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une chose certaine, mobilière ou immobilière. La procédure qu'on y suivait est encore ignorée.

11. L'action dite manús injectio, imposition de la main, était une voie d'exécution. Après avoir amené, de gré ou de force, son adversaire devant le magistrat, le demandeur disait: Quod tu mihi judicatus sive damnatus es (par exemple, sestertium 10 millia) quæ dolo malo non solvisti, ob eam rem ego tibi sestertium 10 millium judicati manus injicio. En même temps, il saisissait le débiteur par quelque partie de son corps. Celui-ci devenait, dès ce moment, esclave de fait (mais non encore de droit); et faute par lui de pouvoir donner un répondant solvable, il était, par déclaration du préteur, attribué (addictus) au demandeur qui l'emmenait chez lui et le chargeait de fers. Il restait dans cet état pendant soixante jours. Si, dans cet intervalle, et après qu'il avait été conduit, par trois jours de marché, devant le magistrat, dans le comitium, avec proclamation du montant de la dette, personne ne se présentait pour payer celle-ci, il devenait la propriété du créancier qui pouvait le vendre comme esclave à l'étranger, ou même le tuer. Établie d'abord, ainsi qu'on vient de le voir, comme voie d'exécution des jugements, la manus injectio fut autorisée plus tard dans certains cas qui furent assimilés à ceux où il y avait eu condamnation judiciaire. Par exemple, elle fut admise pour le remboursement de ce que le sponsor avait payé en l'acquit de son cautionné.

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12. Enfin, l'action pignoris capio était aussi un moyen d'exécution, mais elle s'exerçait sur les biens et non sur la personne. Elle consistait dans la saisie d'une chose appartenant au débiteur, saisie faite d'autorité privée, avec certaines solennités de gestes et de paroles. Elle n'avait lieu que dans un petit nombre de cas, pour des créances favorisées dans un intérêt public. On l'accordait, par exemple, aux soldats contre ceux qui devaient leur payer la solde, aux publicains pour le recouvrement des impôts. A la différence des autres actions de la loi, elle s'exécutait hors de la présence du magistrat et du défendeur, et même pendant les jours néfastes.

13. L'instance judiciaire, sous l'empire des actions de la loi, commençait par l'in jus vocatio, c'est-à-dire que le demandeur appelait son adversaire devant le magistrat, ce qu'il faisait en termes consacrés: in jus camus; in jus te voco. En cas de refus du défendeur, on pouvait l'entraîner de force au tribunal, obtorto collo. Là, après un exposé préliminaire de l'affaire, les parties procédaient à l'accomplissement, selon le rite consacré, de l'action de la loi qu'elles exerçaient. - Si l'affaire était de nature à pouvoir être décidée par le magistrat, le procès, comme nous l'avons déjà dit, se terminait devant lui; sinon, il ajournait les parties à se présenter de nouveau, trente jours après, à son tribunal, pour obtenir la nomination d'un juge ou arbitre. Les parties se promettaient réciproquement de comparaître au jour indiqué.— Elles se promettaient pareillement, après que le juge avait été désigné, de se présenter devant lui le troisième jour. En présence du juge, chaque partie exposait brièvement l'affaire. Puis venaient les divers moyens d'instruction, preuves par témoins ou autres, examen des lieux; ensuite les plaidoiries en détail, et enfin la sentence, pour l'exécution de laquelle il fallait recourir au magistrat, qui seul avait l'imperium.-Pour éviter la première comparution devant le magistrat, le demandeur fut autorisé à dénoncer extrajudiciairement à son adversaire l'objet de sa demande, en le sommant de se présenter in jus dans les trente jours, pour y faire nommer un juge. C'est cette dénonciation qui paraît avoir donné son nom à la forme de procéder appelée condiction.Au surplus, que l'on fût demandeur ou défendeur, on devait agir par soi-même ; il ne fut permis de se faire représenter par autrui que dans quelques cas particuliers.

substituer fréquemment, en fait, une pratique imitée des formes suivies à l'égard des pérégrins. Enfin, au sixième siècle de Rome, elles furent supprimées par la loi OEbutia et par les deux lois Julia, attribuées l'une à Jules César, l'autre à Auguste. Elles ne furent plus mises en usage que dans quelques cas exceptionnels.

Il est à remarquer toutefois que les formes de l'action sacramenti, relatives à la revendication, furent détachées de cette action, et employées, par fiction, dans des cas où il n'y avait pas de procès réel, pour arriver à des résultats qui, sans cela, eussent été plus difficilement obtenus. Ainsi, celui à qui l'on voulait transférer une chose ou un droit réel simulait une revendication de la chose que le magistrat, en l'absence de toute contradiction de la part du cédant, attribuait au demandeur. De cet emploi fictif de la revendication, découlèrent les translations de propriété ( in jure cessio), l'affranchissement des esclaves, l'adoption des fils de famille, au moyen de mancipations et d'une cession juridique simulée.

15. Procédure par formules. Ainsi qu'on vient de le dire, ce nouveau mode de procédure fut introduit par la pratique prétorienne, et d'abord à l'occasion seulement des pérégrins ou étrangers; il fut ensuite étendu de fait aux procès entre citoyens à l'aide de divers artifices et de quelques similitudes d'expressions qui semblaient le faire dériver des actions de la loi. Au moyen de ce système, graduellement substitué au premier, et qui resta en vigueur depuis le sixième siècle de Rome jusqu'au onzième, la procédure quiritaire s'humanisa, comme on l'a dit avec raison, de sacerdotale et exclusivement réservée aux citoyens qu'elle était, elle devint prétorienne, et sauf quelques modifications de détail, applicable à tous. (V. Ortolan, Expl. hist. des Inst., t. 2, p. 1186.)

16. La juridiction était exercée à Rome par les préteurs, dont le nombre, successivement augmenté, était de 18 au temps de Pomponius; par les édiles, le préfet de la ville, le préfet du prétoire; et dans les provinces, divisées par Auguste en provinces du peuple et provinces de l'empereur, par les gouverneurs de chacune d'elles, sous les noms divers de proconsuls, propréteurs, lieutenants de César, présidents, préfets. Au-dessus de tous ces magistrats était l'empereur, magistrat suprême.—La mis sion de juger continua d'être remplie par un juge ou arbitre donné pour chaque cause; par des récupérateurs, et par le tribunal des centumvirs, qui se soutint, quoique en déclinant, jusqu'à la chute du système formulaire.—Le droit d'être institué juge cessa, en l'an de Rome 684, de constituer un privilége au profit des patriciens; il fut étendu, après de longues résistances, à diverses catégories de plébéiens.

17. L'acte important de la procédure, dans le système qui nous occupe, était la formule ou instruction écrite par laquelle le magistrat instituait le juge, fixait les questions que celui-ci devait résoudre et déterminait les principes de droit qu'il devait appliquer.-A son entrée en fonctions, le préteur publiait nombre de formules qui étaient exposées dans son album par ordre de matières. Le demandeur choisissait parmi ces formules l'action qu'il entendait exercer. Il pouvait revenir sur son option, tant qu'il n'y avait pas eu litis contestatio, c'est-à-dire tant que la formule n'était pas encore délivrée. Le choix de la formule était très-important, ce choix pouvant entraîner, s'il était erroné, la perte du procès.-Après que le demandeur avait exposé devant le magistrat les motifs et l'objet de sa demande, choisi et demandé la formule d'action dont il voulait faire usage, le défendeur pouvait, soit contester l'admissibilité de l'action, par des moyens tirés, non des faits (dont l'appréciation appartenait au juge), mais du droit, soit requérir l'insertion dans la formule des exceptions dérivant des faits de la cause. Il était loisible au demandeur de répondre aux moyens invoqués par le défendeur, et à celui-ci de répliquer à son tour. Si l'action ou l'exception proposées n'étaient pas fondées en droit, elles étaient refusées. Le préteur s'abstenait également d'accorder une action, quand les allégations servant de base à une demande fondée en droit étaient avouées par le défendeur; il autorisait, dans ce cas, les mêmes voies d'exécution que s'il y avait eu jugement de condamnation. Lorsque l'action était admissible, le préteur arrêtait la formule avec laquelle il renvoyait les parties devant le juge choisi ou agréé par elles on

14. Les actions de la loi portaient au plus haut degré, comme le fait observer M. Ortolan, la marque propre aux actes juridiques des civilisations en enfance. « Leur caractère sacerdotal, patricien, symbolique et sacramentellement périlleux, fut de plus en plus en désaccord avec les mœurs et avec la constitution sociale. Par-dessus tout, c'était pour la plèbe romaine le vestige d'un asservissement contre lequel on avait tant lutté; aussi étalent-elles tombées dans la haine populaire. » Elles avaient régné intégralement pendant cinq siècles; des modifications graduelles vinrent en tempérer la rigueur. On commença par leur | désigné par le sort.

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18. En tête de la formule se trouvait toujours l'institution du Juge: N. judex esto. On y remarquait, en outre, quatre parties principales: 1° la demonstratio, qui énonçait la partie non contestée des faits occasionnels du litige; par exemple : Quod Au- | lus Agerius Numerio Negidio hominem vendidit ;— 2o l'intentio, qui précisait la prétention du demandeur, tant en faits contestés qu'en droit, à vérifier par le juge; exemple: Si paret N. Negidium A. Agerio sestertium decem millia dare oportere; 30 la condemnatio, qui donnait au juge le droit de condamner ou d'absoudre, selon le résultat de sa vérification, en lui fixant, avec plus ou moins de latitude, la condamnation : Si paret, etc., condemnato; si non paret, absolvito; — 4° l'adjudicatio, qui conférait au juge, indépendamment du pouvoir de condamner ou d'absoudre, celui d'attribuer aux parties, selon qu'il serait nécessaire, la propriété des objets litigieux : quantum adjudicari oportet, judex Titio adjudicato.

19. L'intentio était la partie fondamentale de la formule. Il n'y avait point de formule sans intentio; mais les autres parties n'étaient point un élément nécessaire de toutes les formules. L'adjudicatio ne se trouvait que dans les actions familiæ erciscundæ (en partage d'une hérédité), communi dividundo (en partage d'un objet commun), et finium regundorum (en bornage). Le plus souvent la formule comprenait les trois premières parties cidessus rappelées. Dans plusieurs cas, elle ne comprenait que l'intentio et la condemnatio, par exemple, dans l'action in rem, dans l'action in personam, quand elle avait pour objet une chose ou somme certaine, et dans les actions in factum, où la démonstration se confondait dans l'intention. Quelquefois, enfin, la formule ne consistait que dans l'intentio; l'action était dite alors préjudicielle, et le juge, chargé de résoudre la question posée dans l'intention (par exemple, si un tel est libre, s'il est affranchi, etc.), n'avait point à prononcer de condamnation. L'intentio était conçue, tantôt de manière à soumettre au juge, non pas seulement la vérification d'un fait, mais aussi l'appréciation de ses conséquences juridiques (si paret dare oportere; siparet hominem ex jure quiritium Agerii esse), tantôt de manière à ne donner au juge qu'un fait à constater (si paret A. Agerium apud N. Negidium mensam argenteam deposuisse, eamque dolo malo N. Negidii A. Agerio redditam non esse); dans le premier cas, la formule ou l'action était dite conçue in jus; dans le second in factum.

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20. Toute condamnation, sous le système des formules, était pécuniaire. Quel que fùt l'objet du procès, le juge ne pouvait condamner qu'à une somme d'argent. La partie de la formule nommée condemnatio précisait quelquefois la somme à laquelle le défendeur, s'il succombait, devait être condamné; d'autres fois, elle fixail un maximum que le juge ne pouvait dépasser, ou même elle laissait à celui-ci toute latitude pour déterminer le chiffre de la condamnation. Du reste, la règle d'après laquelle le défendeur, alors même que la demande dirigée contre lui avait pour objet un corps certain, ne pouvait subir qu'une condamnation pécuniaire, n'avait peut-être pas en réalité les inconvénients qu'on pourrait supposer, la rigueur des exécutions dont il était passible dans sa personne et dans ses biens devant le déterminer le plus souvent à restituer la chose qu'il détenait injustement.

21. Outre les parties principales que nous avons énumérées, la formule pouvait contenir occasionnellement certaines parties accessoires (adjectiones), telles que les exceptions, les répliques, les dupliques, etc. Les exceptions étaient employées lorsque l'action existant, d'après le droit strict, et devant être donnée au demandeur, l'adversaire alléguait quelque circonstance particulière (par exemple, de dol ou de fraude) de nature, si elle était vraie, à rendre la condamnation inique. Pour que le juge, qui n'avait de pouvoirs que ceux qu'il tenait du magistrat, pût vérifier cette circonstance et y avoir égard, le préteur énonçait dans la formule l'exception invoquée, et restreignait le pouvoir qu'il conférait au juge de condamner le défendeur au cas où celui-ci ne justifierait pas de son exception: ainsi, par exemple, après ces mots : Si paret N. Negidium A. Agerio sestertium 10 millia dare oportere, la formule ajoutait, s'il y avait lieu, cette exception: Si in ea re nihil dolo malo A. Agerii factum sit neque fiat. C'est dans les exceptions que le préteur a puisé son principal moyen d'atténuer la rigueur du droit civil. La réplique n'était que l'exception du demandeur contre celle du défendeur.

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Les mots duplique et triplique portent en eux-mêmes leur signification.

22. Le préteur rendait quelquefois, sur la demande d'une partie, des interdits, c'est-à-dire des édits particuliers (inter duos edictum) pour prescrire ou défendre quelque chose: Vim fieri veto.— Exhibeas.— Restituas.-Les interdits s'employaient surtout dans les matières placées plus particulièrement sous la surveillance de l'autorité publique, comme lorsqu'il s'agissait de la conservation des choses de droit divin, telles que les temples, ou de l'usage des choses communes, telles que les voies publiques. Mais ils s'employaient aussi pour des intérêts privés, dans les contestations qui, sans l'intervention immédiate du magistrat, pouvaient occasionner des luttes, par exemple, dans les contestations sur la possession (V. Actions possessoires).-Lorsque celui contre qui avait été donné l'interdit ne s'y soumettait pas, il y avait procès, et les parties étaient renvoyées devant un juge, avec une action conçue d'après l'interdit.

23. Dans le système formulaire, le mot action signifiait lo droit conféré par le magistrat de poursuivre devant un juge ce qui nous était dû; mais ce mot était souvent employé pour désigner la formule qui conférait le droit dont il s'agit. Souvent aussi, par une figure de langage, on appliquait, soit à la formule, soit à l'action qui en dérivait, le nom de judicium, lequel, dans son sens propre, indiquait l'instance judiciaire organisée par la formule: ainsi, les mots actio, formula, judicium, étaient fréquemment employés comme synonymes.

24. L'instance, dans ce système comme dans le précédent, commençait par l'in jus vocatio. Le défendeur qui refusait d'aller devant le magistrat pouvait y être contraint par la force; mais le recours à la violence n'était pas nécessaire, le préteur ayant établi une amende et une action contre ceux qui, appeléŝ injus, n’obtempéraient point à cette sommation. Il était d'ailleurs loisible au défendeur d'ajourner sa comparution in jus, en présentant, non plus comme auparavant un vindex qui prenait l'affaire à sa propre charge, mais une simple caution qui répondait, sous une peine pécuniaire, que le défendeur se présenterait devant le magistrat à un jour déterminé. En cas d'absence de celui qu'on voulait appeler in jus, il n'était point assigné et poursuivi par défaut, mais le préteur envoyait le demandeur en possession de ses biens pour le forcer à se présenter. — Au reste, rien n'obligeait le demandeur de faire connaître à son adversaire, en l'appelant in jus, sa prétention et l'action qu'il entendait exercer contre lui; mais l'usage de dénoncer l'objet de la demande (litis denuntiatio), et de s'engager respectivement à se rendre in jus à un jour convenu, devint de plus en plus fréquent, et l'ancienne in jus vocatio finit, sous Marc-Aurèle, par être entièrement remplacée par la litis denuntiatio. Les parties une fois rendues devant le magistrat, il y avait lieu aux formalités relatives à la désignation, à la rédaction et à la délivrance de l'action et de la formule.

25. La formule délivrée, les parties s'ajournaient à comparaître devant le juge. Si le défendeur faisait défaut, il était rendu contre lui une ordonnance de comparution, qui se renouvelait deux ou trois fois, à des intervalles de dix jours; après quoi, on passait outre à la sentence.- L'affaire était d'abord exposée sommairement devant le juge, qui ordonnait quelquefois des remises pour préparer la décision ou pour la production des preuves. Les moyens de preuve étaient les témoins, les titres, le serment et l'aveu. Les parties ou leurs avocats plaidaient leur cause. Puis le juge, auquel il était permis de se faire assister, à titre do conseils, par des personnes dont les lumières lui inspiraient de la confiance, prononçait à haute voix et à l'audience la sentence définitive, ce qui mettait fin à sa mission.

26. Tel était le mode de procédure ordinairement suivi; mais il y était dérogé quelquefois. Au lieu de renvoyer l'affaire devant un juge, le magistrat statuait lui-même dans certains cas. Cette forme de procéder était nommée extrà ordinem cognitio. Elle avait lieu notamment lorsqu'il s'agissait de restitution en entier, de l'envoi en possession de biens, et de contestations sur les fidéicommis. Mais le nombre des cas où l'on y avait recours s'accrut progressivement. On s'habitua de plus en plus à voir les procès directement jugés par le magistrat, sans l'aide d'un juge. Enfin, cette procédure, autrefois exceptionnelle, fut établie pour règle générale, d'abord dans les provinces, par Dioclétien, en

suite dans tout l'empire; et le système formulaire céda ainsi graduellement la place aux cognitiones extraordinariæ, appelées aussi judicia extraordinaria.

27. Procédure extraordinaire.-Depuis Constantin, l'empire était divisé en quatre grandes préfectures: l'Orient, l'Illyrie, l'Italie, les Gaules; à la tête de chacune était un préfet du prétoire. Chaque préfecture se divisait en diocèses ou provinces, gouvernées par un recteur ou président, juge ordinaire des affaires civiles. Les cités avaient aussi leurs magistrats locaux, investis d'une juridiction subalterne limitée à une certaine somme. Rome et Constantinople avaient une organisation judiciaire à part. Le préfet du prétoire était l'autorité judiciaire supérieure comme lieutenant de l'empereur. Le président de la province connaissait en appel des sentences des magistrats locaux. M. Savigny résume ainsi l'organisation judiciaire des Romains au 5° siècle : « Les duumvirs jugeaient en première instance les affaires ordinaires; l'appel était porté devant le lieutenant de l'empereur. Ce dernier jugeait aussi en première instance les affaires réservées, telles que les différends entre plusieurs villes ou entre les autorités d'une même ville, et toutes les affaires qui s'élevaient au delà d'une certaine somme. » (Hist. du droit romain au moyen àge, t. 1, ch. 2, p. 51, no 11.)

28. Il n'y a plus de distinction entre la déclaration du droit et le jugement du fait, plus de rédaction et de délivrance d'une formule. Le demandeur appelait directement son adversaire par une dénonciation au greffe, devant le fonctionnaire compétent qui, à la fois magistrat et juge, après avoir fait notifier par un huissier cette dénonciation au défendeur, prononçait sur la contestation. Il faut remarquer toutefois que le président de la province pouvait renvoyer les causes de peu d'importance à des juges pédanés, judicibus pedaneis, légistes ou juges inférieurs attachés en certain nombre au ressort de chaque prétoire, et dont Justinien limite la juridiction à 500 solides.

prend que cette division est commune à tous les systèmes de procédure, à toutes les législations, car elle dérive de la nature même des choses, toute demande judiciaire se résolvant nécessai– rement, soit dans la réclamation de ce qui nous est dû par une personne, en vertu d'une obligation, soit dans la réclamation de droits réels ou absolus, tels que les droits de propriété, d'usufruit, de servitude, d'hypothèque, etc., et ceux attachés à l'état des personnes, comme les droits d'hérédité.—La différence entre les actions réelles et personnelles en produisait une dans la rédaction des formules, différence qui consistait en ce que l'intention, dans l'action personnelle, désignait nommément le défendeur, ce qui n'avait pas lieu dans l'action réelle.

30. L'action réelle s'attachait à la chose réclamée et s'exerçait contre quiconque en était détenteur, tandis que l'action personnelle, inhérente à la personne obligée, ne s'exerçait que contre elle seule. Suivant M. Bonjean, Tr. des actions, 2,

p. 275, ces propositions, vraies en général, admettaient pourtant des exceptions en ce sens qu'il y avait des actions personnelles qui se donnaient contre tout possesseur, entre autres, l'action ad exhibendum, dont l'objet était de faire représenter une chose qui avait été cachée de mauvaise foi; et réciproquement, l'action réelle pouvait, en certains cas, être exercée contre le non-possesseur par exemple, l'action paulienne était donnée contre | l'acquéreur de mauvaise foi, alors même qu'il ne possédait plus. Ces prétendues exceptions appartenaient, ce nous semble, à la troisième classe d'actions dont on a parlé, c'est-à-dire à la classe des actions mixtes, que la plupart des commentateurs nous paraissent avoir mal à propos limitée aux trois actions divisoires en partage d'hérédité, de choses communes, et en bornage, et cela par une interprétation restrictive que ne comportent pas les termes énonciatifs du § 20 des Institutes, au tit. des Actions. Sans entrer ici dans de longs détails, nous préférons à tous les subtils commentaires dont ce texte a été l'objet, l'opinion de Loyseau, qui, dans son traité du Déguerpissement, chap. 1, n° 1, n'hésite pas à penser que ce texte est purement démonstratif, et qu'on doit regarder comme mixtes les actions que le droit romain désignait sous le titre d'actiones personales in rem scriptæ. Nous pensons donc que l'action paulienne et celle ad exhibendum, que M. Bonjean qualifie, la première d'action réelle, pouvant atteindre la personne, même après qu'elle ne possède plus, et la seconde d'action personnelle, pouvant être dirigée contre tout possesseur de la chose, étaient dans la réalité des actions mixtes. Cela nous semble de toute évidence pour l'action paulienne, que reproduit l'art. 1167 c. civ., car, dans le droit romain, comme aujourd'hui, elle ne pouvait atteindre le tiers détenteur qu'autant qu'il était de mauvaise foi, ce qui constituait de sa part une obligation personnelle qui se joignait à l'obligation réelle résultant de la détention de la chose. De même aussi dans l'action ad exhibendum la possession de la chose cachée de mauvaise foi constituait une double obligation personnelle et réelle qui imprimait à cette action le caractère d'une action mixte.

Dans ce dernier système, un grand progrès s'était accompli; le mot action n'indiquait plus ni une forme sacramentelle de procéder, ni l'autorisation du magistrat jusque-là nécessaire à tout plaideur pour réclamer en justice: il exprimait le droit absolu dérivant, non d'une concession spéciale du magistrat, mais de la loi même, de s'adresser directement aux juges pour obtenir justice. Le mot action désignait aussi l'exercice de ce droit, c'està-dire la poursuite. La signification du mot exception avait pareillement changé: ce n'était plus une restriction apportée par le magistrat au pouvoir qu'il donnait aux juges de condamner; c'était un moyen de défense qui appartenait au défendeur pour repousser la réclamation dirigée contre lui, moyen de défense, qu'il faisait valoir de son chef. La réplique, la duplique, la triplique, ne furent aussi dès lors que des moyens respectifs de défense employés tour à tour par les parties. Les interdits n'existaient plus dans tous les cas où ils auraient été accordés par le préteur, on avait une action directe devant le juge compétent. En résumé, une grande simplicité tendait incessamment à se substituer aux formules bizarres des deux premiers âges de la législation romaine que nous avons précé-dications, rei vindicationes, ou pétitions, qu'elles ont conservé demment tracées.

29. Division des actions.-A Rome, les actions ont reçu, tant sous le système formulaire que depuis, différentes divisions, suivant les différents points de vue sous lesquels on les a considérées. La principale de ces divisions, summa actionum divisio, suivant les Institutes, § 1, De act., était déduite de la nature des droits que les actions tendaient à faire valoir. Sous ce rapport, les actions étaient réelles, ou personnelles, ou mixtes, suivant qu'elles avaient pour objet un droit réel, une obligation, ou bien l'un et l'autre à la fois. Ainsi, les actions réelles étaient celles qui tendaient à faire reconnaître au demandeur des droits absolus, c'està-dire des droits existant à l'égard de tous, adversùs omnes, indépendants de toute obligation de la personne contre laquelle on les faisait valoir; les actions personnelles étaient celles par lesquelles le demandeur soutenait que le défendeur était obligé envers lui et poursuivait l'exécution de cette obligation; enfin, on appelait actions mixtes et quelquefois personnelles et contre la chose, personales in rem scriptæ, certaines actions qui avaient simultanément pour objet un droit réel et un droit personnel, comme on le verra avec plus de détail dans un moment.—On com

Les actions réelles portaient le nom générique de reven

chez nous; et les actions personnelles, du moins pour la plupart, celui de condictions, condictiones.-Les condictions, dans la classe desquelles n'étaient pas comprises les actions in factum, ni l'action de vol, étaient de deux sortes, suivant qu'elles avaient pour objet une chose certaine et déterminée (condictio certi), ou une chose indéterminée (condictio incerti). Dans ce dernier cas, la condiction se désignait souvent par le seul mot d'action suivi de l'indication de la cause de l'obligation: actio ex stipulatu, ex testamento.-Les actions réelles ou revendications s'appliquaient tan aux choses incorporelles qu'aux choses corporelles.-Les reven< dications concernant les servitudes personnelles et réelles se divisaient en confessoires et négatoires: l'action était confessoire, quand on prétendait avoir une servitude sur un fonds; négatoire, quand on déniait le droit de servitude qu'un tiers voulait exercer.

31. Considérées par rapport à l'autorité qui les avait établies, les actions se divisaient en civiles, fondées sur une loi, un sénatus-consulte ou toute autre source du droit civil, et prétoriennes, introduites par le préteur, dont l'artifice, pour subve nir à des droits non sanctionnés par le droit civil, consistait principalement, sous le sastème formulaire, soit à construire la

formule sur une hypothèse fictive, on surtout à la rédiger in factum, de manière à donner à résoudre au juge une question de fait et non de droit. L'action præscriptis verbis, espèce d'action in factum introduite par Labéon, avait pour objet les droits qui dérivaient de contrats innommés pour lesquels on donnait aussi l'action utile du contrat qui offrait le plus d'analogie.-Parmi les actions civiles, il en était de réelles et de personnelles.-Les principales actions réelles étaient : l'action publicienne, l'action contraire à la publicienne, l'action paulienne, l'action servienne, l'action quasi-servienne ou hypothécaire, et les actions préjudicielles.

32. L'action publicienne reposait sur l'hypothèse qu'une usucapion avait été accomplie, bien qu'elle ne l'eût pas été réellement. Elle était applicable notamment lorsqu'une chose mancipi (c'est-àdire dont la propriété ne pouvait être transférée que par l'acte sacramentel de la mancipation) ayant été livrée par le propriétaire, sans aucun mode d'acquisition quiritaire, ou lorsqu'une chose mancipi ou nec mancipi (non susceptible de mancipation) ayant été reçue par quelqu'un, en vertu d'une cause translative de propriété, et de bonne foi, mais à non domino, le possesseur en voie d'acquérir la chose par l'usucapion, en avait perdu la possession, avant le temps révolu de cette usucapion: dans l'un et l'autre cas, le possesseur pouvait, au moyen de la publicienne, soutenir avoir prescrit la chose, et par suite la revendiquer comme sienne.— L'action dont il s'agit pouvait être utile même à l'acquéreur qui était devenu réellement propriétaire, mais qui avait perdu la possession de sa chose, car il était dispensé, en intentant la publicienne de préférence à la revendication, de justifier du droit de propriété de ses auteurs; il lui suffisait de prouver qu'il avait acquis de bonne foi.

L'action contraire à la publicienne se donnait, soit à celui dont on avait prescrit la chose, pendant son absence, causée par de justes motifs; soit à celui dont la chose avait été prescrite par une personne absente, pour quelque motif que ce fût, et contre laquelle dès lors on n'avait pu agir l'effet de cette action était d'autoriser le propriétaire à revendiquer la chose comme s'il n'y avait point eu d'usucapion. Elle devait être intentée dans le délai d'un an à compter du retour de l'absent, délai que Justinien a porté à quatre années.

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même après cette époque, un sentiment de haine contre la fraude
avait porté le préteur à autoriser cette action, mais seulement
jusqu'à concurrence de la somme dont la fraude avait enrichi le
tiers contre lequel l'action était dirigée : Hæc actio, dit pien,
dans la loi 10, § 24, quæ in fraudem cred., post annum de eo
quod ad eum pervenit adversus quem actio movetur competit :
iniquum enim prætor putavit in lucro morari eum qui lucrum
sensit ex fraude; idcirco lucrum ei extorquendum putavit.
reste, envisagée sous le rapport de la révocation des aliénations,
l'action paulienne était, comme on l'a vu, no 27, au nombre des
actions que le droit romain qualifiait in rem scriptæ et que nous
avons considérées comme mixtes; mais lorsqu'elle avait seulement
pour objet l'annulation des engagements ou autres actes par
lesquels leur débiteur pouvait nuire à ses créanciers, elle n'avait
plus évidemment que le caractère d'une action personnelle.

Du

34. Par l'action servienne, le bailleur d'un fonds rura! pouvait revendiquer contre tout possesseur les choses que son fermier avait affectées à la sûreté de ses fermages.-Far l'action quasiservienne ou hypothécaire, le créancier réclamait de tout détenteur la chose qui lui avait été donnée en gage ou hypothéquée. Elle appartenait, quand la chose avait été hypothéquée à plusieurs par des conventions différentes, à celui dont l'hypothèque avait été constituée la première : Prior tempore, potior jure.

35. Enfin, les actions préjudicielles, presque toutes d'origine prétorienne, étaient celles qui avaient pour objet la constatation d'un état ou d'un fait pour en faire résulter, non une condamnation immédiate, mais un avantage ultérieur. A cette classe appartenaient toutes les questions d'état. Ces actions, qui tendaient à faire constater telle ou telle qualité adversus omnes, avaient par là même le caractère d'actions réelles.

36. Parmi les actions personnelles introduites par le droit prétorien, on distingue, entre autres, les actions constitutæ pecuniæ, de peculio, ex jurejurando.—L'action constitutæ pecuniæ tendait à l'exécution d'un constitut, c'est-à-dire d'un pacte prétorien par lequel on avait promis de nouveau de payer à jour fixe ce qu'on devait déjà ou ce que devait un tiers. Elle fut une extension d'une action civile, appelée receptitia, qu'on exerçait contre le banquier qui avait été employé comme intermédiaire dans une négociation et qui avait promis de payer la dette d'un de ses clients. Elle n'eut lieu d'abord que pour les choses qui s'évaluent au nombre, au poids ou à la mesure; mais Justinien la rendit applicable à toutes sortes de choses.-Par l'action de peculio, on contraignait le père de famille à acquitter les obligations contractées par le fils de famille ou l'esclave, jusqu'à concurrence de la valeur de leur pécule. Elle se donnait même pour des obligations dérivant d'un quasi-contrat, mais non pour celles qui résultaient d'un délit ou quasi-délit. Du reste, elle était moins une action particulière qu'une modification de celles auxquelles donnaient naissance les obligations des individus alieni juris. Si donc ceux-ci avaient fait une vente, reçu un dépôt, on avait toujours contre le père de famille l'action ex vendito, depositi, etc., jusqu'à concurrence du pécule.-Il y avait lieu à l'action ex jure

33. L'action paulienne, dont il est essentiel de bien préciser les caractères, parce qu'elle est reproduite dans l'art. 1167 de notre code civil, avait pour objet la rescision des actes faits par le débiteur en fraude des droits de ses créanciers. A ne consulter que les Institutes, on pourrait croire que cette action n'était admise que contre les aliénations, à titre gratuit ou onéreux, consenties par un débiteur au préjudice de ses créanciers: Item, porte le § 6, De act., si quis in fraudem creditorum rem suam alicui tradiderit, bonis ejus à creditoribus ex sententiâ præsidis possessis, permittitur ipsis creditoribus, rescissa traditione, eam rem petere, id est, dicere eam rem traditam non esse, et ob id in bonis debitoris mansisse. Mais ce serait une erreur que de donner à l'action paulienne une portée aussi restreinte; plus large et plus morale dans son but, elle atteignait généralement les actes frau-jurando, lorsque l'une des parties avait déféré le serment à l'auduleux de toute nature au moyen desquels un débiteur diminuait sa fortune au détriment de ses créanciers. C'est ce qui résulte clairement du titre du Digeste Quæ in fraudem creditorum facta sunt ut restituantur. Toutefois cette action, limitée, comme on vient de le dire, aux actes par lesquels le débiteur diminuait son patrimoine, ne pouvait atteindre ceux par lesquels il négligeait de l'augmenter, comme par exemple la répudiation d'une succession ou le refus d'accepter une libéralité. Nous devons aussi faire remarquer que l'action paulienne était subordonnée au concours de deux conditions; il fallait que l'acte attaqué eût causé un dommage réel aux créanciers et qu'en outre le tiers qui avait contracté avec le débiteur eût participé à la fraude de celuici. C'est ce qu'on indiquait par ces mots : consilium fraudis et eventus damni. Il est vrai de dire cependant que l'intention frauduleuse n'était pas nécessaire pour justifier la demande en révocation des actes à titre purement gratuit; il suffisait alors que ces actes eussent causé un dommage réel aux créanciers. - Comme toutes les actions prétoriennes, l'action paulienne ne durait qu'une année à partir du jour où les créanciers avaient constaté leur dommage en faisant vendre les biens de leur débiteur; néanmoins,

tre, circonstance d'où résultait entre elles la promesse de s'en
rapporter au serment qui serait prêté sur l'existence de la dette.
Dans cette action, la condamnation du défendeur dépendait de la
question de savoir, non pas s'il y avait eu, ou non, obligation,
mais s'il y avait eu, ou non, prestation de serment.
37. Les préteurs avaient encore établi diverses actions pé-
nales :
l'action de albo corrupto, instituée contre ceux qui
avaient dégradé l'album ou tableau, exposé au forum, sur lequel
était inscrit l'édit du préteur; —l'action de patrono aut parente
in jus vocato, dirigée contre le descendant ou l'affranchi qui
avait appelé in jus, sans la permission du magistrat, son ascen-
dant ou son patron; l'action de in jus vocato vi exempto,
établie contre ceux qui s'opposaient violemment à ce qu'une per-
sonne appelée in jus y fût amenée par son adversaire;
- les ac-
tions de dejectis cel effusis, de suspensis vel positis, créées con-
tre ceux qui auraient jeté quelque chose sur la voie publique,
ou suspendu quelque objet dont la chute pouvait entraîner des
dangers.

38. Envisagées sous le rapport de la nature du profit que lo demandeur devait en retirer, les actions se divisaient en trois

classes: celles appelées persécutoires de la chose, par lesquelles le demandeur réclamait ce qu'on lui avait enlevé ou ce qui lui était dû; les actions persécutoires d'une peine ou pénales, par lesquelles on poursuivait une condamnation pécuniaire à titre de peine, non pas de peine publique, réclamée au nom de la société, mais de peine privée, devant être prononcée au profit du demandeur, en sus de ce qui lui était dù;-et les actions mixtes, d'un autre genre que celles dont nous avons déjà parlé et par lesquelles on requérait simultanément la chose et une peine.

Dans la première classe rentraient toutes les actions réelles et la plupart des actions personnelles dérivant des contrats. Étaient persécutoires d'une peine, plusieurs des actions qui naissaient des délits telles que l'action de vol, action qui, soit qu'on agit au double ou au quadruple, ne tendait toujours qu'à obtenir la peine du délit; car, outre cette action, le propriétaire volé avait l'action in rem ou la condiction, pour reprendre la chose ou s'en faire payer la valeur ; — Enfin, étaient mixtes, d'autres actions naissant des délits, comme celle vi bonorum raptorum, parce que la chose était comprise en même temps que la peine dans le quadruple. L'action de la loi Aquilia, pour dommage causé injustement, était également mixte, ainsi que l'action de dépôt nécessaire, quand elle était dirigée contre le dépositaire ou son héritier personnellement coupable de do!, et l'action formée contre ceux qui avaient attendu qu'on les appelât devant le juge pour délivrer des legs faits aux églises.

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39. Relativement à la quotité de la condamnation, les actions se divisaient en actions données au simple, au double, au triple ou au quadruple, selon que la condamnation devait être égale à la valeur de ce à quoi le demandeur avait droit, au double, triple ou quadruple de cette valeur. Les actions non pénales, telles que celles dérivant de la stipulation, de la vente, du louage, du mandat, du mutuum, etc., étaient au simple.- Parmi les actions pénales, quelques-unes, celle d'injure, par exemple, étaient pareillement au simple. On agissait au double dans les actions de vol non manifeste, de corruption d'esclave, etc. Il en était de même dans les cas de dépôt nécessaire et de dommage prévu par la loi Aquilia, mais seulement quand le dépôt ou le dommage était dénié, et enfin dans le cas de retard apporté à la délivrance des legs faits aux établissements religieux. Les actions dérivant de certains vols (furti concepti et furti oblati) étaient au triple, avant Justinien, ainsi que l'action créée par cet empereur contre un demandeur qui, dans la citation, avait réclamé plus qu'il ne lui était dù. Enfin, étaient au quadruple l'action de vol manifeste, celle quod metus causa, celles dirigées contre les individus qui avaient reçu de l'argent pour susciter un procès injuste, ou pour y renoncer, et celle donnée par Justinien contre les huissiers, executores litium, qui avaient exigé des défendeurs plus qu'ils ne devaient.

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40. Par rapport à l'étendue du pouvoir du juge, les actions se distinguaient en actions de droit strict, actions de bonne foi et actions arbitraires. Cette division se déduisit, sous la procédure formulaire, de la nature des attributions données au juge par la formule. Dans les actions de droit strict, le juge devait appliquer les règles du droit civil, sans avoir égard à aucune circonstance d'équité ou de bonne foi, en dehors de ces règles. Étaient de droit strict les actions ex stipulatu, ex testamento, la condiction naissant du mutuum, les actions dérivant des délits. Les actions de bonne foi étaient celles dont la formule conférait au juge, au moyen de ces mots : ex bona fide (ou autres équivalents) ajoutés dans l'intentio, le pouvoir de statuer d'après les règles de l'équité, plutôt que d'après la rigueur du droit civil. Parmi ces actions, dont la création fut un moyen puissant de corriger la rigidité du droit des douze tales, en y appliquant les principes du droit des gens, il faut ranger celles qui naissaient de la vente, du louage, de la société, de la gestion d'affaires, du mandat, de la tutelle, du dépôt, du commodat, du gage, les actions familiæ erciscundæ et communi dividendo, la pétition d'hérédité, et l'action præscriptis verbis, quand elle dérivait de l'échange ou du contrat estimatoire.

41. Des deux actions accordées à la femme pour la répétition de sa dot, savoir l'action rei uxorie et l'action ex stipulatu, la première seule était de bonne foi. Elle fut supprimée par Justinien, qui accorda à la femme l'action ex stipulatu, même pour

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le cas où il n'y aurait pas eu de stipulation relative à la restitution de la dot, mais qui déclara en même temps que cette dernière action, de sa nature stricti juris, deviendrait par exception, dans ce cas spécial, une action de bonne foi. Il résulta de là que, sans cesser d'être plus avantageuse à la femme que l'action rei uxoriœ celle ex stipulatu cessa néanmoins d'être aussi rigoureuse qu'auparavant pour le mari, auquel notamment il fut laissé un délai pour la restitution des objets dotaux autres que les immeubles. 42. Dans les actions de bonne foi, le juge devait prendre en considération tout fait de dol de l'une des parties, suppléer d'office ce qui était conforme aux mœurs et aux usages, compenser ce que les parties se devaient respectivement (compensation qui n'avait pas lieu dans les actions de droit strict, parce qu'elle n'était point, d'après le droit civil, une cause d'extinction des obligations), et enfin mettre à la charge du débiteur, à compter de sa mise en demeure, les fruits ou intérêts des choses dues.

43. Les actions arbitraires étaient celles qui autorisaient le juge à rendre, avant sa sentence, un ordre préalable par lequel, appréciant ex æquo et bono la restitution ou la satisfaction due au demandeur, il enjoignait au défendeur de faire cette restitution ou de donner cette satisfaction; de telle sorte que celui-ci devait être absous, s'il se conformait à l'ordre du juge, et condamné, dans le cas contraire, à une somme dont le juge déterminait le montant. Il est à remarquer que le défendeur pouvait être contraint manu militari à donner la satisfaction prescrite, et que le demandeur ne pouvait la refuser.-On comprend que l'action arbitraire corrigeait les inconvénients du principe admis sous le système des formules que toute condamnation était pécuniaire. — Toutes les actions réelles étaient arbitraires, à l'exception de la pétition d'hérédité. Il en était de même de plusieurs actions personnelles, in rem scriptæ, comme par exemple celles ad exhibendum, quod melús causá, etc.

44. Les actions se divisaient aussi en directes et indirectes. On nommait directes celles qui étaient données contre une personne à raison de son propre fait ou de celui de ses auteurs, et indirectes celles qui étaient données contre quelqu'un à raison des faits d'un autre, par exemple de ses fils de famille ou de ses esclaves, ou même à raison des dommages causés par un animal qui lui appartenait. D'après le droit civil, le chef de famille ne pouvait être obligé à raison des contrats passés avec son fils ou son esclave; mais le droit prétorien introduisit par équité les actions indirectes: quod jussu, exercitoria, institoria, tributoria, de peculio et de in rem verso. – L'action quod jussu était accofdée pour contraindre le père de famille ou le maître à acquitter en entier les obligations que son fils ou son esclave avait contractées par son ordre (jussu). Les actions exercitoire et institoire se donnaient contre celui qui avait préposé son fils de famille ou son esclave à la direction de son navire ou d'un commerce quelconque, et à raison des engagements pris par ce préposé dans le cercle de ses attributions. Elles se donnaient pour la totalité de la dette; et il y avait lieu à leur exercice alors même que le préposé n'était point sous la puissance du préposant. — Lorsqu'un fills de famille ou un esclave avait commercé sur son pécule, avec l'autorisation de son père ou de son maître, le fonds de commerce et les bénéfices en provenant devaient, s'il était dû quelque chose au père ou au maître, être distribués proportionnellement entre lui et les autres créanciers du fils ou de l'esclave; la distribution étail opérée par le père ou le maître; mais pour empêcher qu'elle ne fut faite d'une manière préjudiciable aux autres créanciers, on avait accordé à ceux-ci une action protectrice de leurs intérêts, appelée tributoire.

Les actions de peculio et de in rem verso étaient aussi données contre le père de famille ou le maître, pour le contraindre à acquitter les obligations contractées, à son insu, par son fils ou son esclave, soit jusqu'à concurrence du pécule, si le défendeur n'avait profité en rien de l'acte à raison duquel il était poursuivi, soit, dans le cas contraire, jusqu'à concurrence du profit qu'il avait retiré de cet acte.-Dans l'action de peculio, on n'évaluait le pécule que déduction faite de ce que le fils ou l'esclave devait à son père ou à son maître. - Dans l'action de in rem verso, on considérait comme ayant tourné au profit du défendeur toutes les dépenses nécessaires ou utiles faites dans son intérêt par son fils ou son esclave. Celui qui avait le droit d'exercer l'une des

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