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actions quod jussu, exercitoire ou institoire, était le maître de préférer à cette action, soit l'action tributoire, soit celle de peculio; mais il avait intérêt à ne pas opter pour l'une des deux dernières. Pareillement, celui qui pouvait réclamer l'action tributoire avait aussi la faculté d'intenter celle de peculio et de in rem verso, laquelle lui était le plus souvent, mais non pourtant dans tous les cas, plus avantageuse que la tributoire.— Au reste, la plupart des actions dont il s'agit étaient moins des actions proprement dites, que des qualités ajoutées aux actions ordinaires provenant des contrats ou quasi-contrats. Ainsi, l'action de vente, de louage, etc., devenait institoire, exercitoire, de peculio et de in rem verso, quand le contrat d'où elle découlait avait été conclu avec un institor, un exercitor, ou un individu alieni juris.

45. Indépendamment des actions appelées directes, parce qu'elles étaient données contre le défendeur à raison de son propre fait, il y en avait que l'on nommait aussi directes dans un autre sens ainsi, lorsque les deux actions pouvant résulter d'un contrat synallagmatique n'avaient pas reçu chacune une dénomination particulière, l'une de ces actions était appelée l'action directe, par opposition à l'autre, qui était nommée contraire. Par exemple, dans le commodat, l'action du commodant en restitution de la chose prêtée, était l'action directe du commodat, et l'action du commodataire en payement des indemnités qui pouvaient lui être dues, était l'action contraire de commodat.

46. Enfin, le mot direct appliqué aux actions s'employait encore dans une troisième acception: on appelait directes les actions qui étaient exercées dans le cas même pour lequel elles avaient été instituées, par opposition aux. actions utiles qui ne résultaient pas directement de la loi, mais que l'équité, l'utilité avaient fait introduire dans des cas analogues à ceux pour lesquels existaient les actions directes.

47. Certaines actions étaient appelées noxales : c'étaient celles qui autorisaient le défendeur à se libérer de l'obligation résultant d'un délit, d'un quasi-délit, ou d'un préjudice causé au demandeur, en faisant abandon de la personne qui avait commis le délit ou de l'animal qui avait occasionné le dommage. Elles reposaient sur cette considération que le chef de famille devait être obligé au moins jusqu'à concurrence de son droit de propriété sur l'individu auteur du délit ou sur l'animal cause du préjudice. Elles ne constituaient pas des actions principales existant par elles-mêmes le mot noxales n'exprimait qu'une modification apportée aux actions ordinaires naissant d'un délit ou quasi-délit, modification qui consistait dans la faculté laissée au défendeur de se libérer par l'abandon noxal. Ainsi, les actions furti, vi bonorum raptorum, injuriæ, ex lege Aquilia, etc., devenaient noxales quand elles étaient données contre le chef de famille pour le fait de son fils ou de son esclave. La faculté donnée au père de famille de faire l'abandon noxal de son fils était depuis longtemps abrogée de fait par les mœurs, quand elle fut abolie de droit par Justinien. Il n'y avait lieu dès lors à l'exercice des actions noxales qu'à raison de faits commis par des esclaves. Mais il était permis d'agir directement contre le fils de famille délinquant, dont la condamnation donnait ouverture à l'action de peculio contre le père. - L'action noxale personnelle, mais in rem scripta, était donnée contre tout possesseur de l'esclave auteur du délit.

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48. L'action de pauperie, encore admise dans notre droit, qui se donnait contre le propriétaire d'un animal pour réparation du préjudice occasionné par cet animal, était une action particulière, ayant son existence propre. Elle était, en outre, noxale. Son exercice ne faisait point obstacle à l'application des dispo sitions pénales qui avaient été établies par l'édit des édiles en vue de prévenir les dommages que pouvaient causer les animaux dangereux.

tion ou extension que par contradiction du droit civil; tandis qu'il avait restreint à une durée d'un an les actions pénales par lui créées, ou les actions persécutoires de la chose qui étaient contraires au droit civil. L'empereur Théodose II voulut que toute action personnelle ou réelle s'éteignît par trente ans de non-exercice. Plus tard, la durée de quelques actions fut étendue à quarante ans. Dès lors, on appela perpétuelles les actions qui sub sistaient pendant trente ou quarante ans, et temporaires celles qui ne s'étendaient pas à un aussi long délai.

50. Enfin, les actions se divisaient en transmissibles et non transmissibles aux héritiers.-En général, l'héritier continuant la personne juridique du défunt, pouvait exercer toutes les actions appartenant à celui-ci, et devait subir celles dont il était passible. Mais cette règle n'était pas sans exception: ainsi, les actions accordées au défunt pour protéger des droits tout personnels, comme l'usufruit, l'usage, ne passaient pas aux héritiers, non plus que l'action d'injures, l'action de testament inofficieux, et, en général, celles qui étaient l'exercice d'un ressentiment personnel. Les actions pénales résultant des faits du défunt ne se donnaient pas, quant à la poursuite de la peine même privée, contre ses héritiers, la criminalité d'un fait étant personnelle à son auteur; elles ne se donnaient contre eux que jusqu'à concurrence de ce dont le délit les avait enrichis.-Mais si la litis contestatio avait eu lieu du vivant du défunt, toute action pour ou contre lui, était devenue par là un droit acquis, transmissible au profit ou au préjudice des héritiers, mais seulement, bien entendu, quant à la pénalité privée, si l'on peut parler ainsi, c'est-à-dire celle qui profitait comme réparation à la partie lésée.

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51. Exercice des actions. Il n'était pas permis au demandeur de réclamer plus qu'il ne lui était dû. La demande pouvait être exagérée sous quatre rapports sous celui de la chose demandée (re), quand on réclamait une somme supérieure à celle qui était due, ou la totalité d'une chose sur une partie de laquelle on était sans droit; - Sous le rapport du temps (tempore), lorsqu'on réclamait actuellement ce qui n'était dù qu'à terme ou sous condition; Sous le rapport du lieu (loco), lorsqu'on réclamait dans un lieu ce qui était payable en un autre; - Sous le rapport du mode de l'obligation (causá), lorsque celle-ci étant alternative, ou réclamait un seul des objets qu'elle embrassait, ou lorsque l'obligation étant de genre (generis) on demandait un objet déterminé (speciem). La plus-pétition entraînait, sous le système formulaire, l'absolution du défendeur, et, par suite, la déchéance pour le demandeur de tout exercice ultérieur de la même action, sauf dans le cas rare de la restitution en entier, ou dans celui où l'erreur du demandeur ayant été presque inévitable, le préteur venait au secours de ce dernier. Mais, plus tard, l'exagération de la demande n'eut plus d'aussi graves conséquences. L'empereur Zénon voulut que celui qui aurait agi prématurément (qui tempore plus petit) subît un délai double du délai primitif, sans pouvoir réclamer les intérêts courus dans l'intervalle, et avec obligation, s'il renouvelait son action, de rembourser à son adversaire les frais de la première instance. D'après Justinien, toute autre pluspétition était réprimée par l'obligation imposée au demandeur de payer au défendeur le triple des dommages causés à celui-ci par la demande exagérée.-Les autres erreurs dans la demande, comme la demande en moins, ou celle d'une chose pour une autre, ne faisaient encourir aucun péril au demandeur; elles l'obligeaient seulement à former une action nouvelle; encore cette obligation finit-elle par disparaître, et le demandeur put corriger sa demande primitive, sans intenter une nouvelle instance.

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52. La condamnation pouvait ne pas être de la totalité de la chose due il en était ainsi dans le cas de l'action de peculio quand l'obligation contractée par le fils ou l'esclave excédait leur pécule; Dans le cas où il y avait lieu à la compensation; Et dans le cas où le défendeur jouissait du bénéfice de compétence, c'est-à-dire du droit de n'être condamné que jusqu'à concurrence de ce qu'il pouvait payer sans se réduire à un entier dénûment.Le bénéfice de compétence (exceptio quod facere potest) apparte nait aux ascendants poursuivis par leur descendants; -Aux

49. Envisagées du point de vue de leur durée, les actions se divisaient en perpétuelles et temporaires.-Avant le temps du BasEmpire, les actions fondées sur une loi, un sénatus-consulte, ou toute autre source du droit civil, étaient réellement perpétuelles, sauf la revendication, qui s'éteignait par l'usucapion. La plupart des actions basées seulement sur l'édit du préteur n'avaient, au contraire, qu'une durée temporaire, communément annale. Tou-frères, entre eux; Au patron, à la patronne et à leurs descentefois le préteur avait aussi créé des actions perpétuelles ; il avait déclaré telles les actions pénales, et généralement les actions persécutoires de la chose, qui étaient données plutôt par imita

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dants actionnés par un affranchi; Aux conjoints entre eux;Aux associés agissant l'un contre l'autre par l'action pro socio; Au donateur attaqué par le donataire en exécutios de la dona

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tion; A celui qui avait fait cession de biens, et à quelques autres encore.

53. Sous l'empire des actions de la loi, il n'était permis à un citoyen d'agir en justice au nom d'autrui que dans quelques cas exceptionnels; mais sous le système formulaire, la faculté de se faire représenter en justice s'étendit, et l'on admit successivement à plailer pour autrui les cognitores, représentants constitués solennellement en présence du magistrat, les procuratores ad litem, mandataires qui n'avaient pas besoin d'être nommés in jure, ni en termes sacramentels, les defensores, qui se présentaient pour plaider à la place d'autrui, sans en avoir reçu mandat, véritables negotiorum gestores, ainsi que les tuteurs et les curateurs. Dans le dernier état du droit, il n'existait plus de cognitores.

54. Les plaideurs se devaient respectivement certaines garanties. -Sous la procédure formulaire, le défendeur à une action réelle qui restait en possession de la chose, durant le procès, devait donner la caution judicatum solvi. Faute par lui de fournir cette caution, le demandeur, s'il consentait à la donner lui-même, devait être mis en possession de l'objet litigieux. — En matière d'action personnelle, le demandeur et le défendeur n'étaient tenus de fournir aucune caution, lorsqu'ils agissaient en leur propre nom; mais s'ils se présentaient comme procuratores, ils devaient donner, le premier, la caution rem ratam dominum habiturum; le second, la caution judicatum solvi. Les tuteurs et curateurs étaient soumis aux mêmes garanties que les procurateurs. Dans le nouveau droit, le défendeur n'était plus tenu, même en matière réelle, de donner caution pour la valeur du litige, mais il devait garantir, souvent par une simple promesse, qu'il se présenterait en personne et resterait en cause jusqu'à la fin du procès. Lorsqu'il était représenté par un procurator ou un defensor, le défendeur devait toujours donner la caution judicatum solvi.

55. Diverses mesures étaient établies pour prévenir ou réprimer les procès téméraires. Les parties et leurs avocats devaient, d'après une constitution de Justinien, jurer qu'elles croyaient leur cause bonne. Ce serment s'appelait jusjurandum calumniæ. La partie qui succombait était condamnée à payer à son adversaire les dommages et les dépens du procès; quelquefois le défendeur était, en outre, condamné au double ou au triple. Enfin, la peine du plaideur téméraire était, dans certains cas, l'infamie, par exemple, lorsque le défendeur succombait dans une action de vol, de biens enlevés par violence, d'injure ou de dol.

56. Le juge était obligé de statuer conformément aux lois; sinon sa sentence était nulle, et même sans appel, et il pouvait être passible d'une peine publique.

57. Tel est, en substance, le système du droit romain sur les actions judiciaires. Nous avons tâché de l'esquisser dans ses diverses phases, tantôt en passant rapidement sur ce qui n'a plus qu'un intérêt purement historique, comme les actions de la loi et les formules, tantôt en donnant plus de détail au fond même de la matière, comme à la nature des actions et à leurs divisions principales qui, dérivant de la nature même des choses, semblent appartenir à tous les temps et pouvoir offrir quelques renseignements utiles à toutes les législations. Ceux qui désireraient de plus amples explications, plus propres à satisfaire une louable curiosité qu'à servir utilement la science, pourront consulter avec fruit les Institutes de Gaïus, si heureusement retrouvées en 1816, celles de Justinien, le titre du Digeste De oblig. et actionibus, et les savants commentaires de MM. Ducaurroy, Ortolan, 'Zimmern et Bonjean.

58. Des actions au moyen âge. - Il y a bien peu d'enseignements à demander à cette époque de notre histoire sur la matière qui nous occupe. Les épreuves du feu, de l'eau, de la croix et une foule d'autres usitées sous le nom de jugement de Dieu, et le combat judiciaire admis aussi à ce titre dans presque toute l'Europe, après l'invasion des peuplades du Nord et la chute de l'empire romain, montrent assez tout ce qu'il y avait de barbare dans les mœurs de ces temps d'ignorance. On s'étonne seulement qu'un semblable état de choses ait si lougtemps survécu au progrès de la raison et des lumières. Le combat judiciaire se trouve établi concurremment avec d'autres épreuves dans le 4o capitulaire de Charlemagne, qui ordonne tour à tour l'épreuve de la croix ou le

duel avec le bâton et le bouclier, aut cruce, aut scutc et fuste; mais il remonte à une époque beaucoup plus ancienne, et n'a été aboli en France que par l'ordonnance de Philippe le Bel de 1305, car on sait que, si Louis IX avait commencé cette réforme, ses établissements n'avaient force de loi que dans ses domaines. Nonseulement le combat judiciaire continua d'être usité depuis le règne du saint roi, comme auparavant, mais cette coutume absurde et barbare survécut même pendant plus de deux siècles à l'ordonnance de Philippe le Bel, comme le prouve le duel de Jarnac et Lachataigneraie, ordonné par le parlement de Paris sous Henri II, vers le milieu du 16° siècle, exemple que M. Meyer, t. 1, p. 346 (Esprit des instit. judiciaires), atteste avoir été le dernier. Ce fut, au reste, peu d'années auparavant que le pape Jules II abolit le combat judiciaire dans ses États, par sa constitution du mois de juillet 1505.

59. Il ne faudrait pas croire cependant que cet usage, qui eut d'abord son principe dans la superstition si connue des peuples de la Germanie, et dans l'ignorance presque absolue où l'on était alors de l'écriture, se soit continué avec la même fréquence dans tous les siècles du moyen âge, ni même qu'il ait exclu dans son origine les autres moyens plus raisonnables et plus naturels d'arriver à la connaissance de la vérité, tels que la preuve testimoniale et l'écriture, lorsque plus tard les peuples conquérants du Nord l'eurent empruntée aux peuples vaincus. Mais il paraît qu'alors la procédure était fort sommaire et s'éloignait complétement des formes compliquées et subtiles des actions romaines.

60. Nous ne connaissons aucun document propre à donner une idée des formes pratiquées par les peuples du Nord dans les premiers temps de l'invasion, alors que toutes les contestations civiles et criminelles étaient portées devant le peuple assemblé ou les comices de la nation. Une grande incertitude règne aussi sur les formes de procédure qui ont pu être suivies devant les petits comices, placita minora, auxquels plus tard fut soumis le jugement des affaires, par suite de l'extension des peuplades conquérantes, qui fit sentir le besoin d'une juridiction locale, pour ne laisser aux grandes assemblées ou états généraux que le soin des affaires d'intérêt général pour la nation tout entière. Tout annonce cependant que le système des actions judiciaires y était d'une extrême simplicité. « Celui qui voulait attaquer en justice une autre personne, dit M. Meyer, t. 1, p. 381, la citait en présence de témoins pour assister aux plaids tenus à jour fixe, ou à tel jour que le comte indiquait; il expliquait la cause de sa demande; le défendeur comparaissant proposait ses moyens : lorsqu'il faisait défaut, il était cité de nouveau jusqu'à trois fois avec une augmentation d'amende qui était partagée entre le comte et le demandeur. Lorsqu'il avait déduit ses défenses, le demandeur s'adressait aux hommes libres qui assistaient aux plaids et les interpellait de dire la loi aux parties, et les juges rendaient leur jugement. C'était le comte qui présidait à la séance; c'était lui qui ordonnait aux parties comme au public de se tenir dans le silence nécessaire pour examiner la cause, et dans le respect dù à la justice; c'était lui qui dirigeait la procédure entière. » On voit, au reste, par les formules lombardes que Bignon a ajoutées à celles de Marculfe, que de longs délais étaient ordinairement accordés au défendeur, soit pour produire des témoins, soit pour se défendre par le serment d'un certain nombre de conjurateurs, idée empruntée aux lois romaines, soit pour recourir à d'autres épreuves et au combat judiciaire, qu'au reste presque toutes les formules finissaient par permettre au juge d'ordonner en ces termes Vadiate pugnam.

61. Le système des actions judiciaires commença à s'améliorer, lorsque, pour mettre fin à l'abus qu'avaient fait les comtes du droit de nommer, sous le titre d'Arrimans ou Rachimbourgs, les juges appelés à prononcer sur les intérêts privés, les empereurs instituèrent un certain nombre de juges, sous la dénomination de scabini, scabins ou échevins, auxquels ils confièrent exclusivement l'administration de la justice, comme on le voit dans le premier capitulaire de Charlemagne, de l'année 809, art. 13, et dans le deuxième capitulaire de la même année, art. 5. Toutefois on peut douter, avec M. Meyer, t. 1, p. 409, que ce devoir imposé aux échevins, dont le nombre n'était pas déterminé par la loi, quoigne la loi ripuaire eût exigé le concours de sept hommes

libres pour la validité d'un jugement, ait enlevé aux arrimans ou rachimbourgs le droit de prendre part aux jugements, lorsqu'ils le croyaient convenable; mais il est vrai de dire que les hommes libres, presque entièrement livrés aux exercices de la guerre, n'avaient vu dans le pouvoir de juger qu'un devoir onéreux dont ils se regardèrent comme affranchis par l'institution des scabins, et qu'ils se montrèrent dès lors peu jaloux de l'exercer. On voit par l'art. 13 du second capitulaire de Charlemagne, de 813, que les scabins, pourvu que, réunis à des hommes libres, ils fussent au nombre de sept, rendaient un jugement qui était obligatoire pour les parties et pour le comte lui-même, et c'est ce que confirme M. Meyer, t. 1, p. 421, en citant les Assises de Jérusalem, qui appartiennent, comme on sait, au douzième siècle, et sont assurément l'un des monuments les plus curieux et les plus sûrs de la législation de l'Europe au moyen-âge, puisque toutes les nations qui avaient pris part aux croisades, ont concouru à leur rédaction. Trois garanties principales résultaient de l'institution des scabins ou échevins. D'une part, ils avaient une instruction supérieure aux hommes de guerre, arbitrairement désignés par les comtes pour rendre la justice aux parties; en second lieu, l'habitude de juger leur donnait une expérience que ne pouvaient acquérir des hommes accidentellement appelés aux fonctions de juges. Enfin, nommés par le concours du peuple et le choix du prince, comme le prouve M. Lehuërou, dans son Hist. des instit. mérovingiennes, t. 2, p. 384, ils devaient exactement remplir les devoirs de leur charge pour ne pas encourir le mécontentement des envoyés du roi, missi dominici, qui étaient chargés d'inspecter l'administration de la justice dans tout l'empire.

62. Ces garanties, tout imparfaites qu'elles étaient, ne devaient pas survivre à l'invasion d'un régime qu'on peut qualifier la négation réelle de presque toutes les garanties sociales. Lorsque la plupart des hommes libres se firent les vassaux des comtes, qui eux-mêmes le devinrent des missi dominici, constitués en seigneurs héréditaires de la contrée dont la haute administration leur avait été confiée, et qu'ainsi un immense réseau de féodalité s'étendit sur l'Europe, la juridiction des échevins ne tarde pas à disparaître pour faire place à celle des seigneurs, devenus juges souverains et absolus de leurs vassaux comme du petit nombre d'hommes libres qui existaient encore. Mais, comme la providence se plaît quelquefois à susciter le bien de l'excès du mal, le pouvoir arbitraire du suzerain sur ses vassaux fit sentir à ceux-ci le besoin d'obtenir, non pour la nation, mais pour eux, le privilége de se rendre la justice à eux-mêmes et de n'être jugés que par leurs pairs, sans l'intervention du seigneur ni des hommes de justice qui le représentaient. Dans ce nouvel état, suivant l'observation de M. Meyer, t. 1, p. 460, les formes judiciaires, sous le rapport extérieur, demeurèrent à peu près les mêmes qu'à l'époque de liberté qui avait précédé le régime féodal; mais au fond elles avaient subi une modification profonde, et l'on peut dire un changement total: car, tandis que les comtes n'avaient d'autorité que celle qu'ils tenaient de l'assemblée populaire, composée d'hommes libres qu'ils présidaient, la cour des pairs, dont on vient de parler, composée des vassaux de chaque grand fief, ne tenait son pouvoir que du seigneur auquel elle était attachée. C'est à cette différence d'origine du pouvoir judiciaire que M. Meyer, s'éloignant de l'opinion de Montesquieu, attribue l'institution de la précieuse garantie résultant du droit d'appel. De

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même qu'à Rome, cette garantie demeura ignorée aussi longtemps que le pouvoir judiciaire exercé par les préteurs ne fut qu'une émanation de la puissance populaire, de même, en Europe, on n'eut aucune idée d'affaiblir, par la création d'un droit d'appel, l'autorité des jugements émanés soit de l'assemblée générale du peuple, soit de ses assemblées locales, soit même des scabins ou échevins, qui, bien qu'institués par le prince, étaient censés rendre la justice au nom du peuple, par suite de la faculté, reconnue en droit, quoique peu exercée en fait, qu'avaient tous les arrimans ou hommes libres de se joindre à eux pour administrer la justice. Mais, dès que le droit de justice attribué à la cour des pairs dans chaque fief ne fut plus qu'une émanation du pouvoir seigneurial, il parut naturel de penser qu'un autre seigneur, d'un ordre supérieur, pouvait réparer les erreurs de son vassal et remettre en question ce que celui-ci avait jugé à l'égard de ses propres vassaux.

il

63. Quoi qu'il en soit, les garanties judiciaires ne commencèrent à se développer qu'après et assez longtemps après l'ordonnance de Philippe le Bel de 1302 qui, en rendant le parlement de Paris sédentaire, posa réellement le principe de l'institution de l'ordre judiciaire, c'est-à-dire d'un corps de magistrats chargés d'administrer la justice au nom du roi dans toute l'étendue du royaume. Cependant, et par une triste compensation, faut remarquer que c'est sous ce régime perfectionné que naquit et fut mis en pratique le système odieux des procédures secrètes. L'ordonnance de 1667 a eu pour but de réunir en un corps de doctrine les règles que la pratique des tribunaux pendant plusieurs siècles avait fait admettre sur la procédure. Quoique fort au-dessous des éloges qui lui ont été donnés, on ne peut méconnaître cependant que cette ordonnance n'ait introduit elle-même plusieurs innovations heureuses. Inspirée par le génie de Colbert et du chancelier Séguier, elle fut préparée par les soins d'une commission savante où siégeaient les premiers magistrats et les premiers jurisconsultes de l'époque, tels que d'Ormesson, Pussort, Voysin, Hotman, et cette commission eut de longues conférences avec une députation du parlement de Paris. Mais on peut s'étonner que cette ordonnance, élaborée avec tant de soins, ne contienne aucune disposition particulière sur la matière qui nous occupe; on y trouve bien le titre 18 consacré aux actions possessoires, mais elle garde le silence le plus profond sur la nature et le caractère des actions considérées en général, sujet auquel la diversité des coutumes donnait alors tant d'importance.

64. Si l'on ne peut adresser le même reproche au code de procédure civile, il est permis peut-être de regretter le laco. nisme avec lequel ses auteurs ont traité ce sujet. La cour de cassation, dans ses observations préliminaires sur le projet du code de procédure civile, avait proposé de placer au frontispice de ce code un ensemble de règles relatives aux actions. Ces règles étaient contenues dans les deux premiers titres du livre 1, intitulé: De l'administration de la justice en général, et présentaient une série de dispositions que nous croyons devoir faire connaître, quoiqu'elles n'aient pas été adoptées (1), parce qu'elles offraient le caractère de notions doctrinales plutôt que celui de prescriptions législatives. A ce titre même de notions doctrinales, elles ont une importance égale à l'autorité qu'elles empruntent à la haute et savante compagnie de laquelle elles émanent, quoique à quelques égards elles ne nous paraissent pas à l'abri d'une juste

SECT. 1. - De la nature des actions.

5. Les actions sont mobilières ou immobilières: mobilières, si leur objet est mobilier; immobilières, si leur objet est un immeuble, ou un droit réputé tel par la loi (*).

6. Elles sont aussi personnelles ou réelles.

L'action personnelle est celle par laquelle on agit en justice contre celui qui nous est personnellement obligé, en vertu d'une obligation conventionnelle ou d'un engagement sans convention;

Elle a pour objet des prestations quelconques, ou la nullité ou rescision d'un acte illégal ou illégitime, ou la réparation de quelque dommage; (*) Cette distinction, déjà indiquée par l'art. 526 c. civ., est essentielle, non-senlement pour déterminer la compétence des tribunaux, mais encore pour s'assurer si une action qui se trouve dans la succession appartient à la succession mobilière. ou à la succession immobilière; car, dans les neuf départements réunis et dans les quatre départements du Rhin, la force des anciens usages fait que l'héritier des moubles est souvent tout autre que l'héritier des immeubles. 3

critique. Nous extrairons toutefois de ce document les dispositions relatives aux actions possessoires que la cour de cassation avait

Elle est nommée personnelle, parce qu'elle est attachée à la personne obligée, et qu'elle ne peut être dirigée que contre elle et ses héritiers. 7. Par l'action réelle on revendique une chose certaine et déterminée, mobilière ou immobilière, comme étant notre propriété.

8. Les actions mobilières sont personnelles. Cependant, si elles résultent d'une obligation de livrer un immeuble déterminé, elles sont réputées immobilières, conformément aux art. 526, 918, 1158 et 1585 c. civ.

9. Les objets mobiliers suivent la personne obligée à les livrer; ainsi les actions réelles, mobilières, ne sont distinguées des actions personnelles, que dans les cas spécifiés par la loi.

Des actions en rescision et alternatives. — 10. Les actions en rescision pour cause de vol, violence ou lésion, sont personnelles, quel que soit leur objet mobilier ou immobilier.

Il en est de même des obligations alternatives; mais si l'option a précédé l'exercice de l'action, et si l'objet choisi est un immeuble, dès lors, elle sera réputée immobilière.

11. Les actions en rescision s'exercent contre ceux avec qui l'on a contracté, et leurs héritiers; et l'on peut encore citer en cause les tiers détenteurs, afin que le jugement à intervenir soit commun à toutes les parties.

12. Celui qui a plusieurs causes de rescision doit les cumuler dans la même instance; il ne sera pas recevable à en proposer une seconde, après avoir succombé sur une première, en premier ressort, à moins que la seconde n'ait été découverte postérieurement à l'instruction de l'action.

De l'action en garantie.-15. L'action en garantie, en cas d'éviction, est personnelle; elle est exercée contre le vendeur, ou celui qui le représente, à titre universel, ou à titre particulier.

Elle est accessoire ou principale:

Elle est réputée accessoire, si elle est intentée et suivie en même temps que l'action en éviction, et dans la même instance; elle suit le sort de Paction en éviction.

Elle est principale, si elle est intentée séparément, et elle ne diffère en rien de toute autre action principale.

De l'action de gage et des actions hypothécaires. sont réelles.

14. Ces deux actions

15. L'action de gage compète au débiteur pour répéter l'effet mobilier qu'il a donné en gage à son créancier, lorsque celui-ci abuse du gage, ou lorsque le débiteur est libéré.

Elle ne peut s'exercer que contre le créancier et ses héritiers.

16. L'action hypothécaire proprement dite, appartient au créancier, ou à ses héritiers ou ayants cause, pour poursuivre l'expropriation forcée de l'immeuble qui lui est hypothéqué pour sûreté de la créance;

Elle s'exerce contre tout détenteur de l'hypothèque, ou de partie d'icelle. 17. L'action en déclaration d'hypothèque est réputée réelle, ainsi que celle en radiation d'inscription hypothécaire; cette dernière est principale ou accessoire, ainsi qu'il est expliqué à l'art. 2159 c. civ.

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De la pétition d'hérédité. - 20. Par la pétition d'hérédité, l'on demande la délivrance d'une succession ou de partie d'icelle;

Elle compète à celui qui est héritier, soit ab intestat, soit en vertu d'un testament valable, et à ses héritiers ou ayants cause;

Elle s'exerce contre le détenteur de la succession ou d'une partie, ainsi que contre celui qui, par dol, a cessé de posséder.

De l'action en partage. 21. L'action en partage de succession est celle que chaque héritier a contre ses cohéritiers, pour les obliger à partager les biens héréditaires, qui sont communs entre eux;

Elle s'exerce d'après les règles prescrites aux art. 815, 816 et suivants c. civ.

22. L'action en partage d'un bien particulier appartient à ceux qui ont une chose particulière, commune entre eux, à titre de propriété.

Ceux qui ont pris, en commun, un bien à loyer ou à ferme, n'ont cette action que dans le cas où l'exploitation peut se partager, sans préjudicier au propriétaire.

Il en est de même de deux usufruitiers ou de deux possesseurs du même bien, à titre d'antichrèse.

23. Toute action en partage est imprescriptible, tant que les consorts jouissent en commun, quoique un seul soit de fait possesseur du bien. De l'action en bornage. 24. L'action en bornage appartient au propriétaire d'un héritage, dont les limites sont confondues avec celles des héritages voisins;

cru devoir comprendre dans son travail: on les trouvera dans notre traité sur cette matière où elles seront mieux à leur place.

Elle tend à faire cesser cette confusion, en replaçant les bornes déplacées, ou en en faisant établir de nouvelles, à frais communs.

25. Si les parties ne sont pas d'accord sur les endroits où les bornes doivent être placées, et si les titres produits de part et d'autre ne suffisent pas pour les déterminer, le juge pourra admettre la preuve, par témoins, sur le placement des anciennes limites, et, à défaut d'anciennes limites, sur une jouissance propre à opérer la prescription.

26. L'action en bornage ne compète ni au fermier, ni à l'usufruitier; mais ils peuvent obliger le propriétaire à faire fixer, dans un temps déterminé, les limites de son bien.

Cette action s'intente contre les propriétaires des fonds adjacents, et non contre les fermiers ou usufruitiers de ces mêmes fonds.

SECT. 3. Des actions pétitoires et accessoires.

-

contre

27. On nomme pétitoire toute action par laquelle on revendique, les possesseurs, un immeuble ou un droit réputé tel par la loi. L'action possessoire a pour seul et unique objet la possession d'un fonds ou d'un droit immobilier, dont on ne jouit pas, ou dont l'on ne jouit pas paisiblement et sans trouble.

De la provision. 28. L'action tendante à obtenir provisoirement la possession d'un immeuble ou d'un droit immobilier, est nécessairement l'accessoire d'une action pétitoire; on ne peut demander la provision qu'au juge, qui est saisi du fond du différend, et il ne peut l'accorder qu'à celui qui a prouvé, au moins présomptivement, son droit à la chose.

29. Cette action incidente n'est recevable que quand l'immeuble litigieux est sous le séquestre, ou lorsque celui qui le détient ne l'a point possédé comme propriétaire, pendant plus d'une année avant que l'action pétitoire fùt intentée.

50. Si le défendeur a la possession annale du bien litigieux, tandis que le demandeur a un titre valable, qui cependant peut être rescindé en définitif, le juge pourra accorder ou refuser la provision, selon les circonstances de la cause.

31. La provision ne peut être demandée en instance d'appel, si l'un a perdu sa cause au principal, en première instance (*).

32. Si l'on n'a demandé, provisoirement, que la possession d'une partie des biens compris dans l'action principale, et si cette demande provisoire a été rejetée, ou si le demandeur ne l'a point obtenue telle qu'il le désirait, l'appel qu'il interjettera du jugement de provision sera recevable, et le juge d'appel pourra y prononcer, même avant que la cause principale soit déférée à sa connaissance; mais, dans ce cas, la demande provisoire formée en première instance, ne pourra être augmentée ni étendue devant la cour d'appel (**).

Cette disposition est applicable à la demande provisoire d'une partie des fruits ou revenus des biens compris dans la demande principale.

33. Mais si la demande provisoire ne tend qu'à obtenir, à titres d'aliments, une pension annuelle ou une somme quelconque, sur les biens qui font l'objet de l'action pétitoire, elle pourra être augmentée, tant en première instance qu'en instance d'appel.

34. Celui qui obtient la provision doit, avant d'exécuter le jugement ? donner caution, pour assurer la restitution des fruits, en cas qu'il suecombe au principal.

Sont dispensés de cette caution, ceux qui obtiennent des provisions alimentaires.

Les art. 35 à 44 inclusivement sont relatifs aux actions possessoires. - V. Actions possessoires.

Dispositions générales. 45. Le demandeur n'est pas obligé de spéciGer nominativement l'action qu'il exerce il suffit que sa demande soit claire et précise.

46. La plus-pétition ne détruit l'action dans aucun cas. Celui qui demande le plus est réputé demander le moins, quoiqu'il n'y ait pas conclu, et le juge peut le lui adjuger, pourvu que le moins soit compris dans le plus, qui est l'objet de sa demande.

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(*) La raison est que l'adversaire réunit à sa possession un titre authentique, aussi longtemps que le jugement de première instance n'est pas infirmé.

(**) Par exemple, si l'appelant n'avait demandé provisoirement en première instance que la possession d'un quart des biens compris dans l'action dont le juge de première instance est saisi, il ne pourra pas, en instance d'appel, demander la possession provisoire du tiers ou de la moitié de ces mêmes biens, parce que ce n'est que la demande de la possession du quart qui est dévolue au juge d'appel. La aue propriété de tous les biens litigieux, et la possession des trois quarts de ces mêmes biens sont restées soumises à la juridiction du premier tribunal, et le juge d'appel ne pourrait en connaitre sans une évocation réprouvée par nos lois.

65. Comme on l'a rappelé en commençant no 3, c'est au titre des Ajournements que le code de procédure civil s'est occupé des actions, et nous avons dit aussi qu'il avait donné bien peu de place à cette matière. Il ne lui a consacré, en effet, que les premiers paragraphes de l'art. 59, ainsi conçus : « En matière personnelle, le défendeur sera assigné devant le tribunal de son domicile; s'il n'a pas de domicile, devant le tribunal de sa résidence. -S'il y a plusieurs défendeurs, devant le trial du domicile de P'un d'eux, au choix du demandeur. En matière réelle, devant le tribunal de la situation de l'objet litigieux.in matière mixte, devant le juge de la situation, ou devant le juge du domicile du défendeur. »

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Non-seulement ce texte, qui se borne à poser une règle de compétence, ne présente aucune définition des actions personnelle, réelle et mixte, ni aucune disposition propre à en déterminer le caractère et les effets, mais, chose vraiment étrange, on retrouve le même silence soit dans l'exposé des motifs de M. Treilbard, soit dans le discours de M. Faure, organe du tribunat au corps législatif. Dans le premier de ces documents, l'orateur du gouvernement dit : « J'ai annoncé que je m'occuperais particulièrement du titre des Ajournements, non que je me propose d'arrêter votre attention sur les articles de ce titre qui ne présentent ni difficultés, ni dispositions nouvelles, mais parce que l'exploit d'ajournement est la base, la pierre fondamentale de l'instruction, et que cet acte étant sujet à plus de formalités que tout autre, je dois vous démontrer qu'on n'y exige que l'absolu nécessaire. » M. Treilhard s'attache ensuite à expliquer les motifs des différentes formalités de l'ajournement, mais sans dire un seul mot des caractères de l'action personnelle, réelle et mixte. Il ne rappelle pas même la règle de compétence consacrée par les premiers paragraphes de l'art. 59 qu'on vient de lire; cependant ce n'est pas d'une disposition de ce genre que l'orateur du gouvernement a pu dire avec fondement qu'elle n'offrait aucune difficulté. Quant à l'orateur du tribunat, il se borne à ce peu de mots : « Le code établit qu'en matière personnelle, le défendeur doit être assigné devant le tribunal de són domicile; et, s'il n'a pas de domicile, devant celui de sa résidence.... La nouvelle loi détermine devant quel tribunal le défendeur doit être assigné, quand la matière est réelle ou mixte. » Or, ces quelques paroles de M. Faure ne nous apprennent rien de plus que le silence de M. Treilhard.

contre eux, sera intentée devant le juge de l'un d'eux, au choix du demandeur.

48. Un Français qui a contracté en France, avec un étranger qui n'y reside pas, et qui n'y possède pas de bien, doit le poursuivre en justice devant le juge du ressort où le contrat à été passé (V. l'art. 14 c. civ.). Si le contrat a été passé en pays étranger, le Français poursuivra cet étranger devant les tribunaux de Paris.

49. Si cet étranger a quelque immeuble en France, il sera poursuivi devant le juge de la situation de cet immeuble.

Ces dispositions peuvent aussi être suivics, quoique le contrat ait été passé en France.

50. Quant aux actions réelles ou mixtes, on suivra, à l'égard des étrangers, les mêmes règles qu'à l'égard des personnes domiciliées en France.

51. S'il s'agit d'une affaire commerciale entre un Français et un étranger, et si l'étranger est cité devant un tribunal de première instance, dans le ressort duquel se trouve un tribunal de commerce, l'étranger pourra demander le renvoi de la cause devant ce dernier tribunal.

52. Lorsque l'étranger n'aura pas en France de biens connus, ni donné caution sur la réquisition du demandeur pour sûreté da recouvrement des condamnations qu'il pourrait essuyer, les condamnations contre lui prononcées seront exécutables par corps (*), à moins que le demandeur n'ait négligé de demander ladite caution en temps et lieu.

83. Une cause, étant commencée devant le juge du domicile du défen

Nous proposons cette législation, parce que c'est celle des Anglais, des AngloAméricains, et de toute l'Allemagne. Dans ces pays, dans la Hollande et dans la Belgique avant la conquête, de même que dans les départements du nord, avant la révoJution, lorsqu'une personne, même domiciliée, ne représentait ni meubles, ni immeubles, sur lesquels on put exécuter un jugement de condamnation, le juge, sur le simple rapport de l'huissier, joint à la requête de l'exécutant, permettait de saisir la personne condamnée et de l'emprisonner, et l'on n'avait pas la douleur de voir des débiteurs déhontés, qui, ayant caché leurs biens sous le nom de leur femme, de leurs enfants, ou de leurs amis, vivent dans Paisance, et bravent la misère de leurs eréanciers

66. Les législations étrangères ne paraissent pas plus perfectionnées que la nôtre sur la matière qui nous occupe, et ne sauraient donner lieu à une conférence de quelque intérêt, en ce qui concerne le fond même du droit. Toutes admettent à cet égard la distinction du droit romain, qui est d'ailleurs dans la nature des choses, entre les actions personnelles, réelles et mixtes. On ne la trouve pas seulement dans les codes qui se sont modelés sur les nôtres, elle est encore admise par la jurisprudence des nations qui n'ont pas de lois écrites, et particulièrement par lajurisprudence anglaise. Il y a cela de remarquable dans le droit britannique, que les actions réelles y sont encore qualifiées actions féodales par quelques écrivains. C'est ce qu'atteste Blackstone, t. 4, p. 192, et il ajoute à cet égard · « Autrefois c'était par des actions réelles que se terminaient toutes les contestations relatives aux biens immeubles; mais aujourd'hui elles sont assez généralement hors d'usage, à cause de la rigoureuse exactitude exigée dans leurs formes, et de la longueur incommode de leurs procédures. On a introduit, pour la discussion des titres, une méthode beaucoup plus expéditive, par d'autres actions personnelles et mixtes. >>

Quant à la forme même des actions, les lois étrangères offriraient sans doute d'assez curieux rapprochements; mais la forme des actions, c'est la procédure tout entière depuis l'exploit jusqu'au jugement, et ces rapprochements qui excéderaient infiniment le cadre du travail qu'on se propose ici trouveront naturellement leur place dans chacune des nombreuses rubriques sous lesquelles seront traitées les diverses matières qui appartiennent à la procédure. SECT. 2.

DE LA NATURE ET DE LA DISTINCTION DES ACTIONS.

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67. L'action, qui est le droit de poursuivre devant les tribunaux, ce qui nous est dû ou ce qui nous appartient, né doit pás être confondue avec la poursuite elle-même ou l'instance, laquelle n'est que l'exercice de ce droit. L'action existe avant l'instance et indépendamment de celle-ci ; et réciproquement, l'instance peut exister sans être fondée sur un droit, et, par conséquent, quoiqu'il n'existe pas d'action.

68. Bien que l'action, c'est-à-dire la sanction et la poursuite du droit, participe essentiellement à la nature de ce droit, il ne

deur, se poursuivra devant le même juge, quoique, pendant l'instance, le défendeur change de domicile.

cile, conformément à la disposition des art. 105 et 104 c. civ., et si ello Cependant, si une partie plaidante a prouvé son changement de domien a fait notifier les actes, tant à son adversaire qu'à l'avoué de son adversaire, les délais qu'elle aura dans la suite, pour répondre, seront les mêmes que si elle avait eu ce dernier domicile dès l'origine de l'instance.

54. En matière réelle immobilière, le tribunal compétent est celui du ressort où est situé l'immeuble qu'on revendique, ou qu'on soutient devoir ou ne pas devoir quelque service foncier.

55. Si plusieurs immeubles, situés sous diverses juridictions, sont l'objet d'une seule action revendicatoire, elle sera exercée devant le tribunal, dans le ressort duquel la majeure partie des immeubles est située.

56. Lorsqu'il n'y a qu'un seul détenteur de l'immeuble revendiqué, on lorsque, étant plusieurs, ils sont tous domiciliés dans le même arrondissement communal, l'action pourra être intentée devant le tribunal de première instance de cet arrondissement, quoique l'immeuble soit situé ailleurs.

57. La pétition d'hérédité et l'action en partage de succession, ainsi que celle en délivrance de legs, s'intentent au lieu du domicile du défunt, ou de sa résidence habituelle, s'il était étranger, conformément aux art. 110 et 822 c. civ.

58. L'action en partage d'objets mobiliers ou immobiliers communs, s'intente devant le juge du domicile de celui contre qui l'action est dirigée, ou devant celui du lieu où les objets communs se trouvent.

59. L'action en bornage s'intente devant le juge du lieu de la situation des biens qui doivent être bornés.

60. V. Actions possessoires.

61. Sont mises au rang des actions réelles, mais quant à la compétence des tribunaux seulement :

1o Les actions pour dommages aux champs, fruits et récoltes.

2o Celles pour réparations locatives et pour les indemnités prétendues par le fermier ou locataire pour non-jouissance, ainsi que pour les dégra dations alléguées par le propriétaire.

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