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qu'une rente viagere fait partie intégrante d'une vente, elle jouit, comme le prix principal, du privilége que la loi accorde à tout vendeur d'immeubles (Orléans, 18 juill. 1845, aff, Chevalier D. P. 46. 1. 258).

418. En quoi consiste la créance privilégiée? La loi dit que le vendeur est privilégié pour le payement du prix. Sur quoi il faut remarquer tout d'abord que le prix dont la loi entend parler est celui qui est porté au contrat. Et nous pensons, avec M. Pont, n° 130, que le privilége ne s'étendrait pas aux suppléments ou augmentations de prix résultant de conventions particulières qui ne sont faites ordinairement que pour payer un moindre droit d'enregistremen'.

419. Il a été décidé, cependant, que le vendeur non payé est privilégié sur l'immeuble vendu, non-seulement pour le payement du prix mentionné dans le contrat de vente, mais encore pour le payement du supplément de prix qui, par convention ou décision postérieure, à l'acte de vente, a été reconnu devoir lui être alloué (Bordeaux, 25 avr. 1856) (1).-Mais, comme M. Pont en fatt la remarque loc. cit., l'arrêt ne tire pas à conséquence, ea ce qu'il contient une décision d'espèce. Il s'agissait en effet d'un prix qui avait été déterminé et alloué au vendeur par une sentence arbitrale, laquelle statuait sur des difficultés réelles et sincères qui avaient divisé les parties et seulement sur des conventions secrètes.

420. Le privilége s'étend non-seulement au prix stipulé dans l'acte de vente, mais encore aux intérêts de ce prix. Cela ne peut être douteux puisque les intérêts ne sont que l'accessoire du capital. M. Persil s'était d'abord prononcé en sens contraire. Cependant il a bientôt rétracté cette solution, et il a reconnu que les intérêts sont liés au principal, qu'ils représentent les fruits

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(1) (Gardonne C. Collier.) LA COUR ; · Sur l'appel principal :— Attendu, en fait, qu'en vertu du jugement du 5 vent. an 9, le sieur Gardonne devint adjudicataire du domaine de Baillon dont l'expropriation avait ete poursuivie au préjudice du sicur Bethoneau, son beaufrère, après que celui-ci se fut absenté, pendant un assez long temps, de son domicile;-Attendu que, sur les difficultés élevées à son retour sur la validite du jugement d'adjudication, difficultés prises des dispositions de la loi du 6 brum. an 5, il fut passé entre les deux beaux-frères un compromis, portant nomination d'arbitres arbitrateurs, amiables compositeurs, auxquels ils conferèrent le droit de prononcer sur leurs diérends;-Attendu que la sentence arbitrale, rendue en vertu de ce compromis, constitue le sieur Gardonne débiteur envers le sieur Berthonneau de la somme de 11,250 fr., que la dame Collier déclare réduire à 8,000 fr.; que cette sentence n'a point été attaquée, et que l'expédition produite au procès par la dame Collier a été admise comme authentique par la dame Gardonne; Attendu que la somme de 11,250 fr. susenoncée est, d'après la sentence arbitrale, un reliqua! ou supplément de prix de la vente du domaine de Baillon; - Attendu que la dame Gardonne ne peut prétendre en avoir ignoré l'existence jusqu'au moment de Finstance actuelle, puisqu'il est mention de cette même sentence dans le traité intervenu entre les époux Gardonne, par suite de leur séparation de biens, en date du 5 avril 1826; d'où il suit qu'en acceptant l'abandon du domaine de Baillon (a), elle a connu et accepté les charges qui le grevaient; qu'ainsi elle ne peut maintenant contester à la dame Collier, représentant le sieur Berthonneau, la qualité de créancière privilegiee; Attendu, en droit, que l'art. 2091 c. civ. dispose que le creancier privilégié sur les immeubles doit être préféré aux autres creanciers, même hypothécaires; que l'art. 2105 du code précité place au premier rang des créanciers privilégiés, le vendeur de l'immeuble pour payement du prix :

que

Sur l'appel incident formé par la dame Collier Attendu que les premiers juges, en n'accordant à la dame Collier trois ans d'intérêts pour les sommes capitales par elle réclamées et qu'ils avaient reconnues comme reliquet du prix du domaine de Baillou, out meconnu le principe fondamental en pareille matière, savoir, que les interêts n'étant qu'un accessoire du principal, doivent être régis et fixés par la décision readue au principal; qu'ainsi, il y a lieu de réformer leur sentence sur ce chef;- Sans s'arrêter à l'appel princ pal interjeté par Madeleine Berthonneau, épouse Garonne, du jugement rendu par le tribunal civil de Libourne, le 27 fév. 1855, dit bien jugé, mal appelé; ordonne que ledit jugement sortira son effet en ce qui touche la colloca

Fur l'intelligence de ce passage, il faut dire qu'avant d'en faire la vente à son is, le sieur Gardonne avait abandonné le domaine de Baillon à son épousse, ea papement de ses droits et reprises qu'elle avait réclamés en exécution d'un juement de separation de biens. Mais cette dation ca payement avait elé annulée à la demande de la dame Collier,

produits par l'immeuble et que, par suite, ils doivent être colloqués au même rang que le principal.-V. Persil, art. 2103, § 1,

n° 4.

421. Mais la question a été de savoir si le privilége s'étend à tous les intérêts échus, ou bien s'il n'existe, de même que l'hypothèque, aux termes de l'art. 2151 c. nap. (V. infrà, tit. 3, ch. 4), que pour les intérêts de deux années et de l'année courante, A cet égard, quelques opinions se sont prononcées pour l'applica tion de l'art. 2151. La cour de Nimes notamment a jugé qu'un vendeur n'a pu se faire colloquer par privilége dans la distribution du prix de l'immeuble vendu que pour son capital et trois années d'intérêts, conformément à l'art. 2151 c. nap (Nimes, 12 déc. 1811) (2), et c'est l'avis de plusieurs auteurs.-Y. MM. Grenier, t. 3, p. 359, note 10; Blondeau, Revue de législation, t. 4, p. 568; Rodière, ibid., t. 1, p. 255; Persil, art. 2151,

n° 8.

422. Toutefois la solution contraire a prévalu en jurisprudence et en doctrine. On a pensé, avec raison, que les intérêts d'une créance en forment l'accessoire, et sont de même nature; qu'ils doivent done participer aux mêmes avantages et être régis par les mêmes règles; que si l'art. 2151 s'est écarté du principe, la disposition en est restreinte par son expression même aux intérêts des créances simplement hypothécaires, et qu'elle ne peut dès lors être appliquee aux intérêts du capital dû au vendeur, lequel capital a un rang par privilège lorsque l'acte de vente a été transcrit, et non pas un simple rang par hypothèque.—V. MM. Favard, vo Inscription, sect. 7, no 12; Duranton, t. 16, no 342, et l. 19, no 160 bis ; Zachariæ, t. 2, p. 200 ct note 8; Taulier, 1. 7, p. 175; Troplong, no 219; Pout, no 192; Mourlon, no 156.

tion de la somme capitale de 8,000 fr., à laquelle l'intimée a déclaré réduire sa demande; 2o en ce qui a trait à la collocation de la somme de 56 fr., mise à la charge de Gardonne par la sentence ci-avant mentionnée; statuant sur l'appel incident de l'épouse Collier, et y faisant droit, ordonne qu'elle sera colloquée, également par preférence à l'épouse Gardonne, pour tous les intérêts non prescrits de sa créance, à partir du 25 mai 1808 jusqu'au jour de la dénonciation du contrat de vente en faveur de Gardonne fils.

Du 25 avril 1856.-C. de Bordeaux, 2 ch.-M. de Marbotin, pr. (2) Espèce: - (Fouard.). Fouard vend un immeuble à Margier. Celui-ci ne fait pas transcrire l'acte de vente.-2 et 28 fruct. an 12, deux créanciers bypothécaires de Margier prennent inscription sur l'immeuble. Quelque temps après, Fouard, qui n'avait pas été payé du prix de la vente, prend lui-même inscription pour la conservation de son privilége. Plus tard, et le 20 mars 1808, revente de l'immeuble consentie par Margier à Bouteaud. Ce dernier ayant voulu payer son prix, un ordre s'ouvre dans lequel Fouard, premier vendeur, et le créancier de Margier dont l'inscription était antérieure à celle de Fouard, se disputent la priorité du rang. Fouard demande en outre à être colloqué au premier rang, tant pour le capital du prix de vente que pour la totalité des interêts a dater du jour de la vente. Les créanciers s'y opposent, sur le motif que l'inscription de Fouard ne faisant point une mention spéciale des intérêts, ne pouvait pas conserver au delà de trois années d'intérêts, aux termes de l'art. 2151 c. civ.-Jugement qui adopte en tout point les conclusions du vendeur.- Appel — Arrêt. LA COUR; Considérant que, soit que la première question soit envisagée dans les rapports avec la loi du 14 brum. an 7, soit qu'il faille la décider par les dispositions du code civil, il est certain que le privilége du vendeur a été conservé sur l'immeuble vendu, par l'inscription prise tandis que cet immeuble était encore dans les mains de l'acquéreur immédiat;- Que c'est ce qui résuite en effet des dispositions combinées des art. 1, 2 et 39 de la loi de brum., 2106, 2108 et 2445 c. civ.; Attendu que les inscriptions prises par Fouard, les 49 et 50 flor. an 15, sur le domaine par lui vendu à Margier, ont été prises avant la reventé du domaine par Margier à Bouteaud, et la transcription de ce dernier aete; qu'elles sont d'ailleurs énonciatives de la date et de la nature dụ premier contrat à la date duquel le privilége a dû nécessairement remonter;- Attendu, sur la deuxième question, qu'il ne peut exister de privilége que ceux qui sont établis par la disposition de la loi; — Que l'art. 2108 c. civ. n'attribue au vendeur de privilege que pour ce qui lui reste dû sur le prix de la vente ;--Qu'en portant dans l'allocation prononcée au bénéfice de Fouard les intérêts courus depuis la vente avec le capital, les premiers juges ont créé un privilége, et excédé la mesure fix e par l'art. 2151 c. civ., d'après lequel l'inscription n'assure au créancier inscrit que deux années d'intérêts outre l'annuité courante;Par ces motifs, etc.

Du 12 déc. 1811,-C. de Nimes.

493. Il a été jugé, en ce sens : 1° que le privilége du vendeur, lorsqu'il a été conservé soit par la transcription de la première vente, soit par une inscription prise avant l'expiration de la quinzaine de la transcription de la seconde vente, s'étend au principal

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(1) (Sapey C. Lambilly et Jourdan.) - LA COUR (ap. dél. en ch. du cons.); Vu les art. 2103, 2108 et 2151 c. civ.; - Attendu que les sieurs de Lambilly et Jourdan, n'ayant point acquis de droit sur l'immeuble dont il s'agit, antérieurement à la promulgation du code civil, et s'agissant d'ailleurs de prononcer sur la validité et l'effet de plusieurs inscriptions prises postérieurement à ladite promulgation, les dispositions de ce code devaient seules être consultées et faire la règle pour la décision de l'affaire ; Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles précités dudit code, que le vendeur a, pour le payement du capital et des intérêts du prix de l'immeuble vendu, un seul et même privilége, lequel doit d'autant plus être considéré comme étant de l'essence même du contrat de vente, qu'il est une conséquence nécessaire de la faculté que l'art. 165 du même code accorde au vendeur de faire prononcer la résiliation de la vente, à défaut de payement par l'acquéreur; que la transcription tient lieu d'une inscription au vendeur et lui conserve son privilége; que la disposition de l'art. 2151, qui veut que le créancier inscrit pour un capital produisant intérêt n'ait droit que pour trois années d'intérêts au même rang d'hypothèque que pour son capital, ne peut s'appliquer au privilège du vendeur, dont le rang n'est point fixé par la date de l'inscription ni par la date de la transcription, qui tient lieu d'inscription; qu'il est incontestable que, si le vendeur est déchu de son privilége, lorsqu'il n'a pas pris d'inscription, ou que son acquéreur immédiat n'a pas fait transcrire avant la transcription du tiers acquéreur (ou dans la quinzaine suivante, conformément à l'art. 854 c. pr. civ.), il conserve évidemment ce privilége, à la date du contrat de vente, pour le capital et pour tous les intérêts, si l'inscription, soit qu'il l'ait prise directement, soit qu'elle résulte de la transcription faite par son acquéreur immédiat, a eu lieu dans le délai prescrit par l'art. 834 précité; Attendu enfin, que, dans l'espèce, l'inscription qui était résultée de la transcription a été renouvelée avec l'expiration des dix ans par une autre inscription portant énonciation formelle tant du capital que de tous les intérêts échus jusqu'alors; et que cette nouvelle inscription, par cela même qu'elle a été prise dans le délai prescrit par l'art. 834 c. pr., aurait seule et indépendamment de la transcription qui l'a précédée, conservé, pour le capital et tous les intérêts échus, le privilége du vendeur, avec effet rétroactif, jusqu'au jour du contrat de vente; De tout quoi il suit qu'en jugeant que c'était la loi du 11 brum. an 7 qui devait seule servir de règle, et que, d'après ces dispositions, le sieur Sapey ne pouvait réclamer de privilége que pour deux années d'intérêts, la cour d'appel a d'abord faussement appliqué tant les dispositions de cette loi que l'art. 2151 c. civ., et ensuite formellement violé les art. 2103 et 2108 du même code; Casse.

Du 5 mars 1816.-C. C., sect. civ.-MM. Pajon, pr.-Rupérou, rap.Mourre, pr. gen., c. conf.- Darrieux et Loiseau, av.

Par suite de cette cassation, la cour d'Angers, saisie sur renvoi, a rendu, à la date du 12 juill. 1816, un arrêt qui, tout en décidant implicitement que le privilége de Sapey devait être régi par le code civil, refuse néanmoins de l'étendre à tous les intérêts; attendu, y est-il dit, qu'il n'est question ici que des intérêts du prix d'un contrat de vente d'immeubles, autres que ceux conservés par une première inscription; qu'avant la nouvelle législation, ces intérêts suivaient généralement la nature du principal, et étaient tous colloqués dans l'ordre du privilége ou de l'hypothèque de la créance principale; mais que, depuis le nouveau régime hypothécaire, les intérêts ou arrérages, autres que ceux conservés par la première inscription, étaient assujettis à des inscriptions particulières à prendre, portant hypothèque à compter de leur date; que les raisons proposées par l'appelant sont combattues par le texte et l'esprit de la loi du 11 brum. an 7 et du code civil. En effet, l'objet et Je but du système hypothécaire ont été de rendre toutes les sortes de créances notoires et publiques, afin de faciliter la vente des immeubles, et d'assurer, autant que possible, l'exécution de l'engagement. C'est dans cette vue qu'il a prescrit la formalité de l'inscription de toutes les espèces de créances sur des registres publics à ce destinés, et qu'il a réglé le temps, le lieu, le mode et l'effet de l'inscription; de telle sorte que, d'après ses dispositions, on doit regarder comme un principe incontestable qu'il n'y a plus d'hypothèques sur les immeubles sans inscription, quelle que soit l'hypothèque, simple ou privilégiée, soit qu'il s'agisse du capital ou des intérêts; ainsi, en ce qui concerne particulièrement les priviléges sur les immeubles, il est certain, par l'art. 2106 c. civ., qui est le premier de la section 4, Comment se conservent les priviléges, qu'ils n'ont d'effet que sous la condition de l'inscription; que le privilége du vendeur en particulier se conserve par la transcription du contrat de vente faite par l'acquéreur, laquelle vaut inscription au vendeur, suivant l'art. 2108, ou qu'il peut faire lui-même, ainsi qu'il est dit en cet article, et qu'il résulte de l'art. 2155. La loi suppose donc qu'il est nécessaire que la transcription soit faite par l'acquéreur ou par le vendeur; et, puisque la transcription vaut pour lui inscription, donc il est

et à tous les intérêts échus depuis l'acte de vente, au préjudice de créanciers hypothécaires antérieurement inscrits (Cass. 5 mars 1816, sect. réun. Cass. 1er mai 1817 (1); Req. 16 mars 1820, aff. Grandjacquet, infrà, titre 3; Rej., 9 juill. 1834, aff. Pouplacé par la loi sur la même ligne que les autres privilégiés dénommés aux art. 2109, 2110, 2111, qui sont soumis à l'inscription; donc les dispositions de l'art. 2151, relatives au créancier inscrit, sont communes au vendeur et à tous les créanciers inscrits, privilegiés ou autres; qu'en vain le sieur Sapey a prétendu détourner l'application dudit art. 2151, en disant que « par ces mots, créancier inscrit, l'on ne doit entendre que le créancier simple hypothécaire, et non le vendeur de fonds, à qui, de tout temps, on n'a point disputé le privilége de sa créance, pour capital et intérêts; que, tant qu'il n'est pas payé, il reste propriétaire du fonds, si vrai, qu'il a le droit d'y rentrer en demandant la résolution du contrat; que les intérêts sont de même nature et font partie du prix; qu'enfin, il a été pris une seconde inscription en l'an 1810, qui a eu l'effet de conserver au vendeur son privilége, et pour le capital, et par suite pour les intérêts, tant ceux lors échus que ceux échus postérieurement; » que ces moyens disparaissent devant le droit positif; que si, anciennement, les intérêts, considérés comme accessoires, étaient censés de même nature que le principal, c'était l'effet d'une fiction de droit; car les intérêts ne naissent que successivement; et il n'est pas naturel d'attacher un droit de privilége ou d'hypothèque à une espèce de créance qui n'existe pas encore; que le législateur est toujours le maître de restreindre ou même d'anéantir toute espèce de fiction de droit, s'il juge que ces changements importent à l'utilité publique; que c'est ainsi que, bien qu'avant la nouvelle législation bypothécaire, les intérêts eussent même privilége que le principal, le privilége du vendeur a été restreint à deux années et la courante, et anéanti pour les années postérieures, à l'égard desquelles il n'a été réservé qu'un droit d'hypothèque, à la charge d'inscriptions particulières à prendre à mesure des échéances, et à compter seulement de leur date; que le vendeur du fonds n'est pas plus favorisé que le copartageant pour la somme qui lui est due, le cohéritier pour sa part du prix de la licitation, l'architecte qui a édifié ou reconstruit la maison vendue (art. 2109 et 2110); que ceux-ci sont, comme lui, bailleurs de fonds, et cependant soumis à l'inscription; qu'il n'est pas vrai de dire que le créancier soit propriétaire du fonds, tant qu'il n'est pas payé; qu'il peut seulement le devenir en demandant la résolution du contrat; mais qu'en ce cas, il perd son droit d'hypothèque privilégiée sur le fonds vendu, quant aux intérêts, et que, dans l'espèce dont il s'agit, il serait tenu de rapporter les 23,600 fr. qui lui ont été payés comptant; que d'ailleurs cette action en résolution est réelle, et l'action à fin de collocation en ordre est personnelle et hypothécaire; que ce sont deux actions dont chacune se gouverne par les principes qui lui sont propres. Enfin, la seconde inscription dont argumente Sapey est une inscription renouvelée, dont l'effet n'a été que de lui conserver le droit qui lui était acquis par la première. En tant que la créance nouvellement inscrite excède la première, elle est une inscription particulière aux intérêts, ne portant hypothèque que du jour de sa date, suivant l'art. 2151 précité, laquelle est primée par l'hypothèque de Lambilly, inscrite en l'an 1806, et par les autres antérieures à ladite inscription de l'an 1810; que quand on a dit que, cessant la première inscription, celle acquise au premier vendeur par la transcription du contrat de vente faite par Mahé, le 7 déc. 1810, ou même l'inscription qui n'aurait été prise que dans la quinzaine de cette transcription, suivant l'art. 834 c. pr., conserve à Jouberthon ou Sapey, cessionnaire, son privilége pour toute sa créance, en principal et intérêts, on a fait confusion: cela serait vrai contre Mabé, créancier du prix dudit contrat de vente du 7 déc. 1810, non contre les créanciers inscrits dudit Mahé. Nouveau pourvoi de la part de Sapey. — Arrêt (apr. dél. en ch. du cons.). LA COUR;-Vu les art. 2103, 2108 et 2151 c. civ.; Attendu que, d'après l'art. 2103, le vendeur est créancier privilégié sur l'immeuble vendu, pour le payement du prix, et que, d'après l'art. 2108, il conserve son privilége par la simple transcription de l'acte de vente; que la disposition de ces articles est générale et ne contient aucune exception, et qu'aucun autre article du code n'a établi des dispositions particulières pour la collocation des intérêts qui peuvent être dus au vendeur; que, d'après le droit commun, les intérêts d'une créance en forment un accessoire; qu'ils sont de même nature; qu'ils participent aux mêmes avantages et sont régis par les mêmes règles; que si l'art. 2151 s'est écarté de ce principe, la disposition par laquelle il l'a modifié est restreinte aux intérêts des créances simplement hypothécaires, puisqu'elle porte, en termes exprès, que les intérêts sur lesquels elle statue auront même rang d'hypothèque que les capitaux, et qu'en conséquence il ne peut être permis d'étendre et d'appliquer arbitrairement cette disposition aux intérêts du capital dû au vendeur, puisque ce capital n'a pas un simple rang par hypothèque, mais un rang par privilége, lorsque l'acte de vente a été transcrit; que, dans toutes ces dispositions, le code civil a distingué les créances privilégiées des créances hypothécaires; que, dans le chapitre où se trouve inséré l'art. 2151, et auquel il a été donne un titre qui énonce séparément les priviléges et les hypothèques, le législateur a

lain, Dumont, V. Obligation);—2o Que tant que l'immeuble vendu reste entre les mains de l'acquéreur, le vendeur conserve son privilége, et peut l'exercer, pour le principal et les intérêts échus, sans qu'il soit obligé de prendre une inscription spéciale, ou qu'il soit tenu de renouveler celle que le conservateur a dů prendre d'office pour lui (c. nap. 2108); et c'est en vain qu'on prétendrait le réduire à deux années d'intérêts et à l'année courante, sous le prétexte qu'il aurait requis lui-même une inscription ainsi limitée, une telle limitation ne pouvant nuire aux droits que la loi lui accorde (Bourges, 25 mai 1829) (1); 5o Que, pareillement, le privilége du vendeur non payé s'étend à tous les intérêts échus depuis la vente, et ne peut être restreint au capital et à trois années d'intérêts, par application de l'art. 2151 c. nap., dont les dispositions ne concernent pas le vendeur qui a rang par privilége (Montpellier, 21 mars 1822 (2); Bordeaux, 25 avril 1836, aff. Gardonne C. Collier, V. suprà, no 419; Bourges, 25 mai 1827,aff. Daiguzon, V.Vente; Paris, 7 déc. 1831, aff. Levrat, V. tit. 3); 4o Que la disposition de l'art. 2151 c. nap., qui n'accorde au créancier inscrit le droit d'être colloqué que pour deux années d'intérêts de capital et l'année cou

expressément dénommé les priviléges dans les dispositions qu'il a voulu leur appliquer, et qu'on doit en conclure qu'il n'a voulu appliquer qu'aux créances hypothécaires les dispositions dans lesquelles il n'a dénommé que les hypothèques; qu'il suit de cette distinction, de la disposition générale de l'art. 2105, et des termes restrictifs de l'art. 2151, que le législateur a voulu que la collocation des intérêts dus au vendeur restât dans les règles du droit commun, et que, conformément aux anciens principes et à l'ancienne jurisprudence, ces intérêts eussent, sans aucune restriction, le même rang et le même privilége que le capital; que le système de la publicité des hypothèques ne peut pas être invoqué contre le vendeur, du moins par de simples créanciers, puisqu'il n'y a pas de terme fixé pour la transcription qui conserve le privilége du vendeur, et que même, sans transcription de la première vente, mais en prenant inscription dans la quinzaine de la transcription de la seconde vente, le premier vendeur conserve encore son privilège avant tous les créanciers hypothécaires antérieurement inscrits, quoique dans l'un et dans l'autre cas, le privilège du vendeur n'ait pas été rendu public avant les inscriptions prises par les créanciers hypothécaires; qu'ainsi la cour d'Angers, en n'accordant au demandeur la collocation des intérêts par privilége que pour deux années seulement et pour l'année courante, et en se fondant à cet égard sur la disposition de l'art. 2151 c. civ., a non-seulement fait une fausse application de cet article, mais encore l'a formellement violé, l'étendant arbitrairement à un cas qu'il n'a pas prévu, et qu'en outre elle a contrevenu aux dispositions des art. 2103 et 2108;-Casse. Du 1er mai 1817.-C. C., sect. réun.-MM. le garde des sceaux, pr.Chabot, rap.-Mourre, pr. gén.-Darrieu et Loiseau, av.

Nota. La cassation de l'arrêt de la cour d'Angers fut suivie du renvoi de l'affaire devant la cour de Paris. Lambilly et Jourdan, après avoir soutenu que Sapey ne pouvait être colloqué que pour trois années d'intérêts, prélendirent subsidiairement que, dans le système contraire, on ne pourrait du moins accorder les intérêts à Sapey que pour cinq années, l'art. 2277 c. civ. ayant établi la prescription de cinq ans à l'égard des interêts comme à l'égard de tout ce qui est payable par année. Mais la cour de Paris, par arrêt du 31 janv. 1818, rendu en audience solennelle, mit fin à ce long débat en se conformant, sur les conclusions principales, à la doctrine de la cour suprême, et en décidant, quant aux conclusions subsidiaires, qu'elles ne pouvaient obtenir aucun succès, soit parce qu'il n'y avait point appel de la disposition du jugement qui prononcait la condamnation à tous les intérêts, soit parce que depuis l'an 8, époque de la vente, il y avait eu une série de demandes et d'actes conservatoires.

(1) (Potherat C. dame Laforet.) LA COUR ;- Considérant que tant que l'objet vendu reste entre les mains de l'acquéreur, le vendeur, pour ce qui lui reste dů, a un privilége et peut l'exercer tant pour le principal que pour tous les intérêts échus, soit en vertu de l'inscription d'office que le conservateur doit prendre pour lui, soit de celle qu'il peut prendre luimême à quelque époque que ce soit....; En fait...., que le sieur Ferrand, qui n'était pas obligé à renouveler l'inscription d'office, a fait plus qu'il ne devait; que la précaution surabondante qu'il a prise ne peut lui Daire; qu'à raison des sommes qu'il a reçues, soit du sieur Champton, soit surtout de la dame Champton, il n'est colloqué en principal et intérêts que pour 86,567 fr. 30 c., somme bien inférieure à celle qu'aurait conservée l'inscription, si cette inscription eût été nécessaire; qu'ainsi, sous aucun rapport, le sieur Potherat ne peut se plaindre de cette collocation; Considérant qu'on ne conteste pas que le sieur Champton n'ait pu valablement s'obliger à payer à son épouse les intérêts des intérêts des sommes qu'elle avançait pour lui pour payer le prix de la terre du Batteau; que ces intérêts d'intérêts auraient pu être exigés par le ven

rante, ne s'applique pas aux arrérages d'une rente viagère, alors surtout que cette rente faisait partie du prix de vente d'un immeuble et constituait ainsi un privilége en faveur du vendeur non payé (Req. 20 avril 1819) (3).

424. Le privilége existe-t-il également pour les frais du contrat de vente et pour ceux de la transcription lorsqu'ils ont été avancés par le vendeur? Existe-t-il encore pour les dommages-intérêts auxquels l'acquéreur peut être condamné pour cause d'inexécution du contrat? Sur la première question, M. Grenier, t. 2, no 384, adopte l'affirmative. Les frais du contrat de vente et de transcription, dit-il, sont des accessoires du prix même de la vente (Conf. MM. Troplong, n° 220; Taulier, t. 7, p. 175; Pont, no 194). Nous ne pouvons partager ce sentiment. Observons, en effet, que le législateur n'a accordé privilége que pour le payement du prix; or, par ce mot prix, il n'a pu entendre parler, ce semble, que de la somme représentative de l'immeuble. Les dépenses faites pour l'accomplissement de la vente, quelque favorables qu'elles soient, peuventelles, sans une extension arbitraire, être comprises sous le mot prix? Telle est l'opinion que M. Persil paraît avoir voulu ex

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deur, si les intérêts n'eussent pas été payés aux termes; qu'ils sont une suite et un accessoire des intérêts eux-mêmes, et doivent, à ce titre, jouir du même privilége.

Considérant que la femme, dispensée de prendre inscription pour la conservation de son bypothèque légale, doit nécessairement l'exercer à la date où la loi fixe la naissance de son hypothèque, non-seulement pour le capital qui peut lui être dû, mais encore pour les intérêts qu'elle est en droit d'exiger; qu'autrement, il ne serait pas vrai de dire que la loi, veillant pour elle, la dispense de l'inscription; qu'ici se présente l'ap plication du principe, que de droit commun les accessoires, parmi lesquels il faut ranger les intérêts, jouissent des mêmes avantages que le principal; qu'argumenter de l'art. 2151 c. civ., pour réduire la femme à deux années d'intérêts et la courante, ce serait faire une fausse application de cet article, en étendant sa disposition spéciale pour les créances soumises à l'inscription, à une créance que la loi en dispense formellement, sans distinction du capital et des intérêts; que le créancier ne peut se plaindre, puisqu'il ne peut ignorer ni la qualité de son débiteur, d'homme marié, ni les droits que la loi confère à sa femme;- Considé rant qu'il résulte de cet aperçu de situation, que le sieur Potherat ne peut exercer aucun droit sur une collocation éventuelle des droits de survie, qui ne peut se réaliser à son profit, puisque les créances certaines et exigibles absorbent la somme à distribuer, qui se trouve même insuffisante;

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Considérant que la demande du sieur Potherat, tendant à ce que les intérêts des sommes colloquées s'arrêtent à l'époque de l'adjudication (10 avr. 1826), est contraire à la loi qui porte que les intérêts des créances colloquées ne cessent que du jour où l'ordre aura été définitivement arrêté (art. 767 c. pr.); qu'elle est, d'ailleurs, sans intérêt, puisque l'acquéreur, devant l'intérêt de son prix tant qu'il n'a pas payé, acquittera, avec cet intérêt qu'il doit, les intérêts courus depuis l'adjudication jusqu'au jour de la clôture de l'ordre;-A mis l'appel au néant, etc. Du 23 mai 1829.-C. de Bourges, 2e ch.-M. Trottier, pr. (2) (Thomassin C. Pradal.) - LA COUR; Attendu que, de droit commun, les intérêts d'une créance en forment un accessoire ; qu'ils sont de même nature; qu'ils participent aux mêmes avantages, et sont régis par les mêmes règles; que si l'art. 2151 s'est écarté de ce principe, sa disposition doit être restreinte aux intérêts des créances simplement hypothécaires, désignées seules dans cet article, sans qu'on puisse l'étendre aux intérêts du capital du au vendeur, ainsi que la cour de cassation l'a pensé, dans un arrêt rendu le 1er mai 1817, sections réunies, sous la présidence du garde des sceaux; Ordonne que le sieur Pradal sera colloqué au même rang que son capital, pour une somme de 2,080 fr., au lieu de 780 fr., et ce pour huit années des intérêts du capital de 5,200 fr. à lui dus, d'après la demande qu'il en avait faite dans ses contredits, etc.

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Du 21 mars 1822.-C. de Montpellier.-M. Mourre, proc. gén.

(3) (Chaillou C. Viornoy et cons.) LA COUR; Attendu, quant à la cumulation des arrérages, que le prix se composant en grande partie de rentes viagères, et notamment de celle de 8,000 fr., il s'ensuit que ce ne sont pas des intérêts accumulés pendant plus de dix ans qui ont été adjugés, mais autant de portions du principal du prix qui se composait des annuités de la rente; Attendu d'ailleurs qu'il résulte de la combinaison des art. 2103, 2108 et 2151 c. civ., que le vendeur a, pour le prix de l'immeuble vendu, un privilége pour le capital et pour tous les intérêts, à la date du contrat de vente, pourvu que, comme dans l'espèce, l'inscription ait eu lieu dans le délai prescrit par l'art. 834 c. pr. civ.; Rejette.

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Du 20 avr. 1819.-C. C., sect. req.-MM Henrion, pr.-Dunoyer, rap.

PRIVILEGES ET HYPOTHEQI ES.-T. 2, CHAP. 1, SECT. 3, ART. 1.
PRIVILEGES ET
4.

primer, forsqu'il dit, dans son Conn., art. 2105, § 1, no 5,'
que le privilége n'ayant été accordé au vendeur que pour le
payement du prix, il en résulte que toutes les autres créances,
même celles qui seraient occasionnées par la vente, ne jouissent
pas de cette préférence (Conf. M. Duranton, t. 19, no 162).
De là il suit que nous sommes à plus forte raison de l'avis de
M. Grenier, lorsqu'il refuse d'étendre le privilége aux dommages-
intérêts que le vendeur peut avoir obtenus contre l'acquéreur, et
nous croyons qu'il en devrait être ainsî quand même le contrat
de vente contiendrait stipulation d'une clause pénale (Conf.
MM. Persil, Comm., art. 2103, § 1, no 5, et Questions, chap. 5,
§ 1; Delvincourt, f. 3, p. 280, notes; Duranton, t. 19, no 163;
Zachariæ, t. 2, p. 117; Troplong, no 221; Pont, no 193).
V. cependant M. Mourlon, no 162.

425. Il a été jugé dans le sens de ces solutions: 1° que le privilége du vendeur, pour son prix, n'a pas lieu pour les frais d'acte de vente et droits d'enregistrement :- « Considérant qu'on ne peut considérer comme faisant partie du prix, de manière à avoir le privilége foncier et le droit de résolution, ce qui doit être remboursé pour les droits d'enregistrement et frais d'actes dont la faillite peut seulement se faire indemniser dans le compte qu'elle a à faire avec Hébert et Saffray, sauf à faire tenir compte à la femme Thomasse personnellement de la part proportionnelle dont elle pourrait être restée redevable par son acte d'acquisition » (Caen, 7 juin 1837, M. Roger de la Chouquais, pr., aff. Hébert et Saffray C. Thomasse et syndic Letouzey);

inferêts pour une somme egale à celle dont son prix a été augmenté (2191), n'est pas tenu, après avoir payé tous les créanciers hypothécaires, de représenter, à son vendeur, le surplus du prix, s'il y en a; il peut, au contraire, le retenir par privilége, à valoir sur l'indemnité qui lui est due, sans être obligé davantage de le représenter aux créanciers chirographaires, qui, n'ayant sur l'immeuble aucun droit de suite, et ne pouvant exercer que les actions de leur débiteur, sont repoussés par les mêmes exceptions (même arrêt).

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426. Nous avons dit quelle est la créance privilégiée et les éléments dont elle se compose. Il faut voir maintenant quel est, dans la pensée de la loi, le créancier qui a droit au privilége. L'art. 2103 désigne nommément le vendeur. Ainsi, tout acte de vente d'immeuble duquel résulte le non-payement du prix, donne lieu au privilége. Tout acte de vente, disons-nous, et sur ce point nous ferons remarquer, avec nombre d'auteurs, qu'il est indifférent que l'acte soit authentique ou sous signature privée. En effet, les créanciers de l'acquéreur sont les seuls qui, devant souffrir du privilége du vendeur, soient intéressés à contester la validité des actes qui lui donnent naissance. Mais de quelles exceptions pourraient-ils arguer contre l'acte de vente sous seing privé, qui est le seul titre de leur débiteur à la propriété de l'immeuble? S'ils sont forcés de l'admettre dans leur intérêt, comme titre constatant la transmission de la propriété, peuvent-ils le rejeter pour les autres énonciations qu'il renferme? - V. MM. Tarrible, Répert., vo Privilége, sect. 4, § 1; ci Favard, vo Privilége, sect. 1, § 5, no 2; Zachariæ, t. 2, p. 117, note 1; Duranton, t. 19, n° 159; Pont, no 186.

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427. Il semble aussi qu'il n'y a pas à exclure du cas prévu par la loi celui où la vente n'a pas été purement volontaire. Il a été jugé cependant que le propriétaire, créancier en vertu d'un jugement ou de convention, du prix de la mitoyenneté d'un mur, ne peut invoquer le privilége accordé au vendeur par l'art. 2105 c. nap. (Paris, 23 juill. 1857) (2). Mais la solution nous semble contestable. Sans doute l'art. 661 c. nap., qui accorde au voisin la faculté d'acquérir la mitoyenneté, ne dit pas que le pro

2° Que le privilége accordé à l'acquéreur poursuivant l'ordre par l'art. 777 c. pr., pour le coût de l'extrait des inscriptions et dénonciations aux créanciers inscrits, ne peut s'étendre aux frais de transcription du contrat (Colmar, 5 août 1849, aff. Hagenbach, D. P. 50. 2. 54); 3° Qu'à la différence du droit qui nous régissait avant la loi du 11 brum. an 7, sous lequel tout contrat public conférait hypothèque, aujourd'hui l'acquéquéreur évincé par suite d'une surenchère, a bien, aux termes de l'art. 2101 c. nap.. droit à des dommages-intérêts, pour une somme égale à celle qui fait la différence du premier prix avec celui de l'adjudication; mais n'ayant, pour le répéter, ni hypo-priétaire sera privilégié pour le prix. Mais ce n'était pas non thèque ni privilége, il rentre dans la classe des chirographaires, et vient à contribution comme eux (Bordeaux, 27 fév. 1829)(1); Mais l'acquéreur primitif, qui, sur surenchère, devient adjudicataire, ayant droit, contre le vendeur, à des dommages-vée, doit, pour son exécution, s'encadrer dans le système général

(1) (Hérit. Hervé C. Faulnier et autres.). LA COUR;-Attendu, en ce qui touche François Roussille, qu'aux termes de l'art. 2191 c. civ., il est créancier de la différence qui existe entre le prix fixé par son contrat et le montant de la surenchère, ensemble des intérêts de cette différence; qu'il est de principe, en matière d'hypothèque, que la surenchère a lieu en faveur et dans l'intérêt des créanciers hypothécaires, qui, seuls, peuvent la former, et envers qui, seulement, l'acquéreur est tenu de représenter le prix; que lorsque l'acquéreur primitif devient adjudicataire par suite de la surenchère, s'il est vrai qu'à l'égard des eréanciers hypothécaires, il est tenu du payement du prix entier, à concurrence du montant de l'adjudication, il n'en est pas de même à l'égard de son vendeur; qu'il suffit, pour s'en convaincre, de consulter l'art. 2191 c. civ., qui lui accorde le droit de répéter ce qui excède le prix de vente et les intérêts de cet excédant; que, devenu par le fait de l'adjudication créancier de son vendeur pour cet excédant, il ne peut évidemment être obligé de le représenter aux simples créanciers chirographaires de ce dernier, qui n'avaient sur l'immeuble à vendre aucun droit de suite, et qui ne pouvant, dès lors, exercer que les actions de leur débiteur, sont repoussés par les mêmes exceptions que l'acquéreur, devenu adjudicataire, serait en droit de lui opposer; qu'en un mot, si la surenchère ne peut former un contrat nouveau entre l'acquéreur, devenu adjudicataire, et ses créanciers hypothécaires, elle n'en forme point entre l'acquéreur et le vendeur; qu'à l'égard de ce dernier, la vente subsisté avec toutes ses obligations, et qu'elle a tous ses effets, tant contre lui que contre ses créanciers chirographaires; qu'il suit de là qu'après la distribution du prix et le payement des hypothécaires, si ces derniers n'absorbent pas la différence qui existe entre le prix de vente et le montant de l'adjudication, l'acquéreur est fondé à retenir le surplus, qui vient en déduction des dommages que lui accorde la loi ;

Attendu, en ce qui touche Faulnier et Thomas Lacroisade, qu'ils ne sont point devenus adjudicataires de la partie des biens qu'ils avaient acquis de Godicbaud; que, évincés de leur acquisition, ils ont, aux termes de l'art. 2191 c. civ., droit à des dommages; que, dans les principes qui nous régissaient antérieurement à la loi du 11 brumaire, ils eussent été fondés à réclamer la préférence sur les créanciers chiro

plus le lieu de le dire. Le code a parlé ailleurs des priviléges.— Le principe de l'art. 661, bien qu'exceptionnel en ce qu'il permet une sorte d'expropriation dans l'intérêt de la propriété pri

graphaires, parce que tout contrat public conférait au créancier le droit d'hypothèque; qu'il ne peut en être ainsi sous l'empire d'une législation qui exige la spécialité et la stipulation expresse d'hypothèque dans les conventions; que Roussile, devenu adjudicataire de la portion des biens achetés par eux, n'a d'autre titre pour cette sorte de biens que l'adjudication, qui le soumet à représenter tout le prix ; qu'une fois les créanciers hypothécaires payés, l'excédant rentre dans l'actif de Godichaud, sur lequel tout créancier peut exercer ses droits, suivant le rang et la valeur de ses titres; que Faulnier et Thomas Lacroisade ne se prévalent pas d'un droit d'hypothèque, et n'ont point été colloqués dans l'ordre; qu'ils n'ont en leur faveur aucun privilége déterminé par la loi, l'art. 2191 c. civ., se bornant à fixer la base sur laquelle doivent être calculés les dommages qu'ils sont en droit de répéter; que, n'ayant ni hypothèque ni privilege, ils sont, dès lors, dans la classe des simples chirographaires, avec lesquels ils viennent à contribution; que le tribunal d'Angoulême a, dès lors, commis une erreur, en annulant les saisies-arrêts de Jean Hervé et consorts, par le motif que les créanciers de Roussille, de Faulnier et de Thomas Lacroisade absorbaient, par leurs privilèges, les sommes restées entre les mains du premier; Par ces motifs, ordonne, etc.

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Du 27 fév. 1829.-C. de Bordeaux.-M. de Saget, pr.

(2) Espèce: (Hagerman C. créanciers Levaysse.)- Jugement qui condamne le sieur Levaysse à payer 1,632 fr. pour prix de la mitoyenneté d'un mur de la maison du sieur Hagerman, contre lequel mur le sieur Levaysse avait appuyé une maison.-Celui-ci vendit la maison au sieur Bohayle.-Le prix était en distribution entre ses créanciers, lorsque Hagerman produisit à l'ordre et demanda sa collocation par privilege en vertu du jugement.

Jugement qui rejette cette demande, «attendu qu'aux termes de l'art. 661 c. civ., il n'était accordé, aux cas de mitoyenneté, qu'une action personnelle pour le remboursement de la moitié de la valeur du mur, et que M. Hagerman ne justifiait pas que son titre de créance eût été suivi d'inscription.»-Appel.-Arrêt.

LA COUR-Adoptant les motifs des premiers juges, confirme.
Du 23 juill. 1833.-C. de Paris, 1re ch.-M. Séguier, pr.

de nos iois, et se combiner avec elles. Toute la question se ré- ! duit, ce semble, au point de savoir si, pour être forcée, l'aliénation autorisée par l'art. 661 perd le caractère de vente. Or aucun texte ne la dépouille de ce caractère. Si l'acquéreur ne paye pas l'indemnité ou le prix fixé, soit par la convention, soit par jugement, le vendeur nous paraît en droit de s'opposer à la prise de possession de son voisin, ou de faire résoudre le contrat c. nap. 1184, 1654); car si l'indemnité doit être payée prealablement dans le cas d'expropriation pour utilité publique, il y aurait déraison à faire moins dans le cas où l'intérêt privé est seul mis en jeu. Le privilége est donc dû au vendeur ou cédant de la mitoyenneté et les créanciers qui profitent de l'augmentation de valeur qu'elle donne à leur gage, nous paraissent tout à fait mal fondés à contester le privilége.

428. Au surplus, la loi s'occupe ici de la vente des immeubles. Par conséquent, le vendeur d'une chose mobilière devenue immobilière par destination, par exemple, d'une machine à vapeur incorporée par celui qui l'a achetée dans une fabrique dont il était propriétaire, ne peut prétendre au privilége établi au profit du vendeur d'immeubles par l'art. 2103-1° (C. sup. de Bruxelles, 16 août 1852, aff. K... C. W...,V. suprà, no 362-5o). 429. Mais devons-nous conclure de ce que l'art. 2105, no i, n'accorde privilége qu'au vendeur, que ce droit de préférence ne pourrait pas être exercé par l'échangiste pour la répétition de la soulte qui lui serait due par son copermutant? Nous n'hésitons pas à penser que le privilége appartient à l'échangiste. Permutatio vicina est emptioni, a dit la loi 2, ff., De rerum empt.; et nos législateurs, suivant cette règle de la loi romaine, qui leur était d'ailleurs révélée par la nature même des choses, ont dit dans l'art. 1707 c. nap., après avoir tracé quelques dispositions spéciales relatives à l'échange, que ce dernier contrat reste soumis à toutes les dispositions du titre de la vente. Ces principes sont vrais dans tous les cas, et par conséquent, lorsque l'échange ayant eu pour objet deux immeubles d'une valeur à peu près égale, il n'y a pas eu lieu de stipuler le payement d'un retour de lot; mais combien les rapports qui existent entre les deux contrats deviennent encore plus intimes, lorsqu'une soulte est due par l'un des copermutants! Alors, s'il est vrai de dire qu'il ne s'est opéré qu'un échange proprement dit à l'égard de l'un des immeubles et d'une partie de l'autre immeuble, qui s'est trouvé supérieur en valeur, n'est-il pas vrai de dire aussi qu'il va vente, et vente véritable, à l'égard de l'autre partie de ce dernier immeuble à raison de laquelle une soulte a été stipulée? Il n'existe donc pas de raison pour refuser, dans ce dernier cas, le privilége à l'échangiste (MM. Delvincourt, t. 3, p. 280, notes; Persil, Comm., art. 58, § 1, no 11; Grenier, t. 2, no 387; Zachariæ, t. 2, p. 118; Duranton, t. 19, no 155; Taulier, t. 7, p. 178; Troplong, no 215; Pont, no 187; V. cependant M. Mourlon, nos 148 et suiv.). — Il a été décidé, toutefois, que l'immeuble donné à l'échangiste en contre-échange ne pouvant être assimilé à un prix de vente, l'échangiste ne peut réclamer le privilege du vendeur pour la garantie de cet immeuble; que ce privilége ne pourrait tout au plus appartenir à l'échangiste que dans le cas où il serait demeuré créancier d'une soulte (Turin, 10 juill. 1815) (1).

(1) Espèce :- - (Hérit. Tribaudino C. Sofia.). 26 sept. 1801, Tribaudino et Sofia échangent deux domaines. 24 déc. 1808, Sofia vend les biens que Tribaudino lui avait donnés en contre-échange. Dans l'ordre ouvert à la suite de cette vente, Tribaudino, craignant l'éviction des biens qu'il avait reçus de Sofia, se présente à raison de la garantie dont ce dernier serait tenu à son égard, dans le cas où l'éviction viendrait à se réaliser, et demande à être colloqué au rang que la loi accorde au vendeur. Les échangistes, dit-il, sont de veritables vendeurs; à l'égard de chacun d'eux, l'immeuble reçu en échange doit être réputé prix de vente. L'identité qui existe dans la nature des deux contrats a été d'ailleurs reconnue par l'art. 1707 du code civil. - 8 fév. 1813, jugement qui rejette la demande de Tribaudino. Appel. Arrêt.

LA COUR; Attendu que, quelle que soit l'analogie entre le contrat d'échange et celui de vente, en ce que ce dernier est né du premier, à l'aile du système monétaire représentatif de tous les ob ets, il est néanmoins certain que les priviléges a mis par la loi n'étant pas susceptibles d'extension arbitraire au delà des bornes que la loi même leur a spécifiquement assignées, on ne saurait rendre applicable, par analogie

430. Dans tous les cas, on peut dire, par application du principe suivant lequel lc privilege procède toujours de la lui et ne peut être établi par la convention, que l'échangiste n'a point de privilége sur les immeubles par lui cédés en échange, pour se faire rembourser de ce qu'il a payé aux créanciers inscrits sur ceux qu'il a reçus en contre-échange, encore qu'il ait été convenu, dans l'acte d'échange, que son coéchangiste ne, pourrait toucher le prix de ces derniers biens, en cas de vente, avant d'avoir purgé les immeubles par lui échangés : qu'une telle convention, en admettant que son inexécution fût de nature à entraîner la résolution du contrat pour cause d'éviction, ne saurait faire naître un privilége, que la loi seule peut créer; qu'en conséquence, l'affectation résultant de cette convention ne donne à la partie qui l'a stipulée aucun droit de préférence sur les créanciers hypothécaires de celle qui l'a consentie (Cass. 26 juill. 1852, aff. Grémillin, D. P. 52. 1. 196).

43. Il a été décidé encore dans ce sens que, l'échangiste n'a pas de privilége sur l'immeuble par lui donné en échange pour le payement des dommages-intérêts à lui dus en raison d'une non-jouissance momentanée de l'immeuble qu'il a reçu en contre-échange (Paris, 20 janv. 1854, aff. Mollet, V. Echange, n°45).

432. Faudrait-il admettre à l'exercice d'un privilége l'acquéreur à faculté de rachat qui aurait rendu l'immeuble au vendeur sans exiger le prix? Tous les auteurs se sont accordés avec raison pour soutenir qu'un pareil droit ne saurait lui appartenir. L'acquéreur ne pourrait élever cette prétention qu'en soutenant qu'il est à son tour devenu vendeur au moment de l'exercice du réméré. Mais cette proposition est dénuée de justesse. Il est évident, en effet, que lorsqu'un acquéreur avec faculté de rachat cesse d'être propriétaire, par suite de l'événement de la condition, ce n'est point une nouvelle vente qui s'opère, mais seulement la résolution de celle qui avait investi l'acquéreur de la propriété. Ce principe est si vrai que la loi, après l'exercice du rachat, rétablit les choses dans l'état où elles se trouvaient avant la vente, en effaçant de l'immeuble les hypothèques dont l'acquéreur l'avait grevé. Cet acquéreur est donc considéré comme n'ayant jamais été propriétaire: dès lors, peut-il prétendre à se faire regarder comme vendeur? Conséquentes à ces principes, les lois de l'enregistrement n'ont exigé aucun droit de mutation pour le cas où un immeuble revient entre les mains du vendeur par l'effet du réméré. — Observons d'ailleurs que l'art. 1763 c. nap. accorde à l'acquéreur à titre de réméré le droit de se maintenir dans la possession de l'immeuble jusqu'au remboursement du prix principal, des améliorations et des loyaux coûts. Ainsi, en négligeant d'exercer ce droit, l'acquéreur a suivi la foi de son débiteur et si plus tard il a lieu de se repentir de sa confiance, il ne peut être admis à réparer sa faute au préjudice des autres créanciers. V. MM Per-il, art. 2103, § 1, no 15; Delvincourt, t. 5, p. 282; Grenier, t. 2, no 390; Tarrible, Rép. de Merlin, vo Privilége, sect. 4, § 5, no 5; Duranton, t. 19, no 157; Zachariæ, 1. 2, p. 118, note 7; Taulier, t. 7, p. 178; Troplong, no 214; Duvergier, de la Vente, t. 2, no 52; Marcadé, art. 1659, no 2; Pont, n 189.

433. Mais remarquons, avec M. Pont, loc. cit., que la solu

à l'échangiste, celui qui est exclusivement accordé au vendeur; - Attendu, d'autre part, que le privilege même qui appartient au vendeur sur J'immeuble vendu n'a lieu qu'au profit du vendeur créancier de la totalié ou de partie de son prix; car, dans le cas contraire, manquant de sa cause, il ne pourrait produire aucun effet; que dès lors, en admettant même parité d'effet dans ce privilege au profit de l'échangiste, on ne le pourrait, dans la plus ample hypothèse, qu'en cas où il y existerait la même cause, savoir où l'échangiste demeurerait créancier de tout ou partie de la somme stipulée à titre de retour, pour égaliser la valeur de la chose donnée avec celle de la chose recue; Attendu qu'en l'espèce les héritiers Tribaudino, souffrant ou craignant éviction sur l'immeuble reçu en échange, ne proposent cependant aucune créance sur l'immeuble échangé ; qu'en conséquence leur action est une demande en dommagesintérêts comme acheteurs évincés, plutôt qu'une action en payement de prix comme vendeurs, et, par une conséquence ultérieure, leur instance tend plutôt à faire créer une nouvelle espèce de privilége qu'à profiter de celui admis par la loi, pour sûreté du prix de la vente ;...-Met l'appellation au néant, etc.

Du 10 juil. 1815.-C. de Turin.

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