Page images
PDF
EPUB

171. Cependant la cour de cassation a décidé que, sous cette législation, un tribunal qui pouvait prononcer en dernier ressort sur le fond du procès pouvait aussi régler souverainement sa compétence (Rej., 3 vend. an 10; Cass., 18 mars 1806) (1).-La cour de cassation a rendu une décision semblable le 9 vend. an 13 (aff. Ligné et Dardelle C. Bombart, V. Acte de commerce, sous le n° 371, 2e motif).

172. Mais si la question de l'appel des jugements sur la compétence a été, sous l'ancienne jurisprudence, l'objet de quelques contestations, la loi nouvelle nous paraît avoir levé tous les doutes.

Le code de procédure statue, art. 434, que, « lorsqu'il s'agira d'incompétence, l'appel sera recevable, encore que le jugement ait été qualifié en dernier ressort. »-Les termes de cet article considéré isolément sembleraient indiquer seulement que l'appel d'un jugement d'incompétence rendu en premier ressort sera recevable, quoique les juges l'aient mal à propos qualifié en dernier ressort. Alors l'art. 454 contiendrait un principe semblable à celui de l'art. 455 qui permet d'appeler des décisions qui ne pouvaient être rendues qu'à charge d'appel, mais qui auraient été illégalement qualifiées en dernier ressort.-Telle avait été d'abord l'opinion de M. Pigeau dans la première édition de son traité. — Mais si l'art. 454 devait être entendu ainsi, il serait complétement inutile, puisqu'il n'offrirait que la répétition de la première partie de l'art. 453; et comment supposer que deux dispositions si rapprochées ne soient que la répétition l'une de l'autre? Il est plus naturel de penser que l'art. 454 établit une règle particulière, dont l'objet est d'ouvrir la voie d'appel contre tout jugement qui prononce sur un point de compétence. Cette exception est d'ailleurs appuyée sur un motif puissant d'ordre public; il importe que les tribunaux ne sortent point des limites de leur juridiction; or les usurpations seraient faciles et irréparables, si les décisions sur la compétence étaient souveraines et ne pouvaient être réformées. 173. A cet égard, on peut dire que l'art. 454 a fait pour les tribunaux civils ce que l'art. 425 a fait pour ceux de commerce, en ordonnant que, dans les jugements commerciaux, les dispositions sur la compétence puissent toujours être attaquées par la voie d'appel. C'est en ce sens, du moins, que l'art. 425 a été, avec toute raison, interprété par la cour de Liége le 22 avril 1829, et par celle de Paris le 20 fév. 1812 (2). Mais si dans les affaires de commerce, où la célérité de la procédure est l'un des plus grands intérêts des parties, l'appel est permis,

[ocr errors]

(1) 1 Espèce: (Lanteyres C. Chateignier.) — Il s'agissait du payement d'un cheval d'une valeur moindre de 1,000 fr. On avait préalablement proposé un moyen d'incompétence, fondé sur ce que l'obligation avait eu d'abord pour cause une opération administrative. - Le 19 pluv. an 8, jugement du tribunal civil de l'Ardèche, qui statue sur la compétence en dernier ressort.

Pourvoi par Lanteyres-Lagelle.- Arrêt.

LA COUR;-Attendu que l'objet en contestation n'excédait pas la compétence en dernier ressort du tribunal de première instance, et que l'intérêt de la compétence ne pourrait pas plus être apprécié que celui du fond;Que la compétence n'est pas jugée en général, auquel cas seul elle serait inappréciable, mais relativement à un objet déterminé; - Que, d'ailleurs, la loi d'août 1790 ne fait point une exception relativement au jugement d'incompétence, dans l'attribution qu'elle donne indéfiniment aux tribunaux de district, et qu'elle veut qu'ils jugent sans appel toute cause personnelle non excédant 1,000 fr.; — Rejette, etc.

Du 3 vend. an 10.-C. C., sect. civ.-MM. Maleville, pr.-Babille, rap.

2o Espèce :-(Vincent C. Charlet.) — Vincent acheta de Charlet, au marché aux chevaux à Paris, un cheval qui fut payé 246 fr. Vincent, ayant reconnu et fait constater par experts un vice rédhibitoire, assigna Charlet au tribunal de commerce en restitution des 246 fr. et en reprise de son cheval.-Charlet opposa un déclinatoire, fondé sur ce qu'il n'était point marchand de chevaux, et qu'ainsi il devait être jugé par les tribunaux civils. Le 3 flor. an 13, jugement qui, sans avoir égard au déclinatoire, condamna Charlet en dernier ressort à rendre les 246 fr. Appel pour incompétence. Vincent soutint qu'il était non recevable, puisque le tribunal de commerce pouvait statuer en dernier ressort, comme il l'avait fait. La cour d'appel de Paris déclara, par arrêt du 19 prair. an 13, qu'il avait été mal, nullement et incompétemment jugé; que les tribunaux inférieurs ne sont pas juges souverains de leur compétence, et que Charlet, qui n'était pas marchand, n'avait pu être soumis à la juridiction commerciale, par cela seul qu'il aurait vendu son cheval au marché public.

Arrêt.

LA COUR;

Vu l'art. 4 du tit. 12 de la loi du mois d'août 1790, et

n'en doit-il pas être de même, à fortiori, en matière civile? On a objecté que, lorsque la loi ouvrait l'appel contre un jugement d'incompétence, susceptible d'ailleurs du dernier ressort, elle l'exprimait formellement; c'est ce qu'elle a fait pour le jugement de récusation, art. 391, et pour les sentences rendues par les juges de paix après la péremption acquise par une interruption de procédure pendant quatre mois (art. 15). — V. suprà, nos 163 et s. Mais quand on ne pourrait pas regarder la disposition de l'art. 391 comme une de ces inutilités qui échappent quelquefois au législateur, on concevrait que le respect dû à la magistrature ait demandé pour les jugements de récusation une consécration plus spéciale de la règle commune (V. le Praticien français, t. 2, p. 597).—Quant aux juges de paix, l'appel de leurs sentences, quoique souveraines, n'est qu'une conséquence de la disposition de l'art. 454; car, une fois la péremption acquise, le juge de paix est dessaisi de l'affaire, il n'a plus de compétence pour y statuer. Mais il fallait néanmoins, pour faire disparaître toute difficulté à cet égard, qu'une disposition expresse déclarât que l'appel, dans ce cas, serait toujours recevable.

174. Au surplus, l'opinion que nous venons d'émettre est conforme au sentiment de tous les auteurs qui ont écrit sur la procédure. M. Pigeau, 3e édit., t. 1, p. 518, abandonnant sa première doctrine, enseigne que l'appel d'un déclinatoire est toujours recevable, quand même le fond serait susceptible du dernier ressort, ce qu'il répète encore à la p. 582 ( V. aussi MM. Carré, Analyse du code de proc., t. 2, p. 55; Lois de la pr. civ., quest. 1635; Poncet, Traité des jugements, t. 1, p. 472, no 291; Favard de Langlade, t. 1, p. 160; ThomineDesmazures, t. 1, p. 693; Hautefeuille, p. 256; Boitard, t. 3, p. 98, et Chauveau sur Carré, Lois de la proc., loc. cit.). C'est aussi, dans les Pays-Bas, un principe législativement consacré. Le code de procédure de cette nation porte en effet : « Lorsqu'il s'agira d'incompétence, l'appel sera recevable, encore que le juge dont la compétence sera contestée puisse connaître en dernier ressort de la demande principale » (liv. 1, tit. 6, art. 2).

175. Enfin, la jurisprudence s'est prononcée dans le même sens (Bruxelles, 27 juin 1807 et 10 juin 1808; Trèves, 14 mars 1808; Limoges, 30 juil. 1819; C. C. de Belgique, 15 juin 1835) (5).

l'art. 65 de la constitution de l'an 8;-Attendu que, dans l'espèce, où la demande principale n'avait pour objet qu'une somme de 246 fr., le tribunal de commerce de Paris était autorisé par la loi à prononcer en premier et dernier ressort, ainsi qu'il l'a fait; qu'en principe, les tribunaux ont les mêmes pouvoirs pour juger les exceptions que pour les causes principales; qu'ainsi le tribunal de commerce était juge souverain de l'exception déclinatoire proposée devant lui, comme il l'était du principal; - Attendu que le jugement rendu par ce tribunal au souverain n'était pas susceptible d'être attaqué par appel, mais seulement par voie de cassation; - Donne défaut, et, pour le profit, casse.

Du 18 mars 1806.-C. C., sect. civ.-MM. Maleville, pr.-Chasle, rap.Giraud, subst.

(2) 1re Espèce :— - (N... C. N...) — LA COUR;· - Vu l'art. 425 c. pr.; Attendu qu'il résulte de la disposition de cet article que l'appel est toujours recevable quant à la compétence; - Attendu qu'il s'agit de l'interprétation d'un contrat de société fait entre des entrepreneurs de messageries publiques; qu'une entreprise de cette espèce est, de sa nature, commerciale, et que les contestations qui en sont la suite doivent être soumises aux juges de commerce; Attendu que l'objet de la demande au fond ne se monte qu'à 595 fr. 9 c., et que, d'après les dispositions de l'art. 646 c. com., l'appel ne peut être reçu qu'autant que la somme principale excède 1,000 fr.; - Déclare, quant à la compétence, l'appel recevable; et, faisant droit sur ledit appel, met l'appellation au néant. Du 22 av. 1809.-C. de Liége, 2 ch.

2o Espèce :

l'appel du jugement rendu au tribunal civil de Nogent-sur-Seine, jugeant (Bajard C. Sachot.) - LA COUR; - Faisant droit sur commercialement, le 22 av. 1811; - Attendu qu'en matière de compétence les tribunaux inférieurs ne peuvent prononcer qu'en premier ressort; Met l'appellation au néant, etc.

Du 20 fév. 1812.-C. de Paris, 3 ch.

(3) 1re Espèce:-(Ventusol C. N...) - Au mois de déc. 1806, le sieur Ventusol fut incarcéré pour une dette d'environ 500 fr. - En janv. 1807, il demanda la nullité de son emprisonnement. Le 10 du même mois,

176. Nous inclinerions même à penser que, par application de l'art. 454, on pourrait appeler d'un jugement qui statuerait sur un déclinatoire proposé, soit pour litispendance, soit pour connexité, encore que la valeur en litige n'excédât pas le taux du dernier ressort. Telle est l'opinion de M. Chauveau sur Carré, quest. 1633 quater. V. aussi les quest. 728 et 732; et cette doctrine trouve, à notre avis, un motif fort plausible dans cette considération que le bon ordre de la justice exige qu'il n'y ait pas deux procès pour un, et surtout qu'il n'y ait pas contrariété de jugements.

177. Il est indifférent que l'appel porte sur un jugement contradictoire, ou qu'il soit rendu sur l'opposition à un jugement par défaut. Ainsi, lorsqu'un jugement par défaut a été rendu sur une demande en payement d'une somme inférieure au taux

[blocks in formation]

LA COUR-Attendu que la demande en nullité d'emprisonnement a été intentée depuis le 1er janv. 1807; qu'ainsi elle est soumise aux dispositions du code de procédure civile; que la saisie de la personne de l'intimé -est, non le commencement de l'action, mais que c'est au contraire l'exécution du jugement qui avait terminé la cause entre les parties; - - Attendu que, d'après l'art. 794 c. pr. civ., les demandes en nullité d'emprisonnement sont portées au tribunal civil, et que le président n'en juge en matière de référé que dans les cas qui précèdent l'emprisonnement, suivant l'art. 786 du même code; - D'où il suit que, dans l'espèce, le president a incompétemment et nullement jugé en matière de référé; et altendu qu'aux termes de l'art. 454 c. pr., lorsqu'il s'agit d'incompétence, l'appel est recevable, même dans le cas où le premier juge aurait qualifié son jugement en dernier ressort, et à plus forte raison si le jugement n'est pas qualifié en dernier ressort ;- Par ces motifs, déclare l'appel recevable, et, y statuant, déclare nulle et incompétemment rendue l'ordonnance en référé du 10 janvier dernier, et condamne l'intimé aux dépens, tant de cause principale que d'appel.

Du 27 juin 1807.-C. de Bruxelles, 1e sect. 2 Espèce :-(N... C. N.....) — LA COUR; - Attendu que le jugement dont est appel a été rendu sous l'empire du code de procédure civile, d'après lequel l'appel est recevable en matière de compétence, même quand il s'agirait d'une somme inférieure à 1,000 fr. Du 10 juin 1808.-C. de Bruxelles.

[ocr errors]

3o Espèce: (N... C. N........) — Il avait été procédé, devant le tribunal de Cousel, à l'ordre et distribution du prix d'un immeuble vendu par voie d'expropriation forcée devant le tribunal civil de la Sarre. Depuis le jugement homologatif de l'ordre, un des créanciers s'étant aperçu qu'un autre créancier qui le primait avait été colloqué, par une erreur de calcul, pour 300 fr. de plus qu'il ne lui revenait, se pourvut devant le tribunal de Cousel, en rectification du procès-verbal d'ordre, et demanda que le créancier fùt condamné à la restitution de ces 500 fr., pour le couvrir d'autant du déficit qu'il avait éprouvé par l'insuffisance des deniers. — Le créancier, assigné en restitution, prétendit que le tribunal civil de Cousel n'était pas compétent pour prononcer sur la demande formée contre lui. Mais par un seul et même jugement, ce tribunal rejeta l'exception d'incompétence et ordonna la restitution demandée. - Appel de ce jugement, l'appelant soutenant qu'il était nul pour avoir statué sur le déclinatoire en même temps que sur le fond. — Arrêt.

LA COUR; - Attendu qu'il conste qu'un procès verbal d'ordre avait été ouvert devant le tribunal de Cousel, comme représentant le ci-devant tribunal civil de la Sarre, et qu'il s'agissait de la rectification d'une erreur prétendue commise par ledit tribunal de Cousel, d'où il suit que ce dernier tribunal était compétent dans l'espèce; qu'ainsi l'appel d'incompétence est mal fondé, et la demande en nullité n'est pas susceptible d'étre accueillie, la somme formant l'objet de la contestation n'étant pas appelable; -- Déclare l'appelant mal fondé dans son appel d'incompétence, et non recevable dans celui sur le fond.

Du 14 mars 1808.-C. de Trèves.

Nota. En déclarant l'appel mal fondé, quant à la compétence, la cour de Trèves a reconnu nécessairement qu'il était recevable.

4 Espèce (N... C. N........)— Arrêt conforme aux précédents. Du 50 juill. 1819.-C. de Limoges.

5 Espèce:-(Domaines C. Delimborgh.)-LA COUR; Attendu que, dans l'espèce, il ne s'agit ni de droit d'enregistrement ni d'autres impôts indirects, mais de deux rentes constituées dont les arrérages étaient réclamés par l'administration demanderesse; Attendu que l'art. 17, L. 9 oct. 1791, ne concerne que la forme de procéder; - Attendu que ni cette loi ni aucune autre n'a excepté les affaires domaniales de la règle des deux degrés de juridiction; - Attendu qu'il s'ensuit que l'art. 454 e. pr., portant que « lorsqu'il s'agit d'incompétence l'appel est recevable, encore que le jugement ait été qualifié en dernier ressort, » était appli

du dernier ressort, et que l'opposition à ce moyen est fondée sur l'incompétence, l'appel du jugement qui rejette l'opposition est recevable (Metz, 8 mai 1824, aff. Peroche, V. Jugem. par défaut ).

178. On avait douté d'abord que le principe put s'appliquer aux jugements rendus par les juges de paix, et l'on se fondait sur ce que la disposition de l'art. 454 n'était pas reproduite dans le livre spécial qui règle la forme de procéder devant la justice de paix.

Mais la cour de cassation rejetait cette doctrine en décidant que l'appel pour incompétence était recevable contre les jugements des juges de paix, quoiqu'ils fussent compétents pour statuer en dernier ressort sur l'objet de la contestation (Cass., 22 avril 1811 et 22 juin 1812) (1). Cela était admis par les au

cable au cas particulier où il n'a été statué que sur une exception d'incompétence; Attendu qu'il s'ensuit ultérieurement que si le jugement du tribunal de Charleroi, en date du 14 juin 1854, qui a rejeté le déclinatoire proposé par l'administration, infligeait grief à celle-ci, c'est par la voie d'appel et non par un recours en cassation qu'ils auraient dû se pourvoir; Déclare l'administration non recevable en son pourvoi, etc. Du 15 juin 1855.-C. C. de Belgique, ch. civ.-MM. Van Meenen, pr.Wurth, rap.

(1) Are Espèce: (Defarcy et autres C. Hervé.) - LA COUR ; — Vu l'art. 454 c. pr. civ.; — Attendu que la disposition de cet article est générale; que se trouvant au titre unique de l'Appel et de l'instruction, elle gouverne les appels des jugements de justices de paix comme ceux des tribunaux inférieurs; qu'elle n'est contrariée par aucune autre disposition des divers titres du livre premier qui concerne l'instruction devant les justices de paix ; - Que si la loi autorise spécialement, dans certains cas, l'appel des jugements rendus dans les matières où les juges décident en dernier ressort, on n'en peut conclure que le cas d'incompétence du juge de paix, lorsque le fond n'excède pas le pouvoir de son dernier ressort, rentre dans la règle ordinaire, et soit hors l'atteinte de l'appel, puisque le législateur, après avoir déclaré en général, à l'art. 455, que les appels des jugements rendus sur des matières dont la connaissance en dernier ressort appartient aux premiers juges, ne seront pas recevables, dispose de suite, art. 454, que l'appel sera recevable lorsqu'il s'agira d'incompétence, bien que le jugement ait été qualifié en dernier ressort; Qu'ainsi les juges du tribunal de Montfort, en refusant l'action d'appel contre le jugement du juge de paix du canton de Plénan, sous prétexte que le fond de la demande qui lui était soumise était dans les limites de ses pouvoirs pour juger en dernier ressort, ont évidemment contrevenu à la disposition de l'art. 454 c. pr.; · Casse, etc.

Du 22 av. 1811.-C. C., sect. civ.-MM. Muraire, 1er pr.-Rousseau, rap.-Lecoutour, av. gén.-Lavaux et Sirey, av.

·-

LA COUR;

2o Espèce: (Galibert C. Jourdan.) Vu les art. 172 et 454 c. pr., et l'art. 10, tit. 5 de la loi du 24 août 1790:- Et attendu, 1o en droit, que, suivant l'art. 454 c. pr. civ., l'appel est recevable lorsqu'il s'agit d'incompétence, encore que le jugement ait éte qualifié en dernier ressort; - Que cette disposition étant générale et sans exception, et se trouvant placée au titre des tribunaux d'appel, elle est applicable aux jugements rendus en dernier ressort par les juges de paix, comme à ceux rendus en dernier ressort par les tribunaux d'arrondissement; - Mais qu'il résulte de cette disposition, ainsi que des dispositions de la loi du 24 août 1790, que le tribunal qui est saisi, pour cause d'incompétence, de l'appel d'un jugement rendu en dernier ressort, ne peut connaître que des moyens d'incompetence, puisque l'appel n'est recevable que sous le rapport de l'incompétence; Qu'ainsi, lorsque le tribunal décide que le jugement a été compétemment rendu, il n'a pas à examiner le jugement sous d'autres rapports, ni en la forme, ni au fond;- Qu'autrement, n'y aurait pas de jugement en dernier ressort qui ne pût être réformé par un tribunal d'appel, puisqu'il suffirait à la partie qui ne voudrait pas exécuter le jugement, d'interjeter un appel pour cause d'incompétence, et que le tribunal qui serait saisi de cet appel pourrait, même en rejetant les moyens d'incompétence, s'immiscer dans le fond et réformer le jugement pour vice de forme ou pour mal jugé; — Et qu'il en résulterait, en definitive, qu'il n'y aurait réellement de jugements en dernier ressort que ceux qui seraient rendus par les tribunaux d'appel, puisqu'il y aurait un moyen indirect, qui, bien ou mal fondé, soumettrait à l'infirmation, soit en la forme, soit au fond, tous les jugements rendus en première instance, quoiqu'ils fussent en dernier ressort, aux termes des lois;

il

Que, dans l'espèce, les jugements rendus par le juge de paix du canton de Lodève statuaient sur une action possessoire à raison de laquelle les demandeurs n'avaient réclamé que 50 fr. de dommages-intérêts; qu'ils étaient donc en dernier ressort, aux termes de l'art. 10, tit. 5 de la loi du 24 août 1790; et qu'ainsi l'appel n'en était recevable que pour cause d'incompétence, en ce que ces jugements auraient statué sur la propriété; Mais que le tribunal de l'arrondissement de Lodève ne s'est pas borné à

teurs (V. MM. Thomine-Desmazures, t. 1, p. 693, et Carré, | juges? L'affirmative résulte de deux arrêts de la cour de Gre

Lois de la proc., quest. 1636), et aujourd'hui, cette solution a été érigée en disposition législative par la loi du 25 mai 1838, art. 14. Mais, aux termes de cet article, si le juge de paix s'est déclaré compétent, l'appel ne peut être interjeté qu'après le jugement définitif.

179. La règle qui soumet à l'appel tout jugement sur l'incompétence, encore que la valeur du procès soit dans les termes du dernier ressort, est, du reste, susceptible de recevoir son application, soit qu'il s'agisse de la compétence ratione personæ, soit qu'il s'agisse de la compétence ratione materiæ. Dans le projet primitif du code de procédure, la disposition de l'art. 454 avait été formellement restreinte à l'incompétence ratione materiæ. Mais sur les observations du tribunat, tendantes à ce que la règle fût étendue également à l'incompétence ratione personæ, l'art. 454 fut rédigé dans les termes généraux que l'on y remarque aujourd'hui (V. Locré, t. 22, p. 78, no 6). Il en résulte qu'il n'y a pas de distinction à faire, sous le rapport de la faculté d'appeler, entre les deux sortes d'incompétence. C'est d'ailleurs l'opinion généralement admise par les auteurs. - V. MM. Pigeau, Comm., t. 2, p. 28; Favard de Langlade, t. 1, p. 160, no 3; Thomine-Desmazures, t. 1, p. 693; Poncet, t. 1, p. 472, et Chauveau sur Carré, quest. 1635 bis.

180. Mais faut-il, pour que l'appel soit recevable, du chef de la compétence, contre le jugement rendu en dernier ressort, que l'exception d'incompétence ait été proposée devant les premiers

examiner les jugements sous le rapport de l'incompétence; qu'il les a examinés en la forme et au fond; - Qu'en effet, il ne les a pas annulés comme rendus par un juge incompétent, mais comme ayant été rendus irrégulièrement, en ce que, par contravention à l'art. 172 c. pr. civ., le premier jugement aurait prononcé sur le principal, sans avoir préalablement statué sur la compétence; Qu'il a même décidé que la contestation sur laquelle

il avait été statué était de la compétence des juges de paix, puisqu'en annulant les jugements, il a renvoyé la cause devant un autre juge de paix, et qu'ainsi il a annulé, pour toute autre cause que l'incompétence, des jugements rendus en dernier ressort; - D'où il suit qu'il a faussement appliqué et même violé l'art. 454 c. pr. civ.; qu'il a expressément violé l'art. 10, tit. 3 de la loi du 24 août 1790, et commis en conséquence un excès de pouvoir; Casse, etc.

Du 22 juin 1812.-C. C., sect. civ.-MM. Muraire, 1er pr.-Chabot, rap.

(1) 1re Espèce: (Belluard C. Fuzier-Perrin.) Par jugement du tribunal de Bourgoin, faisant fonctions de tribunal de commerce, le sieur Fuzier-Perrin a été condamné, avec contrainte par corps, à payer au sieur Belluard la somme de 644 fr., montant d'un billet à ordre. Appel de la part de Perrin. - Belluard oppose que le jugement a été rendu en dernier ressort. Perrin répond que son appel est fondé sur une incompétence ratione materiæ, proposable en tout état de cause, et sur ce que, d'ailleurs, l'appel serait toujours recevable, quant au chef du jugement qui a prononcé la contrainte personnelle. - Arrêt.

LA COUR;

[ocr errors]

Considérant que la condamnation principale, prononcée par le jugement dont est appel, ne s'élevant pas à la somme de 1,000 fr., cette condamnation est intervenue en premier et dernier ressort; · Considérant que la contrainte par corps, prononcée par le même jugement, se rattachant à la condamnation principale, ne présentant qu'un mode d'exécution de cette condamnation, la disposition qui renferme la contrainte par corps est également intervenue en premier et dernier ressort;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'appel interjeté par Fuzier-Perrin, du jugement dont il s'agit, n'est pas recevable, et que la cour n'a pas à examiner le mérite de ce jugement;

Considérant qu'il est indifférent que Fuzier-Perrin ait, en cause d'appel, élevé une exception d'incompétence, sous prétexte qu'il n'était pas justiciable du tribunal de commerce de Bourgoin, dès que ledit Perrin n'avait point, en première instance, décliné la juridiction de ce tribunal, et que, par conséquent, il n'a point porté devant la cour d'appel d'un jugement qui aurait prononcé sur cette prétendue incompétence, mais celui d'un jugement qui a prononcé, en premier et dernier ressort, sur la demande du sieur Belluard ; — Considérant enfin que, d'après la fin de nonrecevoir qui s'élève contre l'appel de Fuzier-Perrin, et la circonstance qu'aucun déclinatoire n'a été élevé en première instance, qu'aucun jugement n'est intervenu sur la compétence, il s'ensuit évidemment que l'exception d'incompétence proposée, pour la première fois, devant la cour par Fuzier-Perrin, ne peut pas être appréciée par elle; qu'elle ne peut pas mieux être reçue que l'appel qui en a été l'occasion; - Déclare l'appel non recevable.

Du 15 déc. 1823.-C. de Grenoble, 4° ch.-M. Paganon, pr.

2o Espèce: (David et Gaspard C. Olety.) — LA COUR;

- Attendu

noble, qui ont déclaré l'art. 454 c. pr. inapplicable par cela seul qu'on avait négligé de proposer l'incompétence devant le premier juge (Grenoble, 13 déc. 1823 et 12 avril 1826) (1). Cette doctrine serait, à notre avis, trop absolue. Nous admettons, sans doute, qu'il en doit être ainsi dans le cas où il s'agit de l'incompétence ratione persone, puisqu'il est de principe qu'une telle incompétence doit être proposée in limine litis. Mais les arrêts de Grenoble sont intervenus dans une hypothèse où il s'agissait d'une incompétence ratione materiæ. Or, en cas pareil, la solution ne nous paraîtrait plus admissible. Une telle incompétence est esssentiellement d'ordre public, et dès lors proposable en tout état de cause. On l'a dit avec raison, la circonstance de la valeur du litige ne peut rien changer à cette règle souveraine, puisque ce n'est pas cette valeur qui doit être consultée en matière d'incompétence. - V. M. Chauveau sur Carré, quest. 1635.

181. D'après cette distinction, on peut dire : 1° que l'appel contre un jugement du juge de paix qui a statué sur une demande inférieure au taux du dernier ressort est non recevable, alors même qu'il aurait prononcé en même temps, après une enquête, sur une constitution relative au domicile réel d'une des parties, si le déclinatoire n'a pas été élevé devant lui (Req., 14 juillet 1812) (2).

182..... Qu'on ne peut plus, après avoir conclu à la fois sur l'incompétence ratione personæ et sur le fond, appeler pour incompétence (Bruxelles, 25 mai 1807) (3).

qu'il ne s'est agi, devant les premiers juges, que de sommes qui ne s'élevaient pas à 1,000 fr.; Attendu que, dès lors, le tribunal de première instance a prononcé en premier et dernier ressort; — Attendu qu'il est indifférent que les appelants aient, devant la cour, élevé une exception d'incompétence ratione materiæ, dès que les appelants n'avaient point, en première instance, décliné la juridiction du tribunal civil de Grenoble, et que, par conséquent, ils n'ont point porté devant la cour l'appel d'un jugement qui aurait prononcé sur cette prétendue incompétence, mais celui d'un jugement qui a prononcé, en premier et dernier ressort, sur une demande purement mobiliere;

Attendu que l'exception d'incompétence dont il s'agit, n'ayant point été un sujet de discussion en première instance, n'ayant donné lieu à aucune décision de la part des premiers juges, la cour ne serait compétente pour apprécier le mérite de cette exception, proposée pour la première fois devant elle, qu'autant que les premiers juges n'auraient statué qu'en premier ressort sur les demandes portées devant eux, et qu'autant qu'elle pourrait recevoir l'appel de David et de Gaspard; mais que le tribunal de première instance ayant prononcé en premier et dernier ressort, et la cour ne pouvant exercer aucune juridiction au sujet de la chose jugée (laquelle ne s'élève pas seulement à la somme de 400 fr.), il est évident qu'elle est également sans juridiction au sujet de l'exception à la faveur de laquelle David et Gaspard voudraient faire décider que leur appel est recevable;

Attendu qu'il en serait autrement si l'exception d'incompétence avait été proposée et jugée en première instance, quel qu'eût été l'objet du litige au principal, parce que, dans ce cas, la cour aurait été saisie de l'appel d'un jugement qui aurait prononcé sur une question de juridiction, c'est-à-dire d'ordre public; Déclare les appels de David et de Gaspard non rece

vables.

-

Du 12 avril 1826.-C. de Grenoble, 2o ch.-M. Paganon, pr. (2) Espèce - (Gazagne C. Duclos.) - Gazagne, cité devant le bureau de paix en payement d'une somme de 24 fr. qu'il devait à Duclos, demande la nullité de la citation, en ce qu'elle lui avait été donnée à la commune de Champigny, alors que son domicile était à Moutiers.- 23 janv. 1811, jugement interlocutoire qui ordonne une enquête à l'effet de vérifier si le principal établissement de Gazagne n'est pas à Champigny.— 15 mai 1811, jugement définitif qui déclare valable la citation, comme ayant été donnée au domicile réel. - Appel. 12 juill. 1811, jugement du tribunal de Moutiers, qui déclare l'appel non recevable, attendu que l'objet de la demande n'excédait pas 50 fr.

[ocr errors]

Pourvoi pour excés de pouvoir, incompétence et violation de l'art. 454 c. pr., en ce que, 1° le juge de paix était incompétent pour connaître d'une demande relative à un domicile; 2° en ce qu'en cas d'incompétence l'appel est toujours recevable, alors même que le jugement est en dernier ressort. Arrêt.

[ocr errors]
[merged small][ocr errors][merged small]

183. 2o Au contraire que l'appel fondé sur l'incompétence | Carré, Quest. 1655 ter). — Pour ce qui est du parti à prendre absolue du tribunal est recevable, encore qu'on n'ait pas présenté par le tribunal d'appel qui, sur le déclinatoire, a infirmé pour cette exception devant les premiers juges, et que l'objet du litige incompétence, V. plus bas. ne dépasse pas les limites du dernier ressort (Turin, 18 juin 1810; Douai, 21 juillet 1830) (1).

184..... Que, malgré l'acquiescement qui y a été donné, on peut appeler du jugement qui a écarté une fin de non-recevoir fondée sur l'incompétence matérielle du tribunal (Agen, 4 janv. 1814, aff. Calmejane, V. Acquiescement, no 220).

185. Mais, dans tous les cas, lorsqu'un tribunal a reçu l'appel pour incompétence, d'un jugement rendu en dernier ressort, il ne peut statuer que sur les moyens d'incompétence (Cass., 22 juin 1812, aff. Galibert, V. n° 178; Cass., 11 mai 1813, aff. Remy, vo Degré de juridict.).— On comprend, en effet, que la mission du tribunal statuant sur l'appel se borne là, dans ce cas. S'il en était autrement, si le tribunal pouvait encore annuler pour irrégularité autre que l'incompétence, s'il pouvait apprécier ce qui a été jugé au fond, il n'y aurait pas de jugement rendu en dernier ressort, que l'on ne pût, à l'aide d'un déclinatoire bien ou mal fondé, soumettre à l'appel, même pour le fond. Aussi la doctrine consacrée par les arrêts précités de la cour suprême a-t-elle été généralement adoptée (V. MM. Favard de Langlade, t. 1, p. 161, no 4; Boitard, t. 3, p. 99; Chauveau sur

que les appelants n'ont point prétendu que le tribunal civil de Malines était incompétent à raison de la matiere, mais qu'ils ont uniquement dénié que ee fût à ce tribunal qu'il appartenait dans l'espèce de connaître de l'exécution du jugement du tribunal de commerce de Paris; ---Attendu qu'il résulte de la combinaison des art. 169 et 170 c. proc., que la demande en renvoi doit être formée préalablement à toutes autres exceptions et défenses, toutes les fois qu'il n'est pas question d'incompétence à raison de la matière ;- Qu'il est même prescrit par l'art. 172 que la demande en renvoi soit jugée sommairement, sans qu'elle puisse être réservée ni jointe au principal; - Attendu, d'autre part, que ce n'est que lorsque le tribunal devant lequel une demande est portée est incompétent à raison de la matière, qu'il est tenu d'office au renvoi de la cause pardevant qui de droit; Qu'il suit de ces observations qu'en tout autre cas la partie intéressée à opposer l'incompétence, peut renoncer à cette exception, et que, dans le fait, elle y renonce en concluant à la fois sur la question d'incompétence et sur le fond de la cause; elle discute devant le juge qu'elle prétend incompétent le mérite de la question au principal, sans attendre qu'il ait préalablement statué sur sa compétence;- Attendu que, dans l'espèce, les appelants défendeurs originaires, tout en concluant à l'incompétence du tribunal de Malines, ont en même temps conclu à ce que l'intimé fût déclaré non recevable dans sa demande, et que l'exposé de leurs moyens a également porté sur le fond de la procédure comme sur la question prealable; - Qu'ainsi, ils ne peuvent aujourd'hui se pourvoir par la voie d'appel contre le jugement du 4 mars, par lequel le tribunal, en se déclarant compétent, n'a fait que consacrer ce qui avait été déjà reconnu par les-appelants eux-mêmes, en traitant la question du fond avant qu'il eût été préalablement fait droit sur celle relative à la compétence; — Attendu que le jugement du 11 mars n'est point purement préparatoire, mais qu'à raison de l'injonction faite aux parties d'une vérification qui préjuge le fond, il doit être mis au nombre des jugements interlocutoires, conformément à l'art. 451 c. pr. civ.;-Attendu qu'aux termes de l'art. 451, l'appel d'un jugement interlocutoire peut être interjeté avant le jugement définitif. Déclare l'appelant non recevable.

Du 23 mai 1807.-C. de Bruxelles.

(1) 1 Espèce:-(Clercio C. N...)-LA COUR ; - 1° L'appel du jugement rendu par le tribunal de Verceil, le 25 mai dernier, et dont il s'agit, est-il récusable? 2o Ledit jugement est-il nul faute de compétence dans les juges qui l'ont prononcé? 3o En cas négatif, la cour est-elle compétente pour statuer sur le fond pour raison de somme? Considérant, sur la première question, que l'appelant Clercio attaque le jugement dont est appel, pour défaut de compétence dans les premiers juges;-Que l'art. 454 e. proc. civ., prescrit en termes formels que lorsqu'il s'agira d'incompélence, l'appel sera recevable, encore que le jugement ait été qualifié en dernier ressort. Qu'ainsi, quelle que soit la somme qui fait l'objet de la contestation décidée par le jugement du tribunal de première instance, l'appel en est toujours recevable, si l'incompétence est opposée; que cette sage disposition du code de procédure, ayant pour but d'empêcher que les jugements rendus par des juges incompétents n'obtiennent jamais la force de chose jugée, doit être également applicable au cas que le défaut de compétence ait été seulement opposé sur l'appel, comme à celui qu'il l'ait déjà été en première instance. Sur la deuxième question, considérant que la demande formée par les intimés en leur qualité de percepteurs des revenus de la commune de Viveronne, par-devant le tribunal civil dè Verceil, avait pour objet le payement des fermages dont Clercio était resté

186. Nous avons indiqué les exceptions à la règle d'après laquelle un jugement en dernier ressort n'est pas susceptible d'appel. On peut encore ajouter aux indications que nous avons données le cas d'une affaire qui, rentrant dans les limites du dernier ressort, présente des chefs relatifs à l'état, à la qualité des parties; ces derniers sont sujets à l'appel.-V. Degrés de juridiction.

187. Mais, hors de ces exceptions diverses, le principe certain est que, pour être admis à interjeter appel d'un jugement, il faut que ce jugement ait été rendu en premier ressort, qu'il n'ait pas acquis l'autorité de la chose jugée, et qu'il n'ait pas été acquiescé, conformément aux règles qui ont été établies dans notre Traité de l'acquiescement.

188. D'après cela, un jugement est bien qualifié en premier ressort, et ne peut être attaqué que par voie d'appel, quand la demande sur laquelle il a prononcé dépassait 1,000 fr., ou 1,500 fr. depuis la loi du 21 avr. 1838, alors même que la condamnation serait inférieure à cette somme (Req., 27 janv. 1829) (2). V. aussi Cassation, Degrés de juridiction.

189. Par suite, est non recevable l'appel d'un jugement prononcé en dernier ressort, surtout lorsque la partie condamnée

débiteur, et par conséquent c'était aux tribunaux ordinaires à en connaître; Que l'exception opposée par Clercio, à ladite demande, et tirée de ce qu'il avait été déchargé de l'obligation de payer le dixième additionnel sur le prix du bail, par arrêté du préfet de la Sésia, en date du 10 janvier 1806, et l'opposition par lui faite à la validité de l'autre arrêté du même préfet, en date du 17 déc. même année, par lequel le premier a été révoqué, n'ont pu rendre la cause de la compétence de l'autorité administrative, 1° parce que l'arrêté du 10 janvier 1806 n'a point les caractères d'une décision, mais plutôt ceux d'un arrangement amiable que le préfet, d'après l'avis du conseil de préfecture, a cru devoir proposer aux parties intéressées, afin de prévenir un procès par-devant les tribunaux, entre la commune de Viveronne et le fermier Clercio, sur la lésion et la résiliation du bail en question; 2° parce que cet arrêté du 10 janv. ayant été révoqué par l'autre du 17 déc. même année, les choses seraient par là restées au point où elles étaient avant que l'autorité administrative eût pris aucune ingérence de cette affaire; 3° parce que les premiers juges n'ont pas prononcé par le jugement tombant en appel la validité du second arrêté du préfet de la Sésia, ce qui aurait certainement excédé leurs pouvoirs; mais ils se sont bornés à regarder son existence comme un obstacle à l'exception faite par Clercio à la demande des intimés; - Considérant, sur la troisième question, que, quoique les sommes demandées par les intimés ne montent qu'à 658 fr., il n'est cependant pas moins vrai que le jugement tombant en appel, ayant condamné Clercio au payement desdites sommes, a implicitement décidé une question dont l'objet excède 1,000 fr.; en effet, les sommes susdites représentent le dixième additionnel sur le prix d'un bail en question pour les années antérieures à celle de 1807. Clercio opposait d'être tenu au payement dudit dixième. Les premiers juges, en accueillant la demande des intimés, ont donc décidé que le dixième additionnel était dù par Clercio sur le prix de son bail; or, comme ce bail ne devait, aux termes de l'acte public du 17 avril 1800, avoir fin qu'au commencement de 1810, il en dérive que pour établir la véritable somme sur laquelle porte le jugement appelé, il faut cumuler la somme de 628 fr. à laquelle Clercio a été condamné pour le dixième additionnel des années antérieures à 1807, avec celle de 346 fr., montant du dixième additionnel des années à échoir jusqu'à la fin de son bail, ce qui nous donne pour résultat une somme excédant 1,000 fr. - Sans s'arrêter, etc. »

Du 18 juin 1810.-C. de Turin.

Qe Espèce: -(Radez C. Pourchaux.)-LA COUR, - Vu les art. 424 et 454 c. pr.; - Considérant que quand il s'agit d'incompétence à raison de la matière, l'appel est recevable, encore que le taux du litige soit inférieur à 1,000 fr...

Du 21 juillet 1830.-C. de Douai, 1re ch.-M. Deforest, pr. (2) (N... C. N...) LA COUR; Attendu que le pourvoi en cassation n'est admissible que contre les jugements rendus en dernier ressort; que le jugement attaqué était bien qualifié de jugement rendu en premier ressort, quoiqu'il ne portat, au moyen des réductions, condamnation que d'une somme inférieure à 1,000 fr., parce que la demande était de 1,250 fr., et que c'est la somme demandée et non la somme adjugée qui détermine le degré de juridiction; que, dès lors, le demandeur n'avait que la voie de l'appel; Déclare le demandeur non recevable dans son pourvoi et le condamne à l'amende.

Du 27 janv. 1829.-C. C., ch. req.-MM. Borel de Bretizel, f. f. de pr.Hua, rap.-Lebeau, av. gén., c. conf.-Jouhaud, av.

avait demandé préalablement au tribunal un sursis à l'exécution du jugement qu'il allait rendre (Grenoble, 1er pluv. an 9) (1).

190. Ainsi encore, on a considéré avec raison comme non recevable, soit l'appel d'un jugement qui avait prononcé lui-même sur l'appel d'une sentence du juge de paix en matière possessoire, encore bien qu'il eût statué sur le pétitoire au mépris des principes en cette matière (Cass., 7 août 1833, aff. Seigeot, V. Action possess., no 809), soit l'appel d'un jugement statuant luimême sur l'appel d'une sentence arbitrale (Rej., 2 brum. an 5) (2). Il est évident, en effet, que la même cause ne peut avoir plus de deux degrés de juridiction.

191. Pareillement, il a été décidé qu'on ne peut appeler d'un jugement pour le faire réformer, par des moyens du fonds, lorsque déjà par un premier appel, sur lequel on a succombé, on a élevé contre ce même jugement des moyens d'incompétence et de nullité (Paris, 14 juill. 1809) (5).

192..... Qu'on ne peut non plus appeler d'un jugement rendu par un tribunal de district saisi de l'appel d'une sentence émanée d'un ancien tribunal supprimé (Cass., 12 frim. an 2) (4).

193. Mais il a été décidé que le second jugement d'une affaire, après cassation et renvoi devant le tribunal de première instance qui l'a rendu, peut être frappé d'appel (Req., 12 therm. an 5) (5). On pourrait dire contre cette solution, qu'en thèse générale, le second jugement intervenu après cassation est en dernier ressort, puisqu'aux termes de l'art. 20 de la loi du 1 déc. 1790, c'est le recours en cassation qui est ouvert contre ce second jugement (V. Cassation). Néanmoins, la décision ci-dessus s'explique par la circonstance particulière dans laquelle elle est intervenue. Il s'agissait d'une réclamation d'hérédité qui avait dù être jugée, en premier et en dernier ressort, par un tribunal de famille, aux termes de l'ord. du mois d'août 1560, confirmée par l'art. 83 de celle de Moulins, et par l'art. 152 de celle de janv. 1629. Mais la décision de ce tribunal, dans l'espèce que nous rapportons ici, ayant été cassée à une époque où les tribunaux de famille n'étaient plus reconnus par la loi, et où les affaires dont ils connaissaient avaient été expressément attribuées aux juges ordinaires par la loi du 9 vent. an 4, il en est résulté que le procès a dû être recommencé devant les juges ordinaires, et y suivre la marche indiquée par les lois nouvelles. Or, la réclamation d'hérédité est essentiellement susceptible des deux degrés de juridiction. L'on conçoit donc très-bien que l'appel ait

(1) (Chevalier C. N...)-LE TRIBUNAL; Considérant que la partie qui demande à la justice une surséance à l'exécution de son jugement, renonce, par cela seul, à la voie de l'appel, suivant la loi 5, C., De re judicata; que, d'ailleurs, le jugement dont est appel avait été prononcé en dernier ressort; - Déclare Chevalier non recevable. Du er pluv. an 9.-C. de Grenoble.

(2) (Ve Rousseau C. Dautrey.)—LE TRIBUNAL; Vu l'art. 7 de la loi du 1er mai 1790, qui porte : «lly aura deux degrés de juridiction en matière civile ; »> Attendu que de cette disposition il résulte qu'il n'est accordé aux plaideurs que deux degrés de juridiction; que, dans l'espèce, les parties les ont parcourues, puisque le tribunal de Nancy a connu de la contestation par voie d'appel de la décision arbitrale; qu'ainsi son jugement ne pouvait lui-même être susceptible d'un autre appel; que, dès lors, le tribunal de Lunéville, qui a été saisi du jugement du tribunal de Nancy, a dù declarer les appelants non recevables et s'est conformé à la loi; -Rejette, etc.

[ocr errors]

Du 2 brum. an 5.-C. C., ch. civ.-MM. Chabroud, pr.-Schwendt, rap. (3) Espèce: - (Henry C. Seguy.) Le sieur Henry avait été rejeté, par jugement par défaut du 17 flor. an 11, de l'ordre ouvert sur le prix de deux immeubles appartenant au sieur Seguy. En 1808, et lorsque ce jugement avait été exécuté, le sieur Henry en appela pour incompetence, le motif pris de ce que les immeubles étaient situés hors du ressort du tribunal de la Seine qui avait prononcé l'adjudication.-31 mai 1808, arrêt de la cour d'appel de Paris qui déclare Henry non recevable : « Attendu qu'il avait été appelé lors de l'adjudication, et qu'il aurait dû se présenter pour exciper de l'incompétence du tribunal. »— En 1809, Henry interjette un nouvel appel contre le même jugement, en ce qu'il n'avait pas été colloqué au rang de son inscription. Arrêt.

LA COUR;

Attendu que la faculté d'appeler, par Henry, a été épuisée par son premier appel; Déclare ledit Henry non recevable dans son second appel.

Du 14 juill. 1809.-C. de Paris, 1re sect.

(4) (Cazaux.) LE TRIBUNAL;

- Attendu : 1o qu'aux termes de l'art. 5, L. 19 oct. 1790, le tribunal de Grave, séant à Lourdes, a été saisi,

|

été déclaré recevable contre le second jugement intervenu après la cassation du premier. La jurisprudence présente, dans des situations analogues, des exemples assez nombreux de décisions semblables. V. Cassation, Degrés de juridiction.

Nous n'insisterons pas davantage ici. Les questions de premier et de dernier ressort sont plus particulièrement des questions de compétence: elles trouveront leur place dans l'article Degrés de juridiction, auquel nous renvoyons le lecteur.

194. Mais il est un point sur lequel il convient de s'arrêter, en ce qu'il se rattache exclusivement au principe même de l'appel c'est que le droit d'appeler est tout à fait indépendant de la qualification que le jugement a reçue de la part des juges qui l'ont prononcé. Sous ce rapport, la loi nouvelle a fait cesser le doute et l'incertitude qui existaient dans l'ancienne législation.

L'art. 15 de la loi du 1er déc. 1790, dont la constitution de l'an 8 reproduisit à cet égard la disposition, attribuait à la cour de cassation le droit de prononcer sur toutes les demandes en cassation contre les jugements rendus en dernier ressort. Mais le législateur n'indiquait pas la voie qu'il fallait prendre pour faire réformer les jugements, qui, dans des affaires soumises à deux degrés de juridiction, auraient été cependant qualifiés en dernier ressort. Devait-on alors suivre l'ordre de juridiction établi par la loi, ou s'en rapporter à la qualification donnée par le juge? La divergence d'opinions que cette question fit naître, détermina le directoire exécutif à consulter le corps législatif. Les 27 prair. et 27 therm. an 5, le conseil des cinq-cents repoussa un projet de résolution portant: « La qualification de dernier ressort donnée à un jugement n'empêche pas la voie d'appel dans tous les cas où le jugement, par sa nature, a dû être prononcé en premier ressort. » Le même conseil adopta, au contraire, le 15 pluv. an 6, une résolution portant: « Tout jugement, dont le dispositif annoncera qu'il a été rendu en dernier ressort, ne pourra être attaqué que par la voie de cassation. » Le 4 frim. an 7, un rapport favorable à cette résolution fut présenté au conseil des anciens.

195. Dans cet état de la législation, la jurisprudence, d'accord avec la doctrine émise par Merlin dans ses réquisitoires (Quest. de droit, vo Jugement, § 12) s'était prononcée en ce sens que les jugements mal à propos qualifiés en dernier ressort ne pouvaient être attaqués par la voie de l'appel, et qu'il n'appartenait qu'à la cour de cassation de les annuler (Cass., 16 mess.

comme tribunal d'appel, des contestations liées entre les parties au cidevant parlement de Toulouse, de leur propre choix, sur exclusions respectives, et de préférence même à celui qui remplacerait le parlement, quoique l'option eût été offerte, proposée et mentionnée en l'acte passé au greffe; que, sous ce rapport, le tribunal de Lourdes ne pouvait décider ces contestations qu'en dernier ressort, qu'ainsi il ne pouvait être émis d'appel de son jugement, et que l'appel n'en pouvait être reçu par le tribunal de Vic; 2° que les parlements connaissaient des prises à partie comme juges supérieurs et non par privilége, convention ou attribution; qu'ainsi, l'art. 6 de la même loi, ni celle du 20 septembre dernier, ne sont point applicables à la question; -Casse le jugement du tribunal de Vic, comme contraire à l'art. 4, tit. 25, ord. 1667.

Du 12 frim. an 2.-C. C., sect. civ.-M. Schwendt, rap.

(5) Espèce (Dame Caumont C. Carbonneau). Le demandeur en cassation argumentait des art. 19 et 20 de la loi du 1er déc. 1790, qui institue le tribunal de cassation. « Les parties, disent ces articles, procéderont, savoir: celles qui auront obtenu la cassation comme il est prescrit à l'appelant, et les autres comme il est disposé à l'égard de l'intime. Dans le cas où la procédure aura été cassée, elle sera recommencée à partir du premier acte où les formes n'auront pas été observées; l'affaire sera plaidée de nouveau dans son entier et il pourra encore y avoir lieu à la demande en cassation contre le second jugement. » Dans l'espèce le tribunal de cassation avait cassé un jugement d'un tribunal de Termisse qui avait prononcé, en premier et dernier ressort, sur une réclamation d'hérédité faite par un enfant naturel reconnu. Le tribunal de Lot-etGaronne avait été saisi par renvoi de la contestation et avait prononcé dans les intérêts de l'enfant naturel. Appel. Le tribunal de la Gi- Jugement.

ronde réforme. Pourvoi. LE TRIBUNAL : Considérant que l'effet d'un jugement de cassation étant de remettre les parties au même état qu'avant le jugement annulé, la cassation prononcée le 8 vent. an 4, du jugement arbitral forcé qui avait été obtenu par Jeanne Mamour, femme Caumont, le 8 fruct. an 2, a fait qu'il n'a plus existé de jugement même de première instance entre elle et le citoyen François Carbonneau. Rejette.

Du 12 therm. an 5.-C. C., sect. req.-MM. Chabroud, pr.-Bailly, rap.

« PreviousContinue »