d'une bypothèque, consentie pour la sûreté d'une créance à terme, ne commence à courir, au profit du tiers détenteur de l'immeuble grevé de cette hypothèque, que du jour de l'exigibilité de la créance (Besançon, 19 déc. 1855, aff. Perron, D. P. 56. 2. 174); 2o Qu'on objecterait en vain que le créancier aurait dû, pour empêcher la prescription, exercer, contre le tiers détenteur, l'action en interruption d'hypothèque, cette action, autrefois usitée dans certaines parties de la France, n'ayant pas été maintenue par la législation actuelle (même arrêt). Sur cette dernière solution, qui est une conséquence de la première, V. infrà, n 2552.

2527. Il a été jugé, au contraire: 1o que des héritiers, acquéreurs des portions de plusieurs de leurs cohéritiers dans les immeubles hypothéqués à la garantie d'une créance éventuelle (le rembourement de la finance d'un office seigneurial, supprimé par la loi du 18 oct. 1792), sont de véritables tiers détenteurs, à l'égard du titulaire de l'office supprimé, et que la prescription de l'hypothèque appartenant à ce dernier sur les portions acquises, a couru, à leur profit, du jour de la transcription de leur

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tion en déclaration d'hypothèque contre le tiers détenteur (même 3° Que la suspension de prescription n'a pas lieu au profit de l'échangiste qui, évincé de l'immeuble qu'il a reçu en échange, revendique celui qu'il a donné en contre-échange contre le tiers auquel son copermutant l'a vendu; que cette demande en revendication est une action purement réelle, qui ne peut être assimilée à l'action personnelle en garantie, et à l'égard de laquelle, par conséquent, la prescription court, au profit du tiers acquéreur, du jour de son acquisition, et non pas seulement du jour où le demandeur en revendication a été évincé de l'immeuble qu'il revendique contre ce dernier (Toulouse, 13 août 1827, aff. Fraineau, vo Prescrip. civ., no 767); · 4o Que le créancier hypothécaire n'est pas fondé à prétendre que la prescription n'a pu commencer à courir contre lui que du jour où sa créance est devenue exigible; que cette exception, fondée à l'égard du débiteur, ne l'est pas à l'égard du tiers détenteur, auquel il pouvait dénoncer son hypothèque, avant l'échéance de la dette (Bordeaux, 15 janv. 1855, aff. de Beauchamp, vo Prescr. civ., no 1126);— 5° Que la disposition de l'art. 2257 c. nap., qui déclare la prescription du droit conditionnel suspendue jusqu'à l'événement de la condition, est applicable seulement entre les parties contractantes, et non à l'encontre des tiers qui détiennent les immeucréances non échues, est uniquement relative à l'action du créancier contre le débiteur, et n'a non plus aucun rapport à l'action hypothécaire contre les tiers détenteurs; qu'il est si vrai que la législation a établi une différence notable entre les deux actions, que la première ne prescrit que par le laps de trente ans, sans poursuites (art. 2262 c. iv.), tandis que l'autre prescrit par le laps de dix ans (art. 2180); - Attendu que la femme qui, relativement au délai accordé aux héritiers du mari, ou à tout autre obstacle auxquels ceux-ci peuvent donner naissance par d'injustes résistances, aurait à redouter la prescription à l'égard du tiers détenteur, pourrait, pendant l'existence de tous ces obstacles, à l'instar de tout autre créancier, actionner le tiers détenteur en déclaration d'hy

titre (Colmar, 7 avr. 1821, aff. hér. de Choiseul, V. au numéro suivant); - 2o Que l'art. 2257 c. nap., aux termes duquel la | arrêt); prescription demeure suspendue, quant aux créances non échues, jusqu'à ce que le terme soit arrivé, n'est relatif qu'à l'action du créancier contre le débiteur; qu'il est sans application à l'action hypothécaire contre le tiers détenteur; qu'en conséquence, l'acquéreur d'un immeuble, avec titre et bonne foi, prescrit, aux cas dont il s'agit, les hypothèques qui grèvent cet immeuble, par une possession de dix ans, à partir de la transcription de son titre (Grenoble, 10 mars 1827) (1); ... Qu'on ne peut considérer, comme un acte interruptif de cette prescription, l'inscription prise par la femme avant l'expiration des dix ans ; ni comme une renonciation à la prescription dont se prévaut le premier acquéreur de l'immeuble hypothéqué, le procès-verbal de dépôt, fait au greffe par un acquéreur subséquent, de son acte d'acquisition, en vue de purger l'hypothèque légale de la femme du premier vendeur, et la signification faite à celle-ci de l'acte de dépôt, en conformité de l'art. 2194 c. nap. (même arrêt; V. suprà, nos 2522 et suiv.);— .... Que la femme, à raison de son hypothèque légale (à l'égard de laquelle la prescription ne peut courir pendant le mariage, mais seulement à partir de sa dissolution), a, pour se défendre contre cette prescription, à l'instar de tout autre créancier, l'ac(1) (Planel C. Pradier.) LA COUR Attendu qu'aux termes de l'art. 2265 c. civ., celui qui acquiert de bonne foi, et par juste titre, un immeuble, en prescrit la propriété par dix ans, si le véritable propriétaire habite dans le ressort de la cour royale dans l'étendue de laquelle l'immeuble est situé; - Attendu que, par l'art. 2180 du même code (titre de l'extinction des priviléges et hypothèques), il est disposé que la prescription, quant à l'hypothèque, est acquise au tiers détenteur, par le temps réglé pour la prescription de la propriété, c'est-à-dire par dix ans, dans le cas prévu par l'art. 2265, sous la condition que, si la prescription suppose un titre, elle ne commence à courir que du jour où il a été transcrit sur les registres du conservateur;- Attendu que, dans l'espèce, l'immeuble, sur lequel la femme Planel prétend avoir une hypothè-pothèque, et se mettre ainsi à l'abri de l'empire de la prescription; que que, est situé dans le ressort de cette cour; que toutes les parties habitent dans le même ressort; que la vente dudit immeuble, passée par le débiteur originaire de la créance réclamée par la Planel, l'a été par juste titre, et qu'elle a été transcrite en temps opportun; Attendu qu'à l'époque du 27 déc. 1825, jour de l'inscription prise par la femme Planel, en sa qualité de donataire d'Anne Bonfils, veuve d'Antoine Aubanel, sur l'immeuble dont il s'agit, ayant appartenu audit Aubanel (lequel aurait été vendu au sieur Pradier, par acte du 4 oct. 1809, transcrit le 6 du même mois, et aurait successivement passé en la possession d'Abel Estève), il s'était écoulé plus de dix années depuis le décès d'Antoine Aubanel, arrivé le 27 sept. 1815;- Attendu que, dans cet intervalle de plus de dix années, il n'aurait été fait aucune poursuite, aucun acte acte interruptif de la prescription à l'égard du tiers détenteur de l'immeuble qui donne lieu au procès, soit de la part d'Anne Bonfils, reuve Aubanel, soit de la part de la femme Planel, sa donataire, à l'occasion de la créance de ladite Bonfils, sur les biens de son mari; - Attendu que, dès lors, et en considérant même l'inscription de la Planel comme un acte de poursuite contre le tiers détenteur de l'immeuble vendu par Aubanel à Pradier, ce qui n'était pas, et ne pouvait pas être, il est évident que ce tiers détenteur, ou Pradier, premier acquéreur, et successivement vendeur, agissant dans l'intérêt de l'un et de l'autre, a pu opposer l'exception de prescription, pour rendre inefficace l'inscription de la femme Planel, agissant du chef de la Bonfils, ainsi que toute réclamation ultérieure ; Attendu qu'il est indifférent, par rapport à ce même tiers détenteur, que la Bonfils eût une hypothèque légale sur les biens d'Aubanel, son mari, et qu'aux termes de l'art. 1565 c. civ., elle n'ait pu répéter ses reprises dotales, contre les héritiers de son mari, qu'une année après la dissolution du mariage, c'est-à-dire à partir du 27 sept. 1816, et que, depuis ledit jour 27 sept., il ne se fût pas écoulé dix années à l'époque de l'inscription de la femme Planel; Attendu qu'en effet la surséance d'une année, introduite par l'art. 1565 c. civ., est uniquement relative à l'action de la femme, contre les héritiers du mari, pour la répétitions de ses reprises dotales, et nullement à l'action bypothécaire de la femme, dérivant des mêmes droits contre les tiers possesseurs des biens du mari, laquelle ne peut pas, il est vrai, prescrire pendant le mariage (art. 2256 c. civ.), mais à l'égard de laquelle la prescription commence à courir du jour de la dissolution du mariage;

Attendu que ces deux actions, indépendantes l'une de l'autre, se régissent par des principes différents; que l'hypothèque sur les biens aliénés par le débiteur peut s'éteindre par la prescription, sans que néanmoins la créance soit prescrite, et qu'ainsi le tiers détenteur peut prescrire à l'égard du créancier hypothécaire, alors que l'action de celui-ci, contre le debiteur personnel, est toujours en vigueur; que c'est là un principe qui a été admis dans tous les temps; Attendu que la suspension de la prescription, introduite par l'art. 2257 c. civ., quant aux

c'est encore là un mode de proceder qui a été admis dans tous les temps; - Attendu que, s'il en était autrement, ce serait rendre illusoire l'art. 2180 c. civ., qui, en vue de l'extinction des priviléges et hypothèques, a introduit un nouveau mode de prescription, en statuant qu'un silence de dix années, à l'égard du tiers détenteur, de la part de tout créancier hypothécaire, met ce tiers à l'abri de toute recherche, par voie de prescription, le même article disposant même que les inscriptions prises par le créancier n'interrompent pas le cours de la prescription établie par la loi en faveur du débiteur où du tiers détenteur; - Attendu qu'on ne peut induire aucune renonciation à la prescription de la notification faite à la femme Planel, le 12 déc. 1825, de la part du sieur Estève, possesseur actuel de l'immeuble qui donne lieu au litige, du procès-verbal de dépôt rière le greffe du tribunal de Nyons, de l'acte d'acquisition du sieur Estève, et de sa déclaration à la femme Planel que cet acte resterait déposé pendant le délai de deux mois, en conformité de l'art. 2194 c. Civ., pour purger toutes les hypothèques légales qui existeraient, est-il dit, sur la maison par lui acquise; Attendu, en effet, que de semblables notification et déclaration, faites conditionnellement, c'est-à-dire dans la supposition que la femme Planel pouvait avoir quelque hypothèque sur la maison acquise par le sieur Estève, et que cette hypothè que était encore en vigueur, ne pouvaient faire revivre une hypothèque éteinte par la prescription, ne pouvaient surtout nuire aux personnes qui avaient des droits opposés à ceux de la femme Plane! sur ladite maison, ou sur le prix de l'adjudication passée au sieur Estève; que le sieur Estève, nouvel acquéreur, qui ignorait la consistance des bypothèques, qui ne connaissait pas la position des tiers, qui ne voulait payer son prix de vente qu'après avoir rempli toutes les formalités prescrites par le code civil, pour la purgation des hypothèques, s'adressait à ceux qui, dans son sens, pouvaient manifester des prétentions sur la maison par lui acquise, et cela sans rien apprécier, sans renoncer à aucune prescription, sans entendre compromettre ni améliorer les intérêts d'aucun, et enfin, sauf toute contradiction de droit de la part de toute partie intéressée; Attendu qu'il résulte de ce qui précède que c'est avec raison que les premiers juges ont décidé que l'hypothèque préten lue par la femme Planel, du chef de la Bonfils, qui fut mariée à Antoine Aubanel, sur la maison vendue par ce dernier au sieur Pradier, en 1809, était éteinte par la prescription, dès que, d'une part, la vente passée au sieur Pradier avait eté suivie deux jours après de transcription, et que, d'autre part, déjà à l'époque de l'inscription de la femme Planel, prise le 27 déc. 1825, il s'était écoulé plus de dix années depuis la dissolution du mariage d'Aubanel et de la Bonfits, inscription qui, d'ailleurs, n'aurait pu seule, dans aucun cas, être interruptive de la prescription; — Adoptant au surplus les motifs exprimés par les premiers juges, confirme.

Du 10 mars 1827.-C. de Grenoble, 2 ch.-M. Paganon, pr.

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bles affectés de ce droit (Pau, 22 nov. 1856, aff. veuve LasserreJougla, D. P. 57. 2. 61). — La cour de Pau est revenue, par cet arrêt, sur la jurisprudence qu'elle avait consacrée par celui du 1er juill. 1847, cité no 2525.

2528. Mais il a été jugé, par application du principe énoncé en l'art. 2237 c. nap., que la prescription contre le titre constitutif d'une créance, et, par suite, contre l'hypothèque qui la garantit, ne court (contre le débiteur direct) qu'à dater de l'exigibilité de cette créance, et qu'elle est suspendue jusqu'à l'accomplissement de la condition de laquelle dépend l'exigibilité; qu'il en est ainsi, spécialement, soit de l'hypothèque conventionnelle appartenant au titulaire d'un office seigneurial, supprimé par les lois abolitives de la féodalité, sur tous les biens présents et à venir de l'ancien seigneur, pour le remboursement de la finance attachée audit office, soit de l'hypothèque légale résultant, au profit du même titulaire, de la loi du 18 oct. 1792, qui fixe le mode de remboursement des offices seigneuriaux supprimés; que ce n'est donc qu'à dater de la dépossession de ce titulaire, c'est-à-dire de la promulgation de la loi précitée, qu'ont commencé à courir les trente années, nécessaires, dans le cas dont il s'agit, pour prescrire l'hypothèque (Colmar, 7 avr. 1821) (1). 2529. Lorsque la créance hypothécaire consiste dans une rente régulièrement servie par le débiteur, le payement exact des arrérages empêche-t-il le tiers détenteur de prescrire la libération de l'immeuble hypothéqué à cette rente? La négative est indubitable, dit M. Persil, loc. cit., no 58. La position du tiers acquéreur est indépendante de celle du débiteur. Le créancier devra donc, s'il veut conserver son hypothèque sur l'immeuble, diriger, contre ce tiers acquéreur, une demande en interruption de prescription (Conf. Delvincourt, t. 3, p. 182, note 3; MM. Duranton, t. 20, no 312; Troplong, t. 4, no 887; Flandin, Traité des hypoth., inédit). Ce serait en vain que le crédi-rentier opposerait qu'ayant été exactement payé de ses arrérages, il n'avait pas d'actes de poursuite à exercer. « Il devait prévoir, dit❘ M. Troplong, l'événement où il lui serait nécessaire de recourir à son hypothèque, et la conserver par l'action d'interruption. >> Il y a, dans ce sens, de nombreux arrêts dans l'ancienne juris

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(1) (Hér. de Choiseul C. veuve Fanget.) LA COUR;- Attendu que la législation, qui a précédé le régime hypothécaire actuel, admettait la constitution de l'hypothèque générale sur tous les biens présents et à venir du débiteur, lorsqu'elle était stipulée dans un acte authentique, telle qu'une convention revêtue du sceau royal ou seigneurial; Que, malgré le principe établi par les coutumes féodales d'Alsace, qu'un vassal n'était qu'usufruitier, et ne pouvait grever d'hypothèque les biens qui constituaient le fief, sans le consentement du seigneur suzerain et des agnats, ou de ceux qui en avaient l'expectative, ces biens, lorsqu'ils ont été dégagés du lien féodal et devenus libres dans la main du débiteur, sont tombés dans la catégorie des biens à venir, compris dans la constitution de l'hypothèque générale; Qu'il est de principe que la prescription, contre le titre constitutif d'une créance, ne court qu'à compter de son exigibilité, et qu'elle est suspendue jusqu'à l'arrivée de la condition de laquelle dépend l'exigibilité; Qu'il est également de principe que l'hypothèque est, de sa nature, indivisible, et subsiste en entier sur tous les immeubles affectés, sur chacun et sur chaque portion de ces immeubles, et qu'elle les suit, en quelques mains qu'ils passent; - Que les provisions de l'office de greffier-tabellion du comté de Villé, données par la dame comtesse de Zurlauben, par contrat notarié du 14 juin 1852, à feu Remy Fanget, stipule une finance de 20,000 liv., remboursable au décès de ce dernier, pour raison de laquelle somme, les parties contractantes ont hypothéqué la généralité de leurs biens présents et à venir;

-

Qu'au décès de Remy Fanget, les sieurs de Choiseul, héritiers de la dame de Zurlauben, et successeurs au fief de Villé, ont donné, le 15 déc. 1769, des provisions du même office à Jean-Baptiste Fanget, fils de Remy, pour en jouir, sa vie durant, ainsi et de la même manière qu'en jouissait son père; Qu'il n'est, à la vérité, pas fait mention expresse, dans cet acte, de la finance de 20,000 liv., dont l'office était grevė; mais qu'il est évident que les provisions données à Fanget fils ont produit le double effet de le subroger aux droits de son père, pour récupérer la finance dont il a compte à ses héritiers, comme aussi de proroger l'action en remboursement résultante du contrat de 1752, puisque Fanget fils ne pouvait exercer cette action, tant qu'il possédait l'office grevé de I finance; et, à l'égard des héritiers Choiseul, de leur rendre personnel l'engagement de rembourser la finance, après la mort de Fanget fils, sous l'hypothèque générale portée au contrat primitif de sa constitution, puisque ce n'était qu'à ce titre qu'ils pouvaient la conserver, et en jouir, comme ils ont fait, jusqu'à l'époque de la suppression de l'office; que ce

prudence (V. Louët, lettre P, no 2; Journ. du palais, t. 1). L'art. 95 de la cout. d'Auxerre, et l'art. 115 de la cout. de Paris mettaient ce point hors de doute.

2530. Il a été jugé, sous l'empire de la coutume de Paris (et l'on devrait juger de même sous le code Napoléon), que la jouissance précaire de l'usufruitier ne fait pas obstacle à ce que le nu-propriétaire puisse prescrire contre le créancier hypothécaire; et, spécialement, que le donataire, en nue propriété, de la moitié d'un immeuble hypothéqué, pour la totalité, à un créancier du donateur, prescrit, par dix ans, contre ce créancier, si celui-ci n'a fait aucun acte conservatoire de son droit d'hypothèque dans l'intervalle (Cass. 25 août 1835, aff. Creuzé-Delessert, v Prescrip. civ., no 326); — ...Et que le principe de l'indivisibilité de l'hypothèque ne doit pas être entendu en ce sens, que le tiers détenteur de partie de l'immeuble hypothéqué à la sûreté d'une obligation solidaire, ne puisse se prévaloir de la prescription décennale de l'hypothèque contre le créancier, qui n'a fait aucun acte d'interruption contre lui, sous prétexte qu'il a suffi que cette hypothèque continuât de subsister sur l'autre partie de l'immeuble, pour qu'elle dût être maintenue sur la totalité (même arrêt).

2531. Mais quelle voie doit prendre le créancier hypothécaire pour empêcher le tiers détenteur de prescrire contre lui? Il n'en a que deux : la première, de lui faire sommation de payer ou de délaisser, conformément à l'art. 2169 c. nap.; la seconde, de former contre lui l'action en déclaration d'hypothèque, lorsque sa créance n'est pas exigible.

2532. Mais qu'est-ce que l'action en déclaration d'hypothèque? C'est une action qui a pour but de faire reconnaître, en justice, par le tiers acquéreur, que l'immeuble qu'il détient est hypothéqué au créancier. « Comme le créancier, dit Pothier, de l'Hypoth., ch. 2, sect. 2, § 2, par cette action, ne demande ni le payement de la dette, ni le délais de l'héritage qui y est hypothéqué, et qu'elle n'a d'autre fin que la conservation du droit d'hypothèque, il suit de là: 1° qu'il ne peut y avoir d'exception de discussion à opposer contre cette action; 2o Qu'elle peut être donnée auparavant que le terme de payement de la dette

-

n'est donc qu'à dater de la dépossession de Jean-Baptiste Fanget, que le remboursement de la finance est devenu exigible, et que la prescription a pu commencer à courir; Que cette époque est celle de la promulgation de la loi du 18 oct. 1792, qui fixe le mode de remboursement des oflices des justices seigneuriales, et qui, à défaut d'hypothèque con→ ventionnelle, donnerait aux héritiers Fanget une hypothèque légale sur les biens des ci-devant seigneurs de Villé ; — Qu'antérieurement à cette loi, les biens fiefs du comté de Villé avaient déja perdu leur caractère de féodalité, et étaient devenus des propriétés libres, dans la main des sieurs de Choiseul; que, par conséquent, ils sont tombés dans la gené→ ralité de l'hypothèque, stipulée au contrat du 14 juin 1752, indépendamment de l'hypothèque dont la loi du 18 oct. 1792 les a grevés; Que, depuis le 18 oct. 1792 jusqu'au 1er sept. 1820, date de l'inscription prise par la veuve Fanget, il ne s'est pas écoulé le laps de trente années, qui eussent été requises pour prescrire l'hypothèque; Que les parties sont d'accord que les acquisitions, faites par les dames appelantes, d'une grande partie des portions de leurs cohéritiers, et qui ont été transcrites en temps utile, antérieurement à l'inscription, ont été purgées de l'hypothèque; mais qu'il reste trois portions héréditaires, propres aux dames appelantes, qui, n'ayant pas été dans le cas de la transcription, en demeurent grevées; que n'étant pas d'accord sur deux autres portions, provenant, l'une de la dame de Suffren, l'autre de la dame Félicité de Choiseul, dont on ne justifie pas que l'hypothèque ait été purgie, la cour ne peut en ordonner la radiation, pour ce qui les concerne, sans préjudico aux droits de ces dames. Chacune des portions héréditaires formant un soixante-douzième de la totalité, il reste, par conséquent, cinq soixantedouzièmes sur lesquels l'inscription doit subsister; Que le bordereau d'inscription, produit par l'intimée, est conforme au prescrit de la loi, et que l'extrait, par lequel on a cherché à le contester, n'est pas en forme regulière, propre à détruire la foi que le bordereau mérite en justice; Infirme, en ce que les appelantes ont été déboutées, indéfiniment, de leur demande en radiation de l'inscription d'hypothèque prise, par l'intimée, sur tous les biens présents et à venir, et qui ont appartenu aux débiteurs mentionnés au bordereau d'inscription du 1er sept. 1820; émendant, quant à ce, et ayant aucunement égard à la demande formée. en premiere instance, ordonne que ladite inscription ne subsistera que pour cinq soixante-douzièmes des mêmes biens; l'annule pour le surplus; ledit jugement au résidu sortissant son effet, etc.

Du 7 avr. 1821.-C. de Colmar, 3e ch.-M. Marquair, pr.

soit échu, et, si elle est conditionnelle, même avant l'existence de la condition; et, en cela, cette action diffère de l'action hypothécaire.» Quoique le code Napoléon n'ait fait aucune mention expresse de l'action en déclaration d'hypothèque, il ne semble pas douteux, quoique cela ait été récemment contesté (V. suprà, n° 2526-2o, l'arrêt de la cour de Besançon, du 19 déc. 1855), qu'elle ne puisse être exercée aujourd'hui, comme elle l'était sous l'ancienne jurisprudence: autrement le créancier hypothécaire n'aurait aucun moyen de se soustraire à la prescription du tiers détenteur, lorsque sa créance est à terme, et que l'échéance n'en est pas encore arrivée, la sommation de payer ou de délaisser ne pouvant être donnée que pour une dette actuellement exigible. On peut même dire que le germe de cette action existe dans l'art. 2244 c. nap., qui met au nombre des causes qui interrompent la prescription « la citation en justice, signifiée à celui qu'on veut empêcher de prescrire. » La légalité, au surplus, en a été reconnue par plusieurs arrêts de la cour de cassation, qui ne l'a jamais proscrite que lorsqu'elle était jointe à l'action personnelle contre le tiers détenteur (V. suprà, nos 1784 et suiv.). Les auteurs sont aussi unanimes sur ce point (MM. Persil, Rég. hyp., no 45; Grenier, t. 2, nos 339 et 317; Delvincourt, t. 3, p. 182,

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(1) (Veuve Mennet C. Risser et cons.) LA COUR; Attendu, sur la fin de non-recevoir opposée, en première instance, par les intimés, à la demande de la dame veuve Mennet, fin de non-recevoir basée sur ce que le code civil n'admet pas les demandes en déclaration d'hypothèque;

Qu'à la vérité, l'art. 2169 de ce code porte (suit le texte de l'article); Mais cette disposition, que les intimés invoquent, n'excluait pas la demande de la dame veuve Mennet, qui n'a eu d'autre but que d'interrompre la prescription de dix ans, qui courait en faveur des intimés tiers détenteurs; cette demande n'avait pas pour objet d'astreindre ceux-ci au délaissement des immeubles hypothéqués et par eux acquis, ni de les faire vendre sur eux, comme le suppose l'art. 2169 du code; elle ne pouvait même le vouloir tant que la discussion du principal débiteur ne se trouvait pas consommée; elle n'a pu avoir d'autre intention que celle d'interrompre, ainsi qu'il vient d'être dit, la prescription que les tiers détenteurs eussent pu acquérir durant la discussion du débiteur, dont la fin est difficile à prévoir, et laquelle, suivant l'art. 2170 du code, oblige le créancier à surseoir à la vente de l'héritage hypothéqué; de telle sorte que la veuve Mennet n'eût même pu faire vendre encore les biens à elle hypothéqués sur les tiers détenteurs, et, dès lors, la sommation à ceux-ci de délaisser, et le commandement préalable au débiteur de payer, dont parle l'art. 2169, eussent été oiseux, ou du moins prématurés; - Attendu, dès lors, que la demande de la dame veuve Mennet, tendant à faire déclarer, contre les intimés, les immeubles dont s'agit hypothéqués à sa créance, sans avoir conclu au délaissement actuel, n'est pas une action en déclaration d'hypothèque réprouvée par le code civil; elle n'est vraiment qu'une demande interruptive de la prescription vis-à-vis les tiers détenteurs: or, cette demande était fondée, puisque la dame Mennet n'a voulu que faire reconnaître un droit acquis, et non l'exercer dès à présent; elle est appuyée sur l'art. 2244, qui porte « qu'une citation en justice, un commandement ou une saisie, signifiés à celui qu'on veut empêcher de prescrire, forment l'interruption civile. » L'article suivant porte que « la citation en conciliation devant le bureau de paix interrompt la prescription, du jour de sa date, lorsqu'elle est suivie d'une assignation en justice donnée dans les délais de droit. » Et l'art. 2246 attache à la citation en justice le pouvoir d'interrompre la prescription, lors même qu'elle serait donnée devant un juge incompétent; - Attendu qu'il suit de toutes ces considérations que la demande était recevable et même fondée; qu'ainsi il y a lieu d'infirmer et d'adjuger les fins de ladite demande; sauf aux appelants, lorsqu'il écherra d'agir en délaissement, à suivre les formalités prescrites, à cet égard, par le code civil; firme.

In

Dn 1er déc. 1810.-C. de Colmar.-M. Antonin, pr. gén., c. conf. (2) Veuve Brunck et cons. C. Stüber et autres.)-LA COUR ;-Considérant que les appelants, dans le règlement définitif de leurs conclusions, les ont expressément réduites aux termes d'une simple demande en de claration d'hypothèques; qu'ainsi les expressions impropres, pour, lesdits immeubles, être vendus conformément à la loi, ajoutées à la forme ordinaire de cette action, in limine litis et dans le cours de l'instance, ne peuvent plus présenter d'équivoque; Que l'ancienne prescription décennale, admise, en Alsace, pour libérer les tiers acquéreurs des dettes hypothécaires, du chef de leur vendeur, a été interrompue par l'action en déclaration d'hypothèque, intentée par les appelants, avant la révolution de dix années depuis l'acte de vente; -Qu'en vain objecte-t-on, de la part des intimés, que cette action, intentée sous l'empire de la loi du 11 brum an 7, devait, pour avoir la force d'interrompre la prescription, être appuyée d'inscriptions hypothécaires toujours subsistantes, au moyen de renouvellements opérés en temps utile, tandis qu'au cas particulier, les appelants avaient, durant l'instance, laissé périmer les in

note 3; Duranton, t. 20, nos 312 et 523; Troplong, t. 4, noa 883 bis et 886; Flandin, Tr. des hypoth. inédit).-V. encore vo Prescript. civ., no 506).

2533. Il a été jugé, en effet : 1o que l'action en déclaration d'hypothèque, inutile, sous le code, comme préliminaire de la poursuite d'expropriation, peut, cependant, être encore utilement intentée contre le tiers acquéreur, à l'effet d'interrompre la prescription contre lui (Colmar, 1er déc. 1810) (1);— 2o Que l'action en déclaration d'hypothèque peut être formée par un créancier hypothécaire contre l'acquéreur de l'immeuble, afin d'empêcher la prescription de son droit d'hypothèque (Caen, 23 mars 1847, aff. Delamare, D. P. 49. 2. 52);—...Et qu'il ne doit pas supporter les frais de cette action, rendue nécessaire par un fait qui lui est étranger (même arrêt); 3° Que l'action en déclaration d'hypothèque, intentée par le créancier hypothécaire, avant la révolution des dix années qui ont suivi l'acte de vente antérieur à la loi du 11 brum. an 7, empêche le tiers détenteur de prescrire contre l'hypothèque, nonobstant que, dans le cours de l'instance, le créancier ait laissé périmer son inscription, faute de renouvellement en temps utile (Colmar, 20 juill. 1826) (2); Que la vente, sous le code Napoléon, ayant pour effet de scriptions par eux prises, et ne les avaient renouvelées qu'en 1819, trois mois environ après l'expiration des dix années, depuis le dernier renouvellement; d'où il devait résulter que l'action intentée, manquant de son appui nécessaire, se trouvait ainsi viciée, et, dès lors, incapable d'interrompre la prescription décennale, commencée avant la loi précitéo de brum. an 7; Que raisonner ainsi, c'est, de la part des intimés, confondre deux choses bien distinctes, la conservation d'un droit par interruption de prescription, avec la réalisation de ce même droit par des poursuites réelles et actuelles à fins de payement ou de déguerpissement;

...

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Qu'il est, en effet, bien reconnu que l'action en déclaration d'hypothèque, non prévue, mais non abrogée par la législation nouvelle, est purement conservatoire, et n'a d'autres effets que d'interrompre la prescription, à l'égard des tiers détenteurs, comme toute action en justice régulièrement intentée; tandis que cette même législation, en exigeant la formalité de l'inscription, comme complément nécessaire de tous droits hypothécaires, a disposé dans le système de la réalisation actuelle de ces mêmes droits, et non en vue d'une action purement conservatoire qu'elle a entièrement prétérite; - Qu'enfin, sous le rapport de la prescription, la loi n'attribue aucune vertu à l'inscription, ne voulant pas qu'elle puisse servir à l'interrompre; au lieu qu'elle attribue cet effet à une simple citation en conciliation, relevée en temps utile, parce que le débiteur est mieux et plus sûrement averti par une assignation qu'il recoit, que par une inscription dont il peut ignorer l'existence; - Qu'en ious cas, on peut dire encore qu'il y a eu, dans l'espèce, inscription à l'appui de la demande originaire en déclaration d'hypothèque; que de nouvelles inscriptions ont été prises en 1819, durant cette même instance, non encore vidée; qu'ainsi, et sous le rapport sculement de la régularité de l'instance en déclaration, on peut, surabondamment, prétendre qu'elle est appuyée d'inscription hypothécaire; - Qu'il résulte de ce que dessus que l'instance en déclaration d'hypothèque (n'ayant, d'ailleurs, jamais été périmée) a pleinement interrompu la prescription décennale, commencée sous l'empire de la loi ancienne; Qu'il reste

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à examiner si l'hypothèque ne s'est pas éteinte par quelque autre voie; qu'à cet égard, les intimes n'excipent ni de l'extinction de l'obligation principale, ni d'aucune renonciation de la part des appelants; — Qu'ils ne peuvent, non plus, exciper de la purgation qu'ils auraient opérée des droits hypothécaires; qu'en effet, ils n'ont transcrit, ni sous l'empire de la loi du 11 brum. an 7, ni depuis la promulgation du code civil; or, n'ayant pas libéré les biens par eux acquis, avant la promulgation de ces lois, il n'auraient pu le faire qu'au moyen de la transcription, laquelle aurait paralysé tout droit hypothécaire, non inscrit auparavant, ou dont l'inscription serait périmée; que, notamment, les droits des appelants se seraient éteints, si les intimès avaient transcrit avant ou pendant les trois mois d'intervalle entre la péremption des dernières inscriptions et leur renouvellement en 1819, et cela, en faisant abstraction de l'art. 854 c. pr. civ., applicable seulement aux droits à venir ; mais qu'ayant omis cette formalité indispensable, ils ont eux-mêmes, par là, conservé intact le droit des appelants; qu'il y a lieu, toutefois, de repousser la demande des appelants Jean-Henri Viot, Etienne Richard, Thomas-Adolphe Lacon, dont les droits hypothécaires, postérieurs à l'acte de vente passé aux intimes, n'ont pu frapper des biens dont leur débiteur a été dessaisi, du jour même de l'acte de vente, tant à l'égard des parties contractantes qu'à l'égard des tiers; Qu'il n'y a pas lieu d'accueillir la demande subsidiaire des intimés, relativement à l'irrégularité prétendue des inscriptions prises par les héritiers Fræcisen et Brunck, en ce qu'elles ne seraient pas représentées en originaux, mais seulement par certificat du conservateur des hypothèques, intitulé extrait par extrait, puisque ce fonctionnaire a qualité pour délivrer certificat

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