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— 3o L'arrêt rendu par vingt-quatre conseillers, si la cour est composée de quatre chambres, dont trois pouvaient juger à

de cinq conseillers au lieu de sept; on ne peut sans doute vouloir établir de compensation d'une chambre à l'autre; car il suffit que l'une des chambres soit illégalement composée, pour que le vice s'étende à l'assemblée générale et frappe de nullité l'arrêt intervenu. 2o Contre l'arrêt du 21 juin 1858; violation des mêmes dispositions en ce que cet arrêt a été rendu par dix-sept magistrats, au lieu de 19, qui doivent au minimum composer l'assemblée génerale de la cour; 3 Excès de pouvoir, en ce que ce second arrêt a modifie le premier arrêt, en ordonnant qu'un nouveau motif y serait inséré. Arrêt.

LA COUR; Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 11 juin 1858: - Attendu que, de la combinaison de l'art. 52 de la loi du 20 avr. 1810 et de l'art. 27 de l'ord. du 20 nov. 1822, il résulte que, lorsque les cours royales sont saisies d'un pourvoi formé contre une décision prise par le conseil de discipline de l'ordre des avocats, il doit y être statué par l'assemblée générale de la cour ou la chambre du conseil, et que, par ces mots, assemblée générale, on doit entendre la réunion de toutes les chambres dont la cour est composée; - Attendu toutefois que, dans les audiences ordinaires, lorsqu'une chambre se trouve incomplete par l'empêchement d'un ou de plusieurs de ses membres, les membres absents peuvent être remplacés par des membres d'une autre chambre, et qu'il n'en saurait être autrement dans le cas d'absence d'un ou plusieurs membres d'une chambre appelée à former l'assemblée générale de la cour; - Attendu que la loi à déterminé le nombre des magistrats dont chaque chambre doit être composée pour prononcer jugement; qu'il suit de là que, pour qu'une cour royale soit régulièrement constituée en assemblée générale, il suffit: 1o qu'elle soit formée par le concours de toutes les chambres dont elle est composée; 2o que le nombre des magistrats présents ne soit pas inférieur au nombre total rigoureusement nécessaire pour la formation de chacune des chambres dont la cour est composée; - Attendu que la cour royale de Metz étant composée de trois chambres dont deux pouvaient juger au nombre de sept magistrats et la troisième au nombre de cinq, il en résulte que le nombre de dix-neuf magistrats était suffisant pour la composition des trois chambres de cette cour; Attendu qu'il est constaté, par l'arrêt du 11 juin 1838, que cet arrêt a été rendu par vingt magistrats, savoir, neuf de la première chambre, cinq de la seconde et six de la troisième; Qu'il suit de là que, soit sous le rapport du concours du nombre des magistrats nécessaire pour former l'assemblée générale de la cour, soit sous le rapport du concours de toutes les chambres, le moyen proposé, à l'appui du pourvoi formé contre l'arrêt du 11 juin 1858, n'est pas fonde; Rejet e le pourvoi

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en tant qu'il porte contre l'arrêt dudit jour 11 juin 1838; Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 21 juin 1838 : Vu l'art. 52 de la loi du 20 avr. 1810 et l'art. 27 de l'ord. du 20 nov. 1822; Attendu qu'ainsi qu'il a été établi ci-dessus, le nombre de dix-neuf magistrats était nécessaire pour la formation légale de l'assemblée générale des chambres de la cour royale de Metz; Attendu qu'il est constaté par l'arrêt du 21 juin que dix-neuf membres se sont trouvés présents à la séance dans laquelle cet arrêt a été rendu, mais que deux membres s'étant abstenus, il en est résulté que cet arrêt a été rendu par dix-sept membres, nombre insuffisant pour former l'assemblée générale de la cour, et que, sous ce premier rapport, l'arrêt dudit jour, 21 juin, a violé la loi et l'ordonnance précitées; - Attendu, d'un autre côté, que, lorsqu'une cour royale a statué definitivement sur un litige, de quelque nature qu'il soit, et que l'arrêt qu'il a rendu a été transcrit sur le registre du greffe et revêtu tant de la signature du président que de celle du greffier, la juridiction de la cour se trouvant épuisée, il n'est plus en son pouvoir de modifier et encore moins d'aggraver par un nouvel arrêt les dispositions de celui qu'elle a précédemment rendu;

Attendu que,

par son arrêt du 11 juin, la cour royale de Metz, statuant sur la réquisition du procureur général, a annulé la délibération du conseil de dis cipline de l'ordre des avocats de Charleville, sur le motif unique que cette délibération constituait un excès de pouvoir, et que par son arrêt du 21 juin, elle a déclaré que, par son premier arrêt, elle avait annulé la délibération, non-seulement sur l'excès de pouvoir, mais encore sur la haute inconvenance dont s'étaient rendus coupables les signataires de ladite délibération; Attendu qu'en statuant ainsi de nouveau sur un litige sur lequel sa juridiction était épuisée, et en aggravant les dispositions du premier arrêt par elle rendu, la cour royale de Metz a commis un double excès de pouvoir; - Casse l'arrêt du 21 juin 1858.

Du 8 janv. 1844.-C. C., ch. civ.-MM Teste, pr.-Moreau, rap.Laplagne-Barris, 1er av. gén., c. conf.-Coffinières, av.

2 Espèce (Min. pub. C avocats de Marseille.) Le conseil de l'ordre des avocats de Marseille prit, le 16 avril 1855, une délibération dans le but de donner son adhésion à l'avis du barreau de Paris, sur la question de l'illégalité de l'ordonnance du 30 mars 1835. Le ministere public allègue avoir inutilement demandé qu'il lui fût délivré copie de cette délibération; il n'apparaît pas, au reste, qu'il ait existé aucun réquisitoire à ce sujet. Toutefois cette délibération provoqua des poursuites disciplinaires contre le conseil de l'ordre, et son bâtonnier, Me Dumas, fut cité a comparaître devant la cour royale d'Aix, réunie en as

semblée générale. Le huis clos était ordonné: néanmoins, Me Dumas fut admis à se faire assister par le bâtonnier des avocats d'Aix, et, portent les qualité de l'arrêt, par plusieurs autres avocats du même ordre, tous admis, malgré le huis clos, en qualité de ses conseils.

Le procureur général a pris le réquisitoire suivant : « Attendu que les avocats ne peuvent se réunir en assemblée générale que pour la nomination du bâtonnier et des conseils de discipline; que les avocats de Marseille se sont néanmoins réunis tous en corps et ont delibéré, le 16 avr. 1835, de donner leur adhésion à l'avis du barreau de Paris touchant la prétendue illégalité de l'ordonnance du 30 mars 1835; qu'en présidant cette réunion, en sa qnalité de bâtonnier, Me Dumas a commis une infraction aux réglements de la matière; - Attendu, en outre, que l'ordre des avocats est placé sous la surveillance du ministère public; que cette surveillance serait impossible et illusoire, si le ministère public n'avait pas le droit d'exiger copie des délibérations prises par les avocats, soit en assemblée générale, soit en conseil de discipline; - Que cependant Me Dumas, en sa qualité de bâtonnier, et après avoir pris l'avis du conseil de discipline, a refusé, à plusieurs reprises, copie de ces délibérations; - Requiert qu'il plaise à la cour de prononcer contre Me Dumas, en sa qualité, telles peines de discipline qu'elle jugera convenable; qu'il sera tenu de délivrer copie de la délibération par lui refusée par les lettres des 23 avr. et 27 nov. 1855. »

Le bâtonnier a répondu que les avocats ont le droit de s'assembler et de délibérer sur des objets relatifs à leur profession; que les exemples de l'exercice de ce droit sont aussi anciens que l'ordre même des avocats, et qu'ils n'avaient jamais été contestés sous l'ancienne monarchie; qu'il est vrai que, sous l'empire du décret du 14 déc. 1810, et d'après l'art. 33 de ce décret, l'ordre des avocats ne pouvait s'assembler que sur la convocation de son bâtonnier et pour l'élection des candidats au conseil de discipline; mais que ce décret a été formellement abrogé par l'ord. du 20 nov. 1822, précédée d'un rapport au roi qui blâme énergiquement les précautions excessives et rigoureuses dont la defiance du gouvernement imperial avait injustement environné l'ordre des avocats; que l'art. 45 de l'ordonnance qui abroge le décret porte, dans sa disposition finale, que les usages observés dans le barreau relativement aux droits et aux devoirs des avocats dans l'exercice de leur profession sont maintenus; qu'il n'est permis de considérer comme usages observés dans le barreau que ceux conservés par le temps, et auquel il n'avait été apporté de restrictions que par le decret abrogé par cette même ordonnance; que d'après l'ord. du 20 nov. 1822, M. le procureur du roi n'a aucune action directe ou indirecte contre les membres de l'ordre des avocats, ainsi que cela a été souverainement jugé par la cour le 17 mars dernier; qu'au surplus, il est constant au procès que M. le procureur général n'a jamais demandé au bâtonnier de l'ordre des avocats de Marseille expédition des delibérations mentionnées dans la plainte; qu'en conséquence, la cour doit déclarer non recevables et mal fondées les conclusions de M. le procureur général, et mettre hors de procès le bâtonnier de l'ordre des avocats de Marseille.

Le 14 avr. 1836, la cour royale d'Aix a décidé qu'il n'y avait lieu de prononcer aucune peine disciplinaire contre Me Dumas, mais a néanmoins enjoint à ce dernier de délivrer une expédition de la délibération du 16 avr. 1835 (V. cet arrêt vo Avocats, no 291). La cour royale d'Aix rendit cet arrêt en assemblée générale, c'est-à-dire avec le concours des trois chambres qu'elle comprenait. Deux de ces chambres pouvaient juger au nombre de sept, et la troisième, au nombre de cinq; il en résultait que le nombre de dix-neuf conseillers était nécessaire pour la composition des trois chambres de la cour. Or, les qualités de l'arrêt constatent que dix-huit magistrats seulement ont participé à la formation de cet arrêt. Cette irrégularité a motivé, de la part de M. le procureur général, un pourvoi en cassation fondé sur la violation de l'art. 52 de la loi du 20 avr. 1810, combiné avec l'art. 27 de l'ordonnance du 20 nov. 1822. - Arrêt.

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LA COUR; Vu l'art. 52 de la loi du 20 avr. 1810 et l'art. 27 de l'ord. du 20 nov. 1822; Attendu que, de la combinaison de l'art. 52 de la loi du 20 avril 1810 et de l'art. 27 de l'ord. du 20 nov. 1822, il résulte que, lorsque les cours sont saisies d'un pourvoi formé par le ministère public contre ou à l'occasion d'une délibération du conseil de discipline de l'ordre des avocats, il doit y être statué par l'assemblée générale de la cour en la chambre du conseil, et que, par ces mots assemblée générale, on doit entendre la réunion de toutes les chambres dont la cour est composée; - Attendu que la loi a déterminé le nombre des magistrats dont chaque chambre doit être composée pour juger; Attendu que la cour royale d'Aix étant composée de trois chambres dont deux pouvaient juger au nombre de sept, et la troisième au nombre de cinq, il en résultait que le nombre de dix-neuf magistrats était, dans l'espèce, nécessaire pour la composition de trois chambres de la cour; Attendu que, d'après l'arrêt attaqué, dix-buit magistrats seulement ont concouru à la formation dudit arrêt; Casse. Du 8 janv. 1844.-C. C., ch. civ.-MM.Teste, pr.-Piet, rap. -LaplagneBarris, 1er av. gén., c. conf.-Millet, av.

sept membres et une à cinq, l'assemblée générale devant être composée dans ce cas d'au moins vingt-six membres(Civ. cass. 8 avr. 1845, aff. avocats de Toulouse, D. P. 45. 1. 134). — V. Discipl. jud., no 55.

436. Nous avons dit que la loi, pour composer une audience solennelle, avait égard plutôt au nombre des chambres qu'au nombre des juges, et qu'il fallait par conséquent la réunion de deux chambres chacune complète (no 592). On s'est demandé s'il ne devait pas en être autrement quand il s'agit de la composition d'une assemblée générale pour statuer en matière disciplinaire. La raison de penser ainsi, c'est que, dans les assemblées générales, tous les membres, à quelque chambre qu'ils appartiennent, ont qualité pour eoncourir à la délibération, et nar conséquent pour se suppléer mutuellement, tandis que, pour les audiences solennelles, la loi règle un mode de composition qui exclut certaines chambres et par conséquent certains conseillers. Il a été jugé : 1° que dans le cas où une cour exerce sa juridiction en assemblée générale, toutes chambres réunies dans la chambre du conseil, par exemple pour statuer sur une action disciplinaire, il suffit, à la différence du cas où elle juge en audience solennelle, qu'elle soit composée d'un nombre total de membres égal à celui que la loi attache à chacune de ses cham

(1) Espèce: (Me Boutard.) Boëtard, inscrit au tableau de l'ordre des avocats près la cour de Rouen, avant interjeté appel d'un arrêté du conseil de discipline de cet ordre qui ordonnait sa radiation, les quatre chambres de la cour, à savoir les deux chambres civiles, la chambre des appels correctionnels et la chambre des mises en accusation, se réunirent en assemblée générats dans la chambre du conseil, apres convocation individuelle de tous leure ombres, pour stainer sur cet appel.

Le jour où fut rendue la décision, siegcaient dix-sept membres des deux chambres civiles trois de plus que le nombre nécessaire pour que ces deux chambres eussent pouvoir de juger); quatre de la chambre des mises en accusation (un au-dessous du nombre lépal, décr. 6 juill. 1810, art.2); six de la chambre des mises en accusation (un de moins que le nombre légal, ord. du 24 sept. 1828, art. 1): ainsi composée d'un nombre de conseillers (vingt-sept) supérieur au nombre légal vingt-six), mais sans que deux des chambres complétassent, isolément, le nombre particulier à chacune d'elles, la cour rendit, le 11 nov. 1840, un arrêt confirmatil motivé comme il suit : « Attendu que Me Boëtard, dans les explications qu'il a données à l'audience au soutien de son appel, n'a point detruit les faits compromettants qui servent de base aux deux décisions Fure par défaut) du conseil de discipline, dont est appel; Que la preuve desdits faits se trouve même fortifiée par les actes par lui produits et dont il a argumenté à l'audience. >>

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Pourvoi: - 1o Violation de l'art. 27 de l'ordonnance du 20 nov. 1822, ensemble de l'art. 2 du décret du 6 juill. 1810 et de l'art. 1 de l'ordonnance du 24 sept. 1828, en ce que l'arrêt attaqué a été rendu en assemblée générale par une cour dont quelques-unes des chambres n'étaient point composées du nombre légal de membres nécessaires pour constituer chacune d'elles en pouvoir de juger. 2o Violation de la règle qui, en cas d'absence ou d'empêchement d'un membre du tribunal ou d'une cour, exige la mention de la cause de cette absence ou de cet empêchement. 5o Violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que le même arrêt s'étant borné à confirmer la décision dont était appel, sans ajouter en termes exprès qu'elle entendait adopter les motifs de cette décision, il reste incertain si eile a entendu s'approprier ou répudier ces motifs, point sur lequel elle aurait dù s'exprimer clairement, dans une question surtout où il s'agit de l'application d'une peine disciplinaire de nature à porter une grave atteinte à celui quí en est l'objet. Arrêt.

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LA COUR Sur le premier moyen : — Attendu, en droit, que, sur l'appel des décisions rendues par le conseil de discipline de l'ordre des avocats, les cours royales statuent en assemblée générale, dans la chambre du conseil, ainsi qu'il est prescrit par l'art. 52 de la loi du 20 avril 1810 (art. 27 de l'ord. du 20 nov. 1822); Attendu qu'il faut distinguer le cas où la cour royale exerce sa juridiction en assemblée générale, toutes les chambres réunies dans la chambre du conseil, après la convocation 'ndividuelle de tous ses membres, d'avec le cas où elle l'exerce en audience solennelle, soit par la seule chambre saisie de l'affaire à juger, soit par une où deux autres chambres adjointes à la première pour ce jugement; qu'au premier cas, la cour exerçant sa juridiction comme cour tout entière, il sutit qu'elle soit composée d'un nombre de ses membres au moins égal à celui que la loi attache à chacune de ses chambres, pour qu'elles puissent cxcrcer leur juridiction, sans qu'il soit besoin que toutes fournissent ce nombre par les seuls membres qui leur appartiennent; qu'en effet, dans l'assemblée générale, tous les membres de la cour présents à la délibération ayant qualité et droit pour y concourir, le vide de quelques-unes des

bres pour qu'elles puissent exercer feur juridiction, l'excédant des membres d'une chambre compensant l'absence des membres d'une autre chambre on dirait en vain que chacune des chambres doit nécessairement fournir à l'assemblée générale le minimum du nombre des membres sans lequel elle ne peut, isolément, juger (Req. 12 juill. 1843) (1);—2o Que la règle qui permet que, dans les audiences ordinaires, les membres d'une chambre puissent en cas d'empêchement, être remplacés par ceux d'une autre chambre, est applicable dans le cas où la cour sige en assemblée générale; qu'en conséquence, le nombre de magistrals nécessaire pour constituer chaque chambre peut étre complété par des magistrats appartenant à une autre chambre, en sorte qu'une chambre qui ne pourrait juger qu'au nombre de sept magistrats a pu concourir à constituer l'assemblée | générale au nombre de cinq membres, si une autre chambre jugeant pareillement à sepi magistrats, siégeait à cette assemblée au nombre de neuf conseillers, le nombre total des membres de la cour ne se trouvant pas ainsi au-dessous du minimum légal (Civ. cass. 8 janv. 1844, aff. avocats de Charleville, V. n155-20).

433. De même que pour les décisions rendues par une chambre seule (V. nos 361 et suiv.), la loi n'exige pas que les

chambres est rempli par l'excédant des autres, par la seule présomption et par la seule opération de la loi; tandis qu'au second cas, les chambres jugeant comme chambres, il faut que chacune d'elles fournisse le nombre : écessaire pour qu'elle puisse juger par ses propres membres, et, à leur défaut, par des membres pris, pour la compléter, dans d'autres chambres, qui ne jugent pas, dans l'ordre et dans les formes déterminés par la loi; qu'en effet, le mot chambre est un nom collectif qui exprime le nombre des juges requis pour qu'elle puisse juger, et, par conséquent, si elle ne fournit pas ce nombre, ce n'est pas une chambre qui juge, mais une réunion de quelques juges, réunion arbitraire, que la loi ne peut permettre et qu'elle ne permet pas;

Et attendu, en fait, 1° que c'est sur l'appel de deux décisions rendues par le conseil de discipline de l'ordre des avocats que la cour royale de Rouen a statné par l'arrêt attaqué rendu par elle en assemblée générale, toutes ses chambres réunies dans la chambre du conseil, après la convocation individuelle de tous ses membres; 2° que cette cour, composée de trente et un membres, est divisée en quatre chambres auxquelles la loi attache le nombre de vingt-six, pour qu'e les puissent exerce leur juridiction, savoir, quatorze aux deux chambres civiles; sept à la chambre des appels de police correctionnelle, et cinq à la chambre des mises en accusation; 3° enfin, que l'arrêt attaqué a été rendu par le concours de vingt-sept juges, nombre supérieur à celui que la loi attache aux quatre chambres de la cour pour l'exercice de leur juridiction, savoir: dix-sept des deux chambres civiles, six de la chambre des appels de police correctionnelle, et quatre de la chambre des mises en accusation ; - D'où la conséquence que le vide de la chambre des appels de police correctionnelle et de la chambre des mises en accusation ayant été rempli par l'excédant des membres présents des deux chambres civiles, la cour royale a été composée d'un nombre de ses membres plus que suffisant pour exercer sa juridiction, et l'arrêt attaqué a été ainsi rendu par elle au nombre voulu par la loi; Que, d'après cela, le moyen n'est pas fondé;

Sur le deuxième moyen présenté à la barre et tiré de ce que trente et un membres composant la cour royale de Rouen, vingt-sept sculement ont concour à l'arrêt attaqué, sans qu'il y soit fait mention expresse de la cause de l'absence de quatre membres: Attendu, en droit, que lorsque (comme dans l'espèce) les cours royales statuent en assemblée générale, dans la chambre du conseil, après que tous leurs membres, individucilement convoqués; ont été mis à même d'exercer leur droit de suffrage, la loi n'exige nulle part que leurs arrêts fassent mention expresse de la cause de l'absence de quelques membres, et qu'au contraire, elle la présume valable et justifiée; - Qu'ainsi, le moyen n'est pas fondé :

Sur le troisième moven: Attendu que, pour confirmer les deux décisions rendues par le conseil de discipline de l'ordre des avocats prononçant contre le demandeur en cassation la peine de la radiation du tableau, l'arrêt attaqué considère, en termes formels, a que Boëtard, dans les explications qu'il a données à l'audience au soutien de son appel, n'a point détruit les faits compromettants qui servent de base aux deux décisions du conseil de discipline, dont est appel; que la preuve desdits faits se trouve même fortifiée par les actes par lui produits et dont il a argumenté à l'audience; qu'ainsi, Farrêt est motivé, et par là le væn de la loi rempli; - Rejette.

Du 12 juill. 1843.-C. C., ch. reg.-MM. Zangiacómi, pr.-Lasagni, rap.-Pascalis, av. gén., c. conf.-Belámy, av.

décisions rendues par les cours prononçant en assemblées générales mentionnent les causes d'absence des conscillers appelés à juger l'absence est présumée valable et justifiée (Req. 12 juill. 1843, aff. Boëtard, V. no 456-1°; 22 août 1855, aff. P..., D. P. 54.1 545).

§4.-Des fonctions de conseillers des cours impériales et de la police des audiences.

438. Nous avons parlé, en traitant de l'organisation des tribunaux civils de première instance, des fonctions des juges. La plupart des dispositions de loi que nous avons exposées et commentées sont communes aux juges des tribunaux de première instance et aux conseillers des cours impériales. Ainsi les conditions d'aptitude requises pour être nommé aux fonctions de juge sont applicables également aux conseillers. L'art. 65 de la loi du 20 avr. 1810 le dit expressément (nos 227 et suiv.). Les difficultés que l'interprétation des lois de la matière peut faire naître et que nous avons examinées doivent être résolues pour les conseillers comine pour les simples juges. De même les conditions que nous avons appelées négatives, c'est-à-dire, l'absence d'obstacles naissant de l'incompatibilité de certaines fonctions, ou de l'exercice de certaines professions, ou de causes de parenté, ou d'alliance, sont communes aux deux juridictions (V. nos 252 et suiv., 242 et suiv.). Ainsi encore les questions relatives au mode de computation des voix, dans les cas de parenté ou alliance de deux magistrats, pour la validité d'un jugement, doivent être résolues de même pour la validité d'un arrêt (suprà, nos 247 et suiv.).

439. Il faut également se reporter à ce que nous avons dit de la nomination, du serment et de l'installation des juges (no $258 et suiv.), et en appliquer les règles à la nomination, au serment et à l'installation des conseillers: seulement la prestation de serment et l'installation d'un simple juge se font en deux actes différents, le serment étant prêté devant la cour et l'installation ayant lieu au siége où le juge est nommé (nos 261 et suiv.). Ces deux actes s'accomplissent au contraire dans la même solennité pour les conseillers. Le cérémonial est aussi différent. Tandis que le juge prête serment à l'audience ordinaire de la cour, le conseiller prête serment en audience publique, toutes chambres assemblées (décr. 22 mars 1852, art. 4).-Le premier président et le procureur général prêtent serment entre les mains de l'empereur ou de son délégué (même décret, art. 2). - V. Serment, nos 75 et suiv.

440. Nous nous sommes expliqué également sur l'obligation, pour les magistrats, de résider au siége de leur juridiction (V. no 272 et suiv.),sur le caractère d'inamovibilité de leurs fonctions (V. nos 268 et suiv.), sur les prérogatives que diverses lois leur attribuent (V. nos 280 et suiv., 288 et suiv.), et sur leur mise à la retraite (V. nos 282 et suiv.). Il y a sur ces points des dispositions communes aux juges de première instance et aux conseillers de cours impériales. Il y en a également qui sont particulières à ces derniers magistrats (V. notamment nos 288 et 289); nous les avons exposées toutes ensemble afin de présenter un tableau qui eût perdu de sa vérité à n'être pas complet.

441. Nous devons renvoyer également à ce que nous avons dit précédemment sur le règlement des audiences. Les art. 16 de la loi du 27 vent. an 8, 9 et suiv. du décret du 30 mars 1808 et 7 de loi du 11 avr. 1838 sur le règlement des audiences sont communs aux tribunaux de première instance et aux cours impériales. V. nos 301 et suiv.

442. Les dispositions des art. 88 et suiv. c pr. civ. sur la police des audiences sont communes aux audiences ordinaires ou solennelles des cours impériales et aux audiences des tribunaux de première instance (suprà, nos 306 et suiv.). Il en est de même des dispositions des art. 181 et 505 c. inst. crim. qui autorisent les tribunaux à prononcer séance tenante sur les délits d'audience ou commis à l'audience (no 315 et suiv.).-Les art. 307 et 308 c. inst. crim. contiennent des dispositions spéciales pour le cas où c'est un crime qui a été commis à l'audience, soit de la cour de cassation, soit d'une cour impériale ou d'une cour d'assises. La flagrance du crime donne alors à ces juridic

tions le droit de procéder immédiatement au jugement du coupable. Les art. 507 et 508 c. inst. crim. sont ainsi conçus : « Art. 507. A l'égard des voies de fait qui auraient dégénéré en crime, ou de tous autres crimes flagrants et commis à l'audience de la cour de cassation, d'une cour impériale on d'une cour d'assises, la cour procédera au jugement de suite et sans désemparer. Elle entendra les témoins, le délinquant et le conseil qu'il aura choisi ou qui lui aura été désigné par le président; et, après avoir constaté les faits et ouï le procureur général ou son substitut, le tout publiquement, elle appliquera la peine par un arrêt, qui sera motivé. — Art. 508. Dans le cas de l'article précédent, si les juges présents à l'audience sont au nombre de cinq ou de six, il faudra quatre voix pour opérer la condamnation, s'ils sont au nombre de sept, il faudra cinq voix pour condamner.-Au nombre de huit et au delà, l'arrêt de condamnation sera prononcé aux trois quarts des voix, de manière toutefois que, dans le calcul de ces trois quarts, les fractions, s'il s'en trouve, soient appliquées en faveur de l'absolution. »

443. On remarquera que dans les cas prévus par ces dispositions de loi, la garantie du jury est remplacée pour l'accusé par celle d'une majorité de voix plus grande requise pour la condamnation. Ainsi, si les juges sont au nombre de cinq ou de six, il faut quatre voix pour opérer la condamnation. S'ils sont au nombre de sept, il faut cinq voix. Au nombre de huit et au delà, l'arrêt de condamnation est prononcé aux trois quarts des voix, et les fractions, s'il s'en trouve, profitent à l'accusé. Il résulte du dernier paragraphe de l'art. 508 que si la cour se compose de neuf juges, il faut sept voix pour la condamnation; neuf voix, s'il y en douze; dix, si les juges sont au nombre de treize; onze, s'ils sont quatorze; douze, s'ils sont au nombre de quinze (Conf. MM. Legraverend, t. 1, p. 376; Bourguignon, Manuel sur l'art. 508; Carnot, mème article, no 2; le Sellyer, t. 4, p. 555 et suiv.).

444. La cour doit rester composée, pour instruire et juger les crimes commis à son audience; telle qu'elle l'était au moment de la perpétration du crime. Aucun juge ne pourrait être remplacé par un autre, le nouveau magistrat n'aurait pas connaissance par lui-même des faits, et ne pourrait dès lors se former une conviction que sur des renseignements étrangers; ou d'après l'opinion de ses collègues, ce qui ne peut être admis pour l'exercice d'une juridiction d'exception. - Si un des juges était récusé valablement et que la cour fût encore en nombre légal, elle pourrait procéder au jugement. Mais s'il arrivait qu'après l'exercice légitime du droit de récusation, la cour ne fût plus en nombré requis pour composer son audience ordinaire, elle perdrait sa juridiction exceptionnelle. Il y aurait lieu seulement à faire arrêter le prévenu, à dresser procèsverbal et à le renvoyer devant quide droit (Conf. MM. Carnot sur Fart. 308, no 3; le Sellyer, t. 4, no 1716). Nous ne croyons pas que l'on puisse contester cette conséquence. Il pourrait en résulter cependant une singularité qui n'a jamais été, à notre connaissance, signalée. Supposons qu'un crime ayant été commis à l'audience d'une des chambres de la cour de cassation, composée du nombre minimum de onze conseillers (L. 27 vent. an 8, art. 65), l'exercice du droit de recusation réduise ce nonibre à dix, la cour se trouvera obligée de renvoyer l'accusé devant le jury. Une cour impériale pourra cependant condamner dans ce cas au nombre de sept conseillers. Dix conseillers à la cour de cassation ne pourront prononcer une condamnation qui, dans un cas identique, serait valablement prononcée par sept conseillers d'une cour impériale, et même cinq si le crime a été commis à l'audience d'une chambre d'appel correctionnel.

445. Il s'est élevé une difficulté par suite dés dispositions de la loi du 4 niars 1851 sur les cours d'assises: On sait que cette loi à réduit à trois conseillers le nombre legal des magistrats appellés à siéger, au lieu de cinq dont elle était autrefois composée. Mais l'art. 508 suppose qu'une condamnation pour crime, dans le cas qu'il prévoit, sera toujours prononcée au moins à une majorité de quatre voix. Cette majorité étant impossible à obtenir dans une cour d'assises, la loi du 4 mars 1851 n'a-t-elle pas enlevé implicitement aux cours d'assises la juridiction exceptionnelle que leur confère l'art. 507? Et alors le coupable ne doit-il pas être jugé par la cour, mais avec l'assis

tance du jury? — M. Foucher, dans son édition des œuvres de Carré, t. 4, p. 155, adopte l'affirmative, non-seulement parce que nos nouvelles lois ont consacré la séparation complète des pouvoirs de la magistrature et de ceux du jury, et ont établi ce dernier juge unique du fait, mais encore et surtout par suite de l'impossibilité, dont nous parlons, de former la majorité de quatre voix exigée par l'art. 508 pour la condamnation (Conf. M. Freminville, proc. cr. devant le jury, p. 153). D'autres auteurs

(MM. le Sellyer, t. 4, p. 56; Rauter, t. 2, p. 529) sont d'un avis contraire; ils se fondent, d'une part, sur ce que les cours d'assises peuvent, en vertu de la règle générale sur la majorité fixée pour juger valablement, condamner à cette majorité, lorsque la loi ne décide pas le contraire, et sur ce que la loi de révision des codes du 28 avr. 1852, ayant laissé subsister la réduction des cours d'assises à trois membres établie par la loi en 1851, n'en a pas moins maintenu l'art. 507, en y laissant subsister le mot cour d'assises. — Un arrêt de la chambre criminelle, du 13 sept. 1832, cité par M. Parant et critiqué par M. Foucher, s'est prononcé en ce sens (cet arrêt ne se trouve dans aucun recueil). Nous serions disposés à nous ranger à cette opinion; l'art. 508 c. inst. crim. est général, et s'il parle du nombre de quatre, cinq, six voix pour former dans tel ou tel cas majorité, ce n'est que exempli gratia. Les exemples qu'il donne ne détruisent pas le principe qu'on en doit induire. Ce qu'on peut conclure, c'est que depuis la loi de 1831, la cour d'assises doit prononcer à l'unanimité.

446. La loi n'a pas établi de suppléants auprès des cours impériales. Cependant le décret du 6 juill. 1810 avait créé des conseillers auditeurs auprès de ces cours. La création des con-seillers comme celle des juges auditeurs, dont nous avons parlé en traitant des tribunaux de première instance, se rattachait à la pensée que nourrissait le gouvernement d'alors de relever les institutions aristocratiques. Les conseillers auditeurs, comme les juges auditeurs, étaient choisis parmi les candidats à qui le gouvernement voulait épargner les ennuis du noviciat judiciaire. L'art. 13 du décret du 6 juill. 1810 portait : « Les conseillers auditeurs seront répartis, par le premier président, dans les différentes chambres de la cour; ils pourront aussi être délégués pour le service des cours d'assises et spéciales, lorsqu'ils auront atteint l'âge prescrit pour avoir voix délibérative. »— La loi du 10 déc. 1850 (art. 2) supprima l'institution des juges et conseillers auditeurs, mais à l'égard des conseillers auditeurs seulement elle conserva en fonctions les conseillers nommés, de sorte que l'institution dut successivement s'éteindre par les decès. La loi du 27 juin 1845, relative au personnel de la cour de Paris, confirma celle du 10 déc. 1850. Elle décréta que le personnel de la cour serait augmenté de six conseillers, mais en disposant qu'il ne serait pourvu aux six places nouvelles qu'au fur et à mesure des vacances qui surviendraient parmi les conseillers auditeurs attachés à la cour; aujourd'hui tous ces titres sont depuis longtemps éteints, il n'y a plus de conseillers auditeurs dans aucune cour de l'Empire.

SECT. 2. Des juridictions extraordinaires civiles.

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447. Nous avons expliqué précédemment en quoi consiste le caractère des juridictions extraordinaires. Les juridictions extraordinaires sont les justices de paix, les tribunaux de com · merce, les conseils de prud'hommes et la cour de cassation. A ces juridictions, qui ne sont jamais appelées à prononcer que sur des intérêts de l'ordre civil, à l'exception de la cour de cassation qui a une chambre criminelle, il faut ajouter les tribunaux de police correctionnelle et les cours d'assises, dans les cas où ces tribunaux sont saisis d'une demande en dommages-intérêts formée par les parties civiles ou par le prévenu ou l'accusé reconventionnellement. Nous parlerons de ces dernières juridictions en traitant de l'organisation judiciaire criminelle. L'organisation des conseils de prud'hommes et la cour de cassation ayant déjà fait l'objet d'études séparées (V. Cassation; Prud'hommes), nous n'avons à nous occuper ici que des justices de paix et des tribunaux de commerce.

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tière à notre droit moderne; c'est une création de l'assemblée constituante. Cependant, comme toutes les juridictions importantes, sinon en elles-mêmes, au moins quant à leur objet, ne se créent pas du premier coup, il n'est que juste de reconnaître que l'assemblée constituante emprunta à la Hollande l'idée des justices de paix. Les justices of the peace de l'Angleterre n'ont que des rapports assez éloignés avec nos juges de paix. Quoi qu'il en soit, l'assemblée constituante, loin de vouloir perpétuer ce que l'on appelait jadis les justices de village, eut surtout la pensée de tarir la source principale des procès, en plaçant à la portée de tous les justiciables un magistrat populaire, animé de sentiments pacifiques et chargé d'accommoder les différends. On n'était pas loin de penser alors que la droite raison peut suppléer aux codes et aux institutions judiciaires. « La justice de paix, disait Thouret dans son rapport, ne doit pas être sujette aux rigueurs de la procédure; un règlement très-simple en doit faire tout le code. Il faut aussi en écarter les formes parce qu'elle doit être bonne, simple et exempte de frais. >>>

449. Les justices de paix ont été instituées par la loi des 16-24 août 1790. Comme tous les fonctionnaires publics et magistrats, selon le système de l'époque, ils étaient élus dans les assemblées primaires. Mais dans le système de la loi du 16 août 1790 les juges de paix ne jugeaient pas seuls; les art. 6 et 9 du tit. 5 de cette loi avaient établi auprès de chaque justice de paix quatre assesseurs, parmi lesquels le juge de paix en appelait deux pour l'assister dans ses fonctions de judicature. La loi du 29 vent an 9 supprima les assesseurs, et institua en remplacement deux suppléants auprès de chaque justice pour remplacer le juge de paix titulaire au besoin. Depuis la loi du 29 vent. an 9, le juge de paix, assisté de son greffier, juge et accomplit seul tous les actes de son ministère.

450. Aucune condition particulière d'aptitude et de capacité n'est exigée pour l'exercice des fonctions de juge de paix, si ce n'est la condition d'âge. Aux termes de l'art. 209 de la constitution de l'an 5, encore aujourd'hui observé, nul ne peut être juge de paix s'il n'est âgé de trente ans. Mais il est certain que les juges de paix doivent présenter les mêmes conditions générales que les autres magistrats au point de vue de la nationalité et de la jouissance des droits civils. Ils sont nommés, comme tous les fonctionnaires publics, par un decret du souverain, et ordinairement sur la présentation des chefs de la cour et du parquet dans le ressort où ils doivent fonctionner. Ils prêtent serment au tribunal de première instance.

451. Les juges de paix ne sont pas inamovibles. Dans l'ordre judiciaire, ce sont les seuls magistrats qui ne jouissent pas du privilége de l'inamovibilité. Cette exception s'explique par la diversité de leurs attributions et par ce qu'aucunes conditions légales de capacité ne sont exigées pour eux. Plus la loi multipliait leurs attributions, plus elle laissait de liberté à l'administration supérieure pour choisir les juges de paix, plus aussi on devait lui laisser la faculté de réparer un mauvais choix s'il en était fait un.

452. L'art. 60 de la constitution du 22 frim. an 8 portait: «Chaque arrondissement a un ou plusieurs juges de paix; leur principale mission consiste à concilier les parties. » La constitution de l'an 8 laissait ainsi au pouvoir souverain la faculté d'établir arbitrairement des juges de paix et de les placer aux siéges qu'il lui plairait de choisir. Aujourd'hui la constitution de l'an 8 est abrogée, et comme le pouvoir n'a pas fait usage de l'art. 60, la loi demeurée en vigueur est la loi du 16 août 1790, disposant « qu'il y aura dans chaque canton un juge de paix. » Il y a, en effet, en France autant de juges de paix qu'il y a de cantons.-A Paris, il y a autant de juges de paix qu'il y a d'arrondissements municipaux. Quelques grandes villes ont aussi plusieurs juges de paix (V. nos 541 et suiv.).

453. La loi du 29 vent. an 9 qui a établi, auprès de chaque justice de paix, deux suppléants, ne les a pas soumis à des conditions d'aptitude particulières; ces conditions sont les mêmes que pour les juges de paix. Les suppléants n'ont pas de traitement. Aux termes de la loi du 21 niv. an 8, les suppléants, comme tous les fonctionnaires publics, devaient, avant d'entrer en fonctions, promettre d'être fidèles à la constitution. Sous l'empire de

cette législation, il a été décidé qu'il y avait nullité du juge ment rendu par un suppléant qui n'avait pas fait la déclaration prescrite par la loi (Crim. cass., 12 janv. 1809, M. Bauchau, rap., aff. Maure).- Aujourd'hui les suppléants prètent le même serment que les magistrats, et ils doivent le prêter avant d'entrer en fonctions. La doctrine de cet arrêt serait applicable au cas où un suppléant de justice de paix rendrait un jugement sans avoir prêté serment.

que le juge est assisté d'un greffier. En cas d'absence ou d'em pêchement du greffier titulaire et de son commis, le juge de paix peut le remplacer momentanément par un citoyen françaiâgé de vingt-cinq ans, auquel il fait prêter serment « de bien et fidèlement remplir les fonctions de greffier » (arg. loi 16 août 1790, tit. 9, art. 2 et 5). Il a été jugé que le défaut de serment, de la part du greffier provisoire que le juge de paix a nommé d'office, pour l'assister par suite de l'abstention du greffier titulaire, constitue une irrégularité et non un excès de pouvoir, et, par suite, ne peut donner ouverture à cassation (Req. 14 janv. 1850, aff. Garrigues, D. P. 50. 1. 168).

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458. Le juge de paix statuant en matière civile ne doit pas être assisté du ministère public. Mais il a été jugé que la présence passive d'un maire à une audience du juge de paix siégeant comme juge civil ne peut, alors que ce maire n'a ni conclu ni parlé, être considérée comme équivalente au concours du ministère public, et c'est à tort qu'on prétendrait que le jugement rendu par le juge de paix ainsi assisté doit être annulé comme émanant d'un tribunal illégalement composé (Req. 12 avr. 1836, aff. Bouelle, V. Appel civil, no 1346).

454. Le seul titre de suppléants de justice de paix indique les fonctions que ces magistrats ont à remplir occasionnellement. — Il a été jugé : 1o que, à la différence des anciens assesseurs, les suppléants des juges de paix remplacent ceux-ci dans toutes leurs fonctions; qu'ainsi ils peuvent dresser des procèsverbaux de délit (Crim. rej. 25 prairial an 13 (1); V. aussi no 456),... même dans les communes où il y a plusieurs juges de paix, « attendu que, d'après l'art. 3 de la loi du 29 vent. an 9, les suppléants sont créés pour remplacer les juges de paix; et que les art. 12 et 13 de la loi du 28 flor. an 10, en ordonnant l'alternat des juges de paix dans les communes où il en existe plusieurs pour l'expédition des affaires de police, ne déroge point aux droits de leurs suppléants respectifs » (Crim. rej., 2 frim. an 14, MM. Viellart, pr., Lachèze, rap., aff. Hémard); — 2o Qu'ils peuvent recevoir les affirmations des procès-juge de paix et en même temps officier municipal, membre d'un verbaux des gardes champêtres et forestiers, même dans la commune habitée par le juge de paix, lorsque celui-ci est empêché (L. 28 flor. an 10, art. 11, Crim. rej., 23 oct. 1824, aff. Bastien, V. Acquiescement, no 904).

459. Le décret du 27 mars 1791, relatif à l'ordre judiciaire nouvellement constitué alors, disposait que nul ne pouvait être

directoire (c'est-à-dire aujourd'hui préfet ou sous-préfet), greffier, avoué, huissier, juge de district, juge de commerce, percepteur d'impôts indirects. Le décret du 24 vend. an 3 prononçant également l'incompatibilité des fonctions judiciaires et administratives confirme à l'égard des juges de paix les dispositions du décret du 27 mars 1791 (tit. 1 et 3). Ces décrets sont demeurés en vigueur. Tout ce que nous avons dit des incompatibilités en traitant des juges de première instance est donc applicable aux juges de paix. Les décisions de la jurisprudence sur les incompatibilités à l'égard des juges des tribunaux civils dans les cas non prévus par la loi nous paraissent devoir s'appliquer à l'égard des juges de paix (V. suprà nos 232 et suiv.). 460. La loi n'a rien statué à l'égard des suppléants des juges de paix sur la question des incompatibilités. Dans le silence de la loi, les mêmes principes paraissent applicables aux

455. Il y a plus de doute sur le droit pour les suppléants de remplacer le juge de paix, lorsque le magistrat n'est saisi d'un litige que comme juge délégué. Il a étéjugé que les suppléants ne sont autorisés à remplacer les juges de paix que dans les cas où ces derniers sont appelés par la loi pour connaître du litige, et non dans le cas où ils n'ont qu'une attribution déléguće par un tribunal supérieur, comme en matière d'enquête, par exemple; et la nullité résultant de ce que le suppléant aurait, en l'absence du juge de paix, rempli un mandat qui lui était étranger, ne saurait être couverte par l'acquiescement des parties (Nimes, 28 avr. 1828, aff. Lauzun, V. Enquête, no 104). Mais nous ne voyons aucun fondement solide à cette distinc-juges suppléants des tribunaux civils et aux suppléants des juges tion. Les fonctions des suppléants de justice de paix sont permanentes. Or, les juges suppléants, qui ont d'ailleurs tous les caractères des juges titulaires, ont été précisément institués pour qu'il n'y ait pas d'interruption dans l'administration de la justice (V. Enquête, loc. cit., des arrêts en ce sens). a été jugé du reste qu'un juge suppléant de justice de paix peut être commis par un tribunal en vertu de l'art. 1035 c. pr., pour procéder à l'une des opérations mentionnées dans cet article, et notamment à une enquête (Civ. rej., 15 mars 1866, aff. Robert, D. P. 66. 1. 184).

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456. Lorsqu'un juge suppléant exerce sans réclamation, il y a présomption légale que le titulaire est empêché. Ainsi, le procès-verbal du corps du délit est valablement dressé par le suppléant du juge de paix (V. no 454) : « Attendu que les suppléants tiennent leur pouvoir de la loi et que de l'exercice qu'ils en font sans réclamation naît la présomption de droit que le titulaire principal est empêché, d'où il suit que l'on ne peut arguer en aucune manière le procès-verbal du corps du délit dressé par le suppléant du juge de paix du lieu » (Crim. rej. 7 sept. 1809, MM. Barris, pr., Brillat-Savarin, rap., aff. Ferrari). - Il a été également jugé, pour le cas où un suppléant a rendu'une décision judiciaire, que toutes les fois que siége un suppléant du juge de paix, il est réputé, jusqu'à la preuve contraire, remplacer le juge de paix pour une cause légale (Req. 6 avr. 1819, MM. Henrion, pr., Borel, rap., aff. Moutier-Duparc C. Lefebvre).

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de paix. De même que les règles d'incompatibilité ne sont pas applicables aux juges suppléants, elles ne le sont pas davantage aux suppléants de justice de paix. Nous nous en référons à ce que nous avons dit en parlant de l'organisation des tribunaux de première instance (nos 239 et suiv.).

461. Nous avons vu que les juges de première instance et les conseillers des cours impériales sont obligés de résider au siége de leur juridiction (suprà, no 272). La même obligation de résidence existe pour les juges de paix seulement il n'est pas exigé qu'ils résident au chef-lieu de canton, c'est-à dire au siége de la justice de paix ; il suffit qu'ils résident dans l'une des communes du canton. L'art. 8 de la loi du 28 flor. an 10 dispose: « Tout juge de paix qui, après sa nomination, ne résidera point dans le canton, sera averti par le commissaire du gouvernement près le tribunal de première instance (le procureur impérial d'y fixer son domicile dans le mois de l'avertissement; passé lequel délai et après que le commissaire aura dénoncé la non-résidence au sous-préfet, il sera, à la diligence de ce dernier, pourvu, conformément à l'art. 1er au remplacement du juge de paix considéré comme démissionnaire. Il en sera de même des suppléants. >>

462. Ces dispositions ne sont pas applicables dans le cas où les juges de paix sont absents en vertu d'un congé régulièrement obtenu. Selon l'art. 9 de la loi du 28 flor. an 10, lorsqu'un juge de paix veut s'absenter de son canton, il se munit d'une autorisation du procureur impérial de son arrondissement. Si l'absence est pour durer plus d'un mois, il doit s'adresser au ministre de

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