Page images
PDF
EPUB

populations indigènes, le gouvernement français se trouvait placé dans la nécessité de conquérir l'Algérie tout entière ou de l'abandonner. C'est le premier parti qu'il adopta. Dans les derniers jours de l'année 1840, le général Bugeaud nommé au gouvernement de l'Algérie, entreprit cette œuvre double de conquérir l'Afrique et de la coloniser, c'est-à-dire d'en livrer la culture et l'industrie aux Européens. Nous n'avons pas à raconter les longs travaux de la conquête, mêlés d'insuccès partiels et de succès éclatants; nous devons nous borner à exposer la législation de la période de la colonisation.

18. Le moment n'était pas favorable à la colonisation. Les colons ruinés et découragés par les désastres de 1859 n'étaient guère tentés de renouveler leur expérience. D'ailleurs, les nécessités de la guerre, les mesures prises pour la soutenir avec énergie n'étaient pas de nature à ranimer leur zèle. Le 19 mars 1841, tous les points occupés par les troupes françaises furent déclarés en état de guerre. La milice d'Alger passa sous les ordres du commandant de place; les colons du dehors furent assujettis à un service militaire; tous les petits postes établis pour les protéger avaient été évacués pour former, avec la garnison d'Alger, des colonnes expéditionnaires. Mais l'œuvre de la colonisation ne se poursuivait pas moins. Le commerce s'étendait, les intérêts se multipliaient, et la législation si incomplète établie par les arrêtés des intendants civils ou des gouverneurs devenue insuffisante se complétait insensiblement. Les années 1841, 1842 et 1845 marquent dans l'histoire de la législation algérienne. Les nombreux règlements qui furent rendus pendant ces trois années, et dont la plupart sont encore en vigueur, les grands intérêts auxquels ils étaient destinés à pourvoir, montrent bien quels changements avaient dû s'opérer dans la situation de la colonie. Les lois, décrets et ordonnances qui régissent en France les droits d'enregistrement, de greffe, d'hypothèque et les obligations des notaires, huissiers, greffiers, commissaires-priseurs et tous autres officiers publics et ministériels, en ce qui concerne la rédaction matérielle des actes et la tenue des répertoires furent déclarés applicables à l'Algérie (ordon. 19 août 1841). Le service de la justice, organisé sur de nouvelles bases, se rapprocha de plus en plus des institutions de la métropole; les juges de paix furent institués (ordonn. 26 sept. 1842). De nombreux règlements furent rendus ayant pour objet l'exercice de la profession de défenseur (arrêté min. 26 nov. 1841), les attributions du procureur général et la discipline de l'ordre judiciaire (arrêté min. 22 nov. 1842), l'ordre du service judiciaire et les assemblées générales, les prestations de serment des membres de l'ordre judiciaire, les préséances et les honneurs (arrêté min. 22 nov. 1842), l'exercice de la profession d'huissier (arrêté min. 26 nov. 1842), l'institution des commissaires civils (arrêté min. 18 déc. 1842), lés curateurs aux successions vacantes (ordon. 26 déc. 1842), l'exercice de la profession de notaire (arrêté min. 30 déc. 1842), etc.

19. En 1843, on promulgua en Algérie le code de procé dure civile, sauf certaines modifications commandées par les besoins particuliers de la colonie (ordon. 26 avr. 1843). — On enleva aux tribunaux musulmans le droit de prononcer des condamnations capitales, et l'on étendit la compétence des conseils de guerre aux crimes commis par les indigènes en dehors des limites de la juridiction des tribunaux ordinaires quand ces crimes pouvaient donner lieu à l'application de la peine de mort (ord. 17 juill. 1843).—En matière de douanes, un nouveau progrès fut réalisé par l'ordon. du 16 déc. 1843, sagement conçue et destinée à étendre encore les relations de la métropole avec l'Algérie. Enfin, un arrêté du gouverneur décida que la population civile des places, ports et camps où l'autorité civile n'existait pas encore serait soumise à la juridiction militaire jusqu'à ce qu'il en fût autrement ordonné, et que dans ce cas le commandant de la place remplirait les fonctions attribuées dans les autres localités au commissaire civil et au juge de paix. L'appel de ses décisions pouvait être porté devant le commandant supérieur de la subdivision (arrêté 5 août 1843).

[ocr errors]

20. Les affaire arabes dont la pacification du pays augmentait chaque jour l'importance, prirent à cette époque une grande extension. L'administration en fut centralisée à Alger; mais une direction des affaires arabes fut établie dans chaque division miTOME XXXIV.

litaire et en outre, des bureaux désignés sous le nom de bureaux arabes furent institués dans chaque subdivision sous les ordres directs de l'officier général commandant. On put même en établir sur chacun des autres points occupés par l'armée où le besoin en serait reconnu (arrêté 1er fév. 1844).

21. Une difficulté très-grande pour l'œuvre de la colonisation naissait de l'incertitude de la propriété. La mauvaise foi des indigènes et l'impéritie ou la cupidité des colons européens avaient trop souvent affecté les contrats de vente, les échanges, etc. Il en était résulté une grande confusion. Par suite, personne n'osait acheter, ni risquer des améliorations sur un sol dont il pouvait être dépouillé après les avoir faites. Une ordonnance du 1er oct. 1844 eut pour objet de remédier à cette situation. Cette ordonnance régularisa sous certaines conditions toutes les ventes antérieures, établit le principe du rachat des rentes constituées, régla les formes de l'expropriation pour cause d'utilité publique, et, dans l'espoir d'arriver plus promptement au peuplement et à la mise en valeur du territoire, frappa d'un impôt spécial les terres laissées incultes qu'elle soumit même à l'expropriation. 22. Une ordonnance du 15 avr. 1845 détermina d'une façon plus certaine que cela n'avait été jusqu'alors l'autorité du gouverneur général de l'Algérie. Nous avons dit que le gouverneur de l'Algérie était sous l'autorité du ministre de la guerre. Mais les nécessités de l'état de guerre l'avaient conduit à prendre et à conserver dans les territoires plus récemment conquis un pouvoir à peu près souverain. L'ordonnance du 15 avr. 1845, qui eut pour l'Algérie l'importance d'un véritable code, posa les bases d'un régime administratif régulier. Pour cela, elle divisa l'Algérie en trois provinces correspondant à la division politique antérieure à la conquête : 1o la province d'Alger comprenant le territoire soumis autrefois à la domination directe du dey d'Alger et en outre le beylik de Tittery; 2o la province de Constantine; 3o la province d'Oran. Chaque province se subdivisa soit en arrondissements, cercles et communes, soit en khalifats, aghaliks, kaïdats et cheikats, selon le caractère que la même ordonnance du 15 avril reconnaissait au territoire. Cette ordonnance distinguait en effet, dans chacune des provinces, des territoires civils, des territoires mixtes et des territoires arabes.

Les territoires civils étaient ceux sur lesquels il existe une population civile européenne assez nombreuse pour que tous les services publics y fussent ou pussent y être complétement organisés; les territoires mixtes, ceux sur lesquels la population civile européenne encore peu nombreuse ne comportait pas une complète organisation des services publics; les territoires arabes, tous ceux situés soit sur le littoral, soit dans l'intérieur du pays, qui ne sont ni mixtes ni civils. Ces différents territoires étaient soumis à une administration différente: les territoires civils étaient régis par le droit commun, tel que la législation spéciale de l'Algérie le constitue, et sous la réserve desdispositions particulières relatives aux indigènes qui habitent ces mêmes territoires. L'administration y était civile et placée sous la haute direction du ministre de la guerre qui en nommait les fonctionnaires administratifs et judiciaires. Les territoires mixtes étaient placés sous l'autorité militaire, dont les agents remplissaient les fonctions administratives et judiciaires. Enfin, les territoires arabes étaient administrés militairement les Européens n'étaient admis à s'y établir que dans un but d'utilité publique et en vertu d'autorisations spéciales et personnelles, délivrées par le gouverneur général. Quant aux tribus arabes, quel que fût le territoire qu'elles habitassent, elles restaient soumises à l'autorité militaire.

23. Cette division du territoire de l'Algérie et ces différents régimes administratifs, établis pour limiter l'autorité du gouverneur général, n'empêchaient pas qu'il n'y fût le représentant suprême du pouvoir central. L'ordonnance du 15 avr. 1845 voulait seulement donner plus d'importance à l'élément civil.—Le commandement et la haute administration restaient confiés au gouverneur général, investi des pouvoirs civils et militaires, sous l'autorité du ministre de la guerre. Il était institué auprès de lui un directeur des affaires civiles, des directeurs des services administratifs, un conseil supérieur d'administration, unconseil du contentieux. Le directeur des affaires civiles exerçait, sous les ordres du gouverneur général et en son nom, la haute direction des services administratifs civils; il travaillait avec les chefs des 96

services administratifs. Le conseil d'administration avait auprès du gouverneur général des fonctions purement consultatives. Quant au conseil du contentieux, c'était une création nouvelle. Un arrêté ministériel du 1er sept. 1834, rendu en exécution de l'ordonnance du 22 juillet précédent, avait attribué le contentieux administratif au conseil d'administration. C'était là une confusionr egrettable que l'ordonnance du 15 avr. 1845 fit cesser en instituant un conseil du contentieux séparé du conseil d'administration. - Le conseil du contentieux se composait d'un président, de quatre conseillers et d'un secrétaire remplissant les fonctions de greffier; il connaissait, sauf les exceptions qui résulteraient de la législation spéciale de l'Algérie, des matières qui sont déférées en France aux conseils de préfecture, sauf recours au conseil d'Etat.

administratif des départements de la métropole, sauf les exceptions résultant de la législation spéciale de l'Algérie. Le gouverneur général administra directement les territoires militaires par l'intermédiaire des officiers généraux commandant les divisions. Il eut la disposition de toutes les forces militaires. Il resta investi de la haute administration de l'Algérie, et à cet effet il eut près de lui: 1° un conseil de gouvernement appelé à donner son avis sur certaines matières déterminées, et qui pouvait en outre être consulté sur toutes autres questions d'intérêt général ou spécial qui lui. seraient soumises par le ministre compétent ou par le gouverneur général; 2o un secrétaire général chargé de la préparation et de l'expédition des affaires administratives. Le département était administré par un préfet, et était subdivisé en arrondissements et communes administrés par des sous-préfets et des maires, sauf l'institution des commissariats civils, qui demeura provisoirement maintenue pour les territoires du département qui ne comportaient pas encore l'organisation communale. Un conseil de préfecture et un conseil électif étaient institués dans chaque département, avec des attributions analogues à celles de la métropole. Les

[ocr errors]

24. La même ordonnance du 15 avr. 1845 constituait l'administration civile des territoires civils des provinces par de nombreux détails qu'il serait inutile de reproduire ici. Elle déterminait même le mode d'action de l'autorité militaire dans les territoires mixtes et arabes. Sous l'impulsion que recevait alors l'Algérie, la colonisation devait infailliblement se développer; pour la favoriser d'une manière efficace, l'ordon-préfets correspondaient directement avec le ministre de la

nance du 21 juill. 1845 régla le mode et les conditions des concessions de terrains qui pourraient être faites aux Européens qui viendraient s'établir en Algérie. Jusqu'alors, ces concessions avaient eu lieu en vertu d'un arrêté du gouverneur, du 18 avr. 1841, et plus tard de l'ordonnance du 1er oct. 1844. On es-saya même, dans les circonscriptions des territoires mixtes et arabes, un système de colonisation militaire, par les soldats libérés, dont l'idée était venue au maréchal Bugeaud. Mais il ne paraît pas que ce moyen de colonisation ait répondu aux espérances de son promoteur. Le système de concessions de terrains, moyennant une redevance annuelle et perpétuelle dont l'acte de concession fixait la quotité, fut régularisé par l'ordonnance du 21 juill. 1845; mais ce système qui souleva les critiques les plus vives a été, dans ces derniers temps, définitivement abandonné (V. infrà, tit. 5, chap. 1, sect. 1, art. 2, § 4).

25. Quelque bienfaisants qu'eussent été l'ordonnance du 15 avr. 1845 et les actes qui la suivirent, on ne peut méconnaître cependant que cette ordonnance avait poussé à l'excès l'esprit de centralisation. Une ordonnance du 1er sept. 1847 réagit contre cet excès en réformant l'administration provinciale. Un directeur des affaires civiles, établi dans chacune des villes d'Alger, d'Oran et de Constantine, remplaça les trois directeurs des services spéciaux établis à Alger. Une seconde ordonnance, du 28 sept. 1847, donna pour la première fois aux communes de l'Algérie une existence civile. Enfin une troisième ordonnance, du 31 janv. 1848, constitua les six principales villes de l'Algérie en communes de plein exercice. Ces dernières mesures coïncidant avec la défaite définitive d'Abd-el-Kader, sous le gouvernement du duc d'Aumale en Algérie (déc. 1847), parurent devoir assurer l'avenir de notre colonie.

26. Le gouvernement né de la révolution du 24 fév. 1848 ne modifia pas d'abord sensiblement les institutions de l'Algérie; mais bientôt un arrêté du chef du pouvoir exécutif, du 16 août 1848, accomplit d'importants changements dans un sens libéral. Tout le territoire civil de l'Algérie fut érigé en communes, et le mode électifadopté pour la nomination des membres des conseils municipaux. Le service de l'instruction publique fut organisé, et fut détaché du ministère de la guerre pour être placé dans les attributions du ministre de l'instruction publique, sauf ce qui concernait les écoles musulmanes. On détacha aussi du ministère de la guerre les services des cultes, de la justice, des douanes, de l'enregistrement et des domaines, pour les rattacher aux ministères des cultes, de la justice et des finances (arrêtés 16, 20 août, 12 oct. et 50 nov. 1848). Peu de temps après ces mesures, le territoire de l'Algérie fut déclaré territoire français par la constitution du 4 nov. 1848 (art. 109).

27. En exécution de cette déclaration de la constitution de 1848, l'administration de l'Algérie fut remaniée de nouveau, dans le sens de l'assimilation de l'Algérie à la métropole. Les provinces furent divisées en territoires civils qu'on appela départements et en territoires militaires; on supprima les territoires mixtes. Le département fut soumis au régime

guerre, appelé à centraliser l'administration générale de l'Algérie avec les autres ministères dans la limite de leurs attributions respectives. Les territoires militaires de chaque province étaient administrés, sous les ordres du gouverneur général, par les généraux commandant les provinces. Le secrétaire général centralisait toutes les affaires concernant les indigènes des territoires militaires. Il lui était attaché un bureau spécial chargé de la colonisation de ces territoires et de l'administration indigène, et dont le chef était choisi dans les bureaux arabes (arrêté 9 déc. 1848).

28. La séparation des deux administrations civile et militaire se trouvait, par ces dispositions, aussi distinctement établie que la division du territoire. - La suppression de la direction générale des affaires civiles était la conséquence de ces modifications. Elle disparut. La direction centrale des affaires arabes constituait un rouage qui n'était plus indispensable. Par raison d'économie, on en prononça également la suppression (arrêté 9 déc. 1848).

[ocr errors]

29. L'arrêté du chef du pouvoir exécutif, du 9 déc. 1848, ne put recevoir sur tous les points une exécution complète. La séparation de l'autorité civile et de l'autorité militaire fut souvent une cause qui paralysa l'action de l'une et de l'autre. Les droits électoraux ne furent pas maintenus aux colons; la nomination des conseillers municipaux fut remise à l'administration; l'institution des conseils généraux ne put alors fonctionner. Mais de nombreuses portions du territoire algérien purent passer du régime militaire à celui du commissariat civil. Il serait difficile d'exposer tous les actes législatifs qui furent rendus dans cette nouvelle période. Nous mentionnerons seulement une loi de douanes, du 11 janv. 1851 qui etablit sur une base trèslarge la liberté du commerce entre la France et l'Algérie; Une loi sur la propriété, du 16 juin suivant; Une loi du 4 août 1851 portant création d'une banque à Alger; Un décret du 25 mars 1852, qui règle l'appel des décisions rendues par les commandants de place; Le décret du 22 avril 1853, qui réorganise les chambres d'agriculture, créées par le décret du 6 oct. 1850; - Le décret du 2 avr. 1854, relatif au partage des biens indivis entre le domaine et les particuliers; Le décret du 8 août 1854, qui régularise l'institution des bureaux arabes départementaux, en détermine la composition et les attributions; Le décret du même jour qui fixe les bases de l'administration proprement dite des Arabes; Le décret du 19 août 1854, qui crée des juges de paix à compétence étendue, et qui introduit en Algérie l'institution des cours d'assises sans le jury; -Le décret du 1er oct. 1854, portant organisation de la justice musulmane, qui, tout en introduisant dans ce service des améliorations incontestables, eut le tort de rendre les juges indigènes absolument indépendants des tribunaux français;-Le décret du 5 mars 1855, qui rend applicables à l'Algérie les décrets des 5 sept. 1851 et 30 août 1852, sur l'organisation des chambres de commerce et le mode d'élection de leurs membres; Le décret du 16 avril 1856, qui

[ocr errors]

institue des commissions syndicales dans les localités qui ne sont pas érigées en commune; Le décret du 30 déc. 1856, qui applique à l'Algérie le système de décentralisation introduit en France par le décret du 25 mars 1852.

30. Nous avons traversé jusqu'ici, dans cet historique, trois périodes distinctes, autant qu'il est possible de distinguer parmi tant de faits et d'actes législatifs et administratifs, confus ou contradictoires: la période de premier établissement, pleine de tâtonnements, d'incertitudes, féconde en déceptions, et où le conquérant apparaît souvent fort embarrassé de sa conquête; la période de colonisation sous le maréchal Bugeaud, à partir de 1841, où nous voyons les possessions françaises s'étendre et la colonie se consolider; la période de l'assimilation de l'Algérie à la France, depuis 1849, période pendant laquelle l'Algérie atteint à une véritable prospérité, principalement sous le gouvernement du maréchal Randon, et où la conquête de l'Algérie s'acheva complétement par la soumission de la Kabylie. Nous entrons maintenant dans une quatrième période, que l'on pourrait appeler celle de l'unité de gouvernement.

31. Quelque incontestable que fût le succès des grands efforts de la France, il y avait eu à toutes les époques que nous venons de traverser des tiraillements entre des autorités rivales; et les efforts contraires se paralysant, il en résultait souvent une sorte d'anarchie. La nécessité d'un pouvoir unique appa.. raissait à tous les yeux; mais quel serait-il? Un ministère spécial fut créé par décret du 24 juin 1858 et remis au prince Napoléon. Ce ministère fut formé de la direction de l'Algérie et de la direction des colonies distraites des ministères de la guerre et de la marine (décret 24 juin 1858); on y annexa le service de la justice (décret 29 juill. 1858), ainsi que celui de l'instruction publique et des cultes (décr. 2 août 1858). Il prit le nom de ministère de l'Algérie et des colonies.

32. La conséquence de la création de ce nouveau ministère parut être la suppression du gouvernement général de l'Algérie. Le maréchal Randon résigna ses fonctions, et un décret du 31 août 1858 supprima également le conseil de gouvernement et le secrétariat général de gouvernement placé auprès du gouverneur général. En ce qui concerne la question militaire, on reconnaissait que la centralisation en Algérie devait être maintenue intacte, et que le commandement supérieur de l'armée devait être dévolu à un chef unique. En conséquence, le pouvoir militaire qui appartenait auparavant au gouverneur général fut confié à un commandant supérieur, qui devait pourvoir à toutes les mesures nécessaires et assurer l'exécution des lois; en cas d'urgence, il pouvait suspendre l'exécution des mesures prises par les généraux et les préfets (décret 31 août 1858)

33. L'œuvre tentée en Afrique par le ministère spécial peut se résumer en un mot, affranchissement. Affranchissement politique, administratif, économique; affranchissement du travailleur, du travail et du produit. Les préfets, jusqu'alors réduits à un pouvoir sans portée, obligés à des référés continuels, même pour les cas les plus simples (rapp. à l'emper. 27 oct. 1858, D. P. 58. 4. 157), sont admis à tous les bénéfices du décret de décentralisation; on leur attribue non-seulement la presque totalité des pouvoirs départementaux centralisés précédemment au profit du gouverneur général, mais encore beaucoup de ceux que, d'après d'anciens errements, le ministre de la guerre s'était réservés. Les budgets provinciaux sont créés. Dans chaque province, il est institué un conseil général, dont les attributions s'étendent sur le territoire militaire comme sur le territoire civil. Le général commandant la province prend le titre de général commandant la division; il est investi des attributions préfectorales pour le territoire militaire; un conseil des affaires civiles est institué auprès de lui et remplit les fonctions de conseil de préfecture (décr. 27 oct. 1858).-Un premier président et une chambre d'accusation sont donnés à la cour impériale. Le procureur général cesse de compter parmi les chefs de service administratif; il perd le droit d'incarcération préventive, et prend le rôle attribué à ses fonctions dans les cours de la métropole (décr. 15 déc. 1858).

34. L'administration des indigènes subit des réformes non moins importantes. Il est permis à tout Arabe de passer sur le

territoire civil, à la condition de prouver qu'il ne doit rien à l'Etat ni à la tribu (arr. min. 4 déc. 1858). Les indigènes, travaillant à un titre quelconque sur une terre européenne, sont exemptés de l'impôt achour (décis. min. 25 août 1858). Le collége arabe est remis aux mains du recteur de l'Académie en attendant qu'il devienne une simple annexe du lycée (instr. min. 21 oct. 1858). Les musulmans et les israélites sont admis en nombre déterminé dans les conseils généraux (décr. 27 ock et 14 nov. 1858). L'autorité militaire perd le droit de condamner administrativement les Arabes présumés coupables de crimes ou délits. La juridiction des commandants militaires est pour eux remplacée par celle des commissions disciplinaires, où peuvent être appelés des défenseurs et des témoins (arr. min. 21 sept. 1858). - La liberté des transactions en territoire militaire est proclamée (décr. 16 fév. 1859). Les tribus jusqu'alors étaient responsables des délits commis par l'un des leurs et payaient collectivement les amendes: la suppression de la responsabilité des tribus vint compléter ce système de fusion (24 nov. 1858). Mais le nouveau ministre inspirait des préventions. L'opposition se manifesta surtout à l'occasion de la suppression de la responsabilité collective des Arabes, de telle manière qu'il ne crut pas devoir conserver son portefeuille; il fut remplacé par le comte de Chasseloup-Laubat (7 mars 1859).

35. Le système inauguré par le premier ministre de l'Algérie fut continué par le second. Parmi les mesures importantes prises sous ce ministère, nous citerons réorganisation des services télégraphiques (décr. 16 août 1859), du culte protestant (décr. 14 sept. 1859), des chambres consultatives d'agriculture et de commerce (décr. 22 oct. 1859), des milices (décr. 9 nov. 1859), des sociétés de secours mutuels (décr. 28 janv. 1860), du service des postes (décr. 7 fév. et 10 mars 1860); Extension du territoire civil de Constantine (décr. 25 fév. 1860); Remplacement de la juridiction, des tribunaux ordinaires par celle des conseils de guerre pour les crimes commis en territoire militaire par des Européens ou des israélites (décr. 15 mars 1860); Constitution de dotations immobilière en faveur des provinces (décr. 18 sept. 1860); Réorganisation des tribunaux musulmans replacés sous la surveillance de la magistrature, française (décr. 31 déc. 1859).

36. Les changements économiques ne furent pas les moins importants. Ce qui restait des barrières de douanes entre l'Algérie et la France fut abaissé (décr, 11 fév. 1860); la culture du coton, matière qui manquait par l'effet de la guerre d'Amérique, fat encouragée par des primes (décr. 25 avr. 1860); le système de concession de terrains aux colons moyennant une rente fut remplacé par celui de ventes à l'amiable ou par adjudication (décr. 25 juill. 1860). Plusieurs lignes de chemins de fer furent décrétées.

37. Mais la création du ministère de l'Algérie ne dura pas. Un décret du 24 nov. 1860 le supprima et rétablit un gouverneur général (le maréchal Pélissier), avec cette différence, du nouveau gouvernement avec l'ancien, que le gouverneur n'est soumis à aucun ministère, mais relève directement de l'empereur. C'est le ministère de l'Algérie transporté à Alger, et la colonie replacée sous le régime militaire, d'après le choix du gouverneur. Aussi vit-on bientôt les généraux commandant les divisions investis de l'autorité supérieure, même dans les territoires civils, et les préfets placés sous leurs ordres. Il y eut un autre changement important: jusqu'alors le régime administratif était territorial; un décret du 7 juill. 1864 le rendit personnel, c'est-à-dire que l'Européen fut soumis au régime civil et l'Arabe au régime militaire, en quelque lieu qu'ils se trouvassent.

38. L'année 1865 avait vu s'accomplir un grand acte de justice sinon de bonne politique vis-à-vis des Arabes; le sénatus-consulte du 22 avril de cette année avait déclaré les tribus ou fractions de tribus propriétaires des terrains dont elles ont la jouissance permanente et traditionnelle à quelque titre que ce soit, et décidé qu'il serait procédé à la distribution de ces territoires, à leur répartition entre les différents douars (sections) de chaque tribu ou portion de tribu, et à la constitution de la propriété individuelle entre les membres de ces

[ocr errors]

douars partout où cette mesure sera reconnue possible et op.. portune. Un décret du 23 mai portant règlement d'administration publique détermina les formes de délimitation des territoires, et leur répartition entre les douars, etc. En exécution de ces deux mesures, de nombreux décrets impériaux ont procédé et procèdent encore chaque jour aux délimitations de territoires, qui ont pour objet d'asseoir d'abord sur des bases fixes la propriété arabe collective, en vue de constituer ensuite la propriété individuelle.

39. En 1865, un fait important pour l'Algérie se produisit. Le souverain alla visiter l'Algérie pour se fixer par lui-même sur le caractère du régime auquel le pays devait être désormais soumis. Les résultats de ses observations furent consignés dans une lettre publiée au retour. Une suite de mesures qui s'y trouvaient indiquées comme devant produire un heureux effet, ont été réalisées dans le cours des années suivantes. Nous énoncerons :

1o Le sénatus-consulte du 14 juill. 1865, sur l'état des personnes et la naturalisation en Algérie;

2o Le décret du 21 avr. 1866, portant règlement d'administration publique pour l'exécution de ce sénatus-consulte;

3o La loi du 19 mai 1866 relative à la marine marchande, qui supprime le droit de tonnage sur les navires étrangers et les surtaxes de navigation sur les marchandises importées par navires étrangers, suppression vivement sollicitée par le commerce de la colonie;

l'Algérie tient à des causes qu'il n'appartient à aucune puissance humaine de faire disparaître et qui ne peuvent être atténuées que par l'action du temps. Que l'on se représente, sur un territoire si vaste qu'il soit, cette infinie variété de mœurs, de langues, de religions: ici des tribus arabes et parmi ces Arabes les indigènes de la plaine, ceux des montagnes, etc.; là des Européens, et, parmi ces Européens, des Français, des Espagnols; ailleurs des chrétiens, des juifs, des mahométans, etc. Entreprendre de soumettre une population ainsi mêlée à un régime unique, serait évidemment une chose absurde, irréalisable, inhumaine. Se poser le programme de donner à tous les intérêts légitimes une égale satisfaction, est une noble entreprise; mais c'est venir se heurter à toutes les difficultés que nous venons de voir apparaître dans l'établissement de notre colonie. La séparation de l'autorité civile et de l'autorité militaire est, comme nous l'avons vu, une cause incessante de tiraillements aboutissant à paralyser l'action de l'une et de l'autre. La réunion de ces deux autorités dans les mêmes mains, laisse une pleine liberté d'action; mais qui peut faire la part de tous ces intérêts contraires, et répondre de ne pas sacrifier les uns aux autres?

42. On dit communément qu'il faut pour les Arabes le régime militaire et pour les Européens le régime civil. C'est précisément ce département de l'un et de l'autre régime qui fait la difficulté, dans un pays où les diverses populations se trouvent souvent mêlées. Le régime militaire ne saurait être d'ailleurs un régime définitif; il ne peut être accepté que comme un expédient

4o Le décret du 13 déc. 1866, relatif à la nouvelle organi- pendant un temps. Or l'état de la population de l'Algérie peut en sation des tribunaux musulmans;

5o Le décret du 15 déc. 1866, qui déclare insaisissables pour dettes antérieures les terres constituées en propriété individuelle, en exécution du sénatus-consulte du 22 avr. 1863;

6o Le décret du 27 déc. 1866, sur l'organisation municipale de l'Algérie qui introduit le régime électoral pour les conseils municipanx, et qui, par l'introduction d'un adjoint indigène dans le conseil municipal, a entraîné la suppression des bureaux arabes départementaux ;

7o La loi du 17 juill. 1867, sur le régime commercial de l'Algérie, qui établit la franchise de plein droit sur les marchandises françaises importées en Algérie, et qui accorde même cette franchise aux produits étrangers, sauf exception;

8o Le décret du 27 juill. 1867, qui applique à l'Algérie la loi du 22 juill. 1867, portant suppression de la contrainte par corps en matière civile, etc.

Il faut ajouter à ces différents actes un acte fort important. Le 18 mai 1865, le ministre de la guerre a passé une convention avec une société financière, ayant pour objet l'exécution de grands travaux publics en Algérie. D'après cette convention, une somme de 100 millions doit être affectée à des travaux publics exécutés dans le délai de six années, et une autre somme de 100 millions doit être mise à la disposition de l'Etat pour être employée dans le délai de six années, à la construction de routes, chemins de fer, ports, canaux, etc. Cette convention a été approuvée par une loi du 12 juill. 1865.

40. Nous sommes arrivés au terme de cette esquisse historique; mais avant de terminer, nous devons essayer de jeter un coup d'œil sur l'avenir probable de cette colonie. Que l'Algérie ait été pendant les quinze premières années de notre conquête une charge pour la métropole plutôt qu'un élément de force, c'est ce dont témoignent d'une manière trop irrécusable les faits relatés dans l'historique que nous venons de tracer. Les sacrifices ont été immenses en hommes et en argent; mais une colonie ne se fonde pas en un jour, et l'établissement de celle-ci avait des difficultés qu'aucune autre peut-être n'a présentées au même degré. Après tout, ces sacrifices, même sans parler des compensations que l'avenir certainement nous réserve, n'ont pas été complétement perdus dans le passé. L'Algérie a été pendant quinze ans pour la France une excellente école militaire. Il n'y a pas d'exagération à soutenir que c'est à l'Algérie que les armées françaises doivent la supériorité dont elles ont brillé sur de plus grands théâtres. En outre, le commerce annuel avec la France qui était de 6 millions en 1830, dépasse aujourd'hui 200 millions.

41. La difficulté de la consolidation et de la prospérité de

rendre la prolongation nécessaire au delà des prévisions. Ce sont toutes ces choses à la fois nécessaires et impossibles qui nous font dire que la consolidation de la colonie ne peut être que l'effet du temps et de bonnes lois. En présence de populations de race différente, pénétrées d'un fanatisme indomptable, rebelles aux idées de notre civilisation européenne, la France doit établir un régime transitoire, le modifier selon les besoins du moment sans se faire aucune illusion, sans se dissimuler que cet état transitoire peut se prolonger longtemps, et devra durer jusqu'à ce qu'au contact d'une civilisation supérieure les populations mahométanes, si elles ne se fusionnent pas avec la race conquérante, abjurent au moins leurs défiances et leurs préjugés de race et de religion.

43. Nous ne présenterons pas des vues particulières sur le régime de l'Algérie. Un système arrêté n'aurait de valeur qu'après de longues études dans le pays. Mais s'il est un système qui doit rallier tous les hommes de sens, c'est assurément celui qui consisterait à pratiquer patiemment la justice et à attendre. Toute action violente serait féconde en mécomptes. Dans une telle situation c'est faire beaucoup que de durer. La justice patiente fera plus que les procédés empiriques. Nous nous rangeons à ces paroles, consignées, dans un document célèbre : «Mieux vaut utiliser la bravoure des Arabes que de pressurer leur pauvreté, rendre les colons riches et prospères que d'importer à grands frais des émigrants étrangers, maintenir les soldats dans des positions salubres que de les exposer aux éléments dévorants des déserts » (Lettre sur la politique de la France en Algérie. Paris, imprimerie impériale, 1865).

TABLEAU DE LA LÉGISLATION DE L'ALGÉRIE.

5 juill. 1830. Convention entre le général en chef de l'armée française et Son Altesse le dey d'Alger.

Le fort de la Casbab, tous les autres forts qui dependent d'Alger, et le port de cette ville, seront remis aux troupes françaises ce matin, à dix heures (heure française).

Le général en chef de l'armée française s'engage envers Son Altesse le dey d'Alger à lui laisser sa liberté et la possession de toutes ses richesses personnelles. Le dey sera libre de se retirer avec sa famille et ses richesses particulières dans le lieu qu'il fixera; et tant qu'il restera à Alger, il y sera, lui et sa famille, sous la protection du général en chef de l'armée française. Une garde garantira la sûreté de sa personne et celle de sa famille.

Le général en chef assure à tous les soldats de la milice les mêmes avantages et la même protection.

L'exercice de la religion mahométane restera libre. La liberté des habitants de toutes les classes, leur religion, leurs propriétés, leur commerce et leur industrie ne recevront aucune atteinte. Leurs femmes seront respectées. Le général en chef en prend l'engagement sur l'honneur.

L'échange de cette convention sera fait avant dix heures, ce matin, et les troupes françaises entreront aussitôt dans la Casbah, et successivement dans tous les forts de la ville et de la marine.

[ocr errors]
[blocks in formation]

10 août 1834. Ordonnance concernant l'organisation de l'ordre judiciaire et l'administration de la justice dans les possessions françaises du nord de l'Afrique.

10 août 1834. Ordonnance concernant l'organisation du service maritime dans les possessions françaises du nord de l'Afrique. 1er sept. 1834. - Arrêté du ministre de la guerre qui règle les attributions du gouverneur général, des chefs d'administration civile placés sous ses ordres et du conseil d'administration.

1er sept. 1834. - Arrêté du ministre de la guerre qui règle les formes de l'administration civile et municipale des possessions françaises dans le nord de l'Afrique.

26 sept. 1834. — Ordonnance concernant les traitements des officiers et fonctionnaires de la marine employés dans les possessions françaises du nord de l'Afrique.

14 fév. 1835. Ordonnance qui déclare la loi de finances du 24 mai 1834 exécutoire dans les possessions françaises du nord de l'Afrique et fixe en conséquence le prix des poudres de chasse, de mine - et de commerce.

[blocks in formation]

Ordonnance qui détermine les droits de douane et de navigation à percevoir dans les possessions françaises du nord de l'Afrique.

7 déc. 1835. — Ordonnance sur le prêt à intérêt.

Art. 1. Dans les possessions françaises du nord de l'Afrique, la convention sur le prêt à intérêt fait la loi des parties.

2. L'intérêt légal, à défaut de convention et jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, sera de 10 p. 100, tant en matière civile qu'en matière commerciale. 31 juill. 1836. Ordonnance qui détermine les formes et les délais dans lesquels devront être présentées les demandes d'indemnités auxquelles croiront avoir droit les propriétaires dépossédés par suite de mesures administratives.

2 août 1836. – Arrêté du ministre de la guerre qui règle les attributions du gouverneur général, des chefs de service des administrations civiles et du conseil d'administration.

6 oct. 1836. - Ordonnance qui modifie celle du 10 août 1854, relative à l'organisation judiciaire des possessions françaises dans le nord de l'Afrique.

23 fév. 1837. Ordonnance qui autorise les transports entre la France et l'Afrique, et le cabotage par navires étrangers."

28 fév. 1837. Ordonnance portant création d'une division d'Alger au ministère de la guerre.

16 janv. 1838. Ordonnance qui modifie l'art. 1 de l'ordon. du 6 oct. 1836, en ce qui concerne l'art. 11 de celle du 10 août 1834, sur l'organisation judiciaire.

[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small]

consistoire sera composé d'un pasteur et de douze anciens. Le pasteur présidera le consistoire.

2. Les anciens seront nommés, pour la première fois, par le gouverneur général, et choisis parmi les notables protestants domiciliés à Alger. Dans la suite, ils seront nommés et renouvelés conformément à la loi du 18 germ. an 10.

3. Il pourra être établi par ordonnances royales des oratoires du culte protestant sur les différents points de l'Algérie où la nécessité s'en ferait sentir; des pasteurs auxiliaires du consistoire d'Alger seront attachés à ces oratoires.

4. Le traitement du pasteur d'Alger est fixé à 5,000 fr.; celui des pasteurs auxiliaires sera de 1,500 fr. Ces traitements seront payés sur les fonds du département de la guerre.

5. Le pasteur d'Alger et les pasteurs auxiliaires seront élus dans les formes ordinaires par le consistoire, et leur election confirmée par nous, s'il y a lieu, sur la proposition de notre garde des sceaux, ministre secrétaire d'Etat de la justice et des caites, qui devra se consulter préalablement avec notre ministre secrétaire d'Etat de la guerre.

[blocks in formation]

Ordonnance qui fixe les traitements des memen Algérie.

Arrêté ministériel qui règle la forme des ventes et concessions de biens domaniaux.

18 mai 1841. — Ordonnance portant institution de justices de paix dans chacun des districts de Philippeville et de Bouffarick.

1er juin 1841. — Arrêté ministériel qui règle l'exercice de la profession de commissaire-priseur.

Art. 1. Les commissaires-priseurs institués en Algérie procèdent exclusivement, dans les lieux de leur résidence et dans un rayon de 4 kilom., à la prisée et à la vente, aux enchères publiques, de tous les biens, meubles et marchandises neuves ou d'occasion, à l'exception des droits mobiliers incorporels, dont la vente s'effectuera par le ministère des notaires. Pourront néanmoins les huissiers procéder, concurremment et par continuation de poursuites, à la vente des fruits et objets mobiliers saisis.

[ocr errors]

2. Les ventes seront faites au comptant. Le commissaire-priseur sera responsable de la réalisation immédiate des prix, à moins qu'il n'y ait terme accordé ou consenti par les propriétaires des objets vendus.

3. Les préposes de l'administration continueront à vendre publiquement aux enchères les meubles et effets mobiliers appartenant à l'Etat, d'après les lois et ordonnances en vigueur. Il sera, toutefois, loisible à l'administration de confier ces ventes aux commissaires-priseurs. Ces derniers procéderont seuls aux ventes faites pour le compte de l'Etat, lorsqu'elles intéresseront des tiers.

4. Il est interdit à tous particuliers et à tous autres officiers publics de s'immiscer dans les prisées et ventes attribuées aux commissaires-priseurs, à peine d'une amende qui ne pourra excéder la moitié du prix des objets prisés ou vendus, sans préjudice de tels dommages-intérêts qu'il appartiendra.

5. Les commissaires-priseurs pourront recevoir toutes déclarations concernant les ventes, recevoir et viser toutes les oppositions qui y seront formées, introduire devant les autorités compétentes tous referés auxquels leurs opérations donneraient lieu, et à cet effet ajourner, par le procès-verbal, les parties intéressées devant les

dites autorités.

6. Toute opposition, toute saisie-arrêt formée entre les mains des commissairespriseurs, toute signification de jugements qui en prononcent la validité, seront sans effet, à moins que l'original desdites opposition, saisie-arrêt ou signification de jugement, n'ait été visé par le commissaire-priseur; en cas d'absence ou de refus, il en sera dressé procès-verbal par l'huissier, qui sera tenu de le faire viser par le maire ou le fonctionnaire qui en tiendra lieu.

7. Les commissaires-priseurs auront la police dans les ventes; ils pourront faire toutes réquisitions aux dépositaires de la force publique, pour y maintenir l'ordre et dresser tous procès-verbaux de rébellion. Ils seront tenus de porter, dans l'exercice de leurs fonctions, l'habit noir complet, la ceinture noire et le chapeau à la française. 8. Le ministre de la guerre détermine le nombre et la residence des commissaires-priseurs qui sont nommés et révocables par lui. Les titutaires actuels devront se pourvoir d'une commission confirmative qui leur sera délivrée, s'il y a lieu. 9. Nul ne sera admis aux fonctions de commissaires-priseurs: 1° s'il n'est 2o S'il n'a satisfait Français ou domicilie en Afrique depuis plus de cinq ans; aux lois sur le recrutement de l'armee; 30 S'il n'est âgé de vingt-cinq ans accomplis ; -40 S'il ne justifie de sa moralité.

10. Tout traité direct ou indirect pour la cession, transmission ou exploitation en commun, de titre ou clientèle de commissaires-priseurs, est interdit à peine de destitution. La destitution sera prononcée, même contre le successeur régulièrement nommé, à quelque époque que soit constatée l'existence d'accords ou de conventions quelconques avec le précédent titulaire.

11. Il est interdit aux commissaires-priseurs, à peine de destitution, 1o de se rendre adjudicataires, directement ou indirectement, d'objets qu'ils sont charges de priser ou de vendre; 2° d'exercer par eux-mêmes, par personnes interposées ou prête-noms, la profession de marchands de meubles, de marchands fripiers ou tapissiers, et même d'être associés à aucun commerce de cette nature; 3° de vendre de gré à gré et autrement qu'aux enchères publiques; 4° de comprendre dans les ventes, des meubles, objets mobiliers on marchandises non appartenant aux personnes denommées dans les déclarations prescrites par l'art. 13.

12. Les commissaires-priseurs tiendront un répertoire sur lequel ils inscriront leurs opérations jour par jour, et qui sera préalablement visé au commencement, coté et paraphé à chaque page, par le juge du tribunal civil ou le juge de paix de

[ocr errors]
« PreviousContinue »