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140. L'action en payement de la totalité d'une créance formée | qu'elle dérive d'un quasi-contrat, cela résultant du principe con. contre l'un des héritiers du débiteur, comme héritier tenant et louissant des biens de ce dernier, est aussi une action mixte (Req., 24 août 1826, aff. Laprade, vo Compétence).

141. Il en est de même de la demande en payement d'une rente que l'on prétend être due par le défendeur sur sa maison, et comme représentant celui qui a créé la rente; en conséquence, une telle demande est hors de la compétence du juge de paix (Req., 8 déc. 1829) (1).

142. L'action en payement d'arrérages et en délivrance de titre nouvel d'une rente que l'on prétend établie sur des immeubles possédés par le défendeur est également mixte; et, par suite, l'exploit d'ajournement est hul s'il ne fait pas connaître la nature des immeubles, et deux, au moins, des tenants et des aboutissants (Poitiers, 22 déc. 1837) (2).

143. L'action communi dividundo offre le même caractère; car si elle est réelle, en ce que chacun des communistes a sur les biens indivis un droit de copropriété, elle est personnelle en ce

d'appel d'Amiens a fait une fausse application de l'art. 2 du fit. 10 de la loi du 24 août 1790, en jugeant l'action hypothécaire non recevable en l'état, faute de l'essai de conciliation sous ce rapport;

Attendu, 2° que s'agissant, dans l'espèce, d'une généralité de biens soumis à l'hypothèque, et les mariés Gasset, actionnés comme détenteurs de ces biens à titre universel, ne pouvant ignorer à raison de quoi ils étaient cités, il a été pareillement fait une fausse application des dispositions de l'art. 5 du tit, 9 de l'ordonn, de 1667; - Casse, etc.

Du 10 déc. 1806.-C. C., sect. civ.-MM. Vieillart, pr.-Ralaud, rap, (1) Espèce:-(Fabrique de Boussois C. Daynez.)-La fabrique de l'église de Boussois, créancière d'une rente de 3 fr. 70 c., fondée par Chevin sur sa maison, pour services obituaires, réclame, en 1827, à Daynez, représentant de Chevin, les arrérages de cette rente, qui n'a pas été payée depuis 1824. - Daynez, assigné devant le juge de paix, se contente de nier l'existence de cette rente. 51 mars 1827, sentence du juge de paix, qui condamne Daynez à payer la rente dont s'agit: Attendu que la fabrique est suffisamment fondée dans ses réclamations, ce qui a été prouvé par la présentation d'un ancien registre constatant la rede

vance.

Appel devant le tribunal d'Avesnes, qui envisage la chose sous un autre aspect, et réforme la sentence du juge de paix, par jugement du 5 janv. 1828, conçu en ces termes : -« Considérant que les actions mixtes ne sont pas de la compétence des juges de paix;-Considérant, en droit, que les actions mixtes sont celles dont les pièces, sur lesquelles elles sont basées, donnent cumulativement le droit de poursuivre, réellement et personnellement; - Qu'il résulte du jugement rendu par M. le juge de paix du canton de Maubeuge, le 31 mars 1827, que la rente dont on réclame le payement est hypothéquée sur la maison de Daynez, ce qui donne une action mixte aux créanciers; - Que, dès lors, c'est le cas de déclarer le juge de paix incompétent. »

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Pourvoi de la fabrique pour violation de l'art. 9 du titre 3 de la loi du 24 août 1790; de l'art. 1er de celle du 26 oct. suiv., et de l'art. 2 c. pr. Elle soutient qu'aux termes de l'art. 2 précité, les juges de paix peuvent connaître des causes purement personnelles et mobilières, jusqu'à 50 et 100 fr.; Que rien n'indique que la maison de Daynez füt hypothéquée à la rente en question; - Que, d'ailleurs, la demande était fondée sur des mentions de payement dont la vérité n'était pas contestée; que Daynez était poursuivi comme héritier de Chevin, et seulement pour une somme de 12 fr.; que l'action était formée, purement, contre la personne; qu'il n'était nullement question de faire déclarer sa maison hypothéquée, et qu'aucune inscription n'avait été prise sur ses biens; que l'action ne participait en rien de l'action réelle; que, dès lors, elle n'était point mixte; Que c'est à tort que le tribunal a déclaré qu'une action est mixte, lorsqu'elle peut être suivie, cumulativement, contre la personne et contre la chose; qu'elle n'a ce caractère que lorsqu'elle est, effectivement et simultanément, dirigée contre l'un et l'autre ; — Qu'il n'est déterminé que par la manière dont elle est intentée, et non par cellé dont elle pourrait l'être.-Arrêt.

LA COUR - Attendu que la demande en payement des arréráges de la rente obituaire de 3 fr. 70 C., dont s'agit en la cause, avait été formée par la fabrique de Boussois contre Nicolas Daynez, avec cette énonciation que la rente était due par ledit Daynez sur sa maison, et comme représentant Chevin; que Daynez, pour moyens de défense, dénia que lui et ses auteurs eussent jamais du cette rente; qu'il dénia également l'existence de celle rente en elle-même que la défense, comme la demande, telle qu'elle avait été formée, conduisaient à la nécessité de vérifier et de juger s'il y avait titre suffisant pour établir la rente, et si elle était établie sur une maison possédée par le défendeur provenant du nommé Chevin;-Que le tribunal d'Avesnes, en jugeant que celle action n'était pas une demande pure personnelle et mobilière, qu'elle constituait une action mixte, qui n'était pas

sacré par l'art. 815 c. civ., que chacun a le droit de sortir de l'indivision (Paris, 22 nov. 1838, aff. Longchampt, vo Indivision).

144. Il faut aussi regarder comme mixte l'action des héritiers de l'époux prédécédé, contre le conjoint survivant, en partage des biens dont se composait la communauté entre les époux. Ce n'est pas là une action de la nature de celles dont parle le § 5, no 1, de l'art. 59 c. pr., et qui doivent être intentées devant le juge du lieu de l'ouverture de la succession, mais bien une action mixte, qui doit être portée devant le juge de la situation des biens, ou devant celui du domicile du défendeur, d'après le § 4 du même article (Bruxelles, 3 mai 1828, afl. Bataille, v° Compét.).

145. L'action de l'acquéreur en délivrance de la chose vendue est encore mixte. Cette action, en effet, est à la fois personnelle et réelle personnelle, parce que le vendeur est obligé personnellement en vertu du contrat; réelle, parce que l'obligation qui, dans l'ancien droit, ne produisait jamais que le jus ad rem, est aujourd'hui un moyen de transférer le jus in re, lequel a toujours

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(2) Espèce: (Dupertat C. Coussaud et autres.)-5 et 8 juillet 1854, citation devant le tribunal civil de Montmorillon, à la requête de Dupertat, se disant héritier de Testaud, son aïeul, et, à ce titre, créancier, par acle authentique du 5 janvier 1784, d'une rente foncière en blé, des nommés Coussaud, Poiraton et autres, comme détenteurs des immeubles asservis, pour avoir à lui payer cinq années d'arrérages de ladite rente et à lui passer titre nouvel. 26 août, jugement par défaut qui adjuge au demandeur ses conclusions. 10 novembre, opposition à ce jugement. La requête d'opposition, signifiée le 18, et fondée sur ce que les opposants n'étant point poursuivis comme débiteurs originaires ou personnels de la rente, mais seulement comme lieux tenants, Dupertat devait commencer par établir l'existence matérielle de celle rente, sa nature, la nature et la situation des biens sur lesquels elle est assise, et, à cet effet, faire signifier, en tête de sa demande, copie entière de son titre, s'il en a un, pour que les opposants pussent reconnaître s'ils sont, en réalité, détenteurs de ces biens; à quel titre ils les possèdent; si c'est à titre successif, comme les ayant trouvés dans la succession des débiteurs originaires, ou seulement à titre particulier; Que, faute par lui de fournir ces justifications, et de remplir les formalités voulues pour se faire reconnaître créancier de ladite rente, et faire maintenir son droit hypothécaire sur les biens assujettis, il doit être déclaré purement et simplement non recevable, et, en tous cas, mal fondé dans sa demande.

A l'audience, il a été conclu, pour Coussaud et autres, à l'annulation de l'exploit de demande de Duperlat, comme n'énonçant pas, ainsi que l'exige l'art. 64 c. pr. pour les matières réelles ou mixtes, la nature de l'héritage, la commune de la situation, et deux, au moins, des tenants et aboutissants, et, par suite, à l'annulation de tout ce qui avait suivi. — Dupertat a demandé le rejet de ce moyen de nullité, qui, en tous cas, aurait été couvert par les défenses au fond, fournies dans les écritures. 3 août, jugement qui accueille ce moyen de nullité.-Appel.-Arrêt. LA COUR; Attendu qu'une demande en payement d'arrérages, et en reddition de titre nouvel d'une rente que l'on prétend établie sur des immeubles, constitue une action mixte, toutes les fois que, comme dans l'espèce, elle conduit à la nécessité de vérifier et de juger s'il y a titre suffisant et si la rente est assise sur des immeubles possédés par les parties assignées; Que la demande de Dupertat ayant été formée contre les intimés, comme détenteurs ou héritiers de tenanciers de biens sujets la rente réclamée, il devait se conformer aux dispositions de l'art. 64 C pr. civ., qui, en matière réelle ou mixte, prescrit, à peine de nullité, d'é noncer, dans les exploits d'ajournement, la nature de l'héritage, et deux, au moins, des tenants et aboutissants;

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Attendu que la nullité résultant de l'omission de cette formalité n'a été couverte par aucune défense au fond; Que les conclusions des intimés, telles qu'elles sont établies au jugement dont est appel, tendaient uniquement à ce que les exploits introductifs d'instance fussent déclarés nulg, ainsi que tout ce qui les avait suivis ; et que, si leur requête d'opposition au jugement par défaut du 26 août 1834, se termine par conclure à ce que le demandeur soit déclaré purement et simplement non recevable, ou, en tous cas, mal fondé dans sa demande, ces derniers mots ne pourraient exercer d'influence pour faire déclarer la nullité couverte, qu'autant que, dans le corps de la requête, on aurait défendu au fond ce qui n'existe pas; Confirme.

Du 22 déc. 1837.-C. de Poitiers, 2 ch.-MM. Vincent-Molinière, pr.Colmeil et Pervinquière, av.

pour sanction une action réelle (Troplong, Tr. de la vente, n° 262).

146. On doit aussi voir une action mixte dans l'action intentée par l'acquéreur d'un immeuble, à fin d'exécution du contrat de vente, contre le vendeur qui a également aliéné le même immeuble à un tiers (Req., 2 fév. 1809) (1).

147. Est encore mixte l'action en reconnaissance d'écriture d'un acte sous seing privé, et en réalisation d'une vente contenue dans cet acte; elle est tout à la fois personnelle et réelle; et, par suite, elle a pu être portée devant le tribunal du lieu de la situation de l'immeuble, objet de la vente (Req., 31 mai 1837)(2).

148. Que faut-il penser de l'action en rescision d'une vente d'immeubles pour cause de lésion? A nos yeux, elle a incontestablement le caractère d'une action mixte. Cependant deux arrêts de la C. de cass., ch. des req., en date des 23 prair. an 12 (aff. Dubout, V. n° 167), et 14 mai 1806 (aff. Fabre, vo Vente judiciaire),sembleraient impliquer une opinion contraire, car on lit dans

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(1) Espèce: (Perrin C. Fargues.) Boufflers, domicilié à Paris, avait vendu à Perrin une prairie située à Villefranche (Rhône). — La même prairie avait été vendue, la veille, à la dame de Fargues, par un fondé de pouvoirs de Boufflers. Cette vente avait eu lieu à Neuville (Rhône). Perrin assigna devant le tribunal de la Seine Boufflers, en exécution du contrat qu'il lui avait passé, et la dame de Fargues en déclaration de jugement commun. De son côté, la dame de Fargues fit donner une semblable assignation devant le tribunal de Villefranche, à Boufflers et à Perrin. Pourvoi en règlement de juges de la part de ce dernier. Il disait que la demande par lui formée contre Bouflers était tout à la fois personnelle et réelle, puisqu'elle avait pour objet l'exécution d'un contrat et la revendication d'un immeuble; qu'aux termes de l'art. 59 c. pr., cette demande devait être portée, soit devant le tribunal de Villefranche, juge de la situation des biens, soit devant le tribunal de la Seine, dans le ressort duquel Boufflers a son domicile, et, que par conséquent ce dernier avait pu être assigné devant les juges de Paris. Il ajoutait que la dame de Fargues avait pu être assignée devant les mêmes juges, à l'effet de voir dire que le jugement à intervenir contre Boufflers serait déclaré commun avec elle; car la demande formée contre la dame de Fargues n'était que l'accessoire ou un incident de celle intentée contre Boufflers, et un tribunal compétent pour connaitre d'une demande principale, l'est également pour prononcer sur les accessoires qui s'y rattachent, ou sur les incidents qui en naissent.

La dame de Fargues répondait que l'objet essentiel du procès était de savoir à qui, d'elle ou de Perrin, serait adjugée la prairie qu'ils avaient respectivement acquise; que la revendication de cette prairie formait la demande principale; que, dès lors, cette demande était réelle, et que par conséquent c'était devant les juges de la situation, c'est-à-dire devant ceux de Villefranche, que l'affaire devait être portée.- Arrêt.

LA COUR; Considérant que la compétence des tribunaux se règle d'après la nature des actions qui leur sont soumises, que celle que Perrin a intentée contre de Boufflers est une action mixte, qui, aux termes de l'art. 59 c. pr., pouvait être portée devant le tribunal de la Seine, dans le ressort duquel de Boufflers a son domicile ; que le tribunal de la Seine, ayant été compétemment saisi de cette demande, l'a été aussi compétemment de celle formée en déclaration de jugement commun contre la dame de Fargues, puisque cette seconde demande était intimement connexe à la première : - Ordonne que les parties procéderont sur leurs demandes respectives devant le tribunal de la Seine.

Du 2 fév. 1809.-C. C., sect. req.-MM. Muraire, 1 pr.-Zangiacomi, rap.-Merlin, pr. gén.

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(2) Espèce: (Guillaume C. Gerbe.)-Guillaume, domicilié à Paris, vend, par acte sous seing privé, à Gerbe une maison située à Pontoise. Ce dernier, se prévalant d'une clause contenue dans cet acte, forme, contre Guillaume, devant le tribunal de Pontoise, une demande ayant pour but non-seulement la reconnaissance de son écriture dans l'acte sous seing privé, mais encore la réalisation de la vente.-Guillaume soutient que l'action intentée contre lui, étant personnelle, aurait dû être portée devant le tribunal de son domicile.-Jugement qui rejette le déclinatoire:-Attendu que l'action intentée a pour but non-seulement une reconnaissance d'écriture, mais encore une réalisation de vente, et, par suite, la prise de possession de l'objet vendu; que, sous ce dernier rapport, la matière étant réelle, le tribunal a été compétemment saisi...- Appel. - 26 août 1835, arrêt de la cour de Paris qui, adoptant les motifs des premiers juges, confirme leur sentence.

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leurs motifs que l'action en rescision pour cause de lésion a pouf objet principal et direct un supplément de prix. Mais il nous est impossible d'admettre cette doctrine, car la faculté donnée à l'acquéreur par l'art. 1681 du c. civ. de garder l'immeuble en offrant un supplément de prix, ne saurait ôter à l'action en rescision son véritable caractère d'action personnelle, tendant aussi à la reven dication de l'immeuble vendu. Il est même vrai de dire que le vendeur ne peut demander autre chose que la restitution de cet immeuble, tant que l'acquéreur n'a pas fait connaître son option pour un supplément de prix. Aussi notre opinion, qui est celle de MM. Delvincourt, t. 3, p. 164, et Duranton, t. 4, p. 89, a-telle été consacrée, non-seulement par un arrêt de la cour de Bourges, du 25 janv. 1832 (aff. N...), et par un jugement du trib. civ. de la Seine, du 9 mars 1828, rapportés au no 167, mais encore par un arrêt de la cour de Paris, du 13 mars 1817, et par un arrêt de cassation du 13 fév. 1832 (3).

149. L'action en rescision doit être considérée comme mixte,

LA COUR; Attendu que l'arrêt dénoncé, qui a adopté les motifs du jugement de première instance, considère que l'action du défendeur éventuel a eu pour but non-seulement une reconnaissance d'écriture, mais encore une réalisation de vente, et, par suite, la prise de possession de l'objet vendu, ce qui constitue une action mixte, personnelle et réelle ; d'où il suit que l'arrêt dénoncé, en prononçant que le tribunal de Pontoise, dans le ressort duquel les biens vendus étaient situés, a été compétemment saisi de l'affaire, loin d'avoir violé l'art. 59 c. pr., en a fait au contraire une juste application; - Rejette.

Du 31 mai 1837.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Menerville, rap.-Nicod, av. gén.-Delaborde, av.

(3) 1 Espèce: (Bodin C. Bosquillon.) - La dame Bodin avait été autorisée à poursuivre sa séparation de biens d'avec son mari. En sa qualité de créancière et comme commune en biens avec lui, elle demanda la rescision pour lésion d'une vente d'une maison située à Varennes (Seineet-Oise), vente que son mari avait consentie à Bosquillon. Elle porta

sa demande devant le tribunal de la Seine. Bosquillon opposa que l'action étant réelle, devait être portée devant le tribunal de la situation de l'objet litigieux. 4 août 1816, jugement qui renvoie les parties devant ce tribunal.

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Appel par la dame Bodin. Elle soutient que l'action en rescision n'est pas réelle, puisqu'elle n'a pas pour objet direct et immédiat de revendiquer la propriété, mais qu'on doit la considérer comme personnelle ou au moins mixte. Et en effet, l'action en rescision pour lésion d'outre-moitié a pour objet direct et immédiat le payement du supplément du juste prix; elle ne tend à revendiquer l'immeuble qu'autant que l'acheteur no consent pas à payer ce supplément jusque-là elle est personnelle. C'est l'opinion de Ferrières, Dict. de droit, v° Lésion, p. 212. Que si l'on prétend que ces deux demandes sont unies, l'action se trouve alors mélangée de personnalité et de réalité; elle est donc mixte. D'où il suit que le tribunal de la Seine était compétent, aux termes de l'art. 59 c. pr.

Bosquilion répond que le droit qu'a l'acquéreur de retenir l'immeuble en payant le supplément du juste prix, est une faveur de la loi qui ne change rien à la nature de l'action; que cette action est réelle, puisque, si le contrat est rescindé, la propriété est censée, par une fiction de droit, être toujours restée dans les mains du vendeur, qui la revendique par l'action en rescision. Il ajoute que c'est l'opinion de Pothier, Contrat de vente, p. 5, ch. 2, sect. 2, § 1.

Il prétend, au surplus, que la dame Bodin devait être déclarée non recevable dans son action, attendu qu'elle n'est spécialement autorisée que pour poursuivre sa séparation de biens contre son mari, et que cette autorisation doit se restreindre à ce seul objet. Arrêt.

LA COUR;

Considérant, sur l'exception d'incompétence, qu'il est question, dans la cause, d'une matière mixte, dont la connaissance appartient, soit au tribunal de la situation de l'objet litigieux, soit au juge du domicile du défendeur; Considérant, sur le fond, que la dame Bo din, uniquement autorisée à poursuivre sa séparation de biens contre son mari, ne l'était pas à intenter l'action en rescision dont il s'agit; A mis et met l'appellation et ce dont est appel au néant; - Emendant, sans s'arrêter à l'exception d'incompétence opposée par Bosquillon, dont il est débouté, prononçant au principal, conformément à l'art. 473 c. pr., déclare la femme Bodin non recevable dans sa demande, et la condamne aux dépens des causes principales.

Du 13 mars 1817.-C. de Paris.-MM. Lepoitevin, pr.-Lamy et Thévenin, av.

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2o Espèce: (Fournier et Dufour C. Capitan, etc.) Le 29 janvier 1815, vente par Biosset à Desroches et Fournier, chacun pour moitié, du domaine de Boissard, situé dans la commune de Saint-Clément (Allier), pour 4,000 fr. En 1817, Biosset cita les acquéreurs en conciliation, puis devant le tribunal de Roanne, lieu de leur domicile, en rescision de la vente pour cause de lésion. Ceux-ci opposaient qu'il n'y avait pas lésion. Les choses étant en cet état, Fournier devint seul propriétaire du do

alors même qu'il s'agirait d'une vente d'immeubles passée sous la coutume de Bretagne, si l'action en rescision est postérieure à la loi du 26 vent. an 4; car, à supposer que cette action dût être nécessairement portée, d'après la coutume précitée, devant le tribunal du défendeur, il a été dérogé à cette coutume par la loi

maine de Boissard, et Biosset céda ses droits, pour 617 fr. 50 c., aux époux Capitan et Cuisinier, qui procédèrent en leur nom.

Le 20 juin 1820, jugement qui ordonne une expertise. Sur l'appel, Fournier et Dufour (ce dernier appelé en garantie), demandèrent le renvoi de la cause devant le tribunal de la situation de l'immeuble; mais la cour de Lyon se borna, par son arrêt du 7 mai 1825, à confirmer le jugement dont était appel. — Cet arrêt fut dénoncé à la cour de cassation, qui l'annula par arrêt du 30 avril 1827, pour défaut de motifs.

L'affaire reportée devant la cour de Riom, Fournier et Dufour ont d'abord soutenu que le tribunal de Roanne était incompétent, l'immeuble litigieux étant situé dans le ressort d'un tribunal autre que celui du domicile des acquéreurs, et ils ont ensuite demandé a être subrogés à l'action de leurs adversaires à qui ils offraient le remboursement du prix de leur cession, aux termes de l'art. 1699 c. civ.

Lo 9 mars 1829, arrêt de la cour de Riom, en ces termes : « En ce qui touche le moyen d'incompétence proposé seulement sur l'appel en la cour royale de Lyon, par les parties de Tailhaud contre le tribunal de première instance de Roanne : Attendu que l'on ne peut considérer comme action réelle formée par un vendeur, soit une demande en rescision d'une vente pour cause de lésion, soit une action en subrogation formée par l'acquéreur à l'effet d'une cession faite par le cédant de cette action en rescision; que ces deux actions ne tendent qu'à la résolution d'un contrat; que, de leur nature, elles sont des actions ordinaires et personnelles; que, dès lors, elles ont pu être exercées par-devant le juge du domicile, soit de celui contre lequel l'action en rescision est dirigée, soit de celui contre lequel l'action en subrogation à l'effet de la cession de l'action en rescision a été exercée; Attendu que, d'ailleurs, ces actions ne pourraient tout au plus être considérées que comme des actions mixtes, et que, dans ce cas même, elles ont pu être exercées par-devant le juge de paix du domicile de ceux contre lesquels elles l'ont été;

« Considérant que le droit cédé par Pierre Biosset aux parties de Bayle, par l'acte du 30 mars 1819, n'a point le caractère de droit litigieux, et qu'il a pu être valablement cédé, en sorte que ce ne peut être le cas de l'application de l'art. 1699 c. civ.; Qu'en effet, l'action en rescision n'a point été contestée par l'acquéreur de l'immeuble attaqué par la voie de la rescision contre lequel la prescription n'a point couru; qu'au contraire, il y a donné les mains;-Qu'à la vérité, cet acquéreur a bien prétendu qu'on ne devait pas comprendre dans l'estimation à l'effet de savoir s'il y avait ou non lésion des arbres qu'il prétendait lui avoir été vendus avant la vente de l'immeuble dont ils faisaient partie, et dont il prétendait avoir payé le prix; mais, que ces faits ne se sont pas trouvés vrais, n'ayant point été établi qu'il y eût une vente particulière des arbres, et que le prix en eût été payé; d'où il résulte que ces faits doivent être écartés; Considérant que, dans cet état de choses, l'action en rescision est restée en son entier, qu'il n'y a point eu de litige sur cette action, d'après l'art. 1700 c. civ., où il est dit que la chose n'est censée litigieuse que dès qu'il y a procès et contestation sur le fond du droit; qu'ici, le fond du droit, qui consistait dans l'action en elle-même qui n'a pas été contestée, à laquelle, au contraire, on avait acquiesce, est demeuré intact;- Que les faits allégués auraient pu influer sur le résultat de l'estimation; mais toute différence, toute modification, quant à ce résultat, n'empêcherait pas que le fond du droit ne restat, puisque dans tous les cas la détermination du droit rescisoire dépend, par la nature des choses, de l'estimation par experts à laquelle il est sujet, et que ce droit, en lui-même, ne subsiste pas moins; - Considérant que, de ce qui vient d'être dit, il résulte qu'il est inutile d'examiner tous les autres moyens de fait opposés par les parties de Tailhaud; - Par ces motifs et ceux développés dans le jugement attaqué, confirme. » Pourvoi. 1° Violation des règles de la compétence, consacrées par l'art. 59 c. pr., d'après lequel les actions réelles doivent être portées devant le tribunal de la situation de la chose litigieuse; en ce que l'arrêt attaqué a décidé que la contestation, dans l'espèce, était une action mixte, qui pouvait être portée soit devant le tribunal du domicile du défendeur, soit devant le tribunal de la situation de l'immeuble, lorsque, cependant, l'action qui a pour objet la restitution d'un immeuble pour cause de lésion, est tout à fait réelle.

-

2o Violation des art. 1699 et 1700 c. civ., en ce que la cour de Lyon a refusé de subroger les sieurs Fournier et Dufour à l'action que les époux Capitan et Cuisinier avait acquise contre eux, lorsqu'il s'agissait, cependant, d'une cession de droit litigieux. Il suffit de rapprocher, a-t-on lit, les faits de la cause des art. 1699 et 1700, pour démontrer que le droit de retrait ne pouvait être contesté aux sieurs Fournier et Dufour contre les cessionnaires de l'action déjà intentée par Biosset au moment de la cession.

On ne peut, en effet, refuser à l'action cédée tous les caractères des droits litigieux; car l'action en rescision pour cause de lésion est néces

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sairement contentieuse; elle a pour but de renverser un acte; elle no peut être admise que par jugement, et la preuve de la lésion ne peut se faire que par une expertise; et, en outre, dans l'espèce, le procès était commencé au moment de la cession par une citation en conciliation, et uno assignation à comparaitre devant le tribunal civil.

La cour de Riom a prétendu, pour éluder l'application des art. 1699 et 1700, qu'il n'y avait pas litige dans l'espèce; elle a dit que l'action en rescision n'était point contestée par l'acquéreur; mais c'est là une erreur. Sans doute on ne contestait pas le droit d'intenter l'action, on ne l'aurait pas pu. Mais on contestait le fait de la lésion, ce qui suffisait bien pour constituer le litige, et pour que la cour dût appliquer l'article 1700 c. civ.

Les défendeurs ont soutenu, en réponse au premier moyen, que l'action en rescision était personnelle ou du moins mixte, puisqu'elle avait pour objet principal un supplément du prix stipulé, et subsidiairement la restitution de l'immeuble.

Sur le deuxième moyen, ils ont prétendu que la cour de Riom ayant décidé, en fait, qu'il n'y avait pas litige dans la cause, il n'était plus possible de discuter ce point de fait; que, d'ailleurs, il n'y avait pas réellement contestation, contradiction sur le fond du droit au moment de la cession, puisque les acquéreurs n'opposaient aucune contradiction à la demande de Biosset; ce qui écartait absolument l'application des art. 1699 et 1700 c. civ. Arrêt (après dél.). LA COUR; Attendu que l'action en rescision d'un contrat de vente pour cause de lésion, étant une action utilis in rem, est de nature mixte, et peut, aux termes de l'art. 59 c. pr., être portée devant le tribunal du domicile du défendeur; Rejette ce moyen.

Mais, statuant sur le deuxième moyen, vu les art. 1699 et 1700 c. civ.; Attendu, en fait, qu'il résulte des conclusions signifiées à la requête des époux Fournier, le 30 avril 1819, ainsi que des autres actes et circonstances de l'affaire, qu'il y avait contestation et procès sur la question de savoir s'il y avait lésion; que cette question concernait le fond du droit que prétendait le sieur Biosset; que celto contestation et ce procès étaient nés de l'action en rescision que Biosset avait intentée antérieurement à la cession de ladite action, et que le consentement donné par les acquéreurs à l'expertise, sous la condition de ne pas comprendre dans l'estimation les objets par eux spécifiés, a eu pour motif d'établir que la lésion alléguée n'existait pas; D'où il suit, qu'en droit, les mariés Fournier, en qualité d'acquéreurs dudit Biosset, étaient admissibles et fondés à exercer le retrait légal de la cession qu'il avait faite de son action en rescision, et qu'en jugeant le contraire, l'arrêt attaqué a violé les art. 1699 et 1700 c. civ.;

etc.

Attendu, en ce qui concerne le sieur Plossard, que le pourvoi n'est point dirigé contre lui; que l'arrêt d'admission ne porte pas l'autorisation de l'assigner devant la ch. civ., et que la notification qui lui a été faite de cet arrêt n'explique nullement pourquoi il lui a été notifié; que, dans cet état de choses et d'après ces circonstances, il n'y a pas lieu à statuer à l'égard dudit Plossard; Par ces motifs, casse, Du 13 fév. 1832. - C. C., ch. civ. - M. Portalis, 1er pr. - Rupérou, rap.-De Gartempe, av. gén., c. conf.-A. Chauveau et Gatine, av. (1) Espèce: (Masjombert C. Rubatel.) Par acte du 9 juillet 1793, Bournezeau se rendit adjudicataire d'une maison située en la ville de Lorient, pour le prix de 16,100 fr. en assignats. Peu après, il mourut. Il était domicilié à Lorient; ses héritiers avaient leur domicile à Limoges. Le papier-monnaie ayant disparu, le vendeur de la maison, désirant profiter du bénéfice accordé par la loi du 19 floréal an 6, obtint, le 26 germinal an 7, une cédule du juge de paix de Lorient, qui lui permit de faire citer devant lui les héritiers Bournezeau, pour se concilier sur la demande en rescision que ledit vendeur se proposait de former.

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Le 9 floréal, cette cédule fut signifiée aux héritiers Bournezeau, en leur domicile à Limoges; ils ne comparurent pas. - A la suite de cette citation, une longue procédure fut suivie contre les héritiers Bournezeau, devant les juges du département du Morbihan. Un grand nombre de jugements furent rendus contre eux, et toujours par défaut. Les héritiers Bournezeau appelèrent de tous ces jugements, qui furent confirmés par la cour de Rennes. Pourvoi. En règle générale, disaient-ils, le demandeur doit porter son action devant le tribunal du domicile du défendeur. Ce principe reçoit, à la vérité, des exceptions, quand il s'agit d'actions réelles ou mixtes. Mais l'action en rescision d'une vente est personnelle; en effet, elle n'est donnée que pour cause de lésion: la lésion est un fait de l'homme. C'est donc le fait de l'homme qui donne naissance à l'action : l'action est donc personnelle, et doit être intentée au domicile du défendeur. — Mais en supposant qu'il y eût du doute sur cette matière, dans les principes généraux du droit, ce doute cesserait dans l'espèce où la difficulté se trouve

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enchère, qui réclame contre l'adjudicataire la restitution de ses frais et loyaux coûts, et conclut à ce que la condamnation par lui requise soit prélevée sur l'immeuble adjugé, est aussi une action mixte. Cette action peut donc être portée indifféremment soit devant le tribunal de la situation de l'immeuble, soit devant celui de l'adjudicataire (Bordeaux, 5 juill. 1853, aff. Sieuzac, vo Surenchère).

151. Enfin est également mixte la demande tendant à faire cesser l'administration d'un curateur à une succession vacante, en partie immobilière, et à faire nommer un séquestre; et, à ce titre, elle peut être portée, soit au tribunal du domicile du curateur, soit à celui de la situation des biens (Bourges, 5 août 1820) (1). Des actions mobilières et immobilières.

ART. 3. 152. La nature même des choses indique que les actions sont mobilières ou immobilières, suivant qu'elles ont pour objet un meuble ou un droit mobilier, un immeuble ou un droit immobilier; il n'y a pas en droit de règle plus ancienne que la maxime rappelée par Dargentré: Actio quæ tendit ad mobiles mobilis est, ad immobiles immobilis. Celle maxime bien simple en elle-même, est expressément consacrée dans sa première partie et implicite- | ment dans la seconde par l'art. 529 c. civ., qui répute « meubles par la détermination de la loi les obligations et actions qui ont pour objet des sommes exigibles ou des effets mobiliers... >>

153. On confond assez ordinairement, dans le langage pratique, l'action mobilière avec l'action personnelle, et l'action immobilière avec l'action réelle. Cependant, comme nous l'avons dit plus haut, n° 79, toute action mobilière n'est pas nécessairement personnelle par exemple, la revendication d'un meuble perdu ou volé, autorisée par les art. 2279 et 2280 c. civ., contre le tiers acheteur, est une action réelle quoique mobilière. Mais on est fondé à dire que toute action immobilière est réelle. On a néanmoins soutenu le contraire, et on a signalé notamment comme personnelle immobilière l'action par laquelle le donataire d'immeubles, qui n'a pas encore fait transcrire l'acte de donation, réclame du donateur l'exécution de cet acte. Nous ne pouvons admettre cette opinion, ni l'exemple unique invoqué à l'appui. - La transcription de la donation n'est nécessaire qu'à l'égard des tiers; témoin l'art. 944 c. civ., qui ne permet pas au donateur de se prévaloir de l'omission de cette formalité. Le donataire est donc saisi vis-à-vis du donateur sans le secours de la transcription, et partant l'action qu'il intente contre lui pour obtenir la délivrance des biens donnés, a tous les caractères, non-seulement d'une action personnelle et immobilière, mais encore d'une action réelle. Elle constitue une véritable action mixte. Nous ne connaissons pas d'action immobilière qui ne soit en même temps une action réelle, et la confusion dont nous venons de parler n'est vraiment à reprendre qu'autant qu'elle assimile toutes les actions mobilières aux actions personnelles. Encore fautil remarquer qu'il n'est qu'un petit nombre de cas dans notre droit où l'action réelle mobilière soit séparée de l'action personnelle (c. civ., 1141, 2102, 2279); c'est ce qui explique, sans la justifier,

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prévue par les lois locales. — L'art. 8 de la coutume de Bretagne, dans le ressort de laquelle est situé le bien vendu, dit formellement que l'action en rescision est purement personnelle; d'où il suit que la contestation devait être soumise, non aux tribunaux du Morbihan el de Rennes, mais à celui de Limoges, lieu du domicile des demandeurs en cassation. Arrêt.

LA COUR; Vu l'art. 7 de la loi du 26 ventôse an 4, ainsi conçu : « Dans les affaires, soit réelles, soit mixtes, le demandeur aura le choix de citer en conciliation, ou devant le juge de paix du domicile du défendeur, ou devant celui du canton où les biens sont situés; » Et attendu que, suivant les principes du droit commun, la demande en rescision d'un acte de vente d'immeubles étant une action utilis in rem, et par conséquent de nature mixte, il était facultatif de l'intenter ou devant le tribunal dans le ressort duquel l'immeuble était situé, ou devant le tribunal du domicile du défendeur; - Et qu'en admettant même, qu'aux termes de l'art. 8 de la coutume de Bretagne, la demande en rescision dùt nécessairement étre portée devant le tribunal du domicile du défendeur, l'art. 7 précité de la loi de ventôse an 4 y aurait dérogé, puisque le véritable esprit de cette loi a été de faire revivre les principes du droit commun sur la matière; d'où il suit que la cour d'appel de Rennes a dù envisager comme compétent le tribunal de la situation des biens, pour statuer sur

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la confusion dont nous parlons. On a été d'autant plus aisément amené à ne point distinguer l'action personnelle de l'action mobilière, qu'elles sont soumises à la même règle de compétence, l'une et l'autre devant être portées devant le juge du domicile du déferdeur (c. pr., art.2). Mais cette règle commune n'implique aucune assimilation des deux actions; elle dérive uniquement, comme nous l'avons fait remarquer plus haut, no 118, de ce que les meubles n'ayant point d'assiette fixe, on a dù leur assigner pour situation légale le domicile de celui qui les détient. La cour de cassation distinguait très-bien les actions dont il s'agit, en même temps qu'elle justifiait la disposition qui les soumet au même tribunal, lorsque, dans ses observations sur le projet du code de procédure, elle proposait un article ainsi conçu: « Comme les objets mobiliers suivent la personne obligée à les livrer, les actions réelles mobilières ne sont distinguées des actions personnelles que dans les cas spécifiés par la loi. » V. ces observations plus haut, n° 64, art. 9.

154. Les actions mobilières et immobilières diffèrent entre elles, non-seulement par la nature des choses qu'elles tendent à obtenir, mais encore à plusieurs autres égards. — Les premières peuvent être soumises au juge de paix, qui ne peut connaître des secondes, si ce n'est lorsqu'il s'agit d'actions possessoires. — Celles-là se portent devant le juge du domicile du défendeur; celles-ci devant celui de la situation des biens litigieux. Les premières ne s'exercent que par la voie du pétitoire; les secondes par la voie du pétitoire et par celle du possessoire. Enfin, on peut signaler encore, entre autres différences entre les actions mobilières et immobilières, que celles-ci ne tombent point de plein droit, comme celles-là, dans l'actif de la communauté conjugale; qu'elles ne sont pas comprises dans le legs à titre universel du mobilier, et qu'elles ne peuvent, quand elles appartiennent à une femme mariée ou à un mineur, être exercées par le mari ou le tuteur, sans le concours de la femme ou l'autorisation du conseil de famille.

155. Il serait aussi difficile d'offrir une nomenclature complète des actions mobilières que des actions personnelles qui presque toutes ont le caractère d'actions mobilières; on doit considérer comme telle toute action dont l'objet est d'obtenir une chose qui, aux termes des art. 527 à 537 c. civ., est réputée meuble par sa nature ou par la détermination de la loi (art. 527 c. civ.). C'est dire assez que, sans entrer dans un détail en quelque sorte impossible, nous devons nous borner à citer quelques exemples, et parmi ces exemples ceux particulièrement qui ont été soulevés par la doctrine et par la jurisprudence, ou qui peuvent offrir difficulté.

156. Il n'y en a aucune sur le caractère à la fois réel et mobilier de l'action de gage, c'est-à-dire de celle par laquelle le débiteur revendique l'objet donné en gage, lorsque le créancier en abuse ou lorsque le débiteur s'est libéré. Il faut aussi regarder, non comme réelle, mais comme mobilière, l'action de gage contraire, pignoratitia contraria, c'est-à-dire celle par laquelle le créancier demande au débiteur un autre gage, lorsque l'objet donné en nantissement n'appartient pas au débiteur et a été dé

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(1) (Bruneau C. Bizi et Delichy.)-LA COUR ; Considérant que la demande en nomination d'un séquestre n'est pas, comme on le prétend, une action dont l'unique but soit de faire percevoir, par un individu choisi des revenus mobiliers de leur nature; que la nomination d'un séquestre a pour objet d'enlever l'administration de l'immeuble à la personne qui ex jouit, de faire faire les visites nécessaires, de faire procéder aux réparations, ce qui, dans l'espèce, était d'autant plus nécessaire que depuis dix ans on n'a pas même fait faire les réparations locatives; qu'aucune partie des terres n'ayant été soignée, tout est aujourd'hui dans un tel état de délabre ment, que tous ceux qui ont des droits ne peuvent plus compter sur leur gage;-Qu'une action qui doit produire un tel effet, c'est-à-dire agir sur la personne qu'il faut écarter, et changer, en l'améliorant, l'état des immeubles, est essentiellement une action mixte qui a pu être portée ou au domicile du curateur à la succession vacante dont on voulait faire cesser la jouissance, ou au tribunal dans le ressort duquel les biens sont situés; — A mis l'appellation au néant.

Du 5 août 1820.-C. de Bourges, 2 ch.-M. Delaméthrio, pr.

claré appartenir à un tiers, ou bien lorsque cet objet vient à périr | même, s'il s'agissait de récoltes vendues sur pied, de matériaux avant d'être remis en gage et dans d'autres cas analogues.

157. On doit aussi, sans aucun doute, regarder comme essentiellement mobilières, soit l'action en liquidation de dommagestérêts, à laquelle le mari peut conséquemment défendre sans le concours de sa femme (Req., 7 nov. 1809); soit l'action en payement de l'indemnité due pour le passage d'un fonds enclavé, aclion qui, par suite, est prescriptible contre la femme dotale pendant le mariage (Grenoble, 7 janv. 1845, aff. Sirand, D. P. 45. 2. 160).

158. Mais que faut-il penser de l'action par laquelle l'achetant d'une coupe de bois réclame du propriétaire de la forêt l'aulorisation d'abattre les bois qui lui ont été vendus et de séparer ces bojs du sol immobilier dont ils font partic? Il importe peu que les arbres vendus soient matériellement incorporés au sol, tant que la cognée ne les en a pas détachés; ils en ont été intellectuellement et légalement séparés par la vente de la coupe qui a fait passer ces arbres comme chose mobilière entre les mains de l'acheteur. Le droit qu'il réclame de les abattre n'offre donc que l'exercice d'une action purement mobilière. C'est, au reste, en ce sens que la cour de cassation a résolu la question (Cass., 5 oct. 1813) (1), et il est manifeste que la solution devrait être la

(1) Espèce (Mirepoix C. Reignier.)- Reignier avait acheté de Mirepoix la coupe de la forêt de la Buissonnière, située dans l'arrond. de Roanne, et s'était obligé à laisser sur pied un certain nombre de baliveaux. — En 1810, les héritiers de Reignier ont traduit les héritiers de Mirepoix devant le tribunal de Roanne, pour se voir autoriser à couper 1,027 baliveaux, qu'ils soutenaient avoir laissés sur pied, au delà du nombre déterminé par l'acte de vente. Les héritiers de Mirepoix ont répondu que, s'agissant d'une action qui avait pour objet la livraison d'une chose mobilière, ils auraient dû être assignés devant le tribunal de Paris, dans le ressort duquel ils avaient leur domicile. Le 8 août 1810, le tribunal de Roanne a rejeté ce déclinatoire; et, sur l'appel, son jugement a été confirmé par la cour de Lyon, le 14 juill. 1812; « Attendu que la question à juger tend à savoir si l'une des parties a le droit d'abattre et d'enlever des baliveaux; que cette action caractérise une action réelle, d'après l'art. 521 c. civ.; d'où il suit que le tribunal de Roanne, dans le ressort duquel est situé le bois qui forme l'objet de la contestation, a été légalement saisi. >>

Pourvoi de la part des héritiers de Mirepoix pour violation de l'art. 528 c. civ. et de l'art. 59 c. pr., en ce que le tribunal civil de Roanne avait regardé comme immobilière une action essentiellement mobilière. Les demandeurs soutenaient que les arbres sur pied n'étaient immeubles que par leur accession au sol; mais que dès l'instant qu'ils en étaient intellectuellement détachés par la vente qu'en avait faite à un tiers le propriétaire du sol, ils ne constituaient plus que des objets mobiliers.

Les défendeurs à la cassation contestaient d'abord ce principe, en se fondant sur ce que les arbres non abattus et inhérents au sol en formaient matériellement partie intégrante. - Arrêt.

LA COUR; Vu l'art. 528 c. civ. et l'art. 59 ĉ. pr.;- Attendu que, dans l'espèce, la chose réclamée par la veuve et les héritiers Reignier était pour eux une propriété mobilière, qu'ils n'avaient achetée que pour couper et transporter; d'où il suit que leur action était mobilière, et que la cour de Lyon, en jugeant le contraire, a contrevenu à la disposition de l'art. 528 c. civ., à l'art. 59 c. pr., et fait une fausse application de l'art. 521 c. civ.;- Casse, etc.

Du 5 oct. 1813.-C. C., sect. civ.-MM. Mourre, pr.-Oudot, rap.-Mailhe et Darrieux, av.

(2) Espèce: (Pibaleau C. Achard-de-Lahaye.) - Par acte du 5 juin 1786, les dames Labouère et Lecoq vendirent à Louis Pibaleau la terre de Martigny, pour 57,200 liv.; 22,000 liv. furent payées comptant; les autres 35,000 liv. étaient payables et furent payées en janv. 1788. Pibaleau voulut obtenir des lettres de ratification; et, en 1790, il lui en fut accordé à la charge de plusieurs oppositions, parmi lesquelles figurait celle d'Achard-de-Lahaye. - Louis Pibaleau mourut sans postérité. La demoiselle Pibaleau fut son héritière pour un quart; elle avait épousé Joseph Pibaleau, parent, mais non héritier du défunt.

Vers l'an 12, Achard-de-Lahaye fit assigner Joseph Pibaleau, « en son nom personnel, comme héritier de Louis Pibaleau, en représentation et consignation du prix de la terre de Martigny, pour être payé de 50,000 liv., dont il a prétendu être créancier de la dame Labouère, l'une des venderesses. »~~ Pibaleau soutint qu'Achard était non recevable dans sa demande, faute de justifier de ses créances; subsidiairement, il appela en garantie Gazeau-Labouère, représentant la venderesse. - Mais bientôt il fit connaître que ce n'était point lui qui était héritier de Louis Pibaleau, et il indiqua les héritiers, parmi lesquels était sa femme pour un quart. Il demanda, en conséquence, la nullité de la procédure, sauf à Achard à se pourvoir contre les cohéritiers Pibaleau.

d'une maison ou d'un mur à démolir, en un mot de toute alié nation d'une portion d'immeuble destinée à devenir objet mobi. lier par sa séparation du sol.

159. Est aussi mobilière l'action en représentation du prix d'un immeuble formée par u créancier contre l'acquéreur par suite des lettres de ratification obtenues par celui-ci, à la diffé rence de celle qui aurait pour objet la distribution à faire de ce même prix, entre plusieurs créanciers opposants, suivant l'ordre de leurs hypothèques (Req., 15 mars 1808) (2).

160. Il faut reconnaître le même caractère mobilier, soit à la demande d'un cohéritier en restitution des fruits perçus par son cohéritier depuis l'ouverture de la succession, nonobstant la maxime fructus augent hereditatem, qui ne change en rien la nature de cette action (Agen, 11 nov. 1830, aff. Carrère, V. Succession); soit à la demande d'un cohéritier en rapport du prix d'une adjudication (Orléans, 15 août 1817, aff. N..., V. Mat. somm.).-Peu importe, en effet, qu'il s'agisse du prix d'un immeuble: ce prix n'était plus qu'une chose mobilière, lorsqu'il a été reçu par l'un des cohéritiers, et partant celui qui l'a touché n'est tenu, envers ses cohéritiers, que d'une dette mobilière.

101. Il en serait de même de l'action que les cohéritiers ou

Cette exception fut rejetée par jugement du tribunal de Chinon, dont voici les motifs :-« Considérant que Joseph Pibaleau a reconnu que l'action avait été bien dirigée contre lui seul, tant en demandant la permission d'appeler en garantie Gazeau-de-Labouère, et en formant cette demando en garantie, qu'en soutenant Achard-de-Labaye non recevable en sa demande, faute par lui de justifier avoir acquitté des créances dont il réclamait le remboursement;- Considérant que l'action du sieur Achard est de nature pure mobilière, puisqu'elle ne tend qu'à la représentation du prix de la terre de Martigny-Monteil, par suite des lettres de ratification obtenues par feu Louis Pibaleau, sur son acquisition; -Considérant qu'en supposant que le sieur Pibaleau n'eût aucun intérêt personnel dans la succession de feu Louis Pibaleau, dès qu'il est reconnu par lui que sa femme était appelée dans la succession pour un quart, et avait recueilli ce quart, il a été valablement assigné pour raison des dettes mobilières de cette succession.» Ce jugement fut confirmé par la cour d'Orléans, qui en adopta les motifs.

Pourvoi de Pibaleau: 1° fausse application de l'art. 5, tit. 5, de l'ord. de 1667, dans lequel le demandeur supposait que la cour d'Orléans avait puisé la raison de rejeter l'exception proposée. L'exception prise du défaut de qualité, disait-il, ne peut éire couverte par aucune défense; elle peut être proposée en tout état de cause. Merlin, en ses Quest. de droit, tom. 1, p. 274, et tom. 5, p. 362, va même jusqu'à penser qu'elle peut être suppléée d'office par le juge. — La raison de cette règle, c'est que nulle défense ne peut transformer en héritier celui qui ne l'est pas et ne le fut jamais. Sur ce moyen, nous ferons observer que les principes invoqués par le demandeur, vrais en eux-mêmes, devaient fléchir devant cette circonstance particulière que, si Joseph Pibaleau était sans qualité jure proprio, il avait qualité pour défendre à l'action comme mari, puisqu'il s'agissait, comme cela a été décidé, d'une action mobilière dont sa femme était tenue.

2o Violation des principes constitutifs de tout système hypothécaire, en ce que le tribunal de Chinon et la cour d'Orléans ont jugé que l'action intentée par Achard, en représentation du prix de la vente d'un immeuble, était de nature purement mobilière. C'est, au contraire, une maxime constante que le prix d'un immeuble que l'acquéreur est tenu de représenter aux créanciers opposants au sceau des lettres de ratification, est de nature immobilière. Arrêt.

LA COUR; Altendu, 1° que le sieur Joseph Pibaleau a reconnu que l'action du sieur Achard-de-Lahaye avait été bien dirigée contre lui, soit en demandant la permission d'appeler en garantie le sieur de Gazeau-deLabouère, et en formant lui-même cette demande en garantie, soit en soutenant ledit sieur Achard-de-Lahaye non recevable en sa demande, faute par lui de justifier d'avoir acquitté les créances dont il réclamait le remboursement; d'où il suit que la cour d'appel d'Orléans, loin d'avoir contrevenu à l'art. 5, du tit. 5 de l'ord. de 1667, en a fait au contraire, en le déboutant d'une fin de non-recevoir qu'il n'opposait que tardivement, et après avoir proposé tous ses moyens de défense sur le fond du procès, l'application la plus juste; - Attendu, 2o qu'en décidant que l'action du sieur Achard-de-Labaye était de nature pure mobilière, puisqu'elle ne tendait qu'à la représentation du prix de la terre de Monteil et de Montigny, par suite des lettres de ratification obtenues par Louis Pibaleau sur son acquisition, et qu'en jugeant qu'une parcille action n'est pas de même nature que celle qui aurait pour objet la distribution à faire entre les créanciers opposants, du même prix, et à chacun, suivant l'ordre et la date de son opposition et de son bypothèque, ladite cour n'a pu contrevenir à aucune loi; - Rejette, etc.

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Du 15 mars 1808.-C. Č., sect. req.-MM. Muraire, 1" pr.-Cochard, rap.

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