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après sa majorité, au profit d'un tiers, dans son hypothèque légale, emportant, à l'égard de ce dernier, l'abandon implicite de la créance à laquelle l'hypothèque est attachée, le créancier subrogé, qui veut profiter de l'utilité de cette hypothèque, ne peut être écarté de la distribution du prix de l'immeuble grevé, sur le motif que la subrogation ne porte pas sur la créance, mais seulement sur l'hypothèque, qui n'en est que l'accessoire, et n'a pu, à ce titre, être cédée valablement (même arrêt).

951. Pour procéder méthodiquement dans cette matière un peu abstruse, nous allons nous occuper: 1o de la capacité requise pour subroger; 2o de la subrogation expresse et de la subrogation lacile; 3° des formes; et 4° des effets de la subrogation. Nous avertissons qu'il ne s'agit ici, comme notre rubrique l'indique, que de la subrogation à l'hypothèque légale de la femme; mais une partie des règles que nous allons exposer trouveraient également leur application au cas de subrogation d'un créancier, par un autre créancier, à l'hypothèque de ce dernier. Nous aurons occasion de rappeler ces règles, à propos de plusieurs questions analogues, dont nous renvoyons l'examen sous le ch. 7, où nous traitons des effets de l'hypothèque entre les créanciers, c'est-à-dire de la collocation.

§ 1. De la capacité requise pour subroger.

952. La femme commune en biens a toute capacité pour s'obliger (1431): il en résulte qu'elle peut subroger un tiers, par exemple, le créancier envers qui elle s'est obligée, dans l'effet de son hypothèque légale : « Considérant, dit la cour de Paris, que, sous le régime de la communauté, la femme peut, avec l'autorisation de son mari, aliéner sa dot et ses reprises, qui ne sont que des créances contre son mari; qu'elle peut, par conséquent, céder et transporter son hypothèque légale affectée à ces créances, faire des subrogations et accorder antériorité sur elle à ceux des créanciers qu'elle subroge; que ces subrogations peuvent s'allier avec la bonne foi, et que le créancier qui n'a point obtenu de subrogation, doit s'imputer de ne l'avoir point exigée » (Paris, 15 mai 1816, aff. Porlier C. Portefin et autres). Dans l'espèce, on contestait que les créanciers subrogés à l'hypothèque légale de la femme pussent obtenir un droit de préférence aux autres créanciers non subrogés. Donner aux créanciers subrogés, disaiton, le droit de primer ceux qui ne le sont pas, c'est implicitement déclarer le montant d'une collocation susceptible d'hypothèque, contrairement à l'art. 778 c. proc., aux termes duquel le montant de la collocation du débiteur doit être distribué, comme chose mobilière, entre tous les créanciers inscrits ou opposants avant la clôture de l'ordre. Mais il était facile de répondre, et l'on répondait que le créancier hypothécaire, qui en subroge un autre à ses droits, n'hypothèque point, par là, le montant de sa collocation; qu'il ne fait que céder à son cocréancier le droit qu'il a d'être payé avant lui. Ce n'est pas là constituer hypothèque sur une chose mobilière. Et quant à l'art. 778, il n'est fait que pour le cas où il n'y a pas de subrogations. C'est, en effet, ce que déclare un autre arrêt: «Considérant que l'art. 778 c. pr., qui autorise les créanciers à prendre inscription pour la conservation des droits de leur débiteur, et qui veut que le montant de la collocation soit distribué entre eux, comme une chose mobilière, ne peut pas recevoir d'application lorsque, comme dans l'espèce, le créancier originaire a consenti des subrogations par lesquelles il s'est dessaisi des droits résultant de sa créance, et a ainsi conféré aux créanciers subrogés le tions des art. 669 et 763 c. pr., spécialement relatifs aux formes particulières des ordres et distributions; Au fond : Considérant que la somme en litige provient d'une vente d'immeubles faite par les époux Souhet à Perrot-des-Gachons; Considérant que, par acte sous seing privé du 28 août 1830, enregistré à Saint-Gauthier le 1er oct. suivant, Pasquier, créancier des époux Souhet d'un reliquat de compte de tutelle, liquidé, par acte authentique, à la somme de 7,018 fr. 48 cent., et ayant hypothèque légale sur les biens des sieur et dame Souhet, a subrogé Tardif de Pommeroux en son lieu et place, jusqu'à concurrence de 1,566 fr. 35 cent., et aux intérêts, à dater dudit jour 28 août; Considérant que, si Pasquier était intervenu pour revendiquer la somme saisie, il aurait eu un droit de préférence incontestable sur la veuve et les héritiers Chamblant; -Que, des lors, Pommeroux, exerçant les droits de Pasquier, par suite de la subrogation susdatée, doit être pré

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droit de se faire colloquer directement jusqu'à concurrence des sommes pour lesquelles les subrogations ont été consenties à leur profit;- Infirme » (Paris, 12 déc. 1817, aff. Gaillard et Belin C. Barbon; Conf. Paris, 29 juin 1812, aff. créanc. Hubert C. femme Henry; 15 janv. 1815, aff. Fayard C. créanc. Kleff; 26 janv. 1819, aff. Dauchez, Hémard et cons. C. de Saint-Quentin; Nancy, 24 janv. 1825, aff. Defieune C. créanc. Delalance, infrà, no 989; Req. 2 avril 1829, aff. Lamoignon, eod.; Rej. 24 janv. 1858, aff. Syndicat des Recev. gén., eod.; MM. Troplong, l. 2, no 602; Flandin, Tr. des hyp., inédit).

953. Au contraire, la femme mariée sous le régime dotal ne peut pas consentir de subrogation à son hypothèque, en tant du moins que cette subrogation compromettrait le recouvrement de sa dot; car toute aliénation, directe ou indirecte, de la dot, sous ce régime, est prohibée (V.vo Contr. de mar., nos 3455 et suiv.), 954. Mais la même décision devrait-elle être adoptée, si la subrogation consentie par la femme ne compromettait que sa dot mobilière? La solution de cette question nous paraît dépendre de celle de savoir si le principe d'inaliénabilité de la dot, sous le régime dotal, s'applique à la dot mobilière comme à la dot immobilière? Nous avons traité cette dernière question, fort controversée en doctrine et en jurisprudence, avec tous les développements qu'elle comporte, vo Contr. de mar., nos 3424 et suiv,— Jugé, ainsi, que la femme mariée sous le régime dotal ne pouvant aliéner sa dot, même mobilière, ne peut la compromettre par une subrogation d'hypothèque consentie au profit d'un créancier de son mari (Req. 26 mai 1336, aff. Leplaideur-Sigy C. femme Marion; vo Contr. de mar, no 3455. Voy., dans le même sens, les arrêts cités sous le même numéro et sous les n's 3509 et suiv. Adde, Rej. 12 août 1846, aff. hérit. Lasserre C. Barada, D. P. 46. 1. 296. Contrà, Lyon, 16 juill. 1840, aff. Quiblier C. femme Grandin; trib. civ. de Bruxelles, 5 juin 1846, aff. RicheSoyez C. Laurent, D. P. 46. 3. 187).

M. Troplong, quoique partisan de l'aliénabilité de la dot mobilière, admet cependant que la femme mariée sous le régime dotal ne puisse renoncer, au profit d'un tiers, au bénéfice de son hypothèque légale, toutes les fois que sa dot peut en éprouver du préjudice. La raison qu'il en donne (du Contrat de mariage, no 5265), c'est que l'hypothèque est un droit immobilier, jus in re, un démembrement de la propriété qui, dès lors, est inaliénable comme l'immeuble même. Mais cette raison ne nous parait rien moins que satisfaisante; car l'hypothèque, accessoire de la créance, participe, comme nous l'avons dit, suprà, no 730, forcément de sa nature; et le créancier, qui peut céder la créance ou en faire remise, doit avoir le même pouvoir en ce qui concerne l'hypothèque, qui n'en est que l'accessoire (Conf. Tessier, Quest, sur la dot, n° 111). M. Troplong lui-même, au reste, a reconnu souvent que l'hypothèque attachée à une créance n'en change pas la nature mobilière, et c'est de ce principe qu'il part pour décider que l'art. 1449 c. nap., permettant à la femme séparée de biens de disposer de son mobilier et de l'aliéner, elle peut donner mainlevée des inscriptions qui lui servent de garantie (Des hyp., t. 3, n° 738 bis). M. Troplong, à la vérité, semble distinguer entre l'inscription et le droit d'hypothèque qui peut lui survivre et n'être pas compromis par la radiation; mais en entrant même, avec l'auteur, dans cet ordre d'idées, la mainlevée, consentie par la femme, au profit d'un tiers, de son inscription, n'en serait pas moins une aliénation partielle de l'hypothèque et qui réfléchirait sur la dot. Quant à nous, qui admettons la doctrine de l'inaliénabilité de la dot mobilière comme féré aux saisissants jusqu'à concurrence du montant de la subrogation; - Qu'on objecte vainement que Pasquier n'a pas pu céder valablement l'avantage résultant de son hypothèque légale ; Que l'hypothèque est un droit réel susceptible de toutes les stipulations; que, d'ailleurs, la cession de l'hypothèque emporte, à l'égard des tiers, l'abandon implicite de la créance; Qu'en fait, les termes dont Pasquier s'est servi, dans l'acte du 28 août, contiennent la subrogation la plus étendue ; Que la créance de Pasquier pouvait, sans doute, être contestée, et que Pommeroux était passible de toutes les exceptions opposables à Pasquier; mais qu'aucun moyen susceptible d'atténuer les droits du cédant n'a été justifié, soit en première instance, soit devant la cour; - Ordonne que Perrot payera à Pommeroux 1,566 fr. 55 cent., avec les intérêts, et le surplus aux héritiers Chamblant, etc.

Du 20 juill. 1852.-C. de Bourges, 2e ch.-M. Baudoin, pr.

du fonds dotal, notre opinion sur la question de validité ou d'invalidité de la subrogation d'hypothèque, en tant qu'elle pourrait préjudicier à la dot, ne saurait être douteuse.

955. Il a été jugé, de même, qu'une femme, mariée sous le régime dotal, ne peut renoncer valablement à son hypothèque légale, même au profit de créanciers envers qui elle s'est obligée solidairement avec son mari; qu'en conséquence, et nonobstant cette renonciation, elle conserve le droit de se faire colloquer, préférablement à ces créanciers, dans l'ordre ouvert sur les biens de son mari : 1o pour sa dot; 2o pour ses frais de séparation de biens; 3° pour ses gains de survie, sauf le dépôt de leur valeur (à raison de l'éventualité de cette créance) dans la caisse des dépôts et consignations, pour, les intérêts, profiter aux créanciers, et le capital être remis à qui il appartiendra, lors de la dissolution du mariage (Bordeaux, 9 juill. 1841) (1).

956. Mais la subrogation aurait effet, en ce qui concerne les reprises paraphernales (même arrét), « parce que, dit la cour, la femme Milliac s'étant obligée solidairement, elle n'est fondée à réclamer priorité que pour ce que la loi déclare inaliénable; qu'elle ne peut donc être payée de ses paraphernaux avant les créanciers envers lesquels elle s'est obligée... »

937. Elle obtiendrait également son effet, même en ce qui concerne la dot, si, après le payement du créancier subrogé, il restait au mari assez de biens pour répondre de toutes les créances dotales. C'est avec cette restriction qu'était entendue, dans l'ancien droit, la loi jubemus, 21 C., ad senat. Velleian., qui permettait aux femmes de renoncer à leur hypothèque légale en faveur d'un tiers: nemo dubitat, disait le président Favre (C. lib. 8,

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(1) (Epoux Milliac C. Véron, Lapeyre et autres.)- LA COUR ; tendu, sur la première question, que la femme ne peut, par ses engagements souscrits solidairement avec le mari, porter atteinte au privilege de sa dot, que la loi déclare inaliénable, hors les cas exceptionnels qu'elle a limitativement prévus; - Attendu qu'après la séparation de biens obtenue par Marie-Rosalie Cavalié, épouse Milliac, il fut procédé, par acte public du 26 fev. 1825, à la liquidation de ses droits et reprises, pour lesquels elle reçut de son mari, à titre de dation en payement partiel, divers immeubles, notamment deux maisons sises à Bordeaux, rue de Bourgogne, nos 4 et 5; qu'elle a incontestablement droit à être colloquée au premier rang dans l'ordre ouvert sur le prix de ces deux immeubles, qui est seul en ce moment en distribution, pour tout ce qui lui reste dû de la constitution dotale de 1,000 fr. qui lui fut faite par son contrat de mariage, à la date du 4 frim. an 10 (25 nov. 1801), sauf à fixer le chiffre de ce reliquat, sans qu'on puisse lui opposer l'obligation qu'elle a souscrite, solidairement avec son mari, le 21 juin 1821, au profit de la veuve Chalifour, représentée dans l'ordre par Véron, Lapeyre et autres, ses cessionnaires;

Attendu, sur la deuxième question, que la somme de 453 fr., montant des frais exposés à l'effet d'obtenir la séparation de biens, doit participer au même privilége que celui de la dot elle-même, dont ces frais sont en quelque sorte l'accessoire; que, s'il en était autrement, il pourrait arriver que les précautions que le législateur a prises pour la conservation de la dot seraient inefficaces et illusoires; que c'est par erreur que les intimés ont prétendu que le tribunal de première instance n'avait pas été saisi de ce chef de demande; que Marie Cavalié, épouse Milliac, demandait, par ses conclusions, à être colloquée au rang que lui assuraient la nature et le privilege de ses créances, pour la somme de 403 fr. restant due sur sa dot mobilière, pour le gain de survie et pour toutes les autres sommes énoncées dans son acte de produit; qu'en se référant à cet acte, on y trouve expressément mentionnés les frais de séparation de biens; qu'ainsi il y a seulement, de la part des premiers juges, omission de prononcer sur ce chef;

Attendu, néanmoins, que, s'il ne peut s'élever de difficultés sur le droit, considéré en lui-même, de l'épouse Milliac, il est cependant à remarquer, en ce qui concerne la fixation du solde de sa dot, que le règlement de 1825 lui attribuait, outre une valeur en meubles de 597 fr., la somme de 566 fr. 66 c. à prendre dans les mains du notaire Dubois, sans imputation spéciale; que cette somme doit venir en déduction de la dot; qu'à la vérité, l'acte de liquidation suppose qu'elle devra être déduite sur les reprises paraphernales de l'épouse, qui soutient être en droit de lui maintenir cette destination; mais qu'il n'en saurait être ainsi; que, s'étant obligée solidairement, elle n'est fondée à réclamer priorité que pour ce que la loi déclare inaliénable; qu'elle ne peut être payée de ses paraphernaux avant les créanciers envers lesquels elle s'est obligée; qu'en retranchant cette somme de 566 fr. 66 c. de celle de 856 fr., les deux premiers articles de collocation, pour le reliquat de la dot et les frais de séparation de biens, se trouvent restreints à 289 fr. 34 c.; qu'il reste à examiner si, comme le prétend le tribunal, elle se trouverait payée de cette somme par l'abandon d'un troisième immeuble

tit. 14, def. 3), quin possit mulier, etiam constante matrimonio, pignoris obligationem, sibi in hac aut illá re, sive expressè, sive tacitè quæsitam, ultrò remittere, SI MODÒ ALIA BONA SUPERSINT MARITO EXQUIBUS ILLA INDEMNITATEM CONSEQUI POSSIT (Conf. MM. Troplong, t. 2, nos 596 et suiv.; Flandin, Tr. des hyp. inéd.) 958. La femme qui, en se mariant (antérieurement au code Napoléon), a déclaré se soumettre à la coutume de Paris pour le remploi de ses propres, en quelque lieu qu'ils fussent situés, et qui a, ainsi, reçu de son contrat de mariage, la faculté de s'obliger, ne peut faire valoir, contre les créanciers hypothécaires de son mari, envers lesquels elle s'est personnellement et solidairement obligée, la priorité de son hypothèque légale, à raison de ses biens normands aliénés, nonobstant que cette aliénation fût prohibée par la coutume de Normandie (Req. 22 juill. 1819, aff. de Montchenu, V. Contr. de mar., no 3916-1o).

959. Toutefois, et quoique la femme commune puisse renoncer à son hypothèque légale en faveur d'un créancier de son mari, il est manifeste qu'il faut que cette renonciation, lorsqu'elle n'est pas formellement exprimée, résulte, d'une manière certaine, des actes invoqués pour l'établir. Et, en conséquence, il a été jugé que, lorsque, sur une demande en distraction d'immeubles expropriés sur deux époux, la femme n'a figuré, dans l'instance, que comme partie saisie; que sa présence y était commandée par l'art. 727 c. proc., et qu'elle n'a fait que reconnaitre l'existence de la vente consentie par son mari au profit des demandeurs en distraction, vente à laquelle elle n'avait pris aucune part, on ne peut se prévaloir contre elle du silence qu'elle a gardé, relativement à son droit d'hypothèque sur l'immeuble revendiqué,

(le domaine de Luchey), ou si elle est tenue préalablement de discuter ce domaine, ainsi que le prétendent les cessionnaires de la veuve Chalifour;... de tout quoi il résulte qu'il y a lieu, en reconnaissant que son appel est fondé, de la colloquer au premier rang sur le prix des deux maisons de la rue de Bourgogne, pour la somme de 289 fr. 34 c.;

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Attendu

Attendu, sur la troisième question, que, d'après la jurisprudence du parlement de Guienne, qui est la seule applicable au contrat de mariage de Marie Cavalié, du 4 frim. an 10, la femme ne pouvait, pendant le mariage, ni conjointement, ni séparément, faire aucun acte de nature à nuire soit à sa dot, soit aux conventions matrimoniales; que deux attestations rapportées par Salviat, vo Dot, l'une du 4 déc. 1686, l'autre du 2 juill. 1708, sont explicites sur ce point de doctrine; que l'agencement ou gain de survie est essentiellement une convention matrimoniale, une stipulation réciproque entre époux, et sous la foi de laquelle le mariage a été contracté; que, conséquemment, la dame Milliac avait droit à être colloquée éventuellement, et cela nonobstant toute renonciation à son hypothèque légale, pour les 3,000 fr. de gain de survie, au même rang que pour la dot elle-même; qu'en vertu de cette hypothèque à die contractus, elle doit être préférée, pour l'agencement comme pour la dot, aux créanciers subsequents au mariage; qu'ainsi son appel se trouve encore justifié sur ce chef; -- Attendu, sur la quatrième question, que, d'après la jurisprudence de cet ancien ressort, attestée par Lapeyrère, lettre D, nombre 124, l'agencement devait être mis en mains tierces pour produire des intérêts, pendant la vie du mari, au profit de ses créanciers; que les intimés sollicitent ce mode de conservation de leurs droits comme étant celui qui leur présente, eu égard à la position. particulière de l'épouse Milliac, la garantie la plus rassurante; qu'il convient dès lors d'ordonner, conformément à leurs conclusions subsidiaires, que les 3,000 fr. dont il s'agit seront versés dans la caisse des dépôts et consignations pour être remis à qui il appartiendra, lors du décès de François Milliac; Infirme, et statuant au principal, ordonne que la femme Milliac sera colloquée au premier rang des créanciers hypothécaires, et par préférence à tous autres, sur le prix des deux maisons de la rue de Bourgogne : 1° pour la somme de 289 fr. 34 c. qui lui reste due sur la dot mobilière de 1,000 fr. qui lui fut constituée par son contrat de mariage du 4 frim. an 10, et pour les frais de séparation de biens et liquidation de ses droits et reprises; 20 conditionnellement pour la somme de 3,000 fr., montant de l'agencement ou gain de survie stipulé en sa faveur, aux termes du contrat susrappelé; 3° pour ses frais de production et demande en collocation; Ordonne, en outre, que, pour assurer la représentation de la somme susdite de 3,000 fr., dans le cas où la condition viendrait à ne pas s'accomplir, cette somme sera consignée dans la caisse des dépôts et consignations, pour être remise à qui de droit, au décès de François Milliac, et que, jusqu'à cette époque, les intérêts en seront payés à la veuve Chalifour, ou quoi que ce soit à ses concessionnaires; moyennant ce, dit n'avoir lieu de prononcer sur toutes plus amples conclusions; renvoie les parties devant le juge-commissaire pour être procédé à la clôture définitive de l'ordre, d'après les bases cidessus.

Du 9 juill. 1841.-C. de Bordeaux, 4o ch.-M. Gerbeaud, pr.

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960. Les auteurs reconnaissent deux sortes de subrogation: la subrogation expresse et la subrogation tacite. L'une doit avoir le même effet que l'autre, d'après la règle : eadem est vis taciti ac expressi. Le point est de discerner dans quel cas il peut y avoir subrogation tacite. Et d'abord, résuite-t-elle de la simple obligation solidaire de la femme avec son mari? La question peut se présenter dans deux cas qu'il est nécessaire de préciser, pour éviter toute confusion : le premier, lorsque les époux s'obligent solidairement envers un tiers, mais sans aucune affection hypothécaire de leurs immeubles; le second, lorsque l'engagement solidaire est souscrit au profit d'un créancier qui, par le même contrat, stipule une hypothèque sur les biens du mari.

961. Il nous paraît que le créancier, dans la première hypothèse, ne peut se prétendre subrogé à l'hypothèque légale de la femme, puisqu'il n'a pas même songé à s'assurer pour luimême une hypothèque sur les biens du mari. Tout ce qu'il pourra faire, ce sera de former opposition, conformément à l'art. 778 c. pr., pour se faire colloquer, en sous-ordre, et par contribu

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(1) (Veuve Remacle-Dahattoy C. veuve Gelhay.) LA COUR; Attendu que, s'il n'est pas contesté que la femme puisse renoncer à son hypothèque légale, il faut que cette renonciation, lorsqu'elle n'est pas formellement exprimée, résulte d'une manière certaine, et non douteuse, des actes invoqués pour l'établir; —Attendu que, sans avoir besoin d'examiner si la femme Gelhay a été ou non valablement représentée, lors du jugement qui a prononcé sur la demande en distraction formée par les époux Dubattoy, et en admettant la régu arité de la procédure à cet égard, il est certain que la femme Gelhay ne figurait, dans l'instance, que comme partie saisie; que sa présence était commandée par les dispositions de l'art. 727 c. pr. civ.; qu'en déclarant n'avoir aucun moyen de s'opposer à la distraction demandée, elle n'a fait que reconnaître l'existence de la vente consentie par son mari au profit des époux Duhatloy, vente à laquelle elle n'avait pris aucune part, et dont, par conséquent, on ne pourrait se prévaloir contre elle pour en inférer une renonciation tacite, de sa part, à l'hypothèque égale; qu'elle n'avait rien à dire, ni aucune réserve à faire, concernant son droit d'hypothèque, qui n'était pas contesté, et à raison duquel aucunes conclusions n'avaient été prises; que, par conséquent, ni le jugement qui est intervenu sur la demande en distraction, ni la présence de la femme Gelhay à cette décision, non plus que les conclusions prises en son nom, ne prouvent, sous aucun rapport, qu'il y ait eu, de sa part, renonciation à son hypothèque; qu'on concevrait d'autant moins que les faits ci-dessus rappelés aient pu affranchir de l'hypothèque légale l'immeuble acquis par les époux Duhattoy, et constituer un avantage à leur profit, que c'est le même avoué qui occupait pour les deux parties, circonstance qui démontre qu'il ne s'agissait pas entre elles d'intérêts différents et Confirme. opposes;

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Du 5 janv. 1858 -C. de Nancy, 2e ch.-M. Costé, pr. (2) Espèce : - (Créanc. Dupic C. d'Hautier et cons.). Dans l'espèce, une dame Demereux avait vendu aux sieurs et dame Ligondeix la terre de ce nom, pour le prix de 154,880 fr., dont 44,880 fr. payés comptant; et la femme s'était obligée solidairement avec son mari pour le surplus. Il n'apparaît pas que, dans l'acte, la venderesse eût stipulé, en dehors de son privilége, aucune hypothèque spéciale sur les biens du mari. C'est, néanmoins, de cette obligation sol.daire que la cour de Limoges, par arrêt du 2 juin 1825, a induit qu'il y avait eu de la part de la femme, subrogation de la venderesse dans ses droits d'hypothèque légale sur son mari :-«... Attendu qu'au deuxième rang doit être placée la succession d'Odette Massol pour ses reprises s'élevant à 81,000 fr., à la date de 1760, sur laquelle collocation viendront, de leur chef, les créanciers subrogés hypothécairement par ladite Odette Massol ;- Attendu que la dame Demereux, venderesse de la terre de Ligondeix, peut s'autoriser d'une pareille subrogation; qu'en effet, ledit acte de vente contient l'engagement solidaire de la femme et du mari, pour le payement du prix restant dû;-Que cet engagement solidaire de la femme équipolle à une cession de droits hypothecaires sur son mari;-Qu'au même titre de créancier subrogé à l'hypothèque d'Odette Massol, doit être colloquée, en ses lieu et place, Jeanne Domat, pour les 23,700 fr. destinés au service de sa rente; Attendu que Chardon a droit d'être colloqué sur les reprises d'Odette en vertu de sa subrogation, portée en l'acte du 2 vend an 14;- Attendu que les 25,700 fr. destinés au service de la rente de Jeanne Domat doivent être distribués, par contribution, aux

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tion avec les autres créanciers personnels de la femme, sur le montant de la collocation qu'elle obtiendra. Nous ne pouvons donc donner notre assentiment à un arrêt qui a jugé que la subrogation à l'hypothèque légale de la femme, qui s'oblige solidairement avec son mari dans leur intérêt commun, résulte de la nature même de cet engagement solidaire; - Qu'ainsi, lorsqu'une femme, qui a hypothèque légale pour sa dot sur les biens de son mari, a acquis des immeubles en remploi et s'est engagée solidairement avec son mari au payement de ce qui reste dù sur le prix de la vente, l'arrêt qui décide que cet engagement solidaire équipolle à une cession des droits hypothécaires de la femme sur les biens de son mari et opère une véritable subrogation en faveur du vendeur, ne viole aucune loi (Req. 17 avr. 1827) (2).

M. Troplong, t. 2, no 603, critique aussi très-vivement cet arrêt; et la chambre des requêtes, en invoquant, à l'appui de sa décision, la doctrine des jurisconsultes et la propre jurisprudence de la cour de cassation, confond, avec le cas particulier, celui où, à côté de l'engagement solidaire de la femme, il y a l'affectation hypothécaire des biens du mari: hypothèse dont nous nous occuperons plus bas. Un grand nombre, au reste, d'arrêts de cours impériales ont répudié cette doctrine, et jugé que la simple obligation solidaire de la femme, sans bypothèque sur les biens du mari, n'emportait pas subrogation à l'hypothèque legale (Paris, 2 janv. 1836; Caen, 15 juill. 1840 (3); Paris, 29 juin 1812, aff. créanc. Hubert C. femme Henry; 15 janv. 1815, aff.

créanciers non subrogés; que les syndics Dupic et tous autres pourront produire à cette contribution tous les titres dont ils sont porteurs. >> Pourvoi par les syndics Dupic. Violation des règles sur la subrogation, en ce que l'arrêt a induit une subrogation, au profit de la dame Demereux, à l'hypothèque légale de la veuve de Ligondeix, de l'obligation solidaire contractée par celle-ci avec son mari. En effet, il ne s'agit ici ni de subrogation par cession de droits, ni de subrogation légale autorisée par le droit romain, qui admettait quatre sortes de subrogations, et l'on n'y retrouve pas davantage la subrogation expresse exigée par le droit français. Arrêt.

LA COUR ;-... Sur le troisième moyen, tiré contre la dame Demereux particulièrement, venderesse de la terre de Ligondeix, de ce que, à son égard, il n'y aurait pas eu une subrogation expresse, mais seulement un engagement solidaire de la femme Massoi avec son mari pour le payement de ce qui restait dû sur le prix de la terre; Attendu que la subrogation à l'hypothèque légale de la femme, qui s'oblige solidairement avec le mari, dans leur intérêt commun, résulte de la nature de l'engagement solidaire contracté avec lui; Que telle est, en général, la doctrine des jurisconsultes, consacrée par différents arrêts de la cour; - Qu'il y aurait, en effet, contradiction à ce qu'une obligation personnelle de la femme, qui emporte une renonciation à ses droits sur les biens soumis à son hypothèque légale, fût primée par un créancier qui n'aurait qu'une obligation postérieure, Qu'ainsi, en jugean: qu'un pareil engagement solidaire, de la part de la femme Massol, avec son mari équipolle à une cession de ses droits sur les biens de celui-ci, il n'y a de contravention à aucune loi;- Rejette.

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Du 17 avril 1827.-C. C., ch. req.-MM. Henrion, pr.-Rousseau, rap.Lebeau, av. gén., c. conf.-Mandaroux-Vertamy, av.

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(3) 1re Espece: (Dampon C. Roëttiers-Duplessis.)- Jugement du tribunal de la Seine, ainsi conçu: «Attendu qu'aux termes de l'art. 1250 c. civ., la subrogation doit être expresse, et que ce n'est que par extension que la jurisprudence a admis que le créancier serait subrogé dans les droits de la femme, toutes les fois où ce le-ci paraissant à un acte où le mari hypothéquait ses biens personnels, sa femme s'obligeait solidairement avec lui; que le principe de cette jurisprudence réside dans la présomption bien manifestée par la femme, en consentant à l'aliénation hypothécaire du mari, que le créancier envers qui elle s'engage lui soit préféré; Attendu qu'il n'en peut être de même de l'obligation solidaire purement personnelle, que la femme contracte avec son mari visà-vis d'un tiers; que là, il n'y a, de la part de la femme, ni transport, ni cession, ni subrogation, qui puisse donner sur elle aucun privilége au préjudice de ses autres créanciers; que le jugement qui pourrait survenir contre elle, confirmatif de la créance, en favorisant l'exécution, n'en change pas la nature, et qu'enfin l'hypothèque qui en résulte donne au créancier un droit sur les biens de la femme, si elle en a qui soient susceptibles d'être hypothéqués, mais ne peut donner de privilége sur la créance qu'elle a sur les biens de son mari, créance purement mobilière, et sur laquelle on ne peut avoir de préférence qu'au moyen d'un transport ou d'une cession; Attendu que, si la femme engagée, solidairement avec son mari, ne peut venir exercer des droits sur lui, au préjudice de celui envers qui elle s'est engagée, c'est un droit qui est commun à tous ses créanciers, et que, dès lors, il y a lieu à contribution, si la somme à toucher n'est pas sullisante; Attendu que, dans l'espèce, la

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Fayard C. oréanc. Kleff; Nancy, 24 janv. 1823, aff. Defieune,
infrà, no 989; Orléans, 24 mai 1848, aff. synd. Vidal, D.
P. 48. 2. 185; Paris, 8 avr. 1851 (non 1853), aff. Du-
mont et autres C. Pillas, D. P. 54. 2. 112). Telle est égale-
ment l'opinion du plus grand nombre des auteurs: Grenier, t. 1,
n° 254; Proudhon, de l'Usuf., t. 5, no 2354; MM. Duranton,
t. 12, no 143, et t. 19, no 275; Persil, Rég hyp., art. 2121,
no 20, el art. 2144, no 9; Zachariæ, t. 2, § 238, note 8; Trop-
long, l. 2, no 603; Berlauld, de la Subr. à l'hyp. lég. des fem- |
mes mariées, nos 2 et 51; Flandin, Tr. des hyp., inéd.-Contrà
MM. Mourlon, des Subrog., p. 612; Gauthier, de la Subr. des
pers., nos 578 et suiv.

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que le créancier se trouve vis-à-vis d'autres créanciers qui, comme lui, ont pour obligés la femme et le mari. Alors, en effet, si aucune subrogation ne lui a été consentie, et qu'il soit dans la nécessité de recourir à l'art. 1166, il devra, d'une part, n'être colloqué que concurremment avec ceux qui, également dépourvus de subrogation, excipent aussi de cet article; et, d'autre part, il se trouvera primé par les créanciers envers lesquels la femme, encore maîtresse de son hypothèque, en aurait régulièrement disposé. La subrogation dans l'hypothèque légale de la femme l'investirait, au contraire, d'un droit de préférence sur tous autres créanciers non subrogés ou qui ne l'auraient été qu'après lui. 962. Un jugement de condamnation, obtenu contre la femme et le mari dans le cas dont il vient d'être parlé, n'opérerait pas plus que l'obligation primitive la subrogation du créancier dans l'effet de l'hypothèque légale. « Ce jugement, en effet, dit très-bien l'arrêt précité (Paris, 2 janv. 1836. no 961, 1re espèce), confirmatif de la créance, n'en change pas la nature; et l'hypothèque qui en résulte donne bien au créancier un droit sur les biens de la femme, si elle en a qui soient susceptibles d'être hypothéqués, mais ne peut donner de privilége sur la créance qu'elle a sur les biens de son mari, créance purement mobilière et sur laquelle on ne peut avoir de préférence qu'au moyen d'un transport ou d'une cession » (Conf. Grenier, t. 1, no 254; M. Flandin, Tr. des hyp., inéd.

Ainsi, le créancier, porteur d'un engagement souscrit, sans affectation hypothécaire, par la femme et son mari, ne pouvant se dire subrogé à l'hypothèque légale de celle-ci, demeure simple créancier chirographaire des époux. S'ensuit-il, cependant, que le bénéfice de l'hypothèque légale de la femme soit enlevé d'une manière absolue à ce créancier? Non, et il faut dire, ainsi que cela a été jugé (Orléans, 24 mai 1848, précité; Req. 25 mars 1834, aff. Gombaut, V. yo Contrat de mar., no 1054), que le créancier de la femme a qualité pour se faire colloquer, en sous-ordre, au rang de sa débitrice, comme exerçant ses droits en vertu de l'art. 1166, et que, par conséquent, il doit primer, ainsi que l'aurait fait la femme, les créanciers qui ont le mari seul pour obligé. Placé en présence de ces derniers, le créancier, qui a l'engagement de la femme, jouit donc d'avantages équiva- | lents à ceux que lui aurait procurés la subrogation dans l'hypo-pédient, ou aurait été prononcé, sans opposition de la femme ni thèque légale de sa débitrice, puisque, par l'effet de sa collocation en sous-ordre, il se fait payer avant eux, en vertu de cette hypothèque, de la même manière que s'il y était subrogé. A cet égard, il devient indifférent de rechercher s'il est appelé à recevoir son payement par suite d'une subrogation ou par application du principe général posé dans l'art. 1166 (Conf. Cass. 17 août 1841, aff. Barrière, vo Chose jugée, no 20). Mais il n'est pas toujours sans utilité de distinguer ces deux modes de collocation: il importe notamment de ne pas les confondre, lors

dame Duplessis, colloquée dans l'ordre ouvert sur le sieur Duplessis, n'a jamais prétendu toucher le montant de sa collocation, au préjudice des créanciers envers lesquels elle s'est engagée conjointement avec son mari; que, d'un autre côté, l'obligation par elle contractée vis-à-vis du sicur Dampon était purement personnelle, et qu'elle n'a jamais entendu renoncer, à son égard, à son hypothèque légale sur les biens de son mari; Maintient le reglement provisoire (qui avait colloqué le sieur Dampon, par contribution avec les autres créanciers de la dame Duplessis, sur la collocation de cette dame). » — Appel. Arrêt.

LA COUR ;

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Adoptant les motifs des premiers juges, confirme."

Du 2 janv. 1836.-C. de Paris, 3o ch.

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- Al

2o Espèce : (Léguillon C. créanc. d'Angoville.) Jugement du tribunal de Pont-l'Evêque, en ces termes : -«Attendu que l'obligation prise par la femme, conjointement avec son mari, est, comme celle de celui-ci, déterminée par les stipulations mêmes du contrat; - Attendu que, si ce dernier s'oblige envers un tiers et lui consent hypothèque, que la femme commune intervienne, s'oblige également à la dette, prenne ainsi l'engagement de la payer, on présume qu'elle renonce tacitement à son hypothèque légale en faveur du créancier dont elle reconnaît la qualité, envers lequel, en s'obligeant, elle est censée consentir toute préférence, toute priorité et hypothèque ; Attendu que l'opinion des auteurs et la jurisprudence des arrêts ont consacré cette doctrine comme une conséquence dérivant de la nature de l'obligation solidaire contractée par le mari et la femme soumise au régime de la communauté; Attendu que l'on ne peut étendre la faveur de cette subrogation tacite à l'hypothèque légale de la femme au cas où la créance du prêt, la convention même, n'a pas le caractère d'une créance hypothécaire; tendu, en effet, aux termes de l'art. 1250 c. civ., que la subrogation doit être expresse; que ce n'est que par extension que la jurisprudence a admis que le créancier était tacitement subrogé dans les droits de la femme, toutes les fois que, celle-ci paraissant à un acte où le mari hypothéquerait ses biens personnels, elle s'obligeait solidairement avec lui, le principe de cette jurisprudence résidant dans la présomption manifestée par la femme, en consentant à l'aliénation hypothécaire des biens du mari, que le créancier envers qui elle s'engage lui soit préféré; or, on doit en conclure qu'elle doit être restreinte au cas d'une affectation hypothécaire des biens du mari; Attendu qu'il est évident que cette subrogation tacite à l'hypothèque légale de la femme ne peut dériver de l'obligation solidaire purement personnelle que la femme contracte avec son mari vis-à-vis d'un tiers; que là il n'y a, de la part de la femme, ni transport, ni cession, ni subrogation, qui puisse donner sur elle aucun TOME XXXVII.

963. Une décision semblable doit être adoptée dans le cas même où le jugement de condamnation serait un jugement d'ex

du mari, à la suite d'une comparution volontaire des parties devant le juge de paix, dont elles auraient consenti à proroger la juridiction, conformément à l'art. 7 c. pr. civ. Au moins une pareille décision est dans les attributions souveraines des juges du fond, puisque, la loi n'ayant pas déterminé les caractères auxquelles on doit reconnaître la subrogation, ceux-ci ont pu décider, sans violer aucune loi, que le jugement de condamnation dont il s'agit (le jugement d'expédient) n'en présentait pas les éléments (Req. 27 nov. 1854) (1). L'hypothèque judiciaire,

privilége au préjudice de ses autres créanciers; —Que le jugement qui
intervient contre elle, confirmatif de la créance, en favorisant l'exécu-
tion, n'en change pas la nature, et ne lui imprime pas le caractère de
créance hypothécaire à une époque antérieure à son obtention; qu'enfin
l'hypothèque qui en résulte donne bien au créancier un droit sur les biens
de la femme, si elle en a qui soient susceptibles d'hypothèque, mais ne
peut conférer de subrogation à l'hypothèque légale de la femme, sans le
concours de celle-ci; Attendu que le système contraire tendrait à
ruiner les créanciers de bonne foi, qui auraient en leur faveur une subro-
gation expresse et formelle consentie par la femme, et qui pourraient se
trouver primés par l'effet d'une prétendue subrogation tacite qu'ils n'au-
raient pu prévoir; Attendu que l'arrêt de la cour de cassation du
17 avr. 1827, et qui paraît contraire à cette doctrine, est combattu par
plusieurs arrêts et par l'opinion d'auteurs graves; qu'il n'est pas assez
explicite pour qu'on puisse en induire que, dans l'espèce sur laquelle il
a prononcé, il n'avait été consenti, en faveur du créancier, aucune hypo-
thèque pour sûreté de la dette; Attendu que ces principes sont d'au-
tant plus applicables à l'espèce que la créance réclamée par Léguillon
a pour fondement une lettre de change, acceptée solidairement par les
époux d'Angoville, qui ne contenait ni ne pouvait contenir affectation
hypothécaire en faveur du créancier ;... >> Appel. Arrêt.
LA COUR;
Adoptant les motifs, etc.; Confirme, etc.
Du 15 juill. 1840.-C de Caen, 4o ch.-M. Binard, pr.
(1) Espece: - (Girod C. Dublocard et autres.)- Jugement du tri-
bunal civil d'Arbois, en ces termes : «Considérant, sur la ques-
tion d'hypothèque légale de la femme Girod, demandée par plusieurs
créanciers, que c'est un point sur lequel il ne saurait y avoir de diffi-
cultés, qu'une femme peut, avec l'autorisation de son mari, faire toute
espèce d'actes de la vie civile; qu'elle peut vendre, hypothèquer les im-
meubles, et même faire une cession de l'hypothèque que la loi lui ac-
corde sur les biens de son mari;-Qu'il est également certain qu'il peut
y avoir deux espèces de subrogation: l'une expresse et l'autre tacite, et
que cette dernière a tout autant d'effet que si elle était expresse ;-Qu'il
faut, pour qu'on puisse voir, dans la conduite d'une femme, une subro-
gation tacite, que le contenu de l'acte dont on se prévaut prouve, à n'en
pouvoir douter, que telle a été son intention; que la subrogation con-
sentie par une femme est une véritable aliénation de ses droits; aliéna-
tion qui ne se présume pas facilement, et qui doit résulter, sinon expres-
sément, du moins clairement, des termes dont elle s'est servie; que,
d'après ces principes, il ne saurait y avoir de difficultés sur la subrogation
consentie par la femme Girod en faveur de Mourey, puisqu'elle se trouve

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tion de ce genre, où l'on est forcé de raisonner par analogie, on ne saurait être trop sévère pour admettre la subrogation, et qu'on doit la rejeter toutes les fois que l'on peut supposer à la femme une autre intention... »

964. Le contraire semblerait pourtant résulter d'un arrêt qui décide que le mineur, devenu majeur, qui s'oblige solidairement avec son ancien tuteur, et par un contrat contenant affecta

disait le créancier, doit avoir au moins le même effet que l'hypothèque conventionnelle. Si l'obligation notariée, solidairement souscrite, avec affectation hypothécaire, par la femme et par le mari, emporte virtuellement subrogation du créancier dans l'hypothèque légale de la femme, cette subrogation doit se rencontrer aussi dans tout jugement qui prononce une condamnation solidaire contre les époux. Pour la constitution de l'hypothèque, les jugements ont plus de force que les actes notariés. Le juge-tion hypothécaire sur leurs biens, doit être réputé subroger imment, par cela seul qu'il est jugement, confère une hypothèque générale, embrassant les biens à venir; l'acte notarié ne peut conférer qu'une hypothèque spéciale sur les biens indiqués dans la convention. - Mais le jugement, dont l'arrêt allaqué s'est approprié les motifs, répondait « qu'il y a cette différence remarquable entre les actes notariés et les jugements, que les premiers sont le résultat de la volonté libre des parties, et les seconds la suite forcée des circonstances; ... que, dans une ques

expressément énoncée dans l'acte invoqué par le créancier dans sa production; Que, relativement aux frères Dosmann, l'acte dont ils se prévalent ne contient pas, à la vérité, une subrogation expresse; mais cet acte paraît renfermer tous les caractères d'une subrogation tacite; il résulte effectivement de l'opinion générale des auteurs et de la jurisprudence la plus constante que, lorsque, comme dans l'hypothèse particuliere, un mari et une femme s'obligent solidairement entre eux, affectent simultanément leurs biens à l'hypothèque, il y a, par ce fait seul, subrogation tacite; la femme étant par là même censée consentir à ce que le créancier envers lequel elle s'oblige soit payé, de préférence à elle-même, sur les propres deniers de son mari qui lui servaient de gage; - Qu'enfin la stipulation d'hypothèque simultanée, consentie par la femme en suite de l'obligation solidaire qu'elle a contractée, ne peut guère s'entendre dans un autre sens ;-Considérant, en ce qui concerne Dublocard, que, bien que la stipulation ne soit pas la même, il doit cependant intervenir pareille décision en safaveur. En effet, la femme Girod, én se portant volontairement caution de son mari d'une dette à laquelle ce dernier avait été condamné par un jugement entraînant une hypothèque judiciaire générale sur tous ses biens, et en consentant elle-même une hypotheque conventionnelle, s'est, par là même, et par l'effet d'un consentement purement personnel, volontaire de sa part, et que le créancier de son mari n'avait aucun moyen d'exiger, approprié, pour ainsi dire, la dette de son mari, avec les accessoires dont elle était grevée; et il était inutile que le mari intervint autrement que pour autoriser sa femme, puisque ses biens étaient tous déjà affectés à une hypothèque générale, Il ne pouvait plus, au moyen d'une autre stipulation, augmenter la sûreté de son créancier; qu'en conséquence, il parait certain que Dosmann et Dublocard, tout aussi bien que Mourey, doivent être colloqués comme créanciers subrogés de la femme Girod, en suivant l'ordre de la date de leurs titres;-Considérant, en ce qui concerne la créance de Renaudin, que cette créance résulte d'un jugement rendu par le juge de paix d'ArLois, en suite de prorogation de juridiction; que les mariés Girod ont été solidairement condamnés au payement de la somme réclamée ; que l'on ne saurait d'abord voir dans un jugement de cette nature une subrogation de la femme à son hypothèque légale, parce que, ainsi qu'on l'a dit, la subrogation étant de droit étroit, il faut qu'elle soit clairement démontrée, et que, pour son admission, on voie un acte volontaire de la femme, par lequel elle fait un abandon de ses droits; mais il n'y a rien de volontaire dans la conduite de la femme Girod vis-à-vis de Renaudin, en ce sens que l'on aurait pu forcément arriver contre elle aux mêmes conséquences: en effet, un jugement contradictoire ou par défaut rendu par le tribunal aurait, tout aussi bien que celui dont il s'agit, affecté les immeubles de la femme à l'hypothèque judiciaire générale; elle n'aurait, en aucune manière, pu empêcher l'effet d'un pareil jugement; que de là on doit penser que les parties, en paraissant devant le juge de paix, n'ont eu d'autre intention que de procurer au créancier un titre exécutoire, et, notamment de la part de la femme Girod, celle d'éviter le désagrément qu'a toujours un jugement rendu à l'audience publique, d'éviter aussi les frais d'une procédure par-devant le tribunal et peut-être, par cette complaisance, d'obtenir les délais qui lui ont été accordés; mais on ne saurait voir, dans une telle conduite, l'intention positive de subroger son créancier aux droits de son hypothèque légale; que, d'ailleurs, comme le résultat d'un jugement par défaut serait le même que celui d'un jugement contradictoire, relativement à l'affectation de l'hypothèque, comment pourrait-on voir, dans le silence de la femme, la manifestation de l'intention précise qu'elle aurait eue de subroger son créancier à ses droits? Bien plus, si la femme comparaissant avait soutenu qu'elle ne devait rien, et que ses biens ne sauraient être soumis à l'hypothèque judiciaire, assurément l'effet du jugement de condamnation qui pourrait suivre un tel débat n'en serait pas moins l'affectation de l'hypothèque judiciaire, et, puisque l'on n'argumente, en faveur de la subrogation, que de l'effet du jugement, effet qui évidemment serait le même dans toutes les circonstances, il faudrait, pour être conséquent, voir,

plicitement ce créancier à son hypothèque légale, et que ce principe s'applique au cas où c'est par un arrêt passé en force de chose jugée que l'obligation solidaire a été déclarée souscrite avec affectation hypothécaire, comme à celui où cette affectation résulte formellement de la convention (Req. 16 fév. 1841) (1).

965. Au reste, ce n'est qu'entre les créanciers se prétendant subrogés à l'hypothèque légale de la femme ou du mineur (comme cela avait lieu dans l'espèce précédente), que la question de pré

dans le refus formel de la femme à ce que ses biens soient bypothéqués, un consentement tacite de subrogation à son hypothèque légale, ce que l'on ne saurait admettre; - Qu'il y a cette différence remarquable entre les actes notariés et les jugements, que les premiers sont le résultat de la volonté libre des parties, et les seconds la suite forcée des circonstances;-Que l'on ne saurait se prévaloir du consentement qui abrége les délais et qui proroge la compétence, ce consentement ne pouvant avoir d'autre effet que de håter celui de ce même jugement, mais sans les changer;-Que, dans une question de ce genre, où l'on est forcé de raisonner par analogie, on ne saurait être trop sévère pour admettre la subrogation, et on doit la rejeter toutes les fois que l'on peut supposer à la femme une autre intention; et, dans le doute, on doit dire qu'il n'y a pas de subrogation quand elle n'est pas parfaitement établie ;

» Considérant, en ce qui concerne le jugement obtenu par Girod, qu'à cet égard, pareille décision doit intervenir, par les mèmes raisons qui viennent d'être développées, le consentement des mariés Girod n'ayant été donné dans d'autre intention que de diminuer les frais et d'obtenir des délais de leur créancier ; qu'ainsi c'est le cas, en ce qui concerne Renaudin et Girod, de déclarer qu'il n'y a pas de subrogation, en leur faveur, à l'hypothèque légale de la femme, et d'ordonner qu'ils seront colloqués, à la date de leurs inscriptions, sur les biens de leur débiteur, mais postérieurement aux sieurs Mourey, Dosmann et Dublocard, qui, en qualité de subrogés à l'hypothèque légale de la femme Girod, doivent être colloqués en leur lieu et place;-Par ces motifs, déclaré qu'il y a subrogation suffisante à l'hypothèque légale de la femme au profit des sieurs Mourey, Dosmann et Dublocard, et qu'ils seront colloqués par la femme Girod en son lieu et place, d'après la date de leurs titres, mais avant tous autres qui n'auraient pas cette subrogation; - Rejette la demande en subrogation des sieurs Girod et Renaudin, qui seront colloqués comme simples créanciers hypothécaires, mais après les creanciers subrogés. »>-Appel de Girod.-16 juin 1832, arrêt confirmatif de la cour de Besancon. Pourvoi pour violation des art. 2117, 2123, 215, 2135, no 2, c. civ., et 759 c. pr. -Arrêt.

LA COUR; Attendu qu'il est constant et reconnu par l'arrêt que la femme Girod n'a, par aucune convention expresse ou tacite, consenti la cession ou subrogation des droits attachés à son hypothèque légale envers le demandeur, et que le jugement opposé par le demandeur à la femme Girod ne présente pas les éléments d'une véritable subrogation; -Attendu, d'ailleurs, que les caractères auxquels on doit reconnaître la subrogation n'étant pas déterminés par la loi, leur appréciation est exclusivement dans les attributions des juges du fond; que, dès lors, l'arrêt a pu, sans violer aucune loi, décider que le jugement de condamnation prononcé contre la femme Girod, en raison des billets solidairement souscrits par elle et son mari, n'emportait point avec lui les mêmes effets que les obligations notariées par elle consenties, avec stipulation d'hypothèque, au profit des vendeurs éventuels ;-Rejette.

Du 27 nov. 1934.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Madier de Montjau, rap.-Nicod, av. gén., c. conf.-Dumesnil, av.

(1) (De Barrois C. Pluchart et de Maupassant.)-LA COUR ;-... Sur le troisième moyen, pris de ce que l'arrêt attaqué a violé l'art. 2117 c. civ., en décidant que la souscription d'une obligation purement personnelle contenait forcément subrogation du créancier par le débiteur dans l'hypothèque appartenant à ce dernier sur son codébiteur solidaire:Attendu que, par son arrêt du 14 fév. 1855, rendu entre les Loisel père et fils et de Maupassant, ayant acquis l'autorité de la chose jugée et antérieur à la subrogation faite par Loisel fils en faveur du demandeur en cassation (de Barrois), le 14 nov. 1838, la cour royale avait reconnu et consacré les effets légaux de la convention des parties, laquelle constituait une obligation réelle qui affectait les biens de chacun des codebiteurs, et qu'en statuant que les décisions judiciaires ont au moins la même force que les conventions qui interviennent entre les particuliers, la cour n'a fait que se conformer à la loi ;... — Rejette.

Du 16 fév. 1841.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-De Gaujal, rap.

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