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344. Lorsque la liquidation des dépens est insérée dans le jugement, peut-elle être attaquée par voie d'opposition, bien qu'il ne soit pas délivré d'exécutoire? Ce qui fait naître le doute sur cette question, c'est, d'abord, que l'art. 6 du décret additionnel de 1807 autorise l'opposition à l'exécutoire des dépens : d'où il semblerait résulter que lorsqu'il n'y a pas d'exécutoire, il ne peut pas non plus y avoir d'opposition; c'est, ensuite, que la liquidation des dépens fait alors partie intégrante du jugement: d'où il paraîtrait naturel de conclure qu'on ne peut l'attaquer que comme le jugement lui-même, par la voie de l'appel.-Toutefois, nous ne pensons pas que ces deux motifs doivent l'emporter sur les raisons contraires qui, selon nous, ont beaucoup plus de solidité. La première de ces raisons, c'est que l'art. 6 précité porte que l'exécutoire ou le jugement au chef de la liquidation seront susceptibles d'opposition, ce qui peut parfaitement s'entendre du cas où le jugement contiendrait la liquidation des dépens. La deuxième raison est tirée de ce que la distinction que l'on voudrait établir ne reposerait sur aucun motif solide, et qu'il en résulterait même une anomalie inexplicable. Dans les matières sommaires, en effet, où le législateur a voulu diminuer les frais, il aurait autorisé l'appel pour les dépens, tandis qu'il n'aurait admis que la voie de l'opposition en matière ordinaire. On voudrait vainement, dans le système contraire, échapper à cette conséquence irrationnelle; car si l'art. 6, le seul qui parle de l'opposition, n'a pas trait aux matières sommaires, elles demeurent de tout point soumises à la règle commune qui est le droit d'appel dans les limites légales.

345. Toutefois il a été jugé que c'est par la voie d'appel, et non par celle de l'opposition, que l'adjudicataire doit se pourvoir contre une taxe de frais comprise dans un jugement d'adjudication dont elle fait partie intégrante, et que, dans ce cas, l'appelant peut obtenir de la cour la permission d'intimer l'avoué auquel les frais sont dus, afin d'abréger les délais, surtout si les frais font partie du prix, et si l'adjudicataire a besoin de les connaître promptement, afin de faire enregistrer le jugement d'adjudication (Besançon, 21 août 1807) (1). — Mais il est à remarquer que le jugement d'adjudication qui comprenait la taxe de dépens déférée à la cour de Besançon est du 12 fév. 1807, tandis que le décret est du 16 fév. de la même année. Cette cour a pensé, sans doute, que les dispositions de ce règlement ne devaient pas recevoir d'application dans la cause. Aussi ne voit-on pas qu'il soit cité

boute. — Appel. — On lui oppose que, d'après l'art. 6 décr. 16 fév. 1807, l'appel du jugement sur la taxe n'est recevable que lorsqu'il y a appel du jugement sur le fond et conjointement avec cet appel. Arrêt.

LA COUR; Considérant que l'art. 6 décr. du 16 fév. 1807 est formel; qu'il en résulte qu'on ne peut appeler d'un exécutoire ou d'un jugement rendu sur une opposition à une taxe de dépens, qu'autant qu'il y a appel de quelque disposition du fond; que, dans l'espèce, les sieurs de Cairon avaient interjeté appel du jugement qui avait été rendu sur la contestation qui existait entre eux et diverses autres parties; qu'il a été fait droit sur cet appel par arrêt du 15 janvier dernier, et que ce n'a été qu'après que tout a été définitivement jugé qu'ils ont fait statuer sur l'opposition qu'ils avaient cru devoir former à la taxe faite en première instance; que, conséquemment, il n'y a pas lieu à l'appel du jugement intervenu sur cette opposition; - Déclare les appelants non recevables. Du 20 mai 1822.-C. de Rouen, 1re ch.-M. de Villequier, 1er pr.

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(1) Espèce (Conscience C. Girard.) - Le 12 fév. 1807, l'avoué Conscience s'était rendu adjudicataire d'une maison vendue par licitation. Le cahier des charges portait que les adjudicataires payeraient les frais, dans les dix jours de l'adjudication, entre les mains de Me Girard, avoué des poursuivants. - Les dépens avaient été liquidés le 11 février, veille de l'adjudication, à 1,886 fr. Le 13 février, Conscience argua de nullité cette taxe faite par des avoués tiers, et présenta requête au tribunal de Besançon, pour que la liquidation des dépens fût portée dans le jugement. Sur cette requête, deux jugements successifs ordonnèrent à Girard de déposer au greffe l'état des frais et les pièces à l'appui, et ce, sans prendre égard à la taxe faite par avoués tiers; le 5 mars suivant, l'état fut vérifié et arrêté à 1,169 fr. par un juge-commissaire. Le 10 mars, Conscience présenta requête à la cour pour être reçu appelant de la liquidation des frais; un arrêt lui permit d'intimer Girard, et le lendemain, 11 mars, il le fit assigner pour procéder sur l'appel. — Girard a prétendu, 1o que la taxe des dépens n'étant qu'une simple ordonnance du juge-commissaire, la rectification devait en être demandée au tribunal de première instance, et subir les deux degrés de juridiction; 2° que l'acte d'appel était nul,

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dans l'arrêt. Cette décision ne peut donc, en réalité, être considérée comme opposée à notre doctrine.

§ 5.

·Des jugements en matière disciplinaire.

346. En cette matière, les règles varient en ce qui concerne le droit d'appel; il y a lieu de distinguer entre les cas où l'action disciplinaire s'exerce sur un magistrat, sur un avocat, sur un notaire ou sur les autres officiers ministériels. Les principes sur les matières disciplinaires seront développés dans leur ensemble vo Discipline. Nous nous bornons ici à indiquer seulement ce qui a trait au droit d'appel.

347. La loi du 20 avril 1810 sur l'organisation de l'ordre judiciaire et l'administration de la justice, pose les principes relativement aux magistrats. Il en résulte que les décisions des cours et tribunaux qui frappent un magistrat de l'une des peines disciplinaires déterminées par la loi (art. 50) ne sont pas soumises à l'appel. Seulement la sentence, lorsqu'elle émane d'un tribunal de première instance, et qu'elle atteint soit un membre de ce tribunal, soit un juge de paix, soit un juge de police, doit, avant de recevoir son exécution, être transmise au procureur général par le procureur du roi et soumise à la cour royale (art. 51); et ce droit disciplinaire conféré à la cour royale est même si absolu, qu'elle peut l'exercer directement et d'office sans y être provoquée par le ministère public, lorsque le tribunal de première instance néglige de l'exercer lui-même (Cr. cass., 23 mars 1826, aff. Duch..., V. Discipline). Mais cela même établit que ce n'est pas d'un appel qu'il s'agit, et ce qui le prouve mieux encore, c'est qu'à l'inverse de ce qui a lieu en matière d'appel, ce n'est pas à la partie condamnée que, dans l'économie de la loi, il est donné de saisir les juges du second degré. C'est donc à tort qu'on a présenté, dans un répertoire abrégé, les sentences rendues en cette matière par les tribunaux de première instance comme soumises à l'appel. Cette voie de recours n'existe réellement pas; et de l'aveu de tous les auteurs, il n'y a, d'après les règlements, d'autre recours qu'au ministre de la justice, qui seul peut approuver, modifier ou réformer souverainement les décisions disciplinaires (V. MM. Carnot, Discip. judic., p. 9, no 102; A. Dalloz, Dict., 1re part., vo Discipline, n° 80, etc.; V. aussi notre Traité de la discipline). Ajoutons que, sous ce rapport, les juges des tribunaux de première instance, de police ou de paix, sont placés sur la même ligne que les membres des cours royales. Lorsque la poursuite

comme ne contenant que les formes prescrites par l'art. 456 c. pr.; 3° que l'appel avait été interjeté avant l'expiration de la huitaine de l'opposition, ce qui était contraire à l'art. 449 du même code. — Arrêt. LA COUR; Considérant que l'avoué Conscience a présenté requête pour obtenir le dépôt en son greffe des pièces relatives à la taxe obtenue par l'avoué Girard; qu'il importait à l'avoué Conscience d'abréger les délais de cette affaire, en ce que les dépens qu'il avait été chargé de payer faisaient partie du prix de son adjudication; qu'il fallait dès lors en constater promptement le montant, pour pouvoir faire enregistrer ladite adjudication dans les délais de la loi; que sur le mémoire il y a eu appointement qui a reçu l'avoué Conscience appelant, a ordonné l'apport des pièces qui avaient servi de base à la taxe, et a permis d'assigner l'avoué Girard; qu'ajournement a été donné en conséquence à ce dernier, et qu'ainsi il a été satisfait au vœu de l'art. 456; que d'ailleurs l'avoué Girard a remis ses pièces au greffe, avant et sans qu'il se soit plaint d'aucune procédure; que l'avoué Conscience a pu appeler de la taxe de dépens dont il s'agit, en ce qu'elle faisait partie de son adjudication, et partie en même temps du jugement d'adjudication portant la même date que le jugement, quoiqu'elle aurait été arrêtée postérieurement par un commissaire, qui n'aurait fait que remplir le blanc laissé dans la minute du jugement, ce qui n'est pas moins l'ouvrage du tribunal; qu'une fois que la taxe de dépens était insérée au jugement, elle en devenait une partie intégrante, et un chef qui ne pouvait être réformé que par la voie de l'appel, et non par celle de l'opposition, puisque l'avoué Conscience n'aurait pu former opposition au jugement d'adjudication quand il y avait été partie contradictoire; qu'on ne peut lui reprocher d'avoir appelé prématurément, puisque le jugement dont appel était du 12 fév. 1807, et que son appel est du 11 mars suivant; qu'obligé de payer, d'après l'adjudication, outre le prix de son enchère, les frais légitimes pour parvenir à cette adjudication, il avait intérêt à faire liquider les frais equitablement, sauf aux créanciers du propriétaire de l'objet aliéné, à réclamer la différence entre les dépens répétés et ceux alloués; Par ces motifs et sans prendre égard aux fins de non-recevoir, reçoit l'appel, etc., etc.

Du 21 août 1807.-C. de Besançon.-M. Louvot, pr.

sans retentissement, ainsi que le demanderaient les différends de famille. Il s'ensuit de là que le mérite, au fond, d'une délibération de discipline ne peut être déféré à aucune autre juridiction. » Ce n'est pas dire qu'une délibération de cette nature doive toujours être à l'abri de tout recours. Tout le monde reconnaît, au contraire, que si, par exemple, la chambre disciplinaire avait statué hors de sa compétence ou si elle avait commis un excès de pouvoir, ou si elle avait violé les formes établies, sa délibération ne saurait être maintenue. Mais par quel moyen et devant quelle juridiction le recours pourra-t-il être exercé dans ce cas? C'est là une difficulté des plus sérieuses qui sera examinée vo Discipline.

disciplinaire est dirigée contre ceux-ci, c'est à la cour royale qu'il appartient d'en connaître (art. 52 de la loi précitée), ce qui exclut toute idée d'appel, et ne laisse, comme dans le cas précédent, d'autre recours qu'au ministre de la justice (même loi, art. 56). 348. Il n'en est pas ainsi, du moins d'une manière absolue, des avocats. A cet égard, les principes sont posés dans l'ordonnance du 20 novembre 1822, contenant règlement sur l'exercice de la profession d'avocat et la discipline du barreau. Il en résulte qu'entre les peines disciplinaires qui peuvent être prononcées, et qui sont, comme on sait, l'avertissement, la réprimande, l'interdiction temporaire et la radiation du tableau, deux dernières ne peuvent atteindre un avocat sans donner ouverture, en sa faveur, au droit d'appeler de la condamnation de- 356. Lorsque l'action disciplinaire est exercée devant les vant la cour du ressort (art. 24 de l'ord. précitée). Ainsi l'appel❘ tribunaux, les principes sont différents : c'est la loi sur le notane serait pas recevable contre la décision du conseil de disciplineriat du 25 vent. an 11 qui les consacre. Nous examinerons, dans qui réduirait les honoraires des avocats (Nîmes, 30 juillet 1825, aff. Sauvage, V. Avocat).

les

349. Toutefois, le droit d'appel, tel qu'il est consacré en principe par l'ord, de 1822, doit être étendu par analogie, et même par un argument à fortiori, 1o à la décision qui refuse l'admission d'un avocat au stage (Caen, 11 janv, 1837, aff. Jardin, V. Avocat); car si l'ordonnance précitée permet l'appel dans le cas d'une simple interdiction temporaire, n'est-il pas juste de le permettre à fortiori dans le cas d'un refus d'admission au stage, qui entraîne pour l'avocat la suppression de sa profession?...

350. 2o À la décision du conseil de discipline, qui proclame une incompatibilité entre la profession d'avocat et certaines fonctions, spécialement celles de conseiller de préfecture (Toulouse, 21 déc. 1840, aff. Tajan, V. Avocat).

351. 3° Au cas où le conseil de discipline, sans prononcer une radiation du tableau, mais usant d'un moyen que l'usage sinon la loi a établi, omet de porter sur le tableau des avocats un nom qui y était déjà porté. L'inscription primitive avait, dans ce cas, conféré des droits qu'il ne saurait appartenir au conseil de discipline de résoudre d'une manière absolue et définitive; et en faveur de ces droits, il paraît de toute nécessité de laisser à l'avocat dont le nom aurait été omis, la faculté de réclamer, par la voie de l'appel, devant la cour royale.

352. Disons d'ailleurs que, dans tous les cas où les conseils de discipline répriment d'office, ou sur les plaintes qui leur sont adressées, les infractions et les fautes commises par les avocats inscrits au tableau, le droit d'appeler des décisions appartient également aux procureurs généraux (art. 25 de l'ord. précitée). Le droit d'appel se trouve ainsi plus étendu en faveur des procureurs généraux qu'en faveur des avocats, puisque ceux-ci ne peuvent l'exercer, ainsi qu'on l'a vu, que dans les cas d'interdiction temporaire ou de radiation, tandis, au contraire, que les procureurs généraux pourraient appeler non-seulement dans ce même cas, mais encore dans ceux où l'avocat aurait été réprimandé ou simplement averti. Cette inégalité de position a été assez généralement critiquée. V. Avocat, Discipline.

353. Toutefois, il importe de remarquer que les procureurs généraux ne peuvent appeler que lorsque la décision du conseil statue sur des fautes ou infractions; ainsi ils ne le peuvent pas contre la décision par laquelle le conseil de l'ordre maintient sur le tableau tels ou tels avocats signalés comme n'exerçant pas réellement (Grenoble, 17 juil. 1823, aff. des avocats de Grenoble, V. Avocats). D'autres arrêts consacrent le même principe, et il n'y est fait exception que dans le cas où il s'agit d'une mesure touchant à l'ordre public (Cass., 23 juin 1835, aff. des avoués d'Apt, V. ibid.).

354. Quant aux notaires, il faut distinguer entre l'action disciplinaire exercée par leur chambre, et l'action disciplinaire exercée devant les tribunaux.

355. Les délibérations disciplinaires des chambres des notaires n'ont pas rigoureusement le caractère de jugements: ce sont, dit l'art. 20 de l'ordonnance récente du 4 janv. 1843, de simples actes d'ordre ou de discipline ou de simples avis. « De pareilles mesures, dit avec raison M. A. Dalloz, dans son Traité abrégé de la discipline et des chambres des notaires, no 221, ne peuvent être confiées qu'aux notaires eux-mêmes; de plus, le vœu de l'institution est que les affaires disciplinaires expirent dans l'enceinte des chambres et y reçoivent solution

notre Traité de la discipline, quelle est l'étendue de l'action disciplinaire accordée aux tribunaux, et comment, prise dans son ensemble, cette action se partage entre la chambre disciplinaire et les tribunaux. Constatons seulement ici qu'aux termes de l'art. 53 de la loi précitée <«< toutes suspensions, destitutions, condamnations d'amende et dommages-intérêts, seront prononcées contre les notaires par le tribunal civil de leur résidence, à la poursuite des parties intéressées, ou d'office, à la poursuite et diligence du commissaire du gouvernement. » — Puis, après avoir ainsi indiqué la compétence des tribunaux, le même article ajoute : « Ces jugements seront sujets à l'appel, et exécutoires par provision, excepté quant aux condamnations pécuniaires. »

357. Ainsi, le droit d'appel existe en principe. Par suite, il a été décidé que le jugement qui statue sur la demande du ministère public tendant à faire prononcer contre un notaire une amende même inférieure au taux du dernier ressort est susceptible d'appel (Bruxelles, 17 av. 1824, aff. N....., et 31 janv. 1826, aff. N..., V. Degré de juridiction).

358. Et ce droit d'appel existe même dans les instances introduites par les agents de la régie de l'enregistrement contre les notaires à fin de condamnation à l'amende pour inobservation des formalités qui leur sont prescrites par la loi, sans que l'on puisse opposer, dans ce cas, la règle qui n'établit qu'un seul degré de juridiction dans les affaires d'enregistrement (Cr. cass., 29 oct. 1830, aff. Drojat, V. Notaire).

359. Ajoutons même que la garantie du double degré de juridiction ne peut, d'après la jurisprudence, être enlevée aux notaires, par l'application de l'art. 102 du décret du 50 mars 1808, par une cour royale qui aurait cru être en droit de prononcer la peine disciplinaire contre un notaire pour infraction par lui commise dans des actes produits devant elle (Rej., 12 août 1835, aff. Tessier; Cass., 29 mars 1841, aff. Th........, V. Discipline).

360. D'ailleurs, ici encore, le droit d'appeler appartient aussi bien au ministère public qu'au notaire condamné. Ainsi, le ministère public peut appeler du jugement qui décide qu'il n'y a pas lieu d'appliquer la peine de destitution provoquée par lui (Req., 13 mai 1807, aff. Champeaux, V. Discipline); et selon les principes généraux sur l'acquiescement, le ministère public aurait le droit d'appeler d'un pareil jugement, alors même qu'il l'aurait signifié au notaire avec ordre de s'y conformer (Cass., 13 déc, 1824, aff. Bazille, V. Acquiescement, no 169).

361. Enfin quant aux autres officiers ministériels, avoués, huissiers, commissaires-priseurs, gardes du commerce, etc., il résulte du décret du 30 mars 1808, art. 103, que les mesures de discipline prises contre eux ne sont point sujettes à l'appel ni au recours en cassation et que la réclamation de l'officier ministériel condamné ne peut être adressée qu'au ministre de la justice.

362. Jugé, par suite, que l'appel est non recevable, 1o contre un arrêté d'un tribunal pris en chambre du conseil qui, sur la plainte du ministère public contre un officier ministériel, pour cause de faits qui ne se sont point passés et n'ont pas été découverts à l'audience, applique des mesures de discipline à cet officier (Grenoble, 3 janv. 1828, aff. M... V. Discipline).

363. 2o Contre une décision prise par un tribunal de première instance réuni en assemblée générale en chambre du conseil, qui suspend un huissier de ses fonctions par mesure de discipline à raison de faits qui ne se sont point passés et n'ont pas été.

découverts à l'audience (Nîmes, 31 janv. 1831, aff. G... V. Discipline).

364. Une exception a été faite par l'art. 103 du décret précité au principe qu'il pose lui-même; cette exception, qu'indiquent les arrêts que nous venons de citer, a lieu pour le cas où la peine de la suspension a été prononcée en jugement pour une faute disciplinaire commise ou découverte à l'audience. Le droit d'appel est ouvert, dans ce cas, à l'officier ministériel condamné.

365. C'est une question controversée de savoir si une autre exception ne doit pas être faite pour le cas où les arrêtés disciplinaires rendus en la chambre du conseil par les tribunaux de première instance seraient attaqués pour incompétence. La question sera examinée vo Discipline. Constatons seulement ici que la solution d'après laquelle l'appel ne serait pas recevable, même dans ce cas, a été consacrée par la cour de Riom le 8 avril 1836 (aff. Poncillion). Au contraire, la cour de Rennes, par arrêt du 19 juil. 1833 (aff. Clémenceau), et celle de Paris, par arrêt du 21 av. 1836 (aff. Porquet), ont expressément jugé que l'appel est recevable dans ce cas.

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366. Bien que l'on connaisse, en procédure, des ordonnances qui sont rendues par le tribunal entier (c. pr. 191, 192, 325 et 329), il est juste de dire, cependant, qu'une ordonnance, en matière judiciaire, est le plus souvent un acte qui émane d'un seul juge.

Ces ordonnances sont-elles, en général, susceptibles de recours? Et en admettant l'affirmative, quel est ce recours; est-ce l'opposition ou l'appel?

La jurisprudence et la doctrine présentent, sur ce point, les solutions les plus divergentes. La difficulté tient ici non-seule ment au silence que le législateur a gardé dans un grand nombre de cas, mais encore et surtout au caractère qu'il convient d'attribuer à ces actes. Il ne convient pas de déterminer ici ce caractère; c'est particulièrement dans notre article Ordonnance du juge que nous nous occuperons de cet objet. Mais nous pouvons dès à présent constater une distinction qui, si elle n'est pas écrite dans la loi, en résulte du moins virtuellement et qui, par ce motif, est admise unanimement par les auteurs. C'est que, parmi les ordonnances émanées d'un seul juge, il en est qui sont des actes de simple instruction, ayant pour objet seulement l'avancement de la cause, et d'autres qui présentent le caractère d'une décision véritable. C'est cette distinction que M. Chauveau caractérise (V. Lois de la proc., t. 1, quest. 378) en signalant, dans le code de procédure, la part que le législateur a faite à la juridiction contentieuse et à la juridiction gracieuse; la première, d'après l'auteur, « qui est celle qui a pour mission de décider entre les prétentions rivales de deux parties que la loi met en présence; » la seconde, « celle qui prononce sur les demandes d'une partie que la loi autorise à se présenter seule, sans appeler l'adversaire qui pourrait avoir quelque intérêt à le contredire. » Sauf la différence dans la terminologie, cette distinction, comme nous l'avons dit, est admise par tous les auteurs. V. MM. Talandier, de l'Appel, nos 35 et suiv.; Rivoire, eod., nos 74 et suiv.; Debelleyme, Ord. sur requêtes et référés, 2o édit., t. 1, p. 88, 118 et passim; Rodière, Exposition raisonnée des lois de la comp. et de la proc., t. 2, p. 433 et suiv.

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367. De cette distinction même, semble résulter la solution de la question proposée. Car, en principe, il en doit être des ordonnances comme des jugements; et de même que ceux-ci ne donnent lieu à un recours qu'autant qu'ils présentent les caractères de jugements véritables, de même aussi les ordonnances semblent ne devoir être attaquées que lorsqu'elles constituent une décision judiciaire. D'après cela, l'acte émané du juge agissant dans les limites de la juridiction gracieuse ne serait pas sujet à un recours : au contraire, le recours semblerait devoir être ouvert contre toute decision émanée du juge agissant dans le cercle de la juridiction contentieuse. Ainsi, dit avec raison M. Rodière, loc. cit., un président permet de citer ou d'exécuter un jour de dimanche ou fête, où il abrége les délais de la comparution; un juge autorise une saisie-arrêt, une saisie-gagerie ou toute autre saisie conservatoire en faveur d'un créancier qui n'a pas de titre écrit ; non-seulement ces ordonnances ne jugent rien, mais encore le

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préjudice qu'elles causent est nul ou à peu près nul. Des intérêts peuvent se trouver froissés, aucun droit n'est compromis; et l'on sait quel immense intervalle sépare l'intérêt du droit; partant, aucun recours n'est ouvert. Au contraire, un juge-commissaire aura fixé pour l'audition des témoins un jour tellement rapproché qu'il sera impossible de faire l'enquête régulièrement, ou tellement éloigné qu'une partie pourra en éprouver un dommage notable; il aura, dans une procédure de vérification d'écritures, refusé d'ordonner que le défendeur ferait un corps d'écriture: dans une reddition de compte, il aura refusé d'accorder un exécutoire pour l'excédant avoué de la recette sur la dépense; dans tous ces cas et dans une foule d'autres semblables, la partie lésée est fondée à se plaindre. - V. conf. les auteurs cités au no précédent.

368. Mais quel sera le moyen qu'elle devra prendre? La raison semble indiquer la voie de l'opposition comme la plus simple, sauf dans les cas d'urgence qui ne comportent pas de lenteurs, où l'appel doit être préféré, ainsi que le prescrit la loi elle-même, pour les ordonnances de référé (c. pr. 809) dont nous allons nous occuper spécialement tout à l'heure. Dans tous les autres cas, la voie de l'opposition peut être utilement employée, d'abord. On l'a dit justement: on ne procède pas autrement en matière de distribution par contribution et d'ordre; le travail du commissaire est d'abord querellé devant le tribunal avant d'être soumis à la cour il y a même raison de décider en toute autre matière (V. M. Rodière, loc. cit., p. 435). Ajoutons encore que l'opposition peut quelquefois être portée devant le juge lui-même; et que dans ce cas encore, si l'opposition ne réussit pas, il n'y a lieu qu'à l'appel, à moins que la loi nel'interdise, le tribunal ne pouvant pas être saisi, puisqu'il ne pourrait l'être que par une opposition, ce qui serait impraticable en vertu de la maxime opposition sur opposition ne vaut.

369. Telles sont les solutions qui, dans le silence de la loi, pourraient être proposées. Mais il s'en faut que, dans l'application, ces règles, d'ailleurs très-simples, aient été suivies rigoureusement. C'est ce qui va être établi par l'examen que nous allons faire des ordonnances rendues dans des hypothèses diverses. En suivant l'ordre adopté à cet égard par les auteurs (V. notamment M. Talandier, loc. cit.), nous parlerons successivement des ordonnances rendues en référé, des ordonnances qui permettent d'arrêter un étranger, des ordonnances d'envoi en possession, des ordonnances qui permettent d'assigner à bref délai, de celles qui condamnent un témoin défaillant à l'amende, de celles qui fixent les lieux, jours et heures d'une descente, de celles qui fixent le jour d'un interrogatoire, de celles qui enjoignent une remise de pièces, de celles qui portent règlement des qualités, de celles qui permettent une saisie-arrêt, des ordonnances rendues par le jugecommis à l'examen d'un compte, des ordonnances d'exécution d'un jugement arbitral, de celles qui sont rendues en matière de distribution et d'ordre, des ordonnances afin d'autoriser la femme à poursuivre sa séparation, enfin des ordonnances du président du tribunal de commerce.

En général,

370. 1o Des ordonnances rendues en référé. les ordonnances de référé sont considérées comme de véritables jugements. Le président ou le juge exerce alors une juridiction propre, et non pas un pouvoir emprunté. En conséquence, ces ordonnances sont sujettes à l'appel (art. 809 c. pr.). Ces ordonnances ne sont pas susceptibles d'opposition; il y aurait donc excès de pouvoir dans la décision qui admettrait cette voie. Ainsi jugé, à l'occasion de l'ordonnance du président qui commet un avoué pour la notification d'un contrat d'acquisition aux créanciers inscrits, conformément à l'art. 832 c. pr. (Req., 13 févr. 1839, aff. Besançon, V. Référé).

371. Mais l'appel peut-il être formé contre l'ordonnance ellemême, ou bien faut-il qu'un jugement soit préalablement intervenu, qui ait apprécié cette ordonnance? Avant le code de procédure, l'appel pouvait, sans aucun doute, être formé contre l'ordonnance elle-même; c'est ce qui a été virtuellement consacré par un arrêt de la cour de cassation, qui a fait aux ordonnances sur référé l'application de la règle posée par la loi du 24 août 1790 et suivant laquelle on ne pouvait appeler, avant la huitaine, d'aucun jugement contradictoire, exécutoire par provision (Cass., 1er prair. an 13, aff. Bourdon-Neuville, V. n° 839). L'assimila

tion des ordonnances rendues en référé aux jugements, assimilation que l'on fait encore généralement aujourd'hui, conduit à la même solution. Disons-le cependant, un doute s'est élevé de la rédaction même de l'art. 809 du code de procédure, dont le 3e alinéa est ainsi conçu: « Dans les cas où la loi autorise l'appel, cet appel pourra être interjeté même avant le délai de huitaine, à daler du jugement, et il ne sera point recevable, s'il a été interjeté après la quinzaine de la signification du jugement. » L'expression de jugement deux fois employée dans le même article semblait être mise en opposition avec le mot ordonnance, et entraîner la nécessité d'une décision du tribunal pour faire courir les délais de l'appel. - Mais cette procédure inusitée, que rien ne motiverait, serait contraire au but que le législateur s'est proposé en instituant les référés, la prompte expédition des affaires urgentes. Aussi doit-on tenir pour certain que c'est par inadvertance que le mot jugement a été employé dans l'article, au lieu du mot ordonnance. Ce qui achève de lever toute espèce de doute, c'est la rédaction de l'art. 149 du tarif, qui règle les frais faits sur les appels des ordonnances de référé. Telle est, au surplus, l'opinion de tous les commentateurs.-V. MM. Carré et son annotateur Chauveau, quest. 2774; Bilhard, des Référés, p. 741; Debelleyme, t. 2, p. 47; Thomine-Desmazures, t. 2, n° 947; Favard, vo Référé, p. 778; Pigeau, t. 1, p. 115; Bioche, vo Appel, n° 46; Talandier, de l'Appel, n° 37.

372. Et cette doctrine a été confirmée implicitement par la cour de Turin, qui a reçu un appel contre lequel l'intimé avait élevé une fin de non-recevoir, tirée des termes de l'art. 809 (Turin, 19 août 1807 (1).—Conf. Poitiers, 16 fév. 1807, aff. Ollivier). On trouvera, au mot Frais et dépens, une décision analogue de la cour de cassation, du 12 avril 1820 (aff. hér. Étignard).

373. On peut appeler non-seulement de l'ordonnance qui autorise ou refuse la mesure d'urgence, mais encore de celle qui déclare qu'il n'y a lieu à référé, ou renvoie à se pourvoir au principal, ou joint le référé au principal. M. Debelleyme, qui professe aussi cette doctrine (t. 2, p. 48), cite néanmoins un arrêt de la cour de Paris, du 13 mars 1824 (aff. Kopkinson) qui la contredit : « Considérant que le droit du juge de statuer en référé n'est que facultatif, et qu'à son défaut d'user de ce droit, les parties n'ont qu'à se pourvoir par les voies ordinaires, dé

(1) Espice : - (Malingri-Balagno C. Barroco) - Une ordonnance de référé avait été rendue par le président du tribunal civil de Turin, au préjudice de Malingri-Balogno, en faveur de Barroco. Appel par Balogno. L'intimé soutenait que l'appel était non recevable, parce que l'ordonnance n'avait pas rempli le premier degré de juridiction, qui ne peut être épuisé que par un jugement, et il argumentait de la rédaction de l'art. 809; mais cette fin de non-recevoir a été rejetée. -- Arret.

LA COUR; Considérant que l'objet sur lequel a été rendue l'ordonDance dont il s'agit excédant incontestablement la valeur à concurrence de laquelle les tribunaux de première instance sont autorisés à prononcer en dernier ressort, il n'y a pas de doute qu'elle ne soit sujette à l'appel, en conformité de l'art. 809 c. pr.;-Reçoit le sieur Malingri-Balogno appelant de l'ordonnance sur référé, du 31 mars dernier.

Du 19 août 1807.-C. de Turin.

(2) Espèce: (Pellerin C. héritiers Vittoux.) Le 5 frim. an 4, jugement de condamnation en dernier ressort au profit des héritiers Vittoux, contre le sieur Pellerin. Celui-ci forma opposition aux poursuites dirigées contre lui, et une ordonnance de référé, en date du 4 niv. an 6, suspendit l'exécution du jugement. - Appel de cette ordonnance, par les héritiers Vittoux. - Pellerin soutint que leur appel était non recevable, parce que l'ordonnance de référé, rendue sur un jugement en dernier ressort, était identifiée avec le jugement; que la loi du 24 août 1790, en fixant l'étendue du dernier ressort, n'avait point distingué entre les jugements ordinaires et les ordonnances de référé; qu'ainsi l'on devait les mettre sur la même ligne.-Les appelants répondaient qu'une ordonnance de référé n'était jamais susceptible du dernier ressort, puisqu'il n'était pas possible d'évaluer les obstacles sur lesquels elle prononce; ils ajoutaient que le pouvoir de statuer en dernier ressort donné aux tribunaux, était accordé à la réunion des magistrats composant le tribunal, et non pas à chaque juge individuellement; que l'ordonnance de référé, qui émane d'un juge seul, devait donc être sujette à l'appel. - Arrêt.

LA COUR; En ce qui touche l'appel de l'ordonnance de référé du 5 niv. an 6, sans s'arrêter à la fin de non-recevoir; - Attendu qu'un juge de référé n'est jamais juge en dernier ressort; Met l'ordonnance dont est appel au néant; Ordonne que les poursuites seront continuées, etc. Du 15 niv. an 13.-C. de Paris, 1re sect.

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clare l'appel non recevable. » — « Je ne pense pas, ajoute avec raison M. Debelleyme, que le droit du juge soit facultatif, et qu'il puisse priver les parties d'une juridiction prompte, avec exécution provisoire.... L'appel était recevable, sauf à maintenir ou à réformer la décision. »

374. Mais l'appel serait non recevable, si l'ordonnance avait été exécutée sans réserves (Paris, 10 juin 1830, 21 avril 1841, V. M. Debelleyme, p. 56), ou encore s'il y avait été acquiescé (Paris, 12 avril et 13 déc. 1831, V. ibid., p. 55). Il serait recevable, au contraire, si l'appelant s'en était seulement rapporté à justice (Paris, 30 août 1839, ibid., p. 49). Ce sont là les règles qui sont suivies à l'égard des jugements (V. suprà, la section 1 de ce chapitre, et notre traité de l'Acquiescement). Il n'y aurait donc aucun motif de s'en écarter pour les ordonnances sur référé qui ont le caractère de jugements.

335. L'appel des ordonnances de référé est soumis aux règles ordinaires de deux degrés de juridiction. C'est encore une suite naturelle de l'assimilation de ces ordonnances aux jugements.

376. Cependant, malgré cette assimilation qui, ainsi qu'on l'a vu, était également faite avant le code de procédure, on décidait que l'appel des ordonnances de référé était recevable, lors même qu'elles avaient pour objet l'exécution d'un jugement rendu en dernier ressort (Paris, 15 niv. an 13) (2). Et, depuis le code de procédure, il existe un arrêt de la même cour qui a consacré cette doctrine (Paris, 24 août 1831) (3). Mais les auteurs se sont généralement prononcés en sens contraire, et cela se justifie complétement par les termes de la loi. L'art. 809, relatif aux ordonnances de référé, contient ces mots : dans les cas où la loi autorise l'appel...: or, les cas où la loi n'autorise pas l'appel ne sont autres que ceux où la contestation était de nature à être jugée en dernier ressort (V. conf. MM. Pigeau, t. 1, p. 115; Berriat-Saint-Prix, p. 343, no 11; Carré et son annotateur Chauveau, Lois de la proc. civ., quest. 2776; Poncet, Traité des jugements, no 40, t. 1, p. 54; Thomine-Desmazures, t. 2, no 947; Bioche, vo Référé, no 71; Bilhard, Tr. des référés, p. 743; Talandier, de l'Appel, no 37; Boitard, t. 3, p. 400; Debelleyme, 2e édit., t. 2, p. 49). Telle est aussi la jurisprudence des tribunaux (Turin, 16 oct. 1807) (4). - V. conf. les arrêts nombreux, et notamment Paris, 9 août 1836, aff. Socard; Amiens,

(3) Espèce : — (Jacquelier C. Pionnier.) — Pionnier a été condamné par défaut, au tribunal de commerce, à payer 1,000 fr. à Jacquelier. — Sur le procès-verbal de saisie pratiquée en vertu de ce jugement, Pionnier forme une opposition qu'il ne réitère pas dans les trois jours, suivant l'art. 458 c. pr. - Jacquelier continue ses poursuites. - Alors Pionnier se pourvoit en référé, et soutient que, bien que non réitérée dans les trois jours, son opposition devait arrêter l'exécution, tant que le juge ne l'avait pas déclarée nulle; que l'art. 438 c. pr. ne dit rien de contraire, en déclarant seulement que l'opposition non réitérée sera censée non avenue; que, quant à l'art. 162 c. pr., portant que l'exécution peut être poursuivie, sans qu'il soit besoin de la faire ordonner, il ne s'applique pas aux jugements des tribunaux de commerce, lesquels ont leurs règles exclusives dans l'art. 438.

Ordonnance du président qui, «< attendu qu'il y avait opposition au jugement par défaut, et qu'on ne pouvait statuer en référé sur le mérite d'une opposition, ordonne la discontinuation des poursuites. >>

Appel de Jacquelier. L'intimé oppose une fin de non-recevoir tirée de ce que l'ordonnance étant intervenue sur l'exécution d'un jugement en dernier ressort, se trouvait, aussi bien que le jugement, non susceptible d'appel, l'exécution n'étant, suivant lui, que l'accessoire du jugement qui avait statué au fond. - Arrêt.

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27 août 1838, aff. Levavasseur, qui sont rapportés vo Degrés de juridiction; V. aussi Turin, 19 août 1807, aff. Malingri, n° 372.

377. Il n'y a dissidence entre les auteurs que sur la question importante de savoir quelle est la voie ouverte à la partie condamnée, contre une ordonnance non susceptible d'appel. M. Pigeau, loc. cit., pense que le code n'ayant pas prévu ce cas, il y a lieu d'admettre l'opposition, telle que l'art. 403 c. pr. l'autorise, contre l'ordonnance du président mise au bas d'une taxe de dépens. Mais MM. Berriat-Saint-Prix, Carré et Chauveau, loc. cit., et DemiauCrouzilhac, p. 489, enseignent que l'opposition ne serait pas recevable, parce que l'art. 809, qui la refuse, est conçu en termes trop généraux pour admettre aucune distinction; la partie lésée n'aurait, selon ces auteurs, d'autre moyen que de se pourvoir au principal, et nous partageons cette doctrine.

378. Du reste, notons deux cas dans lesquels la quotité de la somme qui fait l'objet du litige n'influe pas sur le droit de se pourvoir par appel. C'est : 1° lorsque la partie condamnée attaque l'ordonnance du juge de référé comme rendue hors des limites de sa compétence, ou lorsqu'elle prétend que le juge s'est à tort déclaré incompétent (V. conf. MM. Chauveau sur Carré, Lois de la proc. civ., quest. 2776, et Thomine-Desmazures, t. 2, p. 399. V. aussi Paris, 13 oct. 1841, aff. Say-Parry, vo Référé).

379. 2° Lorsqu'il s'agit d'objets d'une valeur indéterminée; spécialement, l'appel est recevable contre l'ordonnance de référé qui décharge un gardien de meubles d'une valeur indéterminée, bien qu'elle lui adjuge des dommages-intérêts inférieurs au taux du dernier ressort (Poitiers, 25 fév. 1834, aff. Seigneuret, V. Degré de juridiction); spécialement encore, est susceptible d'appel l'ordonnance qui prononce sur une demande en revendication de meubles compris dans une saisie-exécution, bien que la créance objet de la saisie soit inférieure au taux du dernier ressort (Aix, 1er fév. 1831, aff. Graff, V. Ibid. - Conf. M. Debelleyme, p. 54).

380. Ajoutons, en terminant, que les règles relatives à l'appel des ordonnances s'appliquent aux jugements sur référés renvoyés à l'audience parce qu'ils remplacent les ordonnances. V. conf. M. Debelleyme, t. 2, p. 57, qui cite plusieurs arrêts à l'appui de cette doctrine.-V., d'ailleurs, notre traité des Référés. 381. 2o Ordonnances qui permettent d'arrêter un étranger. La contrainte par corps est un mode d'exécution des obliga

(1) Espèce (Orenze C. Vasquez et Cie.) — 23 mars 1832, requête par le sieur Mathieu Durou, agissant comme associé de la maison Vasquez et Cie, au président du tribunal civil de Bordeaux, afin d'être autorisé à procéder à l'arrestation provisoire du sieur Orenze. Cette demande était fondée sur la qualité d'étranger d'Orenze et sur ce qu'il était débiteur de la maison Vasquez et Cie de 57,236 fr. L'autorisation d'emprisonnement est accordée, et, suivant procès-verbal d'écrou, en date du 28 avril, l'arrestation eut lieu. Mais Orenze obtint sa mise en liberté au moyen d'un cautionnement fourni par le sieur de Goyeneche. Le 10 mai 1832, Orenze et Goyeneche intentèrent contre les sieurs Durou, Vasquez et Cie, une demande principale tendant à la nullité de l'emprisonnement et du cautionnement, et à 50,000 fr. de dommages-intérêts. Vasquez et Cie déclinèrent la compétence du tribunal, parce que l'ordonnance du président n'avait pas été frappée d'appel.

21 mai 1832, jugement du tribunal civil de Bordeaux, qui se déclare compétent, annule l'emprisonnement et le cautionnement, et condamne Vasquez et Cie à des dommages-intérêts, en ces termes :

<< Attendu qu'il est établi par l'art. 809 c. pr. que les ordonnances rendues en référé par le président du tribunal ne peuvent porter aucun préjudice au principal; que les parties contre lesquelles ces ordonnances ont été rendues n'ont pas moins la faculté de se pourvoir au principal devant le tribunal qui a le droit de prononcer sur ce point; que ces règles existent à plus forte raison au sujet des ordonnances rendues par le président du tribunal sur simple requête et en vertu du pouvoir discrétionnaire que la loi lui accorde; qu'ainsi l'ordonnance par laquelle le président du tribunal a autorisé une saisie-arrêt, une saisie-revendication ou toute autre mesure de ce genre, n'empêche pas celui au préjudice duquel la saisie est faite de se pourvoir au principal pour en faire déclarer la nullité; Que la loi du 10 sept. 1807 a investi le président du tribunal du pouvoir d'ordonner, sur simple requête, l'arrestation provisoire d'un étranger à la requête d'un Français qui a sur lui une créance échue et exigible, quoique non suivie de condamnation; que l'ordonnance qui autorise cette mesure de police, et qui ne peut jamais porter préjudice au principal, n'empêche pas celui dont l'arrestation a été effectuée de faire juger, s'il y a lieu, que la loi du 10 sept. 1807 n'est nullement applicable au cas où se trouvaient

tions d'un étranger envers un Français. Et, en effet, il résulte de la loi du 10 sept. 1807, art. 1, que tout jugement de condamnation qui intervient au profit d'un Français contre un étranger non domicilié en France, emporte la contrainte par corps, disposition qui, on le sait, a été reproduite dans l'art. 14 de la loi du 17 avril 1832. Mais ce n'était pas assez de donner cette sanction aux jugements; il fallait accorder au créancier français d'autres garanties contre un débiteur que rien n'attache au sol, et qui, par ce motif, en peut à chaque instant disparaître : aussi, le même article de cette dernière loi donne pouvoir, avant le jugement de condamnation, mais après l'échéance ou l'exigibilité de la dette, au président du tribunal dans l'arrondissement duquel se trouve l'étranger non domicilié, d'ordonner, s'il y a de suffisants motifs, l'arrestation provisoire sur la requête du créancier français, à moins que l'étranger ne possède des immeubles suffisants ou ne fournisse caution.

382. L'exercice de ce pouvoir accordé au président est trop grave pour que l'ordonnance qui en résulte puisse être considérée comme ne donnant lieu à aucun recours. Aussi la possibilité du recours est admise par tous les auteurs. Mais, selon les uns, c'est la voie de l'opposition qui doit être prise d'abord, sauf ensuite, en cas d'insuccès, à recourir à l'appel (V. conf. M. Talandier, de l'Appel, no 44); selon d'autres, l'ordonnance ne serait attaquable que par la voie de l'appel.-V. MM. Rivoire, de l'Appel, n° 76, et Debelleyme, t. 2, p. 573.

383. C'est aussi ce qui résulte de plusieurs arrêts. Ainsi la cour de cassation a jugé que l'appel de l'ordonnance est recevable · pendant trois mois (Req., 22 avril 1818, aff. Mendiri, V. Contrainte par corps). La cour de Pau à décidé qu'un tribunal ne peut connaître du mérite de l'ordonnance par laquelle le président a permis l'emprisonnement provisoire d'un étranger (Pau, 27 mai 1830, aff. Martinez, V. eod. et Ordonnance du juge).

384. Mais la cour de cassation, revenant sur la doctrine qu'elle avait elle-même consacrée, a jugé, plus tard, que l'ordonnance pour l'arrestation provisoire d'un étranger n'est qu'une mesure de police facultative, abandonnée à la prudence des présidents des tribunaux civils, et dépourvue des éléments constitutifs d'un jugement de première instance; que, par suite, elle n'est pas susceptible d'appel et doit être attaquée par voie d'action principale devant le tribunal civil (Cass., 2 mai 1837) (1).

385. Remarquons cependant que cet arrêt est rendu par ap

les parties, et pour demander tant la cessation de la capture faite de sa personne, que des dommages-intérêts à titre d'indemnité; qu'ainsi, l'exception d'incompétence proposée par les sieurs Vasquez et Cie étant aussi contraire aux règles du droit qu'aux principes d'humanité, doit être rejetée par le tribunal. » (Suivent les motifs sur le fond.)-Appel par Vasquez et Cie. 6 déc. 1833, arrêt de la cour de Bordeaux qui infirme et accueille l'exception d'incompétence, en ces termes : « Altendu que l'arrestation provisoire du débiteur étranger, dans les cas prévus par la loi, est une garantie extraordinaire accordée au créancier français; - Que cette mesure ne peut avoir d'effet qu'autant qu'elle est prise et exécutée avec célérité et en secret; qu'elle fut considérée comme mesure de police par l'orateur du gouvernement, chargé d'exposer les motifs de la loi du 10 sept. 1807, lequel fit encore observer qu'il ne fallait pas y faire intervenir tout l'appareil judiciaire ;—Attendu que la loi attribue spécialement au président du tribunal civil le pouvoir de statuer sur la demande du créancier, d'en juger les motifs et d'ordonner l'arrestation provisoire de l'étranger; que, par conséquent, la décision de cette question n'est pas soumise au tribunal, mais seulement au magistrat qui le préside; qu'il faut en conclure que, dans cette circonstance, le tribunal civil n'est point appelé à connaître de l'ordonnance de son président, qu'il est incompétent pour la réformer, et que la voie de l'appel est la seule régulière. »Pourvoi.Arrêt.

LA COUR; Vu la loi du 1er mai 1790, l'art. 2 de la loi du 10 sept. 1807 et l'art. 445 c. pr. civ. ; — Attendu que l'ordonnance pour l'arrestation provisoire d'un étranger, énoncée en l'art. 2 de la loi du 10 sept. 1807, n'est qu'une mesure facultative abandonnée à la prudence des présidents des tribunaux civils, qui examinent si la créance du Français sur l'étranger est échue ou exigible, et s'il y a des motifs suffisants pour ordonner l'arrestation; - Que cette ordonnance est accordée aux périls et risques du Français qui la réclame et sans que l'étranger soit entendu ou appelé; - Qu'elle n'est point rendue avec l'accomplissement des formalités prescrites pour les jugements et n'en offre pas les garanties, et qu'elle est, dès lors, dépourvue des éléments constitutifs d'un jugement en première instance; Que si, par des considérations d'intérêt national, la loi du 10 sept. 1807 s'est écartée des principes tutélaires du droit com

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