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prononcée en sens contraire, comme les premiers juges, et a décidé que le fait d'avoir pris pour domestique un jeune soldat insoumis ne rend le maître passible des peines portées par l'art. 40 de la loi de 1852, qu'autant que sa mauvaise foi est

coupable, n'a pas pris le mot coupable, ainsi que l'a dit l'arrêt attaqué, avec l'extension que comporte la législation pénale en matière de crime; mais qu'elle a voulu donner aux tribunaux le droit d'affranchir de toute peine les prévenus qui produiraient, à l'appui de leur bonne foi, des témoignages ou des documents satisfaisants à la justice, et empêcher que le fait matériel, sans intention coupable, ou sans négligence grave, ne soit pris pour base de l'application de la peine; - Attendu, d'ailleurs, que cette preuve de bonne foi est facile à rapporter, puisque tous les jeunes Français qui le requièrent reçoivent de l'autorité la preuve de leur libération, et sont tenus d'en justifier (art. 48 de la loi), et puisque les résultats des opérations des conseils de révision sont publiés et affichés avec les noms des jeunes soldats définitivement ou conditionnellement appelés à faire partie du contingent annuel (art. 28 de la même loi); Et attendu que, dans l'espèce, par un arrêt de la chambre d'accusation de la cour royale de Poitiers, Thibault, cultivateur à Bouday, arrondissement de Châtellerault (Vienne), a été déclaré prévenu du délit prévu par l'art. 40 de la loi précitée, par le motif qu'il n'était pas permis de croire qu'il eût, pendant plus de quatre ans, ignoré la condition de son domestique, celui-ci étant domicilié dans une commune voisine, et que, fût-il vrai qu'il l'ignorât, il aurait à s'mputer la faute punissable de l'avoir reçu sans s'assurer s'il avait, ou non, satisfait à la loi, et que c'était à lui de justifier de sa bonne foi; Que l'arrêt attaqué a jugé, en droit, le contraire, en renvoyant Thibault de la prévention, sans que, ni devant les premiers juges, ni devant les juges d'appel, Thibault ait produit aucunes pièces, ni témoins, à l'appui de sa bonne foi, et alors que le prévenu se bornait à alléguer son ignorance; - D'où il suit que l'arrêt attaqué a méconnu l'esprit et le texte de l'art. 40 de la loi du 21 mars 1832; Casse.

Du 14 juill. 1838.-C. C., ch. crim.-MM. de Bastard, pr.- Isambert,

rapp.

(1) (Min. pub. C. Thibault.)

LA COUR; La cause présente à juger s'il a été bien jugé par le jugement dont est appel? - Considérant que cette façon de s'exprimer, toute spéciale à l'art. 40 de la loi du 21 mars 1852, quiconque aura été reconnu coupable d'avoir, etc., exclut l'idée que cette loi ait eu pour but de punir le fait matériel de la prise à gages d'un jeune soldat, abstraction faite de l'ignorance ou de la connaissance de son état d'insoumission; Qu'il est en effet de principe que l'idée de culpabilité se composé de deux éléments essentiels : la perpétration d'un fait incriminé par la loi et la circonstance que cette perpétration ait eu lieu avec connaissance de cause, volenté ou consentement; Qu'évidemment, le maître qui prend à son service un homme dont il ignore l'état de conserit insoumis ne peut jamais être considéré comme ayant agi avec la conscience du fait incriminable qu'il commettait, et comme ayant eu l'intention, la volonté ou le simple consentement d'aider ce conscrit à se soustraire à l'obligation que la loi lui imposait; qu'il n'y a eu dans sa conduite qu'intention de prendre un domestique, et voilà tout; que si, par le fait, il se trouve avoir pris un insoumis, ce n'est que par suite d'une erreur, et que l'erreur, qui vicie le consentement, lorsqu'elle porte sur la chose même qui fait l'objet des conventions, le fait également disparaître là où elle tombe sur ce qui forme la matière d'un délit ; Qu'ainsi, d'après le texte seul de la loi, et en prenant ses termes dans leur sens ordinaire et légal, on est conduit à décider que le fait matériel de la prise à gages d'un jeune soldat n'est pas suffisant pour motiver l'application à son auteur des peines portées par l'art. 40 de la loi de 1832;

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Considérant qu'en vain on prétendrait que le contraire résulte de la discussion qui a eu lieu dans les chambres legislatives, lors de la formation de cette loi; - Que, d'abord, étant de principe que nul ne peut être inquiété à raison d'un fait qui n'aurait pas été, antérieurement à sa perpétration, expressément prévu et prohibé par la loi, il en découle cette conséquence que, si l'inculpé d'un acte qu'on prétend punissable peut, avec raison, être admis à invoquer les discussions qui ont eu lieu sur la loi qu'on veut appliquer, pour établir que le texte de cette loi a mal exprimé la pensée du législateur et lui a fait dire plus qu'ii n'avait voulu, il n'en saurait être de même lorsque, dans l'intérêt de l'accusation, il s'agit de donner à la loi pénale une extension que ses termes, pris dans leur sens naturel, ne comportent pas; Que si, par une fiction d'ordre public, nul n'est censé ignorer la loi, l'eflet de cette fiction ne peut s'étendre à ce qui a pu être dit lors de la confection de cette loi ; Que le texte seul est rendu exécutoire et porté à la connaissance des citoyens par la promulgation; Que ce n'est que là qu'ils ont et le devoir et la possibilité de rechercher la règle de leur conduite, et qu'il y aurait arbitraire et injustice à vouloir prendre ailleurs qu'à cette source des motifs de les condamner;

Considérant, au surplus, que, loin d'être contraire au système du jugement attaqué, les discussions qui ont eu lieu dans les chambres, sur la loi de 1852, lui sont éminemment favorables; - Qu'on y voit

prouvée (Bourges, 6 oct. 1858) (1). Mais, sur un nouveau pourvoi, les chambres réunies de la cour de cassation ont consacré de nouveau la solution de la chambre criminelle en cassant l'arrêt de la cour de Bourges (Ch. réun. cass. 2 fév, 1839) (2).

que l'art. 40, à l'état de projet amendé par la commission, commençait ainsi: «Quiconque sera convaincu d'avoir donné asile à un insoumis, ou de l'avoir pris à son service, etc. »;-Que, sur cet article présenté à la chambre des pairs (séance du 30 janv. 1832, Moniteur du 31, p. 297), il fut demandé que les mots sciemment et avec connaissance y fussent insérés; - Qu'il fut d'abord répondu que cela était inutile, ne pouvant jamais y avoir de délit sans intention; Qu'ensuite, et sur l'insistance de plusieurs membres, et notamment de M. Pontécoulant, qui demandait que, si le mot sciemment n'était pas introduit dans la loi, on fit com→ mencer l'article par ces mots : Quiconque sera reconnu coupable d'avoir, etc., et cela afin d'éviter que l'on pût être condamné pour un fait maté riel commis par erreur et sans mauvaise intention, l'article fut renvoyé à la commission, d'où il revint (séance du 31 janv., Moniteur du 2 fév., p. 325) rédigé tel qu'il a passé dans la loi et qu'il fut adopté après que M. de Pontécoulant eut déclaré « qu'il était complétement satisfait de la nouvelle rédaction, que non-seulement elle rendait l'idée par lui soumise à la chambre,mais qu'il était impossible le voir un article plus clairement rédigé et qui dût moins prêter à l'arbitraire »;-Considérant qu'à la chambre des députés la commission ayant proposé, par amendement, de retrancher ces mots : ou pris à son service, M. Dupin s'y opposa en demandant l'adoption de l'article tel qu'il avait été voté par la chambre des pairs (séance du 6 mars, Moniteur du 7, p. 664); — Que, l'amendement de la commission rejeté, la question s'éleva de savoir si l'on insèrerait dans l'article le mot sciemment; Que M. le garde-des-sceaux s'y opposait, combattu qu'il était par MM. Pelet de la Lozère, Laurence et de Tracy, qui croyaient ce mot nécessaire et proposaient cette rédaction : « Quiconque sera convaincu d'avoir sciemment recélé ou pris à son service, etc.; » Que cette rédaction fut rejetée et l'article de la chambre des pairs adopté sur cette observation de M. Laurence, que cette rédaction: Quiconque aura été reconnu coupable, était suffisante, puisqu'on ne pouvait jamais être reconnu coupable qu'autant qu'on avait agi en connaissance de cause; et sur cette autre de M. Bavoux, qu'on n'est pas coupable quand on n'a pas fait sciemment le recel;

Considerant que peu importe, après cela, la difficulté qu'on prétend qu'il y aurait dans ce cas à établir la mauvaise foi des inculpés;-Que cette difficulté, existât-elle, ne saurait faire donner au mot coupable, employé par la loi, un autre sens que celui qu'il a dans le langage légal, et que la discussion aux chambres prouve surabondamment lui avoir été conservé; qu'au surplus, la preuve de la mauvaise foi n'est pas plus difficile à faire dans ce cas que dans tous ceux où elle est exigée, et notamment qu'en matière de recel d'objets volés et d'hébergement de malfaiteurs ; — Qu'au contraire, la preuve de la bonne foi, si elle devait être mise à la charge de l'inculpé, serait la plupart du temps impossible à fournir, puisqu'elle aurait presque toujours le caractère de preuve négative; Que, s'il peut être vrai qu'en certains cas il y aurait pour le maitre qui prend un domestique moyen de connaître la position de celui-ci, il ne l'est pas moins que le plus souvent il y aurait une difficulté si grande, qu'elle équivaudrait à impossibilité;

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Considérant que, si l'art. 40, qui s'occupe non-sculement de la prise à gages, mais encore du recel des insoumis, autorise les juges à abaisser, suivant les circonstances, la peine qu'ils prononcent jusqu'au minimum de 20 fr, d'amende, ce serait à tort qu'on en voudrait induire l'intention, de la part du législateur, d'appliquer une peine même à la perpétration matérielle d'un fait, effectuée par erreur et insuffisante pour constituer à elle seule la culpabilité; -Que le but unique du législateur a été en cela de donner aux juges, dans le cas de culpabilité reconnue, le moyen de mettre la punition en rapport avec cette culpabilité, suivant la position particulière de chaque inculpé à l'égard de l'insoumis par lui recélé; Considérant enfin que si la loi de l'an 6, à la différence de la loi actuelle, contenait le mot sciemment, on n'en saurait rien induire, parce que ce mot était nécessaire en l'absence de ceux qui se trouvent dans la loi du 21 mars 1852 et qui sont destinés à en tenir lieu: Quiconque aura été reconnu coupable, etc.; — Par ces motifs, et adoptant au surplus, quant au fait, les motifs des premiers juges, la cour donne défaut contre l'inculpé non comparant, et pour le profit, dit qu'il a été bien jugé, etc.

Du 6 oct. 1838.-C. de Bourges, ch. correct. MM. Dubois, pr.-Baillehache, subst., c. conf.

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(2) (Min. pub. C. Thibault.) LA COUR (apr. dél. en ch. du cons.); Vu l'art. 40 de la loi du 21 mars 1832; Attendu que cet article punit non-seulement celui qui a recélé un insoumis, c'està-dire qui l'a soustrait aux recherches de l'autorité, mais aussi celui qui est reconnu coupable d'avoir pris un insoumis à son service; Attendu qu'en ne prononçant une peine que contre celui dont la culpabilité est reconnue, la loi a voulu autoriser le prévenu à administrer la preuve de sa bonne foi, et empêcher que la seule constatation du fait matériel entraînât nécessairement une application de peine, alors

M. Duvergier, t. 32, p. 99, dit que lors de la discussion de la loi, la question avait été résolue dans ce dernier sens, à raison de l'impossibilité où serait toujours le ministère public de prouver la mauvaise foi (V. cependant l'arrêt précité de la cour de Bourges). Quoi qu'il en soit, cette doctrine n'est pas sans inconvénients. Il y a des faits qui portent avec eux un caractère délictueux jusqu'à preuve contraire; mais le fait de louer un domestique n'est pas de ce nombre.

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781. Le même article distingue pour la peine applicable, les effets de grand équipement et ceux de petit équipement. Les effets de grand équipement, d'après l'indication que la loi en donne, sont le cheval, les effets d'armement, d'équipement ou d'habillement, et autres objets confiés pour le service. Les effets de petit équipement sont les chemises, souliers, cols, etc. Ces objets sont payés par le soldat avec une somme dite de première confectionnés dans les ateliers des corps ou achetés, par les conseils d'administration; ils doivent être toujours au complet. Pour les renouveler, l'Etat alloue journellement 10 cent. à chaque sous-officier et soldat; au moyen de la première mise et de l'allocation de 10 cent., on forme à chaque homme une réserve de 30 à 40 fr., qu'on appelle masse de linge et chaussures. Les peines disciplinaires ayant été reconnues insuffisantes pour empêcher les soldats de vendre des objets de petit équipement, la loi de 1829 et celle de 1857 ont édicté des peines correctionnelles.

777. Antérieurement à la loi de 1852, la cour de cassation avait décidé que celui qui, de bonne foi et sans intention répréhensible, a reçu chez lui un jeune soldat appelé au recrutement de l'armée, n'est point passible de peine : << Attendu que le tribunal de Saintes a declaré, en fait, que toutes les circonstances de la cause prouvent la bonne foi de Terrien, et que ces mêmes circonstances que le tribunal rappelle et appré-mise que l'Etat lui alloue dès son arrivée au corps. Ils sont cie dans ses motifs excluent, et doivent conséquemment le faire considérer comme non coupable de ce délit; que dans l'état des faits, tels qu'ils ont été déclarés par le tribunal de Saintes, la décision de ce tribunal est devenue irréfragable >> (Crim. rej. 24 fév. 1827, MM. Portalis, pr., Carbonnel, rap., aff. Terrien). M. Duvergier, loc. cit., pense que cet arrêt, bien que rendu sous la loi du 24 brum. an 6 qui contenait le mot sciemment, a décidé au moins implicitement que la bonne foi du prévenu devait être prouvée par lui: il ne nous paraît pas qu'on puisse induire de l'arrêt une telle décision.

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778. Vente, mise en gage, recel des effets militaires. Le code de 1857 s'est approprié les dispositions de la loi du 15 juill. 1829 qui avait édicté des peines contre la vente, le détournement et la mise en gage des effets militaires. Mais cette dernière loi ne portait aucune peine contre le recel des effets militaires, et d'un autre côté, ne prévoyait pas le cas où l'achat ou la prise en gage de ces effets seraient le fait des citoyens non militaires. La loi nouvelle a comblé ces lacunes. A l'égard de la vente d'effets militaires par des militaires, les art. 244 et 246 disposent :-«Art. 244. Est puni d'un an à cinq ans d'emprisonnement tout militaire qui vend son cheval, ses effets d'armement, d'équipement ou d'habillement, des munitions, ou tout autre objet à lui confié pour le service. Est puni de la même peine tout militaire qui sciemment achète ou recèle lesdits effets. La peine est de six mois à un an d'emprisonnement, s'il s'agit d'effets de petit équipement.-Art. 246. Est puni de six mois à un an d'emprisonnement tout militaire qui met en gage tout ou partie de ses effets d'armement, de grand équipement, d'habillement, ou tout autre objet à lui confié pour le service. La peine est de deux mois à six mois d'emprisonnement, s'il s'agit d'effets de petit équipement. >> L'art. 244 punit de la même manière la vente et l'achat, comme le recel des effets militaires par des militaires. Mais pour que l'achat ou le recel, constitue un délit, le § 2 de l'art. 244 veut que le militaire acheteur ou recéleur ait agi sciemment. Cette condition ne se trouvait pas exprimée dans la loi de 1829. Il paraîtrait que c'est par inadvertance que le mot sciemment ne se trouvait pas dans le texte officiel, et qu'il figurait dans le texte voté par les chambres.

779. Par le mot vendre employé dans la loi, on doit comprendre tous les modes d'aliénation, entre autres, l'échange (Crim. règl. de jug., 25 juill. 1823, MM. Barris, pr., Rataud, rap., aff. Bidal; Bruxelles, 2 mars 1832) (1).

780. L'art. 244 ne comprend dans ses dispositions que les objets affectés au service des militaires, et qui leur sont donnés par l'Etat en qualité de militaires. La vente ou mise en gage de tous

même qu'il serait établi que le fait a eu lieu sans intention ou sans coupable négligence de l'individu auquel il est imputé; Attendu que l'arrêt attaqué, en jugeant que c'était au ministère public à administrer la preuve que Thibault, lorsqu'il a pris Garrand à son service, savait que celui-ci était un insoumis, et en déclarant la non-culpabilité de Thibault, sans que celui-ci eût produit aucune preuve pour établir sa bonne foi, a expressément violé l'article précité;-Casse. Du 2 fév. 1839.-C C., ch. réun. -MM. Portalis, 1er pr.-Renouard, r. (1) (Min. pub. C. V.....) · V... avait troqué avec un militaire une paire de bottes contre une paire de souliers faisant partie de son équipement; traduit en police correctionnelle, il fut acquitté.

Appel.

782. De la généralité des termes de l'art. 244, il résulte que cet article doit recevoir son application pour les officiers comme pour les soldats. Lors de la discussion de la loi de 1829, on avait proposé à la chambre des pairs que la vente d'effets militaires ne fût pas un délit pour les officiers. Les effets de l'officier, disait-on, sont sa propriété particulière; comment pourrait-il donc commettre le délit qu'il s'agit de réprimer ? il fut répondu que si l'officier est ordinairement propriétaire de ses effets, il est des cas où ils lui sont fournis par le gouvernement et que, par conséquent, il était nécessaire de maintenir l'article dans sa généralité. M. de Peyronnet avait proposé de spécifier qu'il n'y a délit qu'autant que les effets que le soldat met en gage appartiennent à l'Etat. On verrait plus clairement, disait-il, que la loi ne s'applique pas aux effets qui seraient la propriété particulière, soit de l'officier, soit des soldats, et qu'elle s'étend à tous les cas où des effets appartenant à l'Etat seraient mis en gage par d'autres que par ceux à qui ils sont confiés pour le service. Le ministre fit observer qu'il importait de faire sentir aux militaires que les effets qu'ils considèrent comme leur propriété ne doivent pas être aliénés par eux, et que, dans les cas où ils auraient mis en gage les effets d'un autre, ce serait un véritable vol.

783. Il a été jugé: 1o que la vente ou l'achat par un militaire d'objets faisant partie du sac d'un marin d'un équipage de ligne, constitue le délit de vente ou d'achat d'effet de grand ou de petit équipement (Crim. règl. de jug. 11 juin 1865, aff. Leplanquais, D. P. 66. 5. 304 et 301); 2° Que le soldat des équipages de ligne, reconnu coupable de vol d'effets d'habillement au préjudice d'un camarade et de vente de ses effets de petit équipement, doit, eu égard à sa qualité de militaire, être puni conformément à la loi pénale militaire, à laquelle il est soumis en dehors de ce qui concerne la police du bord; c'est à tort que le conseil de guerre maritime applique, en pareil cas, l'art. 401 c. pén. (Crim. cass. 7 fév. 1852, aff. Macé, intér. de la loi, D. P. 52. 5. 362). - V. l'art. 330 c. just. milit. pour l'armée de mer, D. P. 58. 4. 90.

784. Dissipation, détournement des effets militaires.—Dis

Le ministère public invoque le but de la loi, et soutient que l'échange participe, sous presque tous les rapports, de la nature de la vente. Arrêt. Attendu qu'il est suffisamment établi que le prévenu

LA COUR;

a fait l'acquisition de deux paires de souliers, faisant partie d'effets d'habillement militaire, et ne portant pas les marques de rebut, fait prévu par l'art. 6 L. 7 oct. 1831; Par ces motifs, faisant droit sur l'appel interjeté par le ministère public, met le jugement dont est appel au néant, etc.

Du 2 mars 1832. C. sup. de Bruxelles, 4e ch.-M. Lauwens, av. gen.,

c. conf.

siper ou détourner les effets militaires est un délit différent de celui de vente ou de mise en gage. A cet égard, l'art. 245 dispose: --«Est puni de six mois à deux ans d'emprisonnement, tout militaire 1° qui dissipe ou détourne les armes, munitions, effets et autres objets à lui remis pour le service; 2° Qui, acquitté du fait de désertion, ne représente pas le cheval qu'il aurait emmené, ou les armes ou effets qu'il aurait emportés. >> - La disposition de la première partie de cet article est applicable au cas où un militaire ne peut représenter les objets qui lui ont été confiés pour le service, sans les avoir cependant ni vendus ni mis en gage, ou qui les garde frauduleusement après le temps de son service militaire. La seconde partie exige une explication. Le § 2 suppose que le délit de détournement peut être commis par un militaire non déserteur, et qu'il ne peut l'être par un déserteur. Pour comprendre cette disposition, il faut savoir que, de tout temps, le détournement d'effets militaires par un déserteur a été compris dans le délit de désertion, et ne constitue pas dans ce cas un fait principal. En effet, un soldat déserte ordinairement avec ses habits militaires; mais le détournement de certains effets militaires peut aggraver le délit de désertion. Il a été jugé, même avant la loi de 1829, que le fait, par un militaire, d'avoir, en désertant, emporté et vendu des effets appartenant au corps dont il fait partie, ne constitue plus un fait principal, mais seulement une circonstance aggravante de la désertion, qui doit être jugée en même temps que le fait de désertion, par les conseils de guerre (Crim. cass. 25 juill. 1823, MM. Barris, pr., Rataud, rap., aff. Bidal).La loi de 1857 est conçue dans cet ordre d'idées. Lorsqu'un soldat aura été condamné comme déserteur, le conseil de guerre aura donc à prononcer sur le fait de détournement, au cas où le soldat aurait aggravé par ce délit le fait de désertion. Mais si le conseil de guerre juge qu'il n'y a pas eu désertion, il peut rester un fait de détournement à punir d'une peine correctionnelle. C'est pour ce cas qu'est fait le § 2 de l'art. 245.

-

785. Le code de 1857, comme la loi de 1829, ne parle pas de la dissipation ou du détournement des effets de petit équipement. La dissipation, la destruction ou le détournement de ces effets ne constituent pas, en effet, un délit, attendu qu'ils sont la propriété, non de l'Etat, mais du soldat. De tels actes pourraient être réprimés, sans doute, disciplinairement par les chefs de corps, mais ils ne tombent pas sous l'application de la loi pénale. On avait demandé si la dissipation ou le détournement de ces mêmes effets militaires ne formeraient pas du moins le délit d'abus de confiance prévu par l'art. 408 c. pén. Cela ne peut être, par la même raison. Il a été jugé, sous l'empire de la loi de 1829, que la dissipation, par un militaire, de ses effets de petit équipement n'est punie ni par la loi du 15 juill. 1829, ni par l'art. 408 c. pén.; qu'elle doit être réprimée seulement par l'usage du pouvoir disciplinaire confié au chef du corps (Crim. cass. 13 juin 1846, afl. Clerc, D. P. 46. 1. 238). Cependant il a été jugé, sous le code de 1857, que l'art. 245 de ce code, qui prévoit et punit le délit de dissipation par un militaire des effets à lui remis pour son service, s'applique au cas de dissipation d'effets de petit équipement, aussi bien qu'à celui de dissipation d'effets de grand équipement (Crim. cass. 15 juill. 1858, aff. Toussaint, D. P. 58. 5. 239). 786. Achat, recel, prise en gage des effets militaires. L'achat et le recel d'effets militaires qui sont le fait de militaires, sont punis par l'art. 244 de la même peine que le fait de la vente. Lorsqu'ils sont le fait de citoyens non militaires, l'art. 247 du même code de 1857 dispose: << Tout individu qui achète, recèle ou reçoit en gage des armes, munitions, effets d'habillement, de grand ou petit équipement, ou tout autre objet militaire, dans des cas autres que ceux où les règlements autorisent leur mise en vente, est puni par le tribunal compétent de la même peine que l'auteur du délit. » Cette disposition a comblé une lacune. La loi de 1829 ne punissait que les acheteurs, recéleurs ou gagistes militaires; d'où était née la question de savoir quelle était la disposition applicable aux citoyens non militaires prévenus d'avoir acheté ou pris en gage des effets militaires. Il avait été jugé: 1° que l'achat ou la prise en gage par un non-militaire d'effets d'équipement, était passible des peines portées par la loi du 28 mars 1793, la loi TOME XXXIV.

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du 15 juill. 1829 n'ayant dérogé à cette loi qu'à l'égard des vendeurs et acheteurs militaires (Crim. cass. 17 juill. 1834, MM. Choppin, f. f. pr., Fréteau, rap., aff. Israël; 2 juin 1837, MM. Bastard, pr., Isambert, rap., aff. Lechalier; 10 déc. 1841, aff. Boy, V. no 875-2°); 2o Que celui qui achète sciemment d'un soldat des effets d'équipement se rend passible, non-seulement de l'amende, mais encore de l'emprisonnement prononcé par l'art. 33, tit. 2, L. 19-22 juill. 1791, auquel se réfère la loi du 28 mars 1793, qui, relativement aux acheteurs d'effets militaires, n'a été rapportée ni modifiée par aucune loi posté-rieure (Crim. cass. 16 nov. 1821, MM. Barris, pr., Ollivier, rap., aff. Sauvage; 9 fév. 1837, MM. Choppin, f. f. pr., Vincens, rap., aff. Rey; même jour, MM. Choppin, f. f. pr., Mérilbou, rap., aff. Jourde; Metz, 17 nov. 1855, aff. Léon Lévy, D. P. 54. 2. 245); -3° Que celui qui achète à des militaires des armes ou effets de grand ou petit équipement est passible des peines portées par l'art. 5 de la loi du 28 mars 1795, et non pas seulement de celles prévues par les art. 406, 408 et 62 c. pén. (Crim. cass. 2 sept. 1836, aff. Fournier, V. no 850-2o; Ch. réun. cass., 8 avr. 1857, aff. Blanchard, V. Abus de conf., Contrà, Crim. rej. 15 janv. 1820, MM. Barris, pr., Giraud, rap., aff. Melquiour); 4° Que la distinction que fail l'art. 9 de la loi du 15 juill. 1829 entre les effets de grand et de petit équipement, pour infliger une peine moindre aux ventes ou achats des effets de petit équipement, est une dérogation à la loi de 1793 qui n'est applicable qu'aux militaires vendant ou achetant des effets militaires, et qui ne peut être invoquée par les non-militaires (Crim. cass. 16 janv. 1841, MM. Bastard, pr.-Romiguières, rap., aff. min. publ. C. Métel).

no 128.

787. Depuis la loi de 1857, cette question ne peut plus se présenter. Il est parfaitement certain que, sous la législation nouvelle, l'achat d'effets illégalement vendus par un non-militaire est non plus un cas de complicité de l'infraction commise par ce militaire, mais un délit sui generis, pour lequel l'acheteur non militaire est justiciable du tribunal correctionnel (V. no 875), et dont la peine peut être atténuée, conformément aux principes du droit commun, par l'application de l'art. 463 c. pén. (V. no 749). Toutefois ce délit diffère des délits de droit commun en ce qu'il ne saurait entrer en compte comme élément de récidive (Crim. cass. 30 mars 1861, aff. Picard, D. P. 61. 1. 185).-Nous croyons utile de rappeler les décisions suivantes qui ont jugé: 1o que le nécessaire d'armes d'un soldat (il consiste en un étui de fer, renfermant un tourne-vis et autres menues pièces que l'on emploie pour démonter un fusil) fait partie de l'équipement militaire; qu'en conséquence, celui qui achète d'un soldat un tel objet, est passible de la peine portée en l'art. 5 de la loi du 28 mars 1793, contre ceux qui achètent des objets faisant partie de l'équipement militaire (Crim. cass. 14 sept. 1852, MM. Ollivier, f. f. pr., Brière, rap., aff. Fleury); - 2° Que l'expression générale d'effets militaires, dans le sens de la loi de 1793, comprend même les effets du petit équipement, lesquels deviennent la propriété du soldat lorsqu'il est légalement libéré du service; qu'ainsi, et tant que la libération de service n'a pas eu lieu, l'achat de ces effets constitue le délit prévu par cette loi (Crim. cass. 17 juill. 1854, MM. Choppin, f. f. pr., Fréteau, rap., aff. Israël); 3° Que les militaires condamnés aux travaux publics ne cessant pas d'être militaires (V. no 741), les individus qui leur achètent des effets d'équipement sont passibles des peines portées par l'art. 55, tit. 2 de la loi du 22 juill. 1791 (Crim. cass. 10 mars 1856, MM. Choppin, f. f. pr., Ricard, rap., aff. Blanchard; 16 janv. 1841, MM. Bastard, pr., Romiguière, rap., aff. Métel; 10 déc. 1841, aff. Boy, infrà, no 875-2o).—L'art. 247, par la généralité de ses termes, est applicable aux militaires comme aux individus de l'ordre civil. Un militaire qui prendrait en gage les effets d'un autre militaire, tomberait ainsi sous l'application de cet article. 788. Vol. La loi de 1857 prévoit trois espèces de vols : 1o le vol de denrées et effets militaires quelconques appartenant soit à l'État, soit à d'autres militaires. La peine varie selon que le prévenu est ou non un comptable;-2o Le vol au préjudice de l'habitant chez lequel le militaire est logé; 3o Le vol sur la personne d'un blessé. La peine peut alors être celle de la mort lorsque, pour dépouiller le blessé, il lui a été fait de nouvelles blessures (art. 248, 249). La loi de 1829 contenant

255

selon que les bâtiments ou les édifices incendiés ou détruits sont ou non habités, servent ou non à l'habitation des hommes, et que de plus cette loi n'est applicable qu'autant que les objets détruits ou incendiés sont à l'usage de l'armée, laissant au code pénal ordinaire son empire, s'il s'agit d'objets ou édifices qui n'ont pas cette destination. L'art. 268 dispose que les citoyens non militaires, lorsqu'ils sont complices de ces faits, sont passibles des mêmes peines que les militaires eux-mêmes. V. Organis. marit., no 932.

des dispositions à peu près conçues dans les mêmes termes.-II | pénal ordinaire qui prononce des peines plus ou moins graves a été jugé sous l'empire de cette loi: 1° que l'art. 1 de la loi du 15 juill. 1829, qui prévoit et punit le vol, commis par les militaires, des munitions appartenant à l'Etat, a entendu désigner par ce terme générique non-seulement les munitions de guerre, mais encore les fourrages, grains et vivres de toute espèce nécessaires à la subsistance de l'armée et appartenant à l'Etat (Crim. règl. de jug. 19 jany. 1856, aff. Christophe, D. P. 56.1. 128);-2° Qu'en conséquence, le vol par un militaire (un cuirassier, pendant qu'il était de garde à l'écurie), de denrées appartenant à l'Etat, et destinées à la subsistance des chevaux, tels que de l'avoine, constitue un vol de munitions puni par l'art. 1 de la loi du 15 juill. 1829 (Crim. rej. 23 fév. 1849, aff. Aleigne, D. P. 49. 1. 184); - 5o Que de même le vol de pain commis par un militaire au préjudice de l'administration des subsistances militaires, constitue un vol de munitions dans le sens de cet article (arrêt précité 19 janv. 1856).

79. Quant aux individus non militaires qui se sont rendus complices de ces vols par recélé ou autrement, ils ne doivent subir que la peine prononcée contre ces faits par la loi pénale ordinaire; celle de la complicité de l'abus de confiance, s'il s'agit d'un détournement par un militaire de munitions ou d'effets à lui confiés pour son service (art. 244); celle de la complicité du vol simple ou qualifié, s'il s'agit de la soustraction de munitions dont le militaire, auteur principal du vol, n'avait pas reçu le dépôt (art. 248); celle de la complicité du vol par un comptable public des effets mobiliers qui étaient entre ses mains en vertu de ses fonctions (art. 169 et suiv. c. pén.), si le crime n'est autre qu'un vol de munitions, de deniers ou effets appartenant à des militaires ou à l'Etat par un militaire qui en était comptable (art. 148). Telle était d'ailleurs la jurisprudence établie avant le code de 1857. V. suprà, no 745.

790. Il a été jugé d'autre part que les tribunaux ne peuvent refuser d'appliquer la disposition pénale de la loi militaire, sous prétexte qu'une circulaire du ministre de la guerre aurait fait remise de la peine à ceux des acheteurs d'armes de guerre qui rapporteraient ces armes dans un délai déterminé, les ministres n'ayant le droit ni d'anéantir ni de suspendre les effets des lois (Crim. cass. 28 juill. 1814, aff. Gérard, et 14 avr. 1815, aff. Tournier, V. Amnistie, no 27; V. aussi Lois, h° 82, 88).

791. Lorsque le vol est accompagné des circonstances aggravantes indiquées par le code pénal, art. 381 et suiv., et que les peines qui y sont portées sont plus élevées que celles de la loi militaire, c'est des dispositions du code pénal qu'il doit être fait application (c. just. mil. art. 248).-Il a été jugé que, dans le cas où la perpétration de vols commis au préjudice de l'armée par des militaires, a été accompagnée de circonstances aggravantes, les juges ne doivent appliquer les dispositions du code pénal ordinaire qu'autant que la peine est supérieure à celle de la reclusion prononcée contre de tels vols par l'art. 248 c. mil.; que dès lors, si par l'effet des débats ies circonstances aggravantes relevées contre les accusés se trouvent écartées, c'est de l'art. 248 c. mil., et non de l'art. 401 c. pén., qu'il y a lieu de faire application (Crim. cass. 15 juil. 1858, aff. Teissier, intérêt de la loi, D. P. 58. 1. 430).

792. Pillage, destruction, dévastation d'édifices. La loi militaire de 1857, dans les art. 250 à 256, édicte des peines contre certains crimes et délits qui se trouvent déjà prévus dans le code pénal ordinaire: tels sont les faits de pillage, de destruction et dévastation d'édifices (c. pén., art. 454 et suiv). On remarquera, sur les dispositions des art. 251 à 256, relatives aux faits de destruction d'édifices, que la loi militaire n'a pas cru devoir graduer la peine suivant la distinction admise par le code

(1) (Amaus.) LA COUR Sur le moyen pris de la violation de l'art. 271 c. inst. crim., en ce que l'accusation primitive aurait été dénaturée par les questions posées devant la cour d'assises : Attendu qu'Amans avait été renvoyé devant la cour d'assises de Blidah pour Complicité de faux en écriture authentique commis par un officier comptable, ce qui constituait le crime prévu et puni par l'art. 146 c. pen., combiné avec l'art. 60 du même code; que, si l'art. 147 a été visé dans l'arrêt de renvoi, cette erreur, qui ne changeait rien aux éléments constitutifs des faits, pouvait et devait être rectifiée par le président

793. Faux en administration militaire. La loi de 1857 ne s'occupe du crime de faux que dans les rapports avec la comptabilité (art. 257 à 260). Le crime de faux commis à propos de tout autre fait que la comptabilité est puni en vertu des dispositions du code pénal ordinaire (art. 267). — Il a été jugé que le militaire qui, à une demande de prolongation de congé par lui adressée au ministre de la guerre, a joint un certificat du maire attestant sa position de soutien de famille, mais sur lequel il avait apposé deux fausses signatures destinées à faire croire à l'adhésion exigée pour la validité de cette pièce, de deux citoyens pères de jeunes soldats appelés ou en activité, doit être poursuivi comme coupable du crime prévu par les art. 162 et 147 C. pén. (Crim. cass. 8 fév. 1855, aff. Giraud, D. P. 55. 1. 89-90. V. Faux, no 442). Il a élé jugé aussi, sous les lois antérieures au code de 1857, qu'un capitaine d'habillement étant, non pas un simple mandataire privé du conseil d'administration du corps, mais un officier chargé d'un service public, dont les registres ont un caractère public et authentique, le faux commis par lui sur ses registres, faux résultant notamment de ce que ce capitaine y aurait fait intercaler des additions dans l'intention criminelle de présenter des situations fausses et d'échapper à la responsabilité d'un déficit existant en magasin, tombe sous l'application des art. 145 et 146 c. pén. (Crim. cass. 5 août 1855, aff. Fabrègue, D. P. 55. 1. 264). - Aujourd'hui ce fait donnerait lieu à l'application des peines de l'art. 257 c. milit. qui prévoit et punit le cas où un comptable militaire porte sur ses registres certaines énonciations mensongères ou commet tout autre faux dans ses comptes. Mais la solution de l'arrêt de 1853 n'en est pas moins bonne à retenir, comme indiquant la véritable qualification du fait vis-à-vis du non-militaire qui se serait rendu complice du faux commis par un militaire comptable. A cet égard il a été jugé que, dans le cas où l'arrêt qui renvoie devant la cour d'assises le complice non militaire d'un faux commis sur ses livres par un comptable militaire, a visé par erreur l'art. 147 c. pén. au lieu de l'art. 146, le président a pu, sans commettre de nullité, rectifier cette erreur et poser au jury la question de culpabilité dans les termes dudit art. 146, et qu'en tout cas l'accusé est sans intérêt à se plaindre, s'il lui a été fait application, non de cet art. 146 c. pén., mais de l'art. 257 c. just. mil., qui prononce la même peine que l'art. 147 c. pén. (Crim. rej. 16 juill. 1868) (1). On comprend la répugnance que le juge doit éprouver à appliquer au complice l'art. 146 c. pén.; cet article prononce la peine des travaux forcés à perpétuité, tandis que l'art. 257 c. just. mil. ne prononce contre le comptable militaire que les travaux forcés à temps, en permettant d'abaisser la peine jusqu'à deux ans de prison en cas de circonstances atténuantes. Par exception, pour ce cas de faux, le droit commun, auquel le complice non militaire se trouve forcément soumis, se trouve être plus sévère que la loi militaire.

794. Il a été jugé, d'un autre côté, qu'il n'y a pas crime de faux de la part du sous-officier ou soldat employé en qualité de sécretaire dans les bureaux du capitaine-major du régiment, qui,

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après avoir, à l'insu de cet officier, préparé ou fait préparer en minute, dans ces bureaux, des congés destinés à libérer des militaires qui n'y avaient pas droit, a glissé ces congés parmi d'autres pièces envoyées à la signature du général, et surpris ainsi l'approbation de ce dernier (Crim. cass. 20 août 1857, aff. Fescourt, D. P. 57. 1. 411).

795. Corruption et infidélité dans l'administration militaire. La loi de 1837, tout en se référant pour la punition de ces délits aux dispositions du code pénal ordinaire (art. 169, 170, 174, 175, 177 et 179. V. Forfaiture, nes 29 et s., 38 et s., 82 el s., 100 et s., 147 et s.; V. aussi vo Organis. marit. nos 956, 957), a introduit cependant, à l'égard du médecin militaire, une disposition qui modifie l'art. 45 de la loi du 21 mars 1332 sur le recrutement. L'art. 262 élève la peine portée par la loi de 1832 contre le fait de prévarication consistant pour le médecin à certifier faussement l'existence de maladies ou infirmités, de nature à exempter du service. Le mème article a apporté une autre modification à la loi de 1852 en punissant, dans le cas en question, les corrupteurs de la même peine que le fonctionnaire qui s'est laissé corrompre. V. supra nos 551 et s. 796. Usurpation d'uniformes, insignes, décorations. — Le code pénal ordinaire punit ces délits par son art. 259. Il faut rapprocher de cette disposition le décret du 15 juin 1855, relatif aux décorations étrangères (V. Usurpation de costume, décorations, etc.). La loi militaire de 1857 (art. 266) applique la mème peine que le code pénal. Elle permet seulement d'en abaisser le minimum à deux mois de prison au lieu de six mois.

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797. La loi du 9 juin 1857 n'a rien innové sur la constitution des tribunaux militaires. A toutes les époques de l'histoire militaire, les militaires ont été soumis à des juridictions spéciales en matière criminelle. Ces juridictions d'exception sont en quelque sorte imposées par la nécessité. Il est vrai que, dans le courant du siècle dernier, les légistes anglais concurent la pensée de soumettre les militaires aux mêmes juridictions criminelles que les citoyens. Mais l'essai tenté à deux reprises ne fut pas heureux. Les cours martiales ont continué de fonctionner, et elles n'ont pas cessé d'appliquer le Mutiny act sans opposition. La forte constitution militaire de la France n'eût pas permis de songer à une pareille tentative. La loi du 9 juin 1857 qui a reconstitué les juridictions militaires s'est particulièrement appliquée : 1° à assurer l'indépendance des tribunaux militaires et à donner aux accusés les garanties les plus larges sans compromettre les besoins de la discipline; 2o à maintenir la séparation de la juridiction militaire et de la juridiction criminelle ordinaire, excepté dans les cas exceptionnels où la séparation eût compromis les intérêts de la justice et les droits des accusés; 3° à donner à l'instruction et à la procédure toute la célérité compatible avec la bonne administration de la jus

tice.

798. Les tribunaux militaires sont de trois sortes. La loi a organisé la constitution, l'instruction et la procédure de trois juridictions différentes: 4° les conseils de guerre; 2° les conscils de révision; 3° les prévôtés. Ses dispositions ont été particulièrement empruntées pour les deux premières juridictions aux lois des 15 brum. an 5 et 18 vend. an 6. La compétence des prévôtés n'avait jamais été bien déterminée. La loi de 1857 ne l'admet qu'en temps de guerre et en pays ennemi sur certaines

Attendu,

(1) (Belkassem-ben-Ali C. min. pub.) LA COUR; quant à la compétence de la cour d'assises, sur un fait qui aurait été commis hors du territoire de la juridiction civile de l'Algérie; que la compétence des tribunaux ordinaires est de droit commun, et qu'il ne peut résulter d'ouverture à cassation de la part d'un accusé, de ce qu'on l'a fait jouir des garanties de cette juridiction, au lieu de le traduire devant la juridiction exceptionnelle des conseils de guerre; Attendu, d'ailleurs, que, dans l'espèce, cette juridiction avait été abolie sur le territoire en question, et que ses attributions avaient, dès lors, et par l'effet d'un arrête du gouverneur, rendu conformément à l'ordonnance royale du 40 août 1854, passé à la juri

classes de personnes qui suivent l'armée. La juridiction ordinaire militaire est donc le conseil de guerre.

99. La juridiction militaire est toute d'exception. L'art. 53 dispose que les tribunaux militaires ne statuent que sur l'action publique, sauf les cas prévus par l'art. 75 qui autorise les prévôtés à connaître des demandes en dommages-intérêts n'excédant pas 150 fr. L'art. 54 ajoute : « L'action civile ne peut être poursuivie que devant les tribunaux civils; l'exercice en est suspendu tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique intentée avant ou pendant la poursuite de l'action civile. » Et l'art. 272 confirme cette disposition. En n'admettant pas l'exercice de l'action civile devant la justice militaire, la loi nouvelle s'est approprié une doctrine consacrée déjà par la jurisprudence et les criminalistes. Il a été jugé : 1o que les conseils de guerre n'ont de compétence que pour prononcer des peines personnelles, à raison des délits militaires ou commis par des militaires, qu'ils n'ont pas le droit de prononcer des réparations civiles; que, spécialement, un conseil de guerre, saisi d'une poursuite dirigée contre un militaire, prévenu de vol dans la caisse d'une compagnie de vétérans, ne peut condamner le capitaine de la compagnie, président du conseil d'administration, à réintégrer la somme soustraite et à payer les dépens de la procédure; qu'un pareil jugement est nul, surtout si la partie ainsi condamnée n'avait été personnellement accusée d'aucun délit devant le conseil de guerre, et si, de plus, elle n'avait été ni entendue ni appelée (Crim. cass. 25 oct. 1817, MM. Barris, pr., Rataud, rap., aff. Rayniac); — 2o Que les tribunaux militaires sont incompétents pour connaître des questions d'état soulevées devant eux, à l'occasion des délits qu'ils ont mission de réprimer: ces questions sont de la compétence exclusive des tribunaux civils (Crim. cass. 1er sept. 1842, M. Isambert, rap., aff. Willems); — 5o Que l'intervention de parties civiles devant les conseils de guerre est inadmissible (Crim. cass. 19 mars 1852, aff. Youda, D. P. 52. 1. 328; V. aussi Crim. rej. 11 juin 1852, aff. Sibourel, D. P. 52. 1. 192).

On admet seulement, dans la pratique, le plaignant à faire soutenir sa plainte par un avocat, en vue d'obtenir la constatation d'une culpabilité qui pourra servir de base à son action en dommages-intérêts devant la juridiction civile.

S00. Toutefois la loi militaire actuelle autorise le conseil de guerre, conformément au droit commun (C. inst. crim.. 566), à ordonner la restitution des objets qui pourraient avoir été saisis. Le § 2 de l'art. 55 porte : - Ils peuvent néanmoins ordonner, au profit des propriétaires, la restitution des objets saisis ou des pièces de conviction, lorsqu'il n'y pas lieu d'en prononcer la confiscation. »

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SO. La compétence des conseils de guerre estétablie dans un intérêt public et aussi dans l'intérêt de ceux que la loi militaire déclare justiciables de ces conseils. Il suit que ceux-ci peuvent décliner la juridiction des tribunaux ordinaires. Il a été jugé qu'un accusé qui, devant le directeur du jury et devant le tribunal criminel, se déclare militaire, doit être renvoyé devant les tribunaux militaires (Crim. cass. 6 mess. an 9, M. Barris pr., M. Seignette, rap., aff. Laurent).

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802. Mais comme les conseils de guerre sont une juridiction d'exception, il suit, d'un autre côté, que l'exception d'incompétence doit avoir été proposée. Il a été jugé que la compétence des tribunaux ordinaires étant de droit commun, un accusé ne peut se faire un moyen de cassation de ce qu'on l'a fait jouir des garanties de cette juridiction au lieu de le traduire devant la juridiction exceptionnelle des conseils de guerre (Crim. rej. 20 juin 1839) (1). La doctrine de cet arrêt

diction du tribunal supérieur; Qu'il s'agissait d'un crime commis par des Musulmans sur la personne d'un Israélite indigène, cas dans lequel l'ordonnance a réservé expressément la plénitude de juridiction des tribunaux français;

Sur l'opposition formée par l'accusé à l'audition sous serment de trois témoins, sous mandat de dépôt, l'un comme inculpé dans l'instruction de faux témoignage, les deux autres comme inculpés, dans la même instruction, de participation au crime; Attendu qu'aucune disposition formelle de la loi ne portait empêchement à l'audition de ces témoins; Que leur état d'arrestation ayant été signalé aux juges de l'accusation, ceux-ci ont dû n'accorder à leur témoignage que le

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