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traduction de plusieurs lois du Digeste (V. entre autres LL. 46, §2, et 108, § 1, De verb. oblig.): Sub hac conditione, si volam, dit la loi 8, D., De oblig. et act., nulla fit obligatio: pro non dicto enim est quod dare, nisi velis, cogi non possis. Cette règle n'empêchait cependant pas que, dans le droit romain, on ne regardât comme valide, intrinsèquement, l'hypothèque stipulée pour un prêt à venir. L'obligation, il est vrai, était éventuelle jusqu'à la réalisation du prêt, et l'hypothèque suivait le sort de l'obligation; mais le prêteur, en livrant ses fonds, n'avait pas besoin de stipuler une nouvelle hypothèque; la convention première subsistait et devenait efficace par l'événement de la condition sous laquelle elle avait eu lieu. Pourquoi n'en serait-il pas de même chez nous? Pourquoi le débiteur éventuel ne pourraitil pas, à l'avance, consentir une hypothèque pour son obligation future, quand même cette obligation serait dépendante de sa volonté? S'il n'y a pas obligation pour lui d'emprunter, il y a obligation pour le prêteur éventuel de livrer ses fonds, si on les lui demande; il y a donc, d'un côté au moins, le vinculum juris, et c'est assez pour qu'on puisse y rattacher la stipulation d'hypothèque.

1321. Toutefois, il a été jugé, avant le code Napoléon, et par application des lois romaines: 1° que l'hypothèque constituée pour sûreté de prêts éventuels, sans aucune détermination de somme, n'est pas valable, comme étant créée sous l'empire

Considérant

d'une condition potestative; qu'ainsi l'inscription prise en vertu
d'une pareille constitution d'hypothèque, ne peut avoir aucun
effet, quand même elle serait postérieure à la réalisation du prêt
(Colmar, 18 avr. 1806) (1); — 2o Qu'avant la loi du 11 brum.
an 7 l'inscription prise en vertu d'une hypothèque consentie
pour sûreté d'une promesse de prêt, méme de somme déterminée,
mais qui n'engageait.ni l'emprunteur, ni le prêteur éventuels,
n'est pas valable, alors même que l'inscription n'a eu lieu qu'a-
près la réalisation du prêt (Liége, 7 janv. 1811) (2).—L'autorité
de ces arrêts doit être écartée, d'une part, parce qu'ils sont in-
tervenus sous l'empire des lois anciennes, qui consacraient le
système occulte de l'hypothèque, si favorable à la fraude, et, de
l'autre, parce qu'ils ont été rendus dans des espèces où le prêt
à effectuer était tout aussi facultatif, de la part du prèteur que
de l'emprunteur éventuels; en sorte qu'il n'y avait de vinculum
juris ni d'un côté ni de l'autre; au lieu que nous avons raisonné
dans la supposition que le prêteur ne pût, en aucune façon, se
dégager de la promesse de prêt.

1322. Mais on a jugé, sous le code Napoléon: 1° que l'hy-
pothèque, consentie pour prèt d'une somme déterminée, est va-
lable, quoiqu'une partie de cette somme ait été remise en traites,
à diverses échéances, lorsque tout fait présumer que ces traites
ont été payées (Cass. 2 déc. 1812) (3); 2o Que l'hypothèque,
consentie pour sûreté d'un crédit ouvert, est valable, bien que

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LA COUR... Attendu que l'hypothèque de l'appelant n'existait point. et ne pouvait exister, avant la loi du 11 brum. an 7, puisqu'il est de principe qu'une hypothèque, qui n'est qu'une obligation accessoire, ne peut exister sans une obligation principale, et que, dans l'espèce, la créance réclamée n'a point eu d'existence avant le 22 vent. an 8;...Confirme.

Du 7 janv. 1811.-C. de Liége.

(1) (Jacquen et Dupuis C. Preiswerch.)- LA COUR ;
que l'intimé fait résulter son hypothèque de l'acte du 23 pluv. an 3;
ainsi c'est le cas de vérifier la nature de cet acte. Par icelui, Rissler
constitue une hypothèque en faveur de l'intimé, pour sûreté des sommes
que celui-ci pourrait lui prêter par la suite; ainsi l'hypothèque est créée
sous une condition potestative, c'est-à-dire que l'exécution de la conven-
tion dépendait de l'evenement qu'il était au pouvoir de l'une ou l'au-
tre des parties de faire arriver ou d'empêcher. C'est la définition que
nous en donne l'art. 1170 c. civ.; et en effet, au cas particulier, il de-
pendait de l'intimé de prêter ou de ne pas prêter par la suite; tout
comme il pouvait également arriver que Rissler ne voulût plus emprun-
ter, ou que le prêt eût lieu pour une somme très-modique ou très-con-
siderable. Or, d'après les anciens principes, et les dispositions du droit
romain, qui régissait la ci-devant Alsace, confirmés par l'art. 1176
c. civ., applicable ici seulement comme raison écrite, puisque le code
est postérieur à l'acte qui a const tuée la prétendue hypothèque en fa-
veur de l'intimé, l'obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous
une condition potestative de la part de celui qui s'oblige, et cela par une
raison bien simple, pour le cas particulier surtout, c'est que l'hypothèque
n'est que l'accessoire d'un engagement préexistant; et, en effet, s'il en
était autrement, il serait facile, par une convention de la nature de celle
dont s'agit, faite à un prête-noin, de frauder les créanciers de qui on
pourrai emprunter ensuite; - Considérant que l'inscription prise par
l'intimé, le 28 therm. an 4, sous l'empire du code hypothécaire du 9
mess. an 3, pour conserver l'hypothèque qu'il prétendait faire résulter de
l'acte du 2 pluv., dite année 3, n'a pu produire plus d'effet que ce
contrat même, parce que l'hypo hèque prépostère, stipulée par ce con-
trat, ne pouvait être efficace, soit à dater du jour auquel elle a été créée,
soit de celui auquel l'on prétend qu'elle a été realisée, qu'autant, 1° que
la somme à prêter eût été déterminée par l'acte constitutif de l'hypothè-
que; 2° que le payement ou réalisation aurait été constaté légalement,
si l'obligation eût été à terme, in diem; 5o que la condition sous la-
quelle l'obligation a été contractée n'eût pas été potestative de la part de
celui qui s'est obligé.-Or, les parties ne se trouvent pas dans ces hypothèque: aucune hypothèque conventionnelle n'existe sans titre, et un
pothèses; les juges à quo ont donc évidemment mal jugé; et c'est le cas,
en-émendant, de debouter l'intimé de sa demande.

Du 18 avr. 1806.-C. de Colmar.

(2) Espèce : - (Bourguignon C. hér. Cologne.) – 29 déc. 1795, acte authentique par leque. Delchef, se proposant d'emprunter de Bourguignon une somme de 1,000 florins, consent, au profit de ce dernier, qui, il faut bien le remarquér, ne s'engagea nullement à faire le prêt, une hypothèque sur plusieurs maisons, pour sûreté de celle somme. Aucune époque n'avait été fixée pour la réalisation du prêt.—22 vent. an 8, Delchef se constitue débiteur, envers Bourguignon, d'une somme de 1,222 fr.—6 fruct. suivant, inscription hypothécaire par Bourguignon, en vertu de l'acte du 29 dec. 1795, sur tous les biens de Delchef, mais sans aucune mention de l'époque d'exigibilité de la créance.Cette irrégularité est corrigée, conformément à la loi du 4 sept. 1807. -Delchef meurt.-Un ordre s'ouvre. L'inscription prise par Bourguignon est contestée on prétend, entre autres griefs, qu'ellest nulle, parce qu'au moment où l'hypothèque avait eté consentie, la créance n'existait pas encore, et que l'hypothèque n'étant jamais que l'accessoire d'une créance, ne pouvait pas exister avant elle.- Jugement qui annule l'inscription.-Appel par Bourguignon.—Arrêt.

(3) Espece: - (Bodin et Bontoux C. Pinot.)- 2 fév. 1811, arrêt de la cour de Turin, en ces termes : « At'endu, en fait, que les deux bordereaux que l'appelant produit comme contre-lettres, pour constater que l'acte public notarié Fromental est, en partie, feint et simulé, n'ont pas été formellement contestés; qu'en consequence leur contenu peut ètre censé pour avéré, sans besoin d'autre interrogation à ce su et; Que même, sans analyser le mandat dont Charles Camosso était nanti, lorsqu'il contracta avec les intimés le prêt porté par l'acte public précité du 20 prair. an 13, il est sensible que les sommes que les bordereaux constatent avoir été fournies en traites ou en bons, n'ont pu produire d'hypothèque sérieuse avant que l'argent représenté par ces effets ait été réellement touché par l'emprunteur; —Qu'ainsi l'acte public Fromental, notaire, est feint et simulé, en ce qu'il déclare que tout l'argent a été réellement compté et retiré, tandis que les contre-lettres prouvent le contraire, et ne laissent même aucun indice que l argent ait été retiré, et ensuite rechangé pour en faciliter le transport, ainsi qu'on aurait cherché à le faire croire à l'audience, pour affaiblir la force invincible des bordereaux; Que la simulation pouvant être opposée par les tiers qui en sont lésés, et l'in'érêt de l'appelant en l'espèce étant évident, on ne saurait méconnaître ia just ce de la conclusion subsidiaire, tendant à ce qu'il soit déclaré quel acte public du 20 prair, an 12 ne doit produire aucun effet contre des tiers, ni d'action hypothecaire, que restrictivement aux sommes que les intimés ont réellement déboursées en argent, au moment de sa stipulation; Que cette conclusion est également fondée, en ce qu'elle tend à obtenir la ma n evée de l'inscription hypothecaire prise par les intimes; car l'inscription ne peut exister sans by

-

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contrat simulé n'etant point un contrat, ne peut valoir comme titre en la
partie simulée; Infirme, dit et déclare que l'obligation hypothécaire,
passée par l'acte public notarié Fromental, en date du 20 prair. an 13,
par Charles Camosso, au profit des intimės, doit être censée comme non
avenue et de nul effet, pour toute somme qui ne résulte pas avoir été
réellement remise à Charles Camosso, en argent comptant, au moment
de la stipulation de l'acte susdit, par les deux bordereaux portant la même
date, et produits par l'appelant ; Ordonne, en conséquen e, la main-
levée, à cette concurrence, de l'inscription prise, par les int més sur les
biens des frères Camosso, à la conservation des hypothèques de Turin,
le 27 prair. an 13. — Pourvoi par Bodin et Bontoux. Arrêt.
LA COUR; Vu l'art. 2132 c. civ., suivant lequel l'hypothèque con-
ventionnelle est valable, quand la somme pour laquelle elle est consentie
est certaine et déterminée par l'acte; Vu aussi l'art. 1131 du même
code, qui déclare nulle toute obligation sur fausse cause; Et attendu
qu'il est reconnu par la cour de Turin que, lors de l'obligation notariée
du 20 prair. an 15, Bodin et Bontoux et compagnie ont fourni, aux frères
Camosso, des valeurs, soit en argent, soit en effets négociables, jusqu'à
concurrence de la somme y portée et de l'hypothèque que ceux-ci leur
ont consentie; Qu'il importe peu de savoir s'il y a eu simulation dans

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la créance soit subordonnée à la réalisation ultérieure du crédit; qu'en conséquence, cette hypothèque doit recevoir son effet, si les fonds promis sont délivrés, et jusqu'à concurrence des sommes

la déclaration que les prêteurs avaient fourni toute la somme en argent : 1o parce que les emprunteurs ont pu échanger postérieurement une partie du numéraire contre ces effets; 2° parce que, quand il y aurait eu véritablement simulation, cette simulation ne serait point réprouvée par la loi, alors qu'elle n'a porté préjudice ni aux emprunteurs, ni aux tiers, ce qui se rencontre ici, où tout fait présumer que les effets en question étaient remboursés avant que l'arrêt attaqué fût rendu; - Attendu que la fausse cause ne vicie l'acte que lorsque, la fausseté étant démontrée, il n'apparaît pas d'une autre cause légitime et véritable; · Que cette interprétation, qui a toujours servi de règle en cette matière, se trouve implicitement consacrée par l'art. 1132 du même code, qui déclare que la convention n'est pas moins valable, quoique la cause n'en soit pas exprimée; ce qui amène la conséquence qu'à la cause feinte, mais non frauduleuse, il est permis d'y substituer une autre cause certaine et légitime; D'où il suit que les arrêts attaqués ont fait une fausse application de l'art. 1131, et violé l'art. 2152 c. civ. ci-dessus cité; Casse, elc.

avance.

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Du 2 déc. 1812.-C. C., sect. civ.-MM. Mourre, pr.-Babille, rap. (1) Espèce :-( Hérault-Desacres C. Manoury-Lacour.) - 27 avril 1808, acte notarié par lequel Manoury-Lacour, banquier, ouvre un crédit de 100,000 fr. à Bonvoisin, qui, pour sûreté du remboursement, lui donne hypothèque, jusqu'à concurrence de cette somme, sur son domaine de Belle-E'ole. Il est stipulé que Bonvoisin payera un demi p. 100 d'intérêts, et un autre demi p. 100 de commission sur les sommes que Manoury déboursera; et que chacune des parties pourra faire cesser les opérations, en prévenant l'autre trois mois d'avance. — 6 mai suivant, Manoury prend inscription, avant d'avoir fait encore aucune 15 sept. 1808, obligation de 30,000 fr. par Bonvoisin au sieur Hérault-Desacres, avec hypo hèque sur le domaine de BelleEtoile. 21 oct., Hérault-Desacre prend inscription. Bonvoisin fait faillite; Manoury-Lacour obtient contre les syndics un jugement du tribunal de commerce qui le reconnaît créancier de 97,208 fr. 28 c. Il requiert sa collocation sur le prix du domaine de Belle-Etoile, à la date de son inscription. Contestation par Hérault-Desacres; et, le 10 oct. 1810, jugement du tribunal de Domfront, qui déclare Manoury simple chirographaire :— « Attendu que l'acte du 27 avril 1808 ne renferme ni obligation pure et simple, ni obligation conditionnelle de la part de Bonvoisin ; qu'il ne contient point d'obligation pure et simple, parce que Bonvoisn avait la faculté d'user ou de ne pas user du crèdit qui lui était ouvert; qu'il ne renferme point d'obligation conditionnelle ou éventuelle qui soit de nature, comme le veut la loi, à pouvoir être remplie malgré le debiteur, puisque, dans aucun temps, dans aucune circonstance, Manoury n'aurait pu contraindre, en vertu de son acle, Bonvoisin à user du crédit qui lui était ouvert ; — Qu'il suit de là que cet acte ne renferme, de la part de Bonvoisin, qu'une obligation purement potestative, toujours dépendante de sa seule volonté, et conséquemment nulle d'après l'art. 1174 c. civ.; d'où il suit encore, par une conséquence néce-s ire, que l'inscription est aussi nulle, d'après l'art. 2148 du même code, puisque, suivant cet article, fondé sur la raison, il ne peut exister d'hypothèque sans une obligation préalable, comme il n'est point d'effet sans cause;-Qu'il n'en est pas ainsi d'une obligation conditionnelle ou eventuelle, parce que celle-ci prend naissance à l'instant même que l'acte est arrêté et suivi d'inscription; qu'elle n'est suspendue que par l'effet de la condition indépendante de la volonté du débiteur, qui peut être contraint à l'exécuter, si la condition arrive; ce qui fait que, dans ce cas, l'hypo hèque remonte à l'instant de l'engagement, parce que, dès lors, l'obligation a été formée; tandis que, dans l'obligation potestative non exécutée, il n'existe encore ni créancier, ni débiteur, ni action, ni obliga ion formée, mais seulement une espérance d'obligation qui, par elle-même, ne peut produire d'effet, et qui est illusoire jusqu'au moment de l'exécution;-Qu'il suit de là que ce n'est que dès l'instant que Bonvoisin a usé du crédit qui lui était ouvert, que son obligation a pris naissance, et que Manoury est devenu son créancier; que consé-quemment c'est de cet instant seulement que l'hypothèque aurait pu prendre naissar ce; mais que, pour la faire naître, il aurait dû se procurer sur Bonvoisin un titre au hentique capable de conférer l'hypothèque, et requerir, en conséquence, inscription, parce que, encore une fois, l'hypothèque n'est que l'accessoire et le gage d'une obligation formée, obligation sans laquelle elle ne peut exister;-Qu'il résulte bien des registres de Manoury, des traites et lettres de change négociées sous sa signature, que Bonvoisin a usé du crédit qui lui était ouvert, et qu'il est constant qu'au moment où il en a usé, il y a eu, de sa part, obligation formée et créance consentie; mais que cette créance n'a pu faire naître l'hypothèque qu'à la charge de l'inscription; et, dès que Manoury n'a pont de titre authentique suivi d'ins ription, qui constate l'instance de cette créance consentie, de cette obligation formée, ses registres, ses trailes, ses lettres de change ne peuvent le constituer que créancier chirographaire de Bonvoisin; que ses négociations, ses créances sur ce

versées, sans qu'il soit besoin d'un nouvel acte (Req. 26 janv. 181 (1); Rouen, 24 avr. 1812, aff. Lefebvre C. faillite Ebran; Bruxelles, 10 juill. 1817, aff. Steenhout C. Vandamme; Liége,

dernier, ne peuvent le faire colloquer comme créancier hypothécaire, et, à plus forte raison, ne peuvent primer la créance inscrite du sieur Hérault-Desacres, ni celle des autres créanciers. » — -Sur l'appel, arrêt infirmatif de la cour de Caen, du 11 août 1812: — «Considérant que si, d'un côté, par l'acte du 27 avril 1808, Manoury-Lacour a accordé à Bonvoisin un crédit de 100,000 fr.;s'il s'est engagé d'acquitter ou de faire acquitter, soit à Paris, soit sur une autre place, des traites ou lettres de change jusqu'à concurrence de cette somme; d'un autre côté, en acceptant, par le même acte, ce crèdit, Bonvoisin, par le seul fait de sou acceptation, a contracté 1 obligation, non-seulement de rembourser Manoury-Lacour des sommes qu'il aurait ainsi déboursées, mais même de lui payer la commission d'un demi p. 10, et les intérêts à un autre demi p. 100;-Que ces obligations, de la part de Bonvoisin, ont pris naissance à l'instant même de la passation de l'acte dont il s'agit; que l'hypothèque qu'il a donnée à Manoury-Lacour, pour sûreté de leur execution, en a été l'accessoire; qu'il n'est conséquemment pas exact de dire, comme on l'a fait, que cette hypothèque a été créée isolément et sans obligation préalable; que les obligations consenties par Bonvoisin ont été valablement contractées, puisqu'on trouve, dans l'acte du 27 avril 1808, les conditions essentielles requises par l'art. 1108 du code, pour la validité d'une convention; Que ce n'est pas le cas d'invoquer, à juste titre, l'art. 1174, qui n'est pas applicable à l'espèce, parce que l'obligation de Bonvoisin n'était pas contractée sous une condition purement potestative; qu'elle était bien potestative, en ce sens qu'il pouvait faire l'usage qu'il jugerait convenable du crédit qui lui était accordé, ou ne pas en user du tout; mais qu'elle n'était pas potestative, sous le rapport de l'acceptation; cette acceptation s'est trouvée consommée au moment même de l'acte, et par les stipulations qui y sont contenues, et par l'apposition de la signature des parties au pied de cet acte; qu'une fois qu'il a été fait, cette acceptation ne dépendait plus d'une condition potestative de la part du débiteur. Or, le crédit donné par Manoury-Lacour équivalait lui-même à une remise de fonds: par l'acceptation que Boavoisin en a faite, à l'instant de l'acte, il a, au même moment, nécessairement contracté l'obligation d'indemniser Manoury de tous les effets que pourrait avoir ce credit: c'est pour sûreté de cette obligation résultante de son acceptation qu'une hypothèque a été consentie par Bonvoisin cette hypothèque, de même que l'obligation dout elle est l'accessoire, ne dépendait donc nullement d'une condition potestative de sa part; qu'il est bien vrai que la créance de Manoury-Lacour était conditionnelle pour son existence, c'est-à-dire qu'elle était subordonnée à l'usage du crédit ouvert; mais qu'il resulte de l'art. 2132 que l'hypothèque conventionnelle peut être valablement consentie pour une créance de cette nature; qu'ainsi, en déclarant que l'acte du 27 avril 1808 n'avait pas conféré à Manoury-Lacour une hypothèque valable, le premier juge lui a fait un grief sensible qui nécessite la réformation de son jugement sur ce chef; Qu'on doit d'autant moins balancer à la prononcer, que c'est en vain qu'on suppose qu'il n'est pas possible de connaître le veritable état de la fortune de celui qui constitue de semblables hypothèques, attendu que, par l'effet de l'inscription, l'hypothèque et la créance qui en est l'objet acquièrent un degré de publicité que la loi juge suffisant pour garantir de l'erreur... >> - Pourvoi par Hérault-Desacres pour violation des art. 1108, 1174, 1528, etc., c. civ. LA COUR, Considérant que, par le contrat authentique du 27 avr. 1808, Manoury-Lacour fils, négociant, contracta l'obligation formelle d'ouvrir, sur sa fortune, un crédit de 100,000 fr. au profit de Bonvoisin, et d'acquitter, ou de faire acquitter, soit à Paris, soit sur une autre place, les lettres de change que tirerait ledit Bonvoisin jusqu'à concurrence de cette somme; Que, par le même acte, Bonvoisin aussi, de son côté, s'obligea envers ledit Manoury-Lacour en acceptant ce crédit; qu'il contracta, en conséquence, l'engagement de rembourser ManouryLacour de toutes les sommes dont celui-ci ferait les avances, et de lai payer les intérêts à raison d'un demi pour 100 par mois, et une commission d'un demi pour 100; - Que, dès lors, les obligations furent réciproques, sous le rapport de la promesse et de l'acceptation du crédit, et sous le rapport des dommages-intérêts qui auraient pu résulter de la violation des engagements importants respectivement contractés;— Considérant que Bonvoisin, afin d'assurer à Manoury-Lacour une garantie suffisante, pour raison du crédit important qui lui était ouvert, constitua, en faveur dudit Manoury-Lacour, une hypothèque sur le domaine de Belle-Etoile et sur d'autres domaines désignés dans ce contrat; Que la constitution de cette hypothèque conventionnelle, créée pour sûreté de l'obligation personnelle, réunit les conditions prescrites par la loi, savoir : le consentement, la capacité, l'objet certain formant l'objet de l'engagement et une cause licite: Que, par conséquent, en validant l'inscriptio prise, le 6 mai 1808, par Manoury-Lacour, en vertu dudit contrat, la cour dont l'arrêt est attaqué a fait une juste application des lois qui ont servi de base à sa décision; Rejette.

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Du 26 janv. 1814.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Vergès, rap.

28 juin 1823, aff. Ripa et Delgoffe C. Regnier; Req. 10 août 1831, aff. Julienne, suprà, no 1267; Paris, 20 août 1841, aff. Hutte C. Seignard; 30 mars 1842, aff. Violette C. Vallet-Martin; Bruxelles, 27 déc. 1843, aff. Benda C. Vanhumbeck; Gand, 29 juill. 1848, aff. Lambrechts, D. P. 48. 2. 149; Besançon, 30 nov. 1848, aff. Hildebrand, D. P. 49. 2. 198; Req. 11 déc. 1848, aff. Perrichon, D. P. 48. 1. 234; Cass. 21 nov. 1849, et, sur renvoi, Metz, 1 4 mars 1850, aff. Lippmann, D. P. 49. 1. 275, et 55. 5. 244; Paris, 15 janv. 1852, et, sur pourvoi, Req. 8 mars 1833, aff. veuve Bordclot, D. P. 54. 1. 341 et 5. 419).

Flandin, Tr. des hypoth., inédit. Contrà, Merlin, Quest. de droit, vo Hypoth., § 3; Toullier, t. 6, no 546; Troplong, t. 2, no 478; Zachariæ, t. 2, p. 143). La question a été tranchée législativement dans le même sens, pour les sociétés de crédit foncier, par la loi du 10 juin 1853, dont l'art. 4 est ainsi conçu : « L'hypothèque consentie au profit d'une société de crédit foncier, par le contrat conditionnel de prêt, prend rang du jour de l'inscription, quoique les valeurs soient remises postérieurement. >> Il a été jugé, dans le sens que nous venons d'indiquer: 1° que l'hypothèque, stipulée pour garantie d'un crédit ouvert, est valable, et que cette hypothèque prend rang du jour de son inscription, et non pas seulement du jour des avances faites au crédité (Douai, 17 déc. 1855; Poitiers, 9 janv. 1844 (1); Paris, 20 août 1841, aff. Hutte; 30 mars 1842, aff. Violette; Gand. 29 juill. 1848, aff. Lambrechts; Besançon, 30 nov. 1818, aff. Hildebrand, cités au numéro précédent); —2o... Quelle que soit, d'ailleurs, l'époque des versements faits au crédité, et alors même

1323. Sur la seconde question, celle de savoir si l'hypothèque prend rang du jour de l'inscription opérée avant la réalisation du prêt, ou seulement du jour de cette réalisation, nous avions dit, dans notre première édition, que l'hypothèque ne doit dater que du jour de la numération des deniers, et qu'ainsi elle ne saurait préjudicier aux tiers à qui le débiteur aurait intermédiairement hypothéqué le même bien. Et nous avions appliqué cette solution, non-sculement au prêt civil, mais encore à l'hy-qu'ils seraient postérieurs à la cessation de ses payements (Paris, pothèse d'un crédit ouvert par un banquier à son correspondant. Mais la jurisprudence s'est prononcée si uniformément pour l'opinion contraire, qu'il y aurait quelque temérité à nous à persister dans notre premier sentiment. La majorité des auteurs s'est aussi prononcée dans le sens de la jurisprudence (MM. Persil, Quest., t. 1, ch. 4, § 3; Grenier, t. 1, no 26; Favard, Rép., vo Hypoth., sect. 2, § 3, no 2; Pardessus, Droit com., t. 4, no 1137; Rolland de Villargues, vo Hypoth., no 55; Battur, t. 2, no 285; Bédarride, t. 1, no 126; Lainné, p. 71;

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LA

(1) 1re Espèce : (De Fonvent C. Paillon et Valentin.) COUR;- Vu l'art. 2152 c. civ.; Attendu que l'acte par lequel un banquier ouvre un crédit à son correspondant, forme entre eux un lien de droit, par suite duquel le premier met ses écus à la disposition du second, qui contracte, de son côté, l'obligation d'indemniser le banquier de ses avances, avec intérêts et droits de commission d'usage; que cette obligation du correspondant se forme, au moment même de l'acte, et peut être valablement garantie par une hypothèque, pourvu que le titre Constitutif de cette hypothèque soit authentique et que la somme à concurrence de la quelle le crédit est ouvert soit déterminée dans l'acte; Attendu que l'inscription prise en exécution d'une telle convention a son effet, non du jour où les écus son' réellement sortis de la caisse du banquier pour entrer dans les mains du correspondant, ou pour acquitter ses traites, mais du jour où ils ont été mis a sa disposition par l'acte qui lui ouvre un crédit; que la numération des deniers n'est que l'exécution de la promesse, la suite nécessaire de l'obligation garantie par l'hypothe que, dont l'effet do t nécessairement se reporter au jour où elle a été rendue publique par une inscription régulière; Attendu qu'il n'est pas nécessaire que les avances du banquier soient prouvées par acte authentique ou ayant dale certaine ; que la réalité et la quotité en est, dans l'espèce, justifice par des livres régulièrement tenus; que la créance du banquier de Fonvent a été admise au passif de son correspondant Oli. vier, après justification et sans contradiction, et qu'elle a même été reconnue par la correspondance de ceux qui lui disputent aujourd'hui son rang; Attendu, enfin, qu'il résulte des documents du procès que le crédit de 6,000 fr. a été épuisé, et que les époux Olivier Legrand en sont debiteurs envers de Fonvent; qu'il est même établi que, soit au 10 mai 1821, soit au 6 janv. 1824 (date de l'obligation des sieurs Paillon et Valentin), lesdits époux avaient usé de ce crédit; que, par suite, c'est à tort que la demande en collocation de Fonvent a été repoussée; - Infirme, etc.

Du 17 déc. 1833.-C. de Douai, 1re ch.-M. de Quardeville, 1er pr. 2o Espece: (Allongue C. femme Broussard.) LA COUR; Atlendu qu'aucun article du code civil ne defend à un banquier d'ouvrir un crédit et de prendre inscription pour les sommes qu'il comptera à l'emprunteur;- Attendu que, par acte authentique en date du 21 août 1836, Allongue a ouvert un crédit à Broussard pour la somme de 5,000 fr., avec intérêts de 6 p. 100, et que, pour sûreté de la somme formant l'ouverture du crédit, Broussard a consenti au sieur Allongue une hypothèque sur les immeubles qu'il possédait; ;- Attendu qu'une inscription a été prise par Allongue sur les biens de Broussard, le 24 août 1836;-Attendu que, suivant les dispositions de l'art. 2134 c. civ., l'hypothèque prend rang du jour de l'inscription prise par le créancier; que ce principe général s'applique à toutes les hypothèques qui ont été consenties par des actes authentiques;-Attendu qu'à partir du 21 août 1836, Broussard pouvait épuiser le credit ouvert par Allongue, qui était obligé de lui fournir des fonds, ou de les tenir à sa disposition; - Attendu qu'à partir de cette époque, un lien de droit a lié les deux parties; que cette obligat on est devenue pure et simple et réciproque par l'acceptation du contrat de la part de Boussard, qui y a apposé sa signature; Attendu que, lorsque le crédit est ouvert, la tradition des

15 janv. 1852, et, sur pourvoi, Req. 8 mars 1853, aff. Bordelot, cité eod.); — 3o Et que le crédit doit être réputé réalisé, lorsqu'il a été employé à payer une dette antérieure du crédité envers le créditeur, lequel, à raison de l'affectation du crédit à l'extinction de cette dette, a consenti à en proroger l'exigibilité;-Que, par suite, l'inscription du créditeur prime les inscriptions ultérieurement prises par les créanciers du crédité, bien que celles-ci soient antérieures à l'exigib lité de la créance à l'extinction de laquelle le crédit a été employé (Aix, 29 mai 1841) (2); —4o Que,

espèces s'opère fictivement, à l'instant du contrat, de la part du créditeur, qui est censé remettre les fonds au crédité, qui les restitue au créditeur, qui est obligé de les tenir à la disposition du crédité; - Attendu que, si l'hypothèque ne prenait rang que du jour du versement des fonds, ce serait ouvrir la porte à la fraude, et diminuer les garanties que le créditeur a voulu se procurer, puisque, du jour de l'obligation au versement des fonds, le crédité pourrait consentir sur les immeubles des hypothèques qui prendraient rang avant celle du créditeur; Attendu que l'inscription de celui qui ouvre le crédit ne peut se modifier, suivant le montant et la date des versements qui est souvent fort incertaine ;-Attendu que l'hypothèque consentie pour sûreté d'un credit ouvert, et qui est conservée par une inscription, ne peut nuire aux tiers qui, au moyen de la publicité du régime hypothécaire, peuvent toujours connaître la position de celui avec lequel ils contractent; Attendu que, si l'on considère l'ouverture d'un crédit comme une créance conditionnelle, le creancier peut requérir l'inscription jusqu'à concurrence d'une valeur estimative par lui déclarée dans l'inscription, conformément aux dispositions de l'art. 2132 c. civ.;-Attendu que l'acte du 21 août 1836 ne contient pas de conditions potestatives de la part de l'une ou de l'autre des parties; qu'il faut entendre, en droit, par condition potestative celle qui dépend uniquement de la volonté de celui qui s'oblige, et non celle qui dépend du fait de l'obligé;-Attendu que, dans l'espèce, Allongue s'était obligé à fournir des fonds, et que l'exercice de l'ouverture du crédit dépendait du fait et des besoins de Broussard; - Attendu que, si l'acte précité eût renfermé des conditions potestatives, non-seulement l'hypothèque n'eût pas dû produire d'effet, mais l'acte devrait être annulé pour le tout, suivant les termes de l'art. 1174 du même code; Attendu que, si l'on considère l'obligation comme mix'e, elle doit produire tous ses effets, suivant les principes du droit;— Attendu qu'il résulte de tout ce qui précède, que l'hypothèque Allongne devait prendre rang à partir du 24 août 1836, jour de son inscription, avant l'hypothèque légale de la femme Broussard, qui ne remonte qu'au mois d'avril 1837; Attendu qu'il est prouvé, par les pièces du procès (la correspondance et l'extrait des livres d'Allongue), qu'Allongue est créancier de la faillite Broussard de la somme de 6,021 fr. 60 c., tant en capital qu'intérêts et frais;—Attendu qu'il est juste d'autoriser la partie de Me Peyrot (l'adjudicataire) à retenir le montant de ses frais taxés sur les sommes qu'elle a entre les mains ;Infirme, émendant, dit et ordonne qu'il sera attribué au sieur Allorgue, sur le prix à distribuer et dû par É ie, adjudicataire, la somme de 6,021 fr. 60 c., savoir: en capital, 4,754 fr. 98 c., le surplus en intérêts, frais de retour et frais d'acte, avec intérêts à partir du 25 août 1842, et ce à la date du 24 août 1856, époque de l'inscription requise par ledit sieur Allongue au bureau des hypothèques de Jonzac.

Du 9 janv. 1844.-C. de Poitiers, 2o cb.-MM. Barbault--Lamothe, pr.Flandin, 1er av. gén, c. conf.-Bigeu et Abel Pervinquière, av.

(2) Espece: (Félemez C. Bonifay.) 5 mars 1841, jugement du tribunal civil de Marseille, ainsi conçu : — « Attendu, en droit, que l'hypothèque, stipulée pour sûreté d'un crédit ouvert, prend rang, du jour de son inscription, pour toutes les sommes fournies en vertu de ce crédit, et même pour celles qui n'ont été fourries que postérieurement

pareillement, l'hypothèque, stipulée pour sûreté d'un crédit ouvert, s'applique aux sommes dues au créditeur, antérieurement à l'ouverture du crédit, et qui ont éte comprises, par l'effet d'nne novation, dans le montant de ce crédit; alors même que le crédit ouvert serait limité à ces sommes (Nimes, 3 août 1854, rapp. avec Req. 15 août 1855, aff, Grasset, D. P. 56. 1. 165). 1324. Reste la troisième question que nous avons posée, celle de savoir si la réalisation du prêt ou du crédit doit être prouvée par des actes authentiques? Merlin avait embrassé l'affirmative, dans sa 2o édit. des Quest. de droit, vo Hypoth., § 3; il nous apprend qu'il y avait été déterminé par le passage suivant de Raviot sur Perrier (quest. 90, no 31): « Le mandant et le mandataire avaient promis, celui-ci l'exécution du mandat, celui-là l'indemnité ou d'autres conditions Je croirais que, pour lors, le mandataire aurait hypothèque du jour de la procuration; mais je n'admettrais cette hypotheque que pour les actes de la gestion qui seraient publics, et dont la date serait certaine; parce que c'est une maxime, en France, qu'il ne doit pas dépendre de nous de nous faire des hypothèques par des actes sous signature privée; ces actes n'on jamais de date à l'égard des tiers. Il faut que les hypothèques soient avérées; sans quoi nous les rejetons, parce que nous préférons le droit public au droit particulier, et que toutes nos lois portent leur attention à ne point souffrir que la foi publique soit trompée, ni même exposée aux fraudes. » Mais, « en y refléchissant, dit Merlin, cette doctrine m'a paru n'être qu'une erreur, en tant qu'elle exige que les actes de la gestion soient publics, et qu'elle ne se contente pas d'actes sous seing privé dont la date, sans être authentique, ne soit pas douteuse» (Conf. MM. Troplong, t. 2, nos 477 et 508; Flandin, Tr. des hyp., inédit). Nous avions, dans notre première édition, adopté le sentiment de Raviol; mais, sur celte question, comme sur la précedente, la jurisprudence s'est prononcée pour la doctrine de Merlin, et avec une tele unanimité, que nous ne saurions plus, sans risque d'égarer le lecteur,

aux inscriptions prises par d'autres créanciers ; qu'il y a, dès le jour même du contrat, obligation réciproque; obligation de la part de celui qui ouvre le crédit, de aire les avances promises; de la part du crédité, de restituer les sommes qu'il prendra en vertu du crédit; que, si cette obligation est conditionnelle, elle n'en est pas moins une obligation à laquelle, aux termes de l'art. 2152 c. civ., peut se rattacher une hypotheque; Attendu que si, d'un côté, la consition accomplie a un effet rétroactif au our auquel l'engagement a été contracté, et si, d'un autre côté, la loi permet l'inscription d'hypothèque pour une créance conditionnelle, on doit induire que cette hypothèque, prise en vertu du crédit ouvert, prend rang du jour de son inscription, et non du jour de la réalisation du crédit, et prime, en consequence, les hypothèques inscrites intermédiairement entre le jour du contrat portant ouverture du crédit et hypothèque, et celui où le crédit a pu se réaliser; Attendu qu'il n'y a aucun préjudice des droits des tiers, puisque, par l'inscription, les créanciers sont suffisamment aver is que, si la condition s'accomplit, c'est-à-dire si le crédit se réalise, l'hypothèque prendra rang du jour de son inscription; que les tiers inscrits posterieurement ont le droit de demander la preuve de la realisation du crédit; - Et, sur la nature des preuves: Attendu que, si la loi exige l'authenticité dans le titre constitutif de l'hypothèque, elle ne l'exige, ni pour étabir la créance, ni pour établir l'usage du crédit; que, pour les payements faits en vertu du crédit, il suffit, entre négociants surtout, de les justifier par des lettres missives, registres ou autres actes de ce genre; Attendu, en fait, que, par acte du 4 juill. 1838, 1. dame Felemez a ouvert, au profit du sieur Froment, un credit pour la somme de 10, 00 fr., pour laquelle

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somme Froment s'entendra ultérieurement avec la dume Felemez sur l'emploi d'icelle; Que, pour garantie de cette créance, Froment a accordé une bypothèque pour laquelle une inscription a été prise, le 5 juill. 1838; Que, par sa 1 ttre du 29 juin 1858, Froment s'était reconnu débiteur de la dame Felemez de 19,566 fr. 65 c.; Attendu que, par sa lettre du 10 juillet, et en exécution de la clause insérée dans l'acte, que les parties s'entendraient ultérieurement sur l'emploi de la somme ouverte en credit, la dame Felemez consent un nouveau délai de six mois, en faveur de Froment, pour payer ces 19,366 fr. 65 c., à la condition que le crédit ouvert le 4 juillet s'appliquera à cette créance, et sera considéré comme épuisé du jour de l'acte; Que, par sa lettre en réponse, du 11 juillet, Froment reconnaît que c'e'ait eur intention primitive, et ajoute qu'il reste convenu que le crédit ouvert est épuisé par les avances antérieures, sous la concession du nouveau délai de six mois; Attendu que ces lettres prouvent suffisamment l'usage du crédit par Froment; que, dès lors, la condition s est accomplie ; que l'hypothèque, des lors, doit se reporter au jour de l'inscription, c'est-à-dire au 5 juill. 1838;

persister dans notre premier sentiment (Douai, 17 déc. 1833; Aix, 29 mai 1841; Poitiers, 9 janv. 1844; Gand, 29 juill. 1848, cités au numéro précédent).-V. aussi, comme analogie, suprà,

n° 909.

1325. Quelle est l'étendue de l'hypothèque stipulée par un banquier pour sûreté du crédit qu'il ouvre à son correspondant? Doit-elle comprendre, avec le solde du compte courant, les intérêts, au taux du commerce, et les droits de commission autorisés par l'usage? L'affirmative a été jugée, et avec raison; car ces intérêts, ces droits de commission, sont des accessoires de la creance principale, et entrent, comme éléments, dans le règlement du compte courant. Il faut s'entendre pourtant comme la créance résultant d'une ouverture de crédit est une créance éventuelle, l'évaluation doit en être faite, en capital et accessoires, conformément à l'art. 2148, dans l'inscription, et c'est cette évaluation qui fixe les droits du créancier, quels que soient les événements ultérieurs; en sorte que, si le solde du compte courant, par l'accumulation des intérêts et des droits de commission, venait à s'élever davantage, ce serait tant pis pour le créancier, qui ne pourrait, à la collocation, toucher au delà de la somme pour laquelle il est inserit, sauf l'application de l'art. 2151 pour le montant des intérêts conservés sans inscription (V. infrà, ch. 4, sect. 4, art. 4). — Jugé ainsi que l'hypothèque, consentie pour garantie d'un crédit ouvert, s'étend à toutes les négociations qui sont la suite de ce crédit jusqu'au compte définitif, et qu'elle comprend, outre le capital, les intérêts, au taux du commerce, et les droits de commission tels qu'ils sont autorisés par l'usage; mais qu'il en est autrement des sommes qui sont le résultat de renouvellements trimestriels opérés après la fixation du solde du compte, et dans lesquelles on a fait entrer dé nouveaux droits de commission et des intérêts d'intérêts qui ne pouvaient être capitalisés que par une demande judiciaire (Bourges, 5 juin 1859) (1).

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1326. On sait que l'usage, parmi les banquiers, est d'arrê

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Que Bonifay n'a pris inscription que le 6 juillet, et ne saurait être préféré ; Qu'il importe peu aux tiers que les contractants aient appliqué le crédit, ouvert le 6 juill. 1858, à des avances déjà faites, au our de l'acte, à une det e antérieure ; qu'il y a toujours là application et usage du crédit; que le seul intérêt des tiers, leur droit unique, est d'exiger la preuve que le crédité est effectivement devenu débiteur par l'usage du crédit; qu'en fait, Froment est débiteur d'une somme bien supérieure à celle pour laquelle le crédit était ouvert; que les parties n'ont fait que réaliser la clause du contrat, qui les autorisait à s'entendre ultérieurement sur l'emploi de la somme formant le crédit ouvert;Par ces motifs, réformant l'état de collocation provisoire, range et colloque la dame Felemez au rang de son inscription prise, le 5 juill. 1858, pour la somme principale de 10,000 fr. résultant de l'acte de crédit ouvert le 4 juill. 1858. » Appel. Arrêt.

LA COUR; Adoptant les motifs des premiers juges, confirme, etc. Du 29 mai 1841.-C. d'Aix, 1re ch.-M. Pataille, 1er pr. (1) (Roger C. hérit. Martin et Galias.)- LA COUR Considérant que rien n'établit que l'acte du 24 juillet ait été le resultat d'un concert frauduleux entre Roger et Gallas; Que la cause en est, il est vrai, simulee, mais que l'obligation n'en est pas moins valable, s'il est démontré qu'elle a une cause réelle et licite; or, il résulte formellement des lettres de Roger et de toute sa correspondance avec Gallas que cet acte avait pour objet de garantir hypothécairement à Roger le payement des valeurs, quelles qu'elies fussent, que Gallas, avec le uel il était en cours de négociations, pourrait lui devoir, et à quelque titre que ce fût; Qu'une telle obligation n'est certainement ni prohibée par la loi, ni contraire aux bonnes mœurs, ni à l'ordre public; qu'elle est favorable aux transactions, et que, par la publicité de l'inscription qui lui donne son efficacité, elle ne peut induire les tiers en erreur; - Considerant que le but évident de l'obligation de crédit du 24 juillet etait de garantir toutes les négociations entre Roger et Gallas, soit antérieures, soit postérieures à cet acte; ce qui comprend et le mouvement des capitaux, et le service des intérêts, au taux du commer e, et les droits de commission, dans les circonstances où les usages du commerce, conformes à l'équité d'ailleurs, peuvent les autoriser; Que ce but ressort, et de la nature même de l'obligation, et de l'intention manifestée des parties; -Que, sous ce rapport, les premiers juges, lorsqu'ils reconnaissaient que l'acte du 24 juillet était une obligation de credit, ne devaient pas exclure de sa compréhension les droits de commission et les intérêts, au taux du commerce; - Qu'une pareille restriction ne serait fondée qu'autant qu'il se fût agi d'un simple pret civil, tel que l'acte apparaissait d'abord; mais qu'il n'est pas possible de lui conférer confusément deux caractères, et de ne pas mettre en harmonie les conséquences avec le

améliorée, l'hypothèque devrait obtenir tout son effet, sans qu'il fût permis aux intéressés de rechercher si, depuis le terme ex

eu lieu de fait, présentent, à un moment donné, le crédité comme libéré, ni de prétendre que cette circonstance est suffisante pour faire réputer éteinte la créance que l'hypothèque était destinée à garantir (Paris, arrêt précité du 21 déc. 1852). — V. encore vo Compte courant, nos 50 et suiv.

ter le compte courant tous les trois ou six mois, et de porter à nouveau le solde de ces règlements partiels dans lesquels de nouveaux droits de commission sont perçus, et les interêts capita-piré, les fluctuations du compte courant, dont la prorogation à lisés pour produire eux-mêmes des intérêts. Et la jurisprudence à consacré cet usage, en décidant que l'art. 1154 c. nap., qui proscrit l'anatocisme, n'est point applicable aux matières commerciales (V. vo Compte courant, nos 98 et s.). Il n'y a done aucune objection à élever contre cette manière de procéder, quoique aggravant la position du débiteur, tant qu'on se trouve dans les limites de la durée du crédit et que les négociations continuent; mais l'arrêt qui précède ajugé, et nous approuvons cette décision, qu'une fois le compte courant définitivement arrêté, ces renouvellements trimestriels ou semestriels, sans opérations de banque nouvelles, et dans l'unique but d'accumuler les droits de commission et d'opérer des capitálisations d'intérêts devaient être rejetés, le créancier n'ayant droit qu'aux intérêts légaux du solde qui constitue sa créanec, et ayant à s'imputer de n'avoir pas poursuivi le renouvellement de celle-ci par les voies de droit, et de n'avoir pas formé une demande spéciale pour la capitalisation des intérêts, dans les termes de l'art. 1154 (Bourges, arrêt précité du 5 juin 1859).—Jugé de même 1° que l'hypothèque, consentie pour garantir, jusqu'à concurrence d'une somme determinée, le solde éventuel d'un crédit par compte courant, dont la durée était fixée, et qui devait être balancé et arrête, à l'expiration du temps convenu, ne s'applique qu'à ce qui pouvait être dù, à cette époque, par celui au profit duquel le crédit a été ouvert, et non point aux sommes dont it a pu se trouver débiteur postérieurement, bien que le compte courant ait continué, du consentement des parties, et jusqu'au décès de l'une d'elles, sans règlement à l'époque fixée pour la cessation du crédit (Cass. 22 mars 1852, aff. De la Planche, D. P. 52. 1. 86, et, sur renvoi, Paris, 21 dée. 1852, D. P. 53. 2. 81);-2° Que, lorsque la durée d'un crédit par compte courant a été déterminée, et le solde éventuel garanti par une hypothèque, les parties sont bien fibres, assurément, de proroger ce compte courant; et, dans ce cas, it continue de produire entre elles tous ses effets, de telle sorte qu'il n'y a à considérer, en ce qui les regarde, que la cessation effective du compte et le solde definitif; mais qu il en est autrement, par rapport aux tiers et aux effets de l'hypothèque, laquellë në peut être prorogée que de la mênie manière qu'elle a été établie et rendue publique (mêmes arrêts). L'hypotheque, en eflet, n'a de valeur, entre les créanciers, que jusqu'à concurrence de la sommié pour laquelle le créancier est inserit; là était, pour les tiers, la limite où devait se trouver fixée l'étendue de la créance, et conséquemment l'importance de l'hypothèque qui la garantissait.

1327. Mais si, à l'époque du règlement définitif, le solde du compte courant se trouvait être inférieur à celui que présentait la situation respective des parties au terme où, d'après la convention, le compte devait être arrêté et balancé, comme la situation du débiteur s'en trouverait, non pas aggravée, mais

principe reconnu; - Que, l'inscription ayant été prise le 25 juill. 1828,
elle garantit toutes les opérations qui ont eu lieu de cette époque jus-
qu'au compte définitif du 22 avr. 1829; Qu'en vain les contestants
opposent qu'elle ne peut sortir effet que pour les valeurs remises à Gal-
las antérieurement à leurs propres inscriptions; mais que Roger était
la-même créancier antérieurement au 24 juil.et; - Qu'il n'a cessé de
l'être; Que les renouvellements de ses effets commerciaux ont consti-
tué la créance comme la dette de Gailas, sans en changer la nature ni
le caractère; - Qu'au surplus, et d'après l'opération des experts, on
reconnait qu'à l'époque des inscriptions prises par les tiers, Roger était
créancier de plus de 100,000 fr.;- Qu'on allègue en vain qu'il y a eu
novation; mais que la novation ne se présume pas; - Qu'ici l'intérêt
même de Roger la rendrait improbable, et qu'en fait, rien ne l'établit;
-Qu'on ne peut, davantage, excepter de la garantie les intérêts et les
droits de commission, qui sont l'accessoire des va eurs principales, et
pour lesquels, comme pour celles-ci, l'hypothèque de 100,000 fr. avait
été stipulée; - Considerant qu'il résuite du rapport des experts que,
le 22 avril 1829, la créance de Royer s'élevait à 49,193 fr. 90 c.;
Que, jusqu'à cette époque, et à partir de l'acte du 21 juill. 1824, une
succession non interrompue de negociations a eu lieu entre Roger et
Gallas;-Que Roger avai certainement droit aux intérêts et aux droits
de commission pour les effets que Gallas lui remettait, et qui n'étaient
pas payables à Nevers; Qu'il était également fondé à répéter ces
droits de commission, dont il tenait compte à son banquier de Paris,

1328. Il a, d'ailleurs, été jugé: 1o que, lorsqu'une hypothèque a été consentie comme garantie d'un crédit ouvert, le tiers porteur des billets créés pour l'exercice de ce crédit ne peut, de son chef, réclamer le bénéfice de cette hypothèque ; qu'il peut seulement, comme exerçant les droits du banquier créditeur, demander à être colloqué jusqu'à concurrence de la somme dont ce dernier se trouve être créancier : - «La cour...; en ce qui touche les demandes de Salleron et cons. : considérant que l'hypothèque consentie par les époux Maillefert à Garnier-Pérille, par l'acte notarié du 14 mars 1829, n'était attachée qu'à la créance qui résulterait, en faveur de ce dernier, de son compte courant avec Maillefert, et non aux billets de Maillefert, transmis par GarnierPérille à des tiers par voie d'endossement; qu'ainsi Salleron et cons. n'ont, de leur chef, comme tiers porteurs des billets dont s'agit, aucun droit hypothécaire...; confirme. » (Paris, 25 juin 1836, M. Simonneau, f. f. de pr., aff. Royer et Salleron C. Drévan); 2o Que l'hypothèque, conférée pour garantie d'un crédit ouvert, s'applique au résultat final de l'opération du crédit, mais non à chaque engagement isolé souscrit par suite de l'ouverture de ce crédit; qu'ainsi les porteurs d'effets tirés par le crédité sur le créditeur, et endossés par ce dernier, n'ont contre celui-ci que l'action personnelle résultant de cet endossement, et ne sauraient, comme exerçant les droits de leur débiteur, profiter de l'action hypothécaire à l'encontre d'un cessionnaire auquel le créditeur a transporté tous ses droits contre le crédité, et qui n'a contracté aucune obligation envers ces tiers porteurs; que du moins l'arrêt, qui a tiré ces déductions des faits et actes soumis à son appréciation, ne contient aucune violation de la loi (Req. 12 janv. 1837, aff. Roulland, V. Vente [transport]); 3° Que l'étendue et les effets d'une hypothèque ne peuvent pas être réglés d'après les conventions renfermées dans un acte sous seing privé, qu'ainsi, en cas d'ouverture d'un crédit par acte privé, jusqu'à concurrence d'une somme déterminée, garantie, pour une partie, par un nantissement de valeurs mobilières, et, pour l'autre, par la promesse d'une hypothèque, cette hypothèque n'est applicable qu'au compte courant spécial, à la somme mentionnée dans l'acte public où elle a été constituée, et non au compte courant établi sur l'ensemble du crédit (Cass. 1er déc. 1852, aff. synd. Tesnières, D. P. 54. 1. 275).

ART. 4. Du supplément d'hypothèque.

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1329. L'hypothèque est presque toujours la raison déterlorsqu'il se chargeait, à la demande de Gallas, d'acquitter des effets que celui-ci n'était pas en mesure de solder ;-Qu'il est naturel et juste que ces valeurs accessoires entrent, comme éléments, dans la constitution de la créance définitive de Roger...; Mais qu'à partir de cette époque, suivant les experts, Roger n'a plus fait d'opérations de banque avec Gallas; Que, cependant, il se prétend aujourd'hui définitivement créancier d'une somme bien plus élevée, et qui n'est que le résultat de renouvellements opérés tous les trois mois, avec les intérêts et droits de commission de la somme primitive de 49,193 fr. 90 c.; mais que ce mode de négociation, réprouvé par la loi, ne saurait être accueili par la cour; Que réglé créancier, au 22 avril 1829, de la somme susénoncée, c'était à lui à en poursuivre le renouvellement par les voies de droit; Que, ne l'ayant pas fait, et n'ayant non plus, par aucune demande spéciale, obtenu la capitalisation des intérêts, il n'a droit, sur le capital ci-dessus reconnu, qu'aux intérêts courants de 6 pour 100; Sans s'arrêter aux exceptions opposées par les intimés, déclare bon et valable, comme obligation de crédit, l'acte du 21 juill 1824; dit qu'il aura pour effet de garantir, par l'inscription hypothécaire qui en a été la suite, et à la date de cette inscription, le résultat des operations commerciales intervenues entre Gallas et Roger; Fixe la créance de Roger, au 22 avril 1829, à 49,193 fr. 90 c.; dit qu'à partir de ce jour, elle portera intérêt à raison de 6 pour 100, sans que lesdits intérêts puissent se cumuler, à défaut de demande à cet égard, etc.

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Du 5 juin 1839.-C. de Bourges, ch. civ.-M. Beaudoin, pr.

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