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de la situation, et que, pendant les poursuites, l'un des copro- Ordre et Règl. de jug.; 1er oct. 1825, aff. de Brivazac; Paris, priétaires assigne les autres en licitation devant un autre tri- 31 mai 1826, aff. Bauchau; Req., 28 fév. 1842, aff. Debuire, bunal, l'individu au profit duquel l'adjudication est ensuite dé- V. Ordre). On comprend que de telles demandes ne peuclarée, ne peut être assigué par le même copropriétaire devant vent être qualifiées réelles que par application de la fiction qui te dernier tribunal, pour que le jugement de licitation soit dé-attribue, dans certains cas, au prix provenant d'une vente, la claré commun avec lui: une pareille action contre l'adjudicataire, ne pouvant avoir pour objet que de provoquer à son égard l'annulation de son adjudication, puisque, si celle-ci est maintenue, il n'y aura plus lieu à licitation, doit être portée devant le tribunal de la situation de l'immeuble adjugé (Paris, 3 janv. 1825, aff. Maître-Jean, V. Compét. civ.).

117. L'action en radiation d'une inscription hypothécaire est aussi assimilée à une action réelle, du moins quand elle est fondée sur un vice de forme de l'inscription, et non sur la nullité du titre en vertu duquel elle a été prise (V. suprà no 110); elle se porte en conséquence devant le tribunal dans le ressort duquel a été faite l'inscription, sauf l'exception prévue par l'art. 2159 c. civ. La même règle de compétence s'applique à la demande en réduction d'une inscription excessive (c. civ. 2161).

118. L'action intentée par l'acquéreur d'un immeuble hypothéqué, afin de faire fixer la part pour laquelle d'autres détenteurs de biens soumis à la même hypothèque devront concourir au payement de la créance hypothécaire, est, suivant la cour de Toulouse, personnelle ou mixte, et peut, en conséquence, être portée devant le tribunal du domicile de l'un des tiers détenteurs, au choix du demandeur (Toulouse, 19 fév. 1827, aff. Gaffard, V. Hypoth.). Cette action nous semble, au contraire, purement réelle; elle a exclusivement son principe dans la détention des immeubles hypothéqués.

119. La cour de Paris a jugé que la folle-enchère, après vente sur licitation, doit être poursuivie devant le tribunal qui a prononcé l'adjudication, et non devant celui de la situation de l'immeuble: « Attendu que cette action n'étant que l'exécution d'une clause toujours exprimée ou sous-entendue dans tout jugement d'adjudication, est, par conséquent, une action pure personnelle qui se rattache au jugement d'adjudication, et qui doit être suivie devant le même tribunal » (Paris, 28 sept. 1825, aff. Delavigne). - Mais l'action dont il s'agit est, ce semble, une véritable action en rescision de vente pour inexécution des conditions de la part de l'acquéreur, et, par conséquent elle ne nous paraît pas pouvoir être qualifiée d'action personnelle. C'est une action mixte.

120. Les demandes à fin d'ordre ont été déclarées réelles par plusieurs arrêts, qui ont jugé, en conséquence, que l'ordre doit être ouvert devant le tribunal du lieu de la situation des biens dont le prix est à distribuer, alors même que la saisie aurait été poursuivie devant un autre tribunal ( Req., 13 juin 1809, alf. Couturier, vo

nature de la chose vendue.

121. L'action tendante à faire décider que le détenteur d'un immeuble n'en est pas le vrai propriétaire, mais n'est que le préte nom d'un tiers, est réelle et non mixte, et doit être portée devant le juge de la situation de l'immeuble (Cass., 5 mai 1829, aff. Ouvrard, vo Règl. de juges).

122. Est également réelle l'action de la femme en revendication de ses immeubles dotaux aliénés pendant le mariage, et dès lors cette demande doit être portée devant le juge de la situation des immeubles, et non devant celui du domicile du premier acquéreur (Cass., 29 avril 1835, aff. Tomboy, V. Com| pétence).-.

123. L'action tendante à l'acquittement des charges réelles qui grèvent les immeubles, comme, par exemple, à l'exécution de l'obligation imposée aux propriétaires, dans les villes et faubourgs, de contribuer aux constructions des clôtures séparatives de leurs propriétés, est une action réelle, qui peut être exercée contre tout détenteur des maisons contigues. C'est là une obligation, ou pour mieux dire une servitude légale qui affecte la chose et non la personne du détenteur, lequel peut toujours s'y soustraire en abandonnant l'immeuble grevé.

124. Mais il en est autrement dans le cas où un propriétaire, d'accord avec son voisin, aurait fait l'avance de tous les frais de construction du mur mitoyen séparatif de leurs héritages: pour se faire rembourser de son avance, ce propriétaire n'aurait pas seulement une action réelle qu'il pourrait exercer contre le tiers acquéreur du fonds voisin; il aurait aussi une action personnelle contre le vendeur en vertu du contrat par lequel celui-ci se serait obligé à lui rembourser sa part contributive des avances faites dans l'intérêt commun, obligation dont cet ancien propriétaire ne se serait pas affranchi, à moins de convention contraire, quand même il aurait conservé son fond, par l'abandon de son droit de mitoyenneté, et dont il ne se trouve pas libéré par la transmission de sa propriété à un tiers. L'action qui appartient alors au propriétaire qui a fait les avances est une action mixte contre le voisin avec le consentement duquel les avances ont été faites. Il a même été jugé qu'elle conservait ce caractère d'action mixte contre le tiers acquéreur lorsqu'il a assumé toutes les obligations de son vendeur et particulièrement celle de contribuer à la construction du mur mitoyen, sauf le droit qu'il s'est réservé de s'en rédimer par l'abandon de la mitoyenneté (Req., 21 mars 1843) (1).

mitoyenneté; Condamne Cochet-Deroche à payer à Blanchet le montant du mémoire des ouvriers qui ont procédé à la construction du mur mitoyen, lesquels mémoires seront réglés par experts.... »

Appel par Cochet-Deroche; et, le 3 avril 1841, arrêt de la cour de Paris, qui, adoptant les motifs des premiers juges, - Confirme.

(1) Espèce: (Cochet-Deroche C. Blanchet.) - La dame Combes et terrain d'autrui, mais de constructions élevées sur le sol des deux prole sieur Hue avaient, d'un commun accord, élevé sur le sol de leurs propriétés, du consentement des deux propriétaires, et destinées à former une priétés contigues, un mur mitoyen dont la dame Combes avança tous les frais. Plus tard, et avant qu'aucun réglement de compte ne fût intervenu entre les deux voisins, la dame Combes vendit sa maison à Blanchet, et Cochet-Deroche se rendit adjudicataire de la maison de Huc. - Blanchet voulut exiger de Cochet-Deroche la portion de mitoyenneté à la charge de la propriété voisine, en vertu de la convention passée entre leurs auteurs; celui-ci refusa sur le motif que si la dame Combes avait avancé des sommes pour Hue, elle était devenue la mandataire de ce dernier, et avait, pour se faire rembourser, une action purement personnelle qu'elle ne pouvait, par suite, étendre à un tiers, étranger à la convention. Blanchet répondait que l'héritage avait été adjugé à Cochet-Deroche avec toutes les charges qui l'affectaient ; qu'au nombre de ces charges se trouvaient colles relatives à la mitoyenneté, et spécialement l'obligation de supporter la portion des frais de construction mis à la charge de son auteur; qu'il est constant que la cession de la mitoyenneté d'un mur donne naissance à une action réelle au profit du cédant qui réclame son prix.

25 juin 1840, jugement du tribunal civil de la Seine qui accueille ce dernier système : — Attendu que Cochet-Deroche a acheté sa maison telle qu'elle se poursuit et comporte, c'est-à-dire avec tous les droits et toutes les charges qui y sont attachés; qu'il doit s'imputer de n'avoir pas mieux étudié l'établissement de la propriété en ce qui concernait la mitoyenneté; - Attendu qu'une action relative à un droit de mitoyenneté constitue un droit réel; qu'en effet un mur mitoyen est une partie intégrante de l'immeuble; que, dès lors, le sieur Blanchet a pu exercer ses droits de suite contre le détenteur de l'immeuble, débiteur encore du prix des travaux; Attendu qu'il ne s'agit pas de réclamation de matériaux employés sur le

Pourvoi fondé sur la violation des art. 529, 555 et 1375 c. civ., en co que l'arrêt attaqué a déclaré action réelle et immobilière, et, comme telle, grevant l'immeuble, quel que soit son possesseur, l'action en remboursement de frais avancés par l'un des propriétaires voisins pour la construction d'un mur mitoyen, bien que cette action ne put avoir pour objet que d'arriver au payement de matériaux fournis et de la main-d'œuvre, qu'clle fùt née du quasi-contrat de gestion d'affaires, et, par suite, ne dût constituer qu'une action purement personnelle et mobilière.

M. le conseiller rapporteur Troplong a fait, sur ce pourvoi, les observations suivantes : « Pour se faire une idée juste du caractère d'une action en payement de frais de mitoyenneté, il faut se rappeler quelques principes. L'obligation de se clore est une charge de la propriété. Lorsque l'art. 665 c. civ. impose aux voisins l'obligation de se clore dans les villes et faubourgs, par un mur mitoyen, c'est une obligation qui pèse sur les héritages contigus et qui les suit en quelques mains qu'ils passent, Done, l'obligation de contribuer à la construction est une charge de la propriété; elle pèse sur le détenteur, quel qu'il soit. Et comment le délenteur y resterait-il étranger? Supposons que son vendeur ne paye pas sa part de frais, il y a alors abandon de la mitoyenneté, et le mur devient la propriété exclusive de l'autre voisin qui a fait les avances (art. 656 c. civ.). Donc, dans l'action dirigée contre le tiers détenteur, il y a toujours l'al

125. De même, le droit qu'a celui dont le voisin a acquis le mur pour le rendre mitoyen, de le reprendre s'il n'est pas payé de la valeur de la mitoyenneté, donne licu à une action réelle qui peut être exercée contre tout détenteur de l'immeuble. En conséquence, le tiers acquéreur est tenu de payer, au delà de son prix, la valeur d'une mitoyenneté et surcharge de mur, prise par son vendeur, ou de démolir la construction faite par ce dernier, sauf son recours contre lui (Paris, 22 fév. 1834, aff. Rousseau, V. Servitude).

126. La demande en dommages-intérêts pour préjudice résultant d'une prise d'eau dans un temps prohibé, est encore une action réelle ou au moins mixte, lorsqu'il y a débat sur l'applicafion de la prohibition au défendeur (Req., 8 avr 1829) (1).

127. Quel est le caractère d'une action en maintien d'un droit d'usage dans une forêt ou sur un immeuble quelconque, forsque à l'appui de son action fe demandeur invoque des titres? Il faut d'abord distinguer entre le cas où les titres invoqués sont ántérieurs au code forestier et le cas où ils sont postérieurs à ce code. Dans le premier cas, l'action, quel que soit son véritable caractère, est réputée réelle par l'art. 9, tit. 1, de l'ord. de 1669, maintenue par l'art. 218 c. forest.; et c'est dans ce sens qu'un arrêt de cassation du 29 avril 1853 a décidé qu'une semblable action re

ternative payer ou délaisser le mur; payer ou renoncer à la mitoyenneté ; comment, dès lors, l'action ne serait-elle pas réelle? Comment n'affecterait-elle pas la propriété? »>

LA COUR;

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)) -- Arrêt.

Considérant que les auteurs des parties ont fait une convention pour se clore par un mur mitoyen dont les frais de construction ont été avancés par les auteurs des défendeurs éventuels; que l'action de ces derniers pour être remboursés de cette avance reposait en premier ordre sur une charge de la propriété, sur une charge réelle, d'après l'art. 663 c. civ.; que, de plus, elle renfermait la condition implicite que s'il n'y était pas satisfait, le détenteur serait tenu de renoncer à la mitoyenneté, conformément à l'art. 656 c. civ.; que, dès lors, cette action était réelle, ou tout au moins mixte, personalis in rem scripta, et qu'elle pouvait être intentée contre tout tiers détenteur; que Cochet-Deroche peut d'autant moins se plaindre, dans l'espèce, qu'il est décidé, en fait, par l'arrêt attaqué, qu'il a acheté sa maison avec tous ses droits et toutes ses charges, et, par conséquent, avec l'obligation qui pesait sur le mur mitoyen; Rejette.

Du 21 mars 1843.-C. C., cb. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Troplong, rap.-Delangle, av. gén., c. conf.-Ledru-Rollin, av.

(1) Espèce (Petit C. Courcy.). — En 1824, Fett, propriétaire d'une usine, cite, devant le juge de paix d'Évreux, la dame de Courcy, pour la faire condamner à lui payer 49 fr., à titre de dommages-intérêts pour préjudice qu'elle lui a causé en faisant, dans un jour défendu, une isa d'eau dans la rivière qui alimentait son usine, contrairement à un ent de police, portant défense de se servir de l'eau, excepté les fériés. La dame de Courcy se borne à une exception d'incompéelle soutient qu'elle avait toujours joui de cette prise d'eau, qu'elle en vertu d'une cession faite par les précédents propriétaires de ; que les règlements du préfet ne pouvaient atteindre que les rivequi étaient en dissidence; qu'ils n'ont rien changé aux arrangements liers; Que, dans la contestation élevée, il etait nécessaire d'exason titre de propriété, et, qu'en conséquence, le juge de paix ne t en connaître. Le juge de paix se déclare incompétent. - Appel. tribunal d'Évreux, par jugement du 9 déc. 1826, confirme la senlu premier juge.

lative à un droit d'usage dans une forêt royale devait être portée, non devant le tribunal du domicile du préfet, représentant l'État, mais devant celui du lieu de la situation de la forêt (2). C'est donc mal à propos que cet arrêt a été critiqué dans l'Encyclopédie đu droit, t. 1, p. 247, où l'on a prétendu que l'action en réclamation d'une servitude n'était réelle que dans le cas où il s'agissait d'une servitude légale, mais qu'elle prenait le caractère d'une action purement personnelle, lorsqu'elle était fondée sur un titre. Non-seulement il n'y a aucune différence entre la servitude légale et celle basée sur un titre sous le rapport de la nature de l'action qui peut en résulter, mais ici la compétence était déterminée d'une manière invariable par un texte de l'ord. de 1669 encore en vigueur, d'après l'art. 218 c. forest., pour tous les droits d'usage créés sous l'empire de cette ordonnance.

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128. S'agit-il, au contraire, d'un droit d'usage dont le titre ést postérieur au code forestier, il y a une seconde distinction à faire ou bien la demande en maintien de la servitude est formée contre le propriétaire duquel le titre est émané, et alors l'action fondée tout à la fois sur un droit réel et sur une obligation personnelle est une action mixte; ou bien cette action est dirigée contre un simple détenteur de l'immeuble, étranger au titre constitutif de la servitude, et alors l'action devient purement réelle,

règles et aux principes posés dans la loi du 24 août 1790 et dans le code de procédure civile, relatifs à la compétence des justices de paix, consi dérées comme justices civiles; Par ces motifs, rejette.

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Du 8 avril 1829.-C. C., ch. req.-MM. Favard, pr.-Mousnier, rap. (2) Espèce: (Le préfet de l'Aude C. Rivals.) - Le 5 juin 1828, Rivals fit notifier au préfet de l'Aude les titres en vertu desquels il avait droit de prendre annuellement dans la forêt royale de Boucheville, située dans le ressort de l'arrondissement de Limoux, mille piles de bois, et cent arbres hêtres, pour l'affouage et les réparations des mines qu'il possédait à Gincla; et en conformité de l'art. 58 c. forest., il l'assigna devant le tribunal de Carcassonne pour ouïr prononcer la validité et la maintenue de ces titres, et ordonner qu'ils continueraient d'être exécutés selon leur forme et teneur, Le préfet de l'Aude conciut à ce que la cause fût renvoyée devant le tribunal de Limoux, dans le ressort duquel était située la forêt de Boucheville, attendu qu'il s'agissait d'une action réelle. Le 14 juillet 1829, jugement par lequel le tribunal de Carcassonne se déclara compétent.

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Sur l'appel, arrêt de la cour de Montpellier, du 7 janv. 1830, qui confirme, en ces termes : « Attendu qu'aux termes de l'art. 58 c. forest., il s'agissait d'apprécier entre Rivals et l'État, les divers titres sur lesquels le premier fondait ses droits d'affouage dans la forêt de Boucheville; que, quand même les droits qui peuvent résulter de ces titres pourraient étro qualifiés d'immobiliers, l'action n'en serait pas moins mixte; et que, dès lors, elle a pu être portée devant le tribunal de Carcassonne. » Voici les motifs du jugement de première instance: « Attendu que l'action intentéo par Rivals a pour objet de faire déclarer que les titres dont it excipe no sont pas atteints par les probibitions portées en l'art. 58 c. forest,, et qu'au contraire ils lui confèrent des droits irrévocables; que, d'après ces titres, ces droits consistent à se faire délivrer annuellement, moyennant une indemnité convenue, une certaine quantité d'arbres et de piles de bois à prendre dans la forêt de Boucheville; qu'il est de principe consacré par la jurisprudence constante de la cour suprême, que les arbres et bois, non encore détachés du fonds, sont considérés comme meubles relativement aux personnes qui ont acquis le droit de les couper ou de se les faire dé livrer; d'où il suit que l'action de Rivals est mobilière, puisqu'elle tend à la réclamation d'objets mobiliers; que cette action est en outre personnelle, ayant pour objet l'exécution d'une obligation résultant de titres; Qu'ainsi le tribunal est compétent. » — Pourvoi par le préfet de l'Aude. Arrêt.

LA COUR;

rvoi de Petit, pour violation de l'art. 9, tit. 3, de la loi du 24 790, en ce que l'action étant personnelle, puisqu'il s'agissait d'une de en dommages-intérêts, d'une réparation pécuniaire, résultant contravention à un règlement de police, le juge de paix était compétent; que le droit de prise d'eau n'ayant pas été contesté devant le juge de paix, il n'y avait pas eu lieu de préjuger la validité de ce titre; qu'il n'avait eu à statuer que sur un dommage, résultant de ce seul fait, que la dame de Courcy avait usé de la prise d'eau un jour prohibé. - Arrêt. LA COUR; tuation de la forêt; - Attendu que la demande dont le sieur Petit avait saisi le juge de paix, comme juge civil, n'était ni une action possessoire ou en complainte fondée sur une possession d'an et jour, ni une action purement personnelle ou mobilière; qu'elle n'était pas purement personnelle, puisque, pour l'accueillir, il aurait fallu juger ou préjuger un droit de prise d'eau, dont la dame de Courcy se disait propriétaire, en vertu d'un titre; modifier ou restreindre l'exercice de ce droit au proft dudit sieur Petit: ce qui donnait à l'action, dès qu'elle ne pouvait pas être qualifiée d'action possessoire, le caractère d'une action réelle, ou tout au moins d'une action mixte; que le juge de paix, saisi de cette demande, devait, comme il l'a fait, se déclarer incompétent, et que le tribunal d'Évreux, en confirmant la sentence de ce juge, s'est conformé aux

-

Vu l'art. 636 c. civ., l'art. 218 c. forest., et l'art. 9, titre 1 de l'ordonnance de 1669; Considérant que, d'après l'article précité de l'ordonnance des eaux et forêts de 1669, maintenu par l'article 218 c. forest., la compétence en matière d'usage se règle par la siQue, d'après le texte positif de cette loi, l'action intentée par le défendeur, qui avait pour objet d'être maintenu dans la jouissance de ses droits prétendus d'affouage, et de prendre annuellement dans la forêt de Boucheville, arrondissement de Limoux, certaine quantité de bois, était une action réelle et en maintien d'un usage, et en cette qualité devait être portée devant le tribunal de Limoux, dans l'arrondissement duquel est située cette forêt; qu'en décidant, au contraire que la cause avait pu être portée compétemment devant le tribunal de Carcassonne, l'arrêt attaqué a violé les articles de lois précités; Par ces motifs, donne défaut contre les défaillants et casse.

Du 29 avril 1833.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1 pr.-Bonnet, rap.-Voysin de Gartempe fils, av. gén., c. conf.-Teste, Lebeau, avi

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130. L'action mixte est celle qui a son principe tout à la fois dans une obligation personnelle et dans un droit réel. Elle présente, à vrai dire, deux actions réunies en une seule, mais deux actions qui tendent à obtenir la même chose; car, si elles avaient deux objets distincts, elles ne formeraient pas une action mixte, mais bien deux actions différentes dont chacune conserverait son caractère et obéirait aux règles qui lui sont propres. Tel est le sens dans lequel il nous paraît qu'on doit entendre la définition assez obscure et assez imparfaite d'ailleurs que donne Justinien de l'action mixte dans le § 20, tit. 6, liv. 4, des Institutes, ainsi conçu : Quædam actiones mixtam causam obtinere videntur, tam in rem quam in personam. Qualis est familiæ erciscundæ actio, quæ competit coheredibus de dividenda hereditate; item communi dividundo, quæ inter eos redditur inter quos aliquid commune est, ut id dividatur; item finium regundorum, quæ inter eos agitur qui confines agros habent. In quibus tribus judiciis permittitur iudici, rem alicui ex litigatoribus ex bono æquo adjudicare, et si unius pars prægravari videbitur, eum invicem certá pecuniâ alteri condemnare. Nous avons dit plus haut, n° 29, que dans notre opinion, ce texte, tant controversé, était purement démonstratif, et que, loin de limiter les actions mixtes aux trois actions divisoires dont il y est parlé par forme d'exemple, on devait considérer comme telles, toutes les actions connues dans le droit romain sous la dénomination d'actions personnelles données contre la chose, actiones personales in rem scriptæ.

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131. Les trois exemples d'actions mixtes choisis par Justinien et la raison qui y est invoquée, étaient, il faut en convenir, assez peu propres à donner une idée exacte des caractères de l'action mixte; aussi non-seulement on a contesté la justesse de cette qualification appliquée aux actions en partage de l'hérédité, de choses communes, et à l'action en bornage; mais ceux même qui ont accepté cette qualification sont loin de s'entendre sur les motifs de leur opinion. Sans parler de ceux qui, comme M. Bon-❘ jean, t. 2, § 292, admettent difficilement l'idée, pourtant assez intelligible, selon nous, de l'action mixte, on voit d'abord que, dans la loi 37, § 1, au Dig., De oblig. et act., Ulpien donnait pour motif de cette qualification appliquée aux actions divisoires, non pas la raison tirée de la condamnation possible de l'une des parties à une somme d'argent, la seule qu'indique le § cité des Institutes, mais cette particularité que chaque partie peut demander la même chose mixtæ sunt actiones in quibus uterque actor est.-Suivant Pothier, Pand., liv. 10, tit. 2, no 19, et Henrion de Pansey, ch. II, la raison qui doit faire réputer mixtes les actions en partage et en bornage, c'est qu'elles sont tout à la fois réelles, en ce qu'elles ont pour objet un immeuble ou un droit immobilier, et personnelles, parce qu'on ne manque jamais d'y joindre des demandes à fin de rapport, de remboursement d'impenses et de restitutions de fruits. La cour de cassation, dans ses observations sur le projet du code de procédure, proposait de formuler en loi l'opinion de Pothier: « Il est, disait-elle, art. 18, des actions auxquelles on donne plus particulièrement le nom de mixtes, c'est-à-dire à la fois réelles et personnelles, parce que, outre la revendication d'une chose, elles embrassent presque toujours des prestations. »

Cette définition n'était point admissible car la véritable conséquence à tirer de la doctrine de Pothier et de la cour de cassation, ce n'est pas que les actions en partage et en bornage sont à la fois personnelles et réelles, mais bien qu'elles sont en ellesmêmes purement réelles, et ne deviennent mixtes que par l'adjonction accidentelle d'une demande de prestations personnelles.

Dans l'opinion de M. Carré, Comp., t. 1, p. 474, les actions en partage et en bornage sont essentiellement réelles, alors même qu'elles comprennent, outre la revendication d'une chose, des prestations résultant de l'obligation légale ou contractuelle du dé

fendeur, ces prestations n'étant que de simples accessoires de la demande principale, et ne pouvant dès lors dénaturer le caractère de celle-ci. « La seule définition de l'action mixte que l'on doive adopter, dit Carré, est celle donnée en ces termes par DuparePoullain, t. 8, p. 4, no 4 : « L'action qui a la chose seule pour objet, et qui naît d'un contrat passé entre le défendeur et un tiers, est l'action mixte. Elle n'est pas purement réelle, quoiqu'elle ait la chose seule pour objet direct, parce qu'elle dérive d'un contrat sans lequel elle n'aurait pas lieu. Elle n'est pas aussi purement personnelle, parce que le contrat dont elle dérive n'est point passé entre les deux parties, et ne forme point un véritable lien personnel entre elles. » - Mais cette théorie de Duparc-Poullain est tout à fait inacceptable. Une action qui a la chose seule pour objet direct sans qu'il existe un véritable lien personnel entre le demandeur et le défendeur, est évidemment une action purement réelle. Qu'importe le contrat intervenu entre le défendeur et un tiers? C'est là un acte étranger au demandeur, res inter alios acta, qui ne peut ni lui profiter, ni lui nuire, ni modifier dès lors le caractère de l'action par lui intentée. Il ne faut donc pas dire, avec Duparc, qu'une telle action n'est pas purement personnelle; il faut dire qu'elle ne l'est pas du tout.

De même que Pothier, mais par d'autres motifs que lui, M. Boncenne considère comme mixtes les actions en partage et en bornage.

«L'action en partage, dit-il, t. 1, p. 72, est moins une revendication de la chose qu'une demande tendante à la détermination de la portion de chacun dans cette chose; elle se dirige nécessairement contre le cohéritier ou le copropriétaire; elle naît du quasi-contrat de communauté, et de la disposition de la loi qui veut que nul ne soit forcé de rester dans l'indivision (c. civ. 815). Ces caractères de personnalité subsistent indépendamment des prestations personnelles qui peuvent être jointes à la demande. Voët trouve dans les actions en partage et en bornage une prédominance de réalité (Defin. ac divis. juxtà seriem Institut., p. 58). Vinnius, au contraire, dit que ces actions sont plus personnelles que réelles (Comm. ad § 20 Instit. ). Je pencherais pour ce dernier avis. »

Quant à nous, au contraire, le sentiment de Voët nous paraft préférable. A nos yeux, l'élément réel est prédominant dans les actions en partage et en bornage, car, alors même qu'il ne s'y joint aucune demande en revendication, il suffit qu'elles aient pour objet la reconnaissance et la consécration du droit de propriété, tel qu'en jouit déjà le demandeur, c'est-à-dire la consécration d'un droit réel immobilier, pour que leur caractère réel soit, ce nous semble, manifeste. L'élément personnel est manifeste aussi dans un grand nombre de cas, par exemple, quand l'immeuble dont le partage ou le bornage est demandé, a été acheté en commun par les parties, ou vendu par l'une d'elles à l'autre; mais il est plus difficile à découvrir dans quelques autres cas, par exemple, lorsqu'il s'agit, soit de l'action en partage d'un immeuble qui a été légué aux deux parties, soit d'une action en bornage fondée sur le seul fait du voisinage. On objecte, il est vrai, que dans ces dernières hypothèses, les actions dont il s'agit dérivent des obligations imposées par les art. 646 et 815 c. civ., mais si cette objection était fondée, il faudrait dire qu'il n'y a point d'action purement réelle, car il est évident qu'il n'y a pas d'action qui ne soit basée sur une obligation imposée par la loi ou sur une sorte de quasi-contrat; il faudrait prétendre, par exemple, que l'action hypothécaire exercée contre un tiers détenteur, action reconnue exclusivement réelle, est, au contraire, mélangée de personalité, attendu Pobligation légale où est le tiers détenteur d'acquitter la dette ou de délaisser l'immeuble.-Au reste, la détermination du caractère des actions en partage et en bornage a plus d'intérêt en théorie que dans la pratique. Elle n'a pas, en effet, d'influence sur le point de savoir devant quels juges doivent être portées ces actions; la compétence à cet égard étant fixée, soit par des dispositions spéciales, qui soumettent les demandes en partage d'une hérédité au tribunal de l'ouverture de la succession, celles en partage d'une société, au tribunal du lieu où celle-ci a son siége (c. pr. 59; c. civ. 1872), soit par l'opi nion générale des auteurs qui attribuent les demandes en bornage, à raison des expertises et visites des lieux qu'elles exigent souvent, au tribunal dans le ressort duquel les biens sont situés. (V. c. pr., art. 3).-La question ne conserve d'intérêt sérieux que reìall

vement au partage d'une chose commune entre deux ou plusieurs personnes qui ne sont pas associées, ce qui constitue, à proprement parler, l'action communi dividundo. Dans ce cas, il nous semble qu'on doit se décider, non par le titre seul de l'action, mais par sa nature propre, c'est-à-dire que le juge devra rechercher s'il y a, outre le droit réel, un contrat ou un quasi-contrat d'où dérive aussi une obligation personnelle, toujours nécessaire pour imprimer à l'action le caractère mixte.

132. Les actions en partage, en bornage, auxquelles elle ajoutait celle en pétition d'hérédité, sont les seules, comme on l'a vu, que la cour de cassation ait qualifiées mixtes dans ses observations sur le code de procédure; mais, comme nous croyons l'avoir dit en parlant du droit romain, et à bien plus forte raison, celte qualification appartient aujourd'hui à un grand nombre d'autres actions. Ainsi, la demande formée par l'acquéreur ou donataire contre le vendeur ou donateur, à l'effet d'obtenir, soit la remise de l'immeuble vendu ou donné, soit le libre exercice du droit immobilier constitué à son profit, est mixte, car le défendeur est assigné, dans ce cas, comme détenteur et comme personnellement obligé.

133. Si la demande tendante à l'exécution d'une aliénation d'immeubles ou droits immobiliers, au lieu d'être exercée contre l'auteur même de l'aliénation ou ses successeurs universels, l'était contre un tiers détenteur, elle serait purement réelle, et non pas mixte.

Il en serait de même, suivant notre savant ancien collaborateur M. Rodière (Exposition des lois de la compét. et de la proc., t. 1, p. 114), de la demande qui n'aurait pour objet qu'une servitude dérivant de la situation des lieux ou de l'autorité de la loi, parce que les parties ne sont alors respectivement obligées qu'à raison des immeubles qu'elles détiennent, ce qui exclut toute idée de lien personnel.

134. Le même auteur estime que l'action serait purement personnelle, quoique ayant trait à un immeuble, si elle était dirigée contre un fermier, ou autre personne qui, au su du demandeur, ne détient pas l'immeuble animo domini. Mais cette dernière opinion ne semble pas fondée. L'action ne cesse pas d'être réelle, pour être dirigée contre un fermier, si le droit réclamé n'est point fondé sur une obligation personnelle de ce dernier, comme s'il s'agit d'une servitude dérivant de la situation des lieux. Que si, au contraire, la demande tend à l'exercice d'un droit immobilier ayant sa source dans une obligation consentie par le fermier, par exemple, si elle a pour objet l'exécution d'un sous-bail, elle a alors le double caractère des actions personnelle et réelle, et, par suite, elle est mixte.

135. Parmi les actions mixtes, on rangeait, dans l'ancien droit, les actions révocatoires d'aliénations immobilières. « Sont mixtes, dit Loiseau (Tr. du déguerpissement, chap. 1), les actions qui, dans le droit, sont appelées actiones personales in rem scriptæ, qui, quant au sujet où elles résident, semblent être réelles, parce qu'elles suivent la chose et non la personne; et, quant à la forme et conclusion, semblent être personnelles, parce qu'elles sont dirigées contre la personne et non contre la chose. Ainsi il faut regarder comme actions mixtes, les restitutions en entier, les actions révocatoires ou rescisoires d'aliénations d'immeubles, les actions possessoires. » Pothier, Introd. aux cout., nos 121 et 122, donne pour exemple d'actions mixtes celles de réméré, de retrait lignager.-M. Boncenne, loc. cit., voit aussi une action mixte dans l'action en rescision de la vente d'un immeuble, pour cause de lésion, de dol, d'erreur ou de tout autre vice; dans celle en résolution à défaut de payement du prix; dans celle en restitution à raison de l'incapacité de l'une des parties, etc. En un mot, dit cet auteur, « toutes les fois qu'une chose est demandée, et que pour l'obtenir il faut faire juger contre une certaine personne, qu'elle est tenue de la remettre par l'effet d'une obligation résultant d'un contrat, d'une loi ou d'un fait, l'action est mixte. »

Nous estimons pareillement que les demandes en révocation d'aliénations d'immeubles sont mixtes du moins quand elles sont dirigées contre l'acquéreur ou le donataire, ou contre leurs représentants. Cette solution, toutefois, a été contredite par M. Poncet, qui regarde les demandes dont il s'agit comme personnelles, même quand elles sont formées contre des tiers TOME III

détenteurs.Les actions en rescision, dit-il, et en général les actions appelées par les commentateurs du droit romain actiones personales in rem scriptæ, dérivent uniquement d'une clause expressément renfermée au contrat ou qui y est sous-entendue. Elles sont donc personnelles quand elles sont exercées contre la partie contractante. Il est vrai que, lorsqu'elles sont exercées contre des tiers, elles ont quelque chose de réel. Mais un mélange accidentel de personnalité el de réalité ne suffit pas, pour donner à une action le caractère de mixte; il n'y a d'actions mixtes que celles qui ne peuvent pas être autre chose, c'est-à-dire qui | présentent, dans leur objet et dans leur nature, les deux caractères de la personnalité et de la réalité tellement confondus, que la pensée ne peut pas les concevoir séparés. M. Poncet ne voit d'actions mixtes que celles en bornage, en partage, et les actions possessoires (Tr. des actions, p. 188). On ne saurait, à notre avis, s'arrêter au système de M. Poncet, même pour le cas où l'action révocatoire est exercée conte l'acquéreur ou le donateur lui-même. Une telle action offre tous les caractères de l'action mixte, car le défendeur est poursuivi à la fois et comme détenteur de l'immeuble, et indépendamment du fait de sa détention. Il est vrai que la demande en nullité du contrat d'aliénation semble principale; celle en restitution de l'immeuble n'en est que la conséquence. Si donc on devait appliquer ici la maxime que l'accessoire suit le sort du principal, il faudrait dire que l'action est personnelle. Mais le législateur, en admettant, à tort ou à raison, qu'il existe des actions mixtes, a manifestement entendu déroger à la maxime dont il s'agit pour les cas où il est question de déterminer la nature des actions. En effet, l'action mixte est celle mélangée de réalité et de personnalité; or, on ne saurait concevoir que, dans ce mélange de l'action personnelle et de l'action réelle, il n'y ait pas, dans tous les cas, prédominance de l'une d'elles; donc le mélange, même inégal, des deux actions, suffit pour constituer l'action mixte. D'ailleurs, restreindre, comme le fait M. Poncet, la qualification d'actions mixtes aux demandes en partage et en bornage et aux demandes possessoires, ce serait rendre inutile la disposition de l'art. 59 c. pr., qui permet de porter la contestation, en matière mixte, devant le juge de la situation ou devant le juge du domicile du défendeur; car on ne voit pas dans quels cas le demandeur pourrait exercer le droit d'option que cette disposition lui accorde, s'il n'y avait pas d'autres actions mixtes que celles reconnues telles par M. Poncet, puisque, pour ces actions, il y a une juridiction expressément déterminée par des dispositions spéciales, comme on l'a vu plus haut, no 158. Notre sentiment est, au reste, celui de M. le professeur Rodière, t. 1, p. 114. Suivant cet auteur, la demande en nullité, résolution, ou réduction d'une aliénation immobilière, dirigée contre la partie même qui a contracté, est mixte, nonseulement quand elle a pour cause quelque fait ou quelque faute du défendeur (dol, violence, inexécution des conventions), mais encore quand elle est fondée sur des causes qui n'impliquent pas nécessairement une faute de la part de cette même partie(comme, par exemple, l'erreur ou la lésion).

136. Mais M. Rodière va plus loin : il prétend que l'action en nullité, en résolution ou en réduction d'une aliénation immobilière, ne cesse pas d'être mixte, alors même qu'elle est dirigée contre un tiers détenteur, attendu, dit-il, que la loi elle-même (c. civ. 930 et 1664) subroge, en quelque sorte, les sous-acquéreurs aux obligations des acquéreurs primitifs, et semble attribuer à l'action exactement le même caractère, soit qu'on la dirige contre les uns ou contre les autres.-Nous ne pouvons admettre cette solution. L'action révo catoire est, à nos yeux, purement réelle, dès qu'elle est dirigéo contre un tiers qui n'a contracté aucune obligation personnelle envers le demandeur, et qui n'est poursuivi qu'à raison de la détention qu'il a de l'immeuble litigieux. Invoquer une prétendue subrogation du tiers acquéreur aux obligations de son vendeur, pour faire sortir de là l'élément personnel, sans lequel l'action dont il s'agit, réelle de sa nature, ne saurait devenir mixte, c'est étendre implicitement le caractère mixte à toutes les actions réelles, car dans quels cas une semblable subrogation ne pourra→ t-elle pas être alléguée? M. Rodière nous semble contredire luimême sa doctrine, car il déclare, p. 113, que l'action formée par un acquéreur en remise de l'immeuble à lui vendu, est purement réelle, quand elle est dirigée contre un tiers détenteur. Or, pour

être conséquent à sa première opinion, M. Rodière ne devrait-il pas dire, au contraire, dans ce cas, comme dans celui où il est question d'une action révocatoire, que le tiers détenteur est subrogé aux obligations de ses auteurs, et qu'en conséquence, l'action formée contre lui n'est pas réelle, mais mixte?

137. Suivant M. Boncenne, Théorie de la proc., t. 1, p. 61 et suiv., on doit regarder comme mixte la demande d'un créancier qui agit pour se faire payer une somme ou une rente, et pour faire déclarer que tel immeuble du débiteur est hypothéqué à la sûreté de la créance. « Si l'immeuble hypothéqué, ajoute cet auteur, n'est plus dans la possession du débiteur, une distinction est à faire le créancier demande-t-il au tiers détenteur le payement de la dette ou le délaissement de l'immeuble? L'action est mixte. Conclut-il simplement au délaissement? L'action n'est que réelle. Dans les actions mixtes on peut donc quelquefois agir contrà quemlibet possessorem, comme dans les actions réelles; mais on y conclut toujours adversarium dare aut facere oportere, comme dans les actions personnelles. »-Cette solution est contredite par M. Rodière qui ne reconnaît pas le caractère mixte de l'action tendante à obtenir le payement d'une créance et à faire déclarer en même temps que tel immeuble du débiteur est hypothéqué à cette créance. La nature d'une action doit, dit-il, être déterminé par ses caractères essentiels, et non par ce qui n'est qu'accidentel. Ainsi, une obligation purement personnelle, mais garantie par une hypothèque, pourra bien produire deux actions, l'action personnelle et l'action hypothécaire, qui est une espèce de demande réelle, mais elle ne produira point d'action mixte. -Nous préférons, quant à nous, l'opinion de M. Boncenne. L'action qui a pour objet de faire déclarer tel immeuble du défendeur affecté au payement d'une rente, nous semble mixte par ellemême, quand elle est dirigée contre un débiteur personnellement tenu du payement de cette rente, puisque ce débiteur est assigné alors et comme obligé personnellement et comme détenteur de l'immeuble sur lequel l'hypothèque est réclamée. Or, elle ne saurait perdre ce caractère par le fait accidentel de sa jonction à une demande en payement d'arrérages échus.

138. Il résulte de ce qui précède, que, pour apprécier la nature des actions, on ne doit pas, à notre avis, s'attacher d'une manière exclusive au caractère dominant de chaque demande,

(1) Espèce: - (Ranchon C. Gasset.) Le 25 mars 1792, Maupin se reconnut débiteur envers Ranchon de 2,000 fr., au payement desquels il s'obligea solidairement avec sa femme, sous l'hypothèque de tous leurs biens. - Les père et mère de Maupin se rendirent cautions solidaires de leur fils, pareillement sous l'hypothèque de leurs biens. - Les sieur et dame Maupin avaient plusieurs enfants. Dès le 21 juin 1791, ils avaient fait à la femme Gasset, leur fiile, et à son mari, cession de tous leurs biens, à la charge de les nourrir et entretenir jusqu'à leur mort. - Les cessionnaires n'ayant pas fait transcrire leur contrat, l'hypothèque consentie à Ranchon avait frappé ces biens. En l'an 7, Ranchon fit citer les époux Gasset, tant comme héritiers de leur père que comme biens-lenants, à l'effet de se concilier, sur la demande qu'il était dans l'intention de former contre eux, en vertu de l'acte du 25 mars 1792. L'assignation au tribunal fut donnée sous les mêmes qualités. Un jugement condamna les époux Gasset à payer la créance de Ranchon, si mieux ils n'aimaient délaisser les biens hypothéqués.

Devant la cour d'Amiens, Gasset et sa femme prétendirent 1° que l'action dirigée contre eux était purement personnelle, puisqu'elle ne pouvait les frapper que comme héritiers de leur père; que cependant le tribunal avait prononcé sur une matière réelle, puisqu'il avait basé sa condamnation sur l'existence de l'hypothèque du demandeur, sur les biens provenant de la succession Maupin; qu'ainsi ce tribunal avait admis une action sur laquelle il n'y avait point eu de préliminaire de conciliation, ce qui était une contravention à l'art. 2 du tit. 10 de la loi du 24 août 1790; 2° que l'exploit d'ajournement ne contenant que l'indication vague des biens provenant de la succession de leur père, il n'avait point été satisfait au vœu de l'art. 3 du tit. 9 de l'ordonn. de 1667; qu'ainsi l'instance avait été nullement entamée et poursuivic. Ces moyens furent accueillis, et Ranchon déclaré non recevable dans sa demande, par arrêt du 8 fructidor an 11.

Pourvoi par ses héritiers. C'est une erreur, ont-ils dit, que de prétendre que la demande formée contre un béritier, tant en cette qualité que comme biens-tenant, est une action purement personnelle. Suivant Pothier, Tr. des hypoth., ch. 2, sect. 1: « L'action personnelle bypothécaire est celle qui a lieu contre l'héritier du débiteur qui est en même temps biens-tenant, c'est-à-dire qui possède des biens de la succession susceptibles d'hypothèque, et par conséquent hypothéqués à la dette.

car toute action étant nécessairement, ou principalement personnelle, ou principalement réelle, il est évident qu'on ne pourrait la qualifier uniquement d'après l'élément qui y prédomine, sans effacer de nos lois les actions mixtes, ainsi que le fait, ou à peu près, M. Poncet. On ne doit pas non plus, exagérant le système contraire, qualifier les actions d'après l'ensemble des conclusion du demandeur; on arriverait par là à abolir toutes les action réelles, car il n'y a pas de demande qui ne contienne quelque che empreint du caractère d'action personnelle. Ce sont alors des ae tions distinctes qui ne tendent pas au même objet et ne sauraient, comme on l'a dit plus haut, n° 137, former une action mixte. Ces conclusions différentes, si elles sont principales, ont leurs règles particulières; sont-elles purement accessoires, elles suivent la demande principale, mais sans en modifier le caractère essentiel. La règle à suivre est, ce nous semble, celle-ci : les conclusions principales ont-elles à la fois pour objet l'exécution ou la révocation d'une obligation personnelle, et la revendication d'un immeuble ou d'un droit réel immobilier, l'action est mixte, alors même que, dans ces conclusions, la demande réelle ne serait présentée que comme une conséquence de l'action principale dirigée contre la personne, ou alors même, au contraire, que la demande en revendication serait placée en première ligne, de sorte que l'obligation personnelle du défendeur ne serait invoquée que comme moyen justificatif de cette demande. Mais les conclusions principales sont-elles purement réelles, il ne saurait suffire alors, pour modifier leur caractère, et rendre l'action mixte, qu'on y ait joint une demande accessoire ayant un caractère personnel, car il est difficile d'admette que la loi ait laissé au demandeur la faculté de convertir à son gré, au moyen de conclusions subsidiaires, toutes les actions réelles en actions mixtes. La règle que nous proposons ici ne sera certainement pas exempte de difficultés dans la pratique; mais ces difficultés sont le résultat inévitable de l'insuffisance et de l'imperfection de la loi qui n'a rien fait pour éclaircir l'une des matières les plus subtiles et les plus difficiles du droit.

139. D'après ces principes, on doit considérer comme mixte la demande formée contre un héritier, tant en cette qualité que comme biens-tenant, c'est-à-dire comme détenteur de biens bypothéqués à la créance du demandeur (Cass., 10 déc. 1806) (1).

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Cette action est personnelle, parce que l'héritier du débiteur, en sa qualité d'héritier, est personnellement débiteur de la dette, puisqu'il succède, en cette qualité, à toutes les obligations personnelles du défunt: elle est en même temps hypothécaire. » Cette doctrine est celle de Loyseau, 1 liv. 4 chap. 4; de d'Héricourt, Tr. de la vente des immeubles; de Despeisses tom. 2, in fine, et de tous les auteurs qui ont écrit sur la matière des hypothèques. Elle est consacrée par le code civil. L'art. 873 porte que les héritiers sont tenus des dettes et charges de la succession, personnellement pour leur part et portion virile, et hypothécairement pour le tout.... » — Ainsi, quand je demande à un héritier le payement d'une dette de la succession, tant en sa qualité d'héritier que comme biens-tenant, l'action que j'intente contre lui n'est personnelle que jusqu'à concurrence de sa part dans la succession. Pour le surplus, mon action est purement réelle; c'est une demande en déclaration d'hypothèque. Il est donc constant que Ranchon, en citant au bureau de conciliation la damé Gasset, tant comme héritière de son père que comme biens-tenant, a cité sur l'action bypothécaire comme sur l'action personnelle, et que l'arrêt attaqué, en annulant la procédure pour défaut de citation en conciliation sur la demande réelle, a fait une application fausse de la loi de 1790.

La cour royale, ajoutaient les demandeurs, a fait aussi une fausse application de l'art. 3, tit. 9 de l'ord. de 1667, qui prescrit la désignation précise, dans l'exploit de demande, des biens hypothéqués. On no pourrait appliquer justement cette disposition qu'à la simple demande en déclaration d'hypothèque formée contre un tiers détenteur à titre singulier. Elle n'a aucun trait à l'action personnelle bypothécaire dirigée contre un héritier, telle que celle formée par le sieur Ranchon, et il ne faut pas perdre de vue qu'au moment où il a agi, il n'a dù ni pu suivre une autre forme. Arrêt.

LA COUR; Vu l'art. 2 du tit. 10 de la loi du 24 août 1790 et l'article 3 du tit. 9 de l'ord. de 1667; - Attendu 1° que ce n'est pas seulement comme héritiers, mais aussi comme biens-tenant, que les mariés Gasset ont été cités en conciliation au bureau de paix, et ensuite au tribunal de première instance; - Que l'action, ainsi dirigée par un créancier hypothécaire, est évidemment mixte, puisqu'elle a pour objet d'obtenir payement, soit en la double qualité, soit à l'un ou à l'autre de ces titres; Qu'ainsi la conciliation a été provoquée par les demandeurs, sur la double action qu'ils avaient droit et intention d'exercer, et que la cour

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