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pourvoir contre les décisions rendues à ce sujet (Cass. 21 nov., 1827) (1).

239. La disposition qui autorise le tribunal à admettre l'intervention du failli n'a point été adoptée sans discussion. C'est à

failli, et qu'en supposant même qu'il y eût parité de raison pour l'une et l'autre espèce de biens, ce qui n'est pas, on ne pourrait, sans arbitraire, exiger pour la vente des biens d'un failli, et imposer sous peine de nullité, des formes que la loi n'a pas prescrites; qu'il résulte de là que le code civil n'ayant pas ordonné que la vente des biens des mineurs soit précédée d'une estimation, cette estimation n'est pas nécessaire pour la vente des biens du failli, et que, par une autre conséquence, il n'y avait pas nécessité que le juge-commissaire autorisât la vente au-dessous de l'estimation qui avait été faite surabondamment. -2° En ce qui concerne le défaut d'apposition de nouvelles affiches après la surenchère; considérant que cette formalité n'est prescrite par aucune disposition expresse; qu'en vain, on prétend en établir l'obligation, par analogie à ce qui est prescrit par le code civil sur le mode de purger les hypothèques, parce qu'en outre qu'il y aurait trop d'arbitraire à exiger, sous peine de nullité, l'accomplissement de certaines formalités, sous le prétexte de pareilles analogies, la vente des biens d'un failli, qui se fait par adjudication pu

à intervenir en première instance, que pour l'autoriser à venir former pour la première fois en appel une demande en intervention qui n'a pas été soumise aux premiers juges; qu'il suffit done, lorsque la demande est proposée en première instance, que le demandeur ait intérêt dans la cause: or la demande dont il s'agit fut proposée devant le tribunal de Bayonne, et, bien que, d'après la solution précédente, les actions contre la faillite du sieur B... dussent être dirigées contre les syndics provisoires, il est certain que le débiteur pouvait avoir intérêt à intervenir dans l'instance pour surveiller ses droits et fournir aux syndics des renseignements dont il avait une connaissance personnelle, et conséquemment son intervention devait être reçue; Attendu, quant à la dame B..., que les art. 721 et 722 c. pr. civ., en indiquant des cas où les créanciers, autres que le poursuivant, peuvent intervenir, ne sont nullement limitatifs; que, bien que le poursuivant agisse dans l'intérêt de tous les créanciers, en ce sens que les poursuites doivent profiter à tous ceux qui ont un droit réel sur l'immeuble, il n'est pas cependant constitué leur mandataire par la loi; que d'ailleurs la signification prescrite par l'art. 695 serait sans uti-blique et à la suite d'affiches, a beaucoup plus d'analogie avec la vente lité, si elle n'avait pour objet de mettre les créanciers en mesure de veiller à la conservation de leurs droits, et conséquemment d'intervenir; d'où suit que l'intervention de la dame B... devait être admise, et qu'ainsi les fins de non-recevoir ne peuvent être accueillies; Attendu, sur le moyen pris de ce que la notification des placards, prescrite par l'art. 695, n'aurait pas été faite à la dame B..., que l'hypothèque légale de cette dame n'a pas été inscrite; que les règles prescrites par la loi pour purger les immeubles des hypothèques légales ne sont relatives qu'au cas où les immeubles grevés sont aliénés volontairement; qu'on ne peut, par analogie, argumenter de ce cas à celui de l'expropriation forcée, dans laquelle la publicité remplace les précautions exigées pour le cas des ventes volontaires, et suffit pour avertir les intéressés et les mettre à même de veiller à leurs droits; qu'enfin la loi exige la notification des placards aux créanciers inscrits, et seulement à ses créanciers; qu'on ne peut pas ajouter à ses dispositions et créer une nullité qu'elle n'a pas prononcée; qu'ainsi l'on doit décider que la notification dont il s'agit n'est pas exigée pour des hypothèques légales non inscrites, ainsi qu'il a été décidé par la cour de cassation; - Attendu, au fond, que les moyens de nullité du sieur B... ne sont pas suffisamment établis; - Déclare avoir été mal jugé, bien appelé de la disposition qui rejette l'intervention des mariés B...; reçoit dans la forme l'intervention; et disant droit au fond, les déboute de la nullité de la saisie immobilière, et ordonne que le jugement|priation forcée avec les autres surenchères en général. — Arrêt (ap. dél. du 18 déc. 1823 sera exécuté selon sa forme et teneur.

Du 21 fév. 1824.-C. de Pau, 1re ch.-MM. de Crouseilhes, pr. (1) Espèce: (Boulay C. Lemonnier et Dutrésor.) - Après la faillite du sieur Boulay, ouverte le 29 mai 1806, Marie, syndic provisoire, fut autorisé à faire vendre la terre de la Houcherie, estimée par expert à 24,020 fr.-Lemonnier remplaça Marie dans le syndicat. Il ne se trouva aucun enchérisseur lors de la vente; la mise à prix avait été de 24,020 fr., et, en outre, d'une rente viagère de 250 fr. que devait payer l'adjudicataire; le syndic fut autorisé par jugement à faire procéder à la vente audessous de l'estimation. Le 1er avr. 1816, les biens furent adjugés au sieur Dutrésor pour 10,000 fr., et à la charge de la rente de 250 fr., rente qui était alors éteinte. Il y eut une surenchère; mais le surenchérisseur ayant fait défaut, le sieur Dutrésor resta adjudicataire pour 25 fr. de plus. La revente sur surenchère se fit sans affiches ni publication. Quelques créanciers arguèrent la vente de fraude et de nullité. L'instance s'engagea devant le tribunal de Saint-Lô; Boulay intervint. Le 19 déc. 1821, jugement qui déclara les créanciers non recevables, rejeta la fin de non recevoir proposée contre le sieur Boulay, tirée de son état de faillite, déclara son action mal fondée, et le condamna, ainsi que les créanciers, aux dépens. Appel par Boulay de ce jugement et de celui du 24 juill. 1815, par lequel la vente au-dessous de l'estimation avait été autorisée sans l'autorisation spéciale du juge-commissaire. Appel incident de la part de Dutrésor.

Le 10 juin 1824, arrêt de la cour de Caen, en ces termes : - «Considérant que la qualité de failli ne prive pas Boulay du droit d'action pour la conservation de ses intérêts; qu'on ne peut méconnaître qu'il intérêt que le prix de ses biens soit porté à toute leur valeur, afin qu'une plus grande masse de ses créanciers puisse être payée; qu'au surplus, c'est à tort qu'on argumente du silence que Boulay a gardé sur les vices de l'adjudication, puisque le jugement qui autorise la vente au-dessous du prix de l'estimation ne lui ayant pas été signifié, il a pu l'ignorer, comme il a pu ignorer aussi les autres faits sur lesquels il fonde aujourd'hui sa réclamation. Considérant, 1° relativement au défaut d'autorisation spéciale du commissaire à la faillite, pour vendre au-dessous du prix de l'estimation, que l'art. 564 c. com. a prescrit que les biens du failli doivent être veudus dans les formes établies par le code civil pour la vente des biens des mineurs, et que n'ayant pas ordonné que celles prescrites par le code de procédure seraient également observées, on doit conclure que le législateur n'a pas entendu assujettir à ces formes supplémentaires, introduites par le code de procédure, la vente des biens d'un

qui se fait sur saisie immobilière et avec la plus grande publicité, qu'avec une vente volontaire qui peut être frauduleuse et collusoire entre l'acquéreur et le vendeur, raison pour laquelle, en cas de surenchère, il a été jugé utile que l'adjudication eût lieu avec la plus grande publicité, et à la concurrence des étrangers, mais raison qui n'existe pas pour les ventes qui ont été faites d'abord avec publicité et concurrence, cas pour lequel l'art. 712 c. pr. dispose que la concurrence ne doit plus avoir lieu qu'entre l'adjudicataire et le surenchérisseur. -3° Relativement aux manœuvres frauduleuses que Boulay prétend avoir été pratiquées (cette partie de l'arrêt, appuyée uniquement sur des considérations de fait, est sans aucune importance de doctrine); — Considérant que la solution négative résulte des solutions précédentes; - Confirme. >>

Pourvoi par Boulay qui présente deux moyens. 1o Fausse application des art. 457, 458 et 459 c. civ., et violation de l'art. 964 c. pr., en ce que la revente au-dessous du prix d'estimation n'avait pas été autorisée par le juge-commissaire; ce moyen se trouve suffisamment développé dans l'arrêt de la cour de cassation. -2° Fausse application des art. 710, 711, 712 c. pr., et violation des art. 2185 et 2187 c. civ., de l'art. 836 c. pr., et de l'art. 565 c. com., en ce que l'adjudication du 1er avril n'avait été précédée ni de publication ni d'affiches. La cour d'appel, a dit le demandeur, a mal à propos confondu les surenchères sur exproen ch. du cons.). LA COUR; Sur la fin de non-recevoir opposée par les défendeurs;Attendu que, si le failli est privé de l'administration de ses biens par l'art. 422 c. com., il en conserve la propriété, et a, par conséquent, intérêt, droit et qualité pour intervenir dans les instances relatives à la vente de ses immeubles, et veiller à l'observation des formalités prescrites par la loi pour empêcher qu'ils soient vendus au-dessous de leur valeur; -Rejette la fin de non-recevoir.

Statuant, au fond, sur le premier moyen pris de la violation des art. 564 c. com. et 964 c. pr., en ce que le syndic de la faillite a fait procéder à l'adjudication définitive des immeubles du failli au-dessous du prix de l'estimation, sans y avoir été autorisé par le juge-commissaire, qui, en matière de faillite, fait les fonctions des parents des mineurs; - Vu l'art. 564 c. com. et l'art. 964 c. pr.; - Attendu que le code de procédure, au titre de la vente des biens immeubles, ayant déterminé, dans les art. 954 et suiv., le mode d'exécution des formalités prescrites par les art. 457, 458 et 459 c. civ. pour la vente des biens immeubles qui n'appartiennent qu'à des mineurs, les dispositions du code civil ne peuvent pas être séparées de celles du code de procédure; - Attendu que le code de commerce n'a pas dérogé au code de procédure, postérieurement auquel il a été promulgué, et n'a prescrit aucun autre mode d'exécution desdits art. 457, 458 et 459 c. civ.;— Qu'ainsi, en ordonnant que les syndics de la faillite procéderont, sous l'autorisation du commissaire, à la vente des immeubles du failli, suivant les formes prescrites par le code civil pour la vente des biens des mineurs, l'art. 564 c. com. a suffisamment indiqué que ces formalités devaient être exécutées, ainsi que l'avaient spécialement déterminé les art. 955 et 964 c. pr., Attendu que ces principes ont été adoptés par un avis du conseil d'État, du 4 déc. 1810, approuvé le 9, et qu'ils ont été reconnus par le syndic lui-même, puisque, préalablement à la mise aux enchères prescrite par l'art. 459 c. civ., il a fait procéder à l'estimation par experts, comme l'ordonne l'art. 955 c. pr.; Qu'il suit de tout ce qui précède que l'art. 964 de ce dernier code était applicable à la cause, et qu'en confirmant le jugement par lequel l'immeuble du failli a été adjugé définitivement au-dessous du prix de l'estimation, quoique le syndic de la faillite n'y eût pas été autorisé par le juge-commissaire, la cour royale de Caen a faussement interprété l'art. 564 c. com., et expressément violé l'art. 964 c. pr. Sur le second moyen tiré de la fausse application de l'art. 710 c. pr., et de la violation expresse de l'art. 856 du même code; Vu lesdits art. 710 et 836 c. pr.; Allendu que l'art. 710 c. pr. n'est applicable

distinctes, l'unique personne judiciaire qui, dans la plupart des cas, réside dans les syndics chargés de représenter et la masse et le failli. Ce droit d'intervention ouvert au failli n'est autre que le droit de faire déclarer par les tribunaux que les syndics ne représentent pas suffisamment ses intérêts dans telles circonstances données, et notamment lorsqu'il y a contrariété réelle entre ses intérêts et ceux de la masse; d'où naît, pour les syndics, la difficulté de remplir complétement l'un et l'autre de leurs mandats. Il n'y a donc aucun motif de refuser, dans tous les cas au failli, le droit de provoquer pour la première fois en appel cette déclaration que la prudence des cours saura n'accorder qu'a

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vec mesure.

242. Par suite du principe qui reconnaissait au failli le droit d'intervention il a été jugé, sous le code de 1807, et l'on devrait encore décider aujourd'hui, qu'un failli peut se pourvoir en cassation contre un arrêt rendu avec ses syndics et dans lequel il n'a pas figuré (sol. implic., Req., 7 avril 1830, aff. Lasalle, V. Vente). Dans l'espèce, le pourvoi avait été formé directement par le failli contre un arrêt rendu sur un appel dirigé contre les syndics seuls. La chambre des requêtes rejeta le pourvoi sur le moyen du fond, admettant ainsi, peut-on dire, d'une manière

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d'office par M. Lasagni, rapporteur. Toutefois, on peut objecler que lorsque la cour de cassation procède par voie de rejet au fond, elle n'est pas censée avoir rejeté les fins de non-recevoir sur lesquelles elle s'abstient de statuer d'une manière expresse.

243. Les tiers intéressés, les créanciers du failli, par exemple, sont-ils fondés à intervenir dans la poursuite en expro-. priation des immeubles du failli? L'affirmative a prévalu sous le code de 1807 (V. sect. 14). — Jugé, toutefois, en principe, que les créanciers ne sont pas recevables à intervenir personnellement dans une instance intentée par le syndic (Paris, 24 déc. 1849, aff. Baudon, D. P. 50. 2. 195).

ART. 2.

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- Exigibilité des créances, compensation, caution, coobligé. - Cessation du cours des intérêts.

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tort, ce semble, que quelques-uns l'ont considérée comme reproduisant inutilement une règle de droit commun; il était plus conforme aux principes de soutenir, comme l'ont fait d'autres orateurs, que le failli ne pouvait être admis à figurer comme partie dans des instances où il est déjà représenté par ses syndics. Vainement, pour prouver qu'il a le droit d'ester en justice, alléguait-on qu'évidemment, en cas de demande en séparation de corps formée par sa femme, il défendrait lui-même à cette action. On répondait, avec raison, qu'il ne faut pas confondre les droits attachés à la qualité de mari, de père, en un mot, les droits de famille, et ceux qui sont relatifs aux biens; que, n'étant pas dépouillé des premiers, le failli peut ester en justice pour les faire valoir; mais qu'il n'en est pas de même à l'égard des seconds dont il est dessaisi. - M. le garde des sceaux Persil contestait le droit du failli en faisant remarquer que c'était, en cas de condamnation aux dépens contre le failli, grever la masse, puisque le débiteur ne possède plus rien. C'était, ajoutait le ministre, mettre en présence et constamment en opposition les syndics et le failli. Le paragraphe fut conservé sur l'observation faite par M. Jacquinot Pampelune, qu'il était sans inconvénient puisque les tribunaux seraient maîtres d'accorder ou de refuser l'intervention, qu'il était nécessaire à raison même de la rédac-implicite, la capacité du failli, car le moyen avait été soulevé tion générale et absolue de tout l'article, qui conduisait au rejet de l'intervention si la lol ne la permettait pas d'une manière expresse. C'est comme exemple de cette utilité ou opportunité que nous avons conservé les arrêts rendus sous le code de 1807. 240. M. Renouard, t. 1, p. 316, examine la question de savoir si lorsque les tribunaux ne jugent pas à propos d'admettre la demande en intervention formée par le failli, ils peuvent la rejeter par prétérition en se bornant à n'y pas statuer, ou s'ils ont, au contraire, le devoir de la rejeter expressément. Et il décide, avec raison, qu'en cette matière, comme en toute autre, les tribunaux ne peuvent se dispenser de statuer sur les conclusions prises devant eux, l'art. 480 c. pén. donnant ouverture à requête civile s'il n'a pas été prononcé sur l'un des chefs de la demande. Il a été jugé, conformément à cette doctrine, sous l'empire du code de 1807, qu'il y a violation de la loi, et partant ouverture à cassation dans l'arrêt qui ne statue pas sur les conclusions en interventions prises par un failli (Cass. 8 mai 1838, aff. Thomas-Varennes, V. no 219-5o).-On devrait également casser, sous la loi nouvelle, une décision qui déclarerait le failli sans qualité pour demander à intervenir. Les tribunaux sont seulement autorisés à repousser la demande en intervention en motivant le rejet de cette demande, mais ils ne sauraient aller au delà sans violer la loi. Telle est aussi l'opinion de M. Renouard.Enfin, si l'intervention était repoussée sans motifs et par simple forme dispositive, le jugement serait annulé pour contravention à l'art. 7 de la loi de 1810.-V. Intervention et Jugement (motifs). 241. La demande en intervention peut-elle être formée pour la première fois en cause d'appel? D'après les principes généraux, on devrait admettre la négative, car l'art. 466 c. pr. veut qu'aucune intervention ne soit reçue, si ce n'est de la part de ceux qui auraient droit de former tierce opposition, et l'art. 474 porte qu'une partie peut former tierce opposition à un jugement qui préjudicio à ses droits, et lors duquel ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été appelés. Il suit de ce dernier article que la tierce opposition n'est pas recevable de la part du failli puisqu'il a été représenté par les syndics et suffisamment appelé en leur personne, d'où la conséquence que l'intervention ne doit pas être admise. Il a pourtant été jugé, sous le code de 1807, que cette intervention doit être accueillie en appel, alors surtout que les premiers juges, en reconnaissant une créance du failli lui ont enjoint d'en affirmer la sincérité (Bruxelles, 21 juin 1820, aff. Godsal, V. no 238-2°).-M. Renouard, p. 318, estime qu'on devrait statuer de la même manière sous la loi de 1838, l'art. 443 c. com. dérogeant, par son caractère spécial, à la généralité de la règle du code de procédure. Cet article dérive de l'utilité de séparer, suivant les circonstances, en deux personnes judiciaires qu'aux surenchères autorisées en cas de vente par expropriation forcée, et que l'art. 836 du même code prescrit les formalités qui doivent être observées pour les surenchères faites, ainsi que le porte le tit. 4 du liv. 1❘ c. pr., dans le cas de surenchère sur aliénation volontaire; - Qu'il suit de là qu'en déclarant valable la vente faite sur la surenchère dont il s'a

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244. 1o Exigibilité des créances, compensation, caution, coobligé. Un autre effet que produit le jugement déclaratif de faillite, c'est de rendre « immédiatement exigibles, à l'égard du failli, les dettes passives non échues » (c. com. 444). - Ces mots à l'égard du failli, sont une restriction apportée par la loi nouvelle à l'ancien art. 448, qui, par sa généralité, établissait le principe de l'exigibilité des dettes non échues, même à l'égard des coobligés du failli, et cela dans tous les cas indistinctement, sauf toutefois la faculté accordée à ceux-ci de se dispenser de payer avant l'échéance en donnant caution. On verra bientôt que la condition de ces coobligés est aujourd'hui moins rigoureuse dans quelques cas.—On a proposé d'ajouter à la disposition qui nous occupe, ces mots : « sous la déduction de l'escompte des intérêts restant à courir, calculés au taux légal. » L'objet de cet amendement était d'établir l'égalité entre tous les créanciers. Mais on a fait observer que « ce serait une innovation fâcheuse; que ce serait même s'éloigner des principes du droit commun; que la disposition présentée n'est pas autre chose que l'application de l'art. 1188 c. civ.; que toutes les fois qu'il y a une diminution dans la sûreté, il y a déchéance du terme, et la créance devient exigible hic et nunc; qu'il ne faut pas faire acheter au créancier, en quelque sorte, ces avantages que la loi lui donne, car ils sont compensés par la diminution de la sûreté; que, d'ailleurs, Part. 445 arrête le cours des intérêts de toute créance non garantie par une hypothèque, à dater du jugement déclaratif de la faillite. »>

245. Il avait été décidé, sous le code de 1807, que c'était le fait de la faillite résultant de la cessation des payements, et non le jugement postérieur déclaratif de cette faillite qui rendait exigibles les créances non échues. Par suite, on admettait un créancier à intervenir sur l'opposition au jugement déclaratif de la git, quoique le poursuivant n'eût pas observé les formalités prescrites par ledit art. 836, la cour royale de Caen a fait une fausse application de l'art. 710, et expressément violé l'art. 836 du même code; Casse.

Du 21 nov. 1827.-C. C., ch. civ.-MM. Brisson, pr.-Larivière, rap.Cahier, av. gén., c. conf.-De Lagrange, Beguin et Guibout, av.

faillite, encore que sa créance ne fût pas échue (Paris, 22 déc. 1831, aff. Rousseau, V. n° 105). Aujourd'hui la loi dit expressément que c'est le jugement déclaratif qui crée l'exigibilité des dettes non échues. En conséquence, une telle décision ne saurait plus être suivie.

246. L'exigibilité s'étend à toutes les dettes du failli, civiles ou commerciales (V. no 213), car la loi ne distingue pas. -II a été jugé ainsi que la faillite rend exigibles les effets d'une donation faite par un père à sa fille et exigible seulement après le décès du donateur (Toulouse, 20 nov. 1835, aff. Peyras, V. Oblig.). M. Renouard, t. 1, p. 331, approuve cette solution, mais il critique l'arrêt en ce qu'il n'a pas restreint les effets de la donation à ce qui devait rester d'actif dans la succession du donateur. — L'exigibilité s'applique, pareillement tant aux créances hypothécaires qu'aux chirographaires (Bordeaux, 4 juin 1832) (1). — On verra, toutefois, que l'exigibilité ne doit s'entendre que du droit de prendre part à la distribution des deniers, alors qu'elle se fait à la suite de la liquidation opérée au nom de la masse, mais qu'elle ne va pas jusqu'à autoriser le créancier hypothécaire, dont la créance n'est pas échue, à poursuivre en son nom l'expropriation de l'immeuble qui lui sert de garantie. M. Pardessus, no 1127, émet une opinion conforme.

247. Enfin, on ne saurait interdire au créancier les actes conservatoires de son droit. -Jugé ainsi que la faillite rendant toutes les dettes exigibles, le protêt des billets souscrits par le failli peut être fait immédiatement et sans attendre leur échéance

(1) Espèce: (Polh C. faillite Loriague.) — Dans l'espèce, les syndics ont soutenu que le mandat de vendre donné par les sieurs Loriague était révoqué par la survenance de la faillite; que, d'ailleurs, le terme stipulé dans le contrat n'était pas échu; que les intérêts avaient été exactement payés; qu'il n'en était point dû; que les deux cas prévus pour le remboursement n'étant pas arrivés, on ne pouvait valablement l'exiger; que l'art. 448 c. com., qui porte que l'ouverture de la faillite rend exigibles les dettes passives non encore échues, ne pouvait être invoqué dans l'espèce, parce que cet article ne s'applique qu'aux créances chirographaires, et non à celles qui sont garanties par une hypothèque, et à l'égard desquelles il n'y a pas même motif de décider, attendu qu'elles no périclitent pas; que les conventions auxquelles les parties s'étaient réci-" proquement soumises devaient être exécutées. — Jugement qui, par ces considérations, annule les commandements et les autres actes de poursuites; - Appel. - Arrêt.

LA COUR;-Attendu que le mandat de vendre donné à Polh, par l'acte du 18 mars 1831, a été constitué dans son intérêt, et que, par conséquent, il n'a pas été révoqué par la faillite des sieurs Loriague et fils aîné;

Attendu qu'il est vrai que Polh, aux termes du contrat, ne pouvait vendre l'immeuble qui lui était hypothéqué que dans le cas où les débiteurs laisseraient un semestre d'intérêts sans payement, et où il ne serait pas remboursé en capital et intérêts à l'époque de l'exigibilité de l'obligation, c'est-à-dire dans le délai de cinq ans; que les intérêts ne sont point en retard, et que le terme de cinq ans n'est pas expiré; mais que les sieurs Loriague et fils aîné ont été déclarés en faillite par jugement du tribunal de commerce; que l'art. 448 c. com. dispose que l'ouverture de la faillite rend exigibles les dettes passives non échues; que la loi ne fait aucune distinction entre les créances chirographaires et les hypothécaires;

Que l'hypothèque est sans doute une sûreté de plus accordée au créancier; que, néanmoins, elle n'est qu'un accessoire de l'obligation personnelle; qu'il faut reconnaitre que le créancier a suivi la foi d'un débiteur notoirement solvable au moment du contrat, et que lorsque celui-ci est déclaré insolvable par l'ouverture de la faillite, la situation du créancier change, et qu'il est juste qu'il puisse faire ses diligences pour obtenir, sur l'actif de la faillite, un payement qu'il ne peut plus attendre des promesses et du crédit de son débiteur ;-Attendu que les syndics des sieurs Loriague et fils aîné ne peuvent invoquer la réciprocité des obligations contenues dans le contrat du 18 mars 1831, pour en induire que les intérêts étant payés et le terme stipulé n'étant pas échu, le sieur Polh ne peut exercer le mandat de vendre, qui était limité, soit au cas où un semestre d'intérêts serait arréragé, soit au cas où les cinq ans pour le payement du capital seraient expirés; que la réciprocité des engagements ne peut être invoquée que par celui qui est à même de remplir les siens ; que le négociant qui déclare sa faillite, manque lui-même à cette réciprocité, et qu'il se rend non recevable à en invoquer l'effet; Attendu que, si les sieurs Loriague et fils aîné sont privés du bénéfice du terme stipulé par le contrat, c'est la conséquence d'un fait qui leur est personnel; que, dans l'esprit du contrat, la faculté de vendre pouvait être exercée lorsque la créance serait exigible, et que ce droit a été ouvert aussitôt que l'exigibilité est résultée de l'ouverture de la faillite; - Faisant droit de l'appel interjeté par Polb, du jugement rendu par le tribunal civil de Bordeaux, le 5 avril dernier, a mis et met l'appel et ce dont a été appelé au néant;

(Nancy, 1re ch., 31 août 1831, M. Breton, pr., aff. Tetel C. Varin; extrait de M. Garnier, jurisp. de Nancy, vo Faillite, no 14).

248. Remarquons, du reste, que si le créancier qui invoque le bénéfice de la loi qui rend exigible sa créance à terme, est tenu lui-même d'une obligation corrélative envers le failli; si, en d'autres termes, il y a eu contrat synallagmatique, il ne pourra différer l'acquittement de sa propre obligation jusqu'à l'échéance du terme et réclamer en même temps l'exigibilité ouverte en sa faveur. - Il a été jugé ainsi que lorsque le payement du prix de vente est subordonné à la livraison de l'objet vendu, et qu'un terme a été convenu au profit du vendeur, pour faire délivrance, la faillite de l'acheteur ne prive pas celui-ci du bénéfice du terme, et réciproquement ne donne pas droit au vendeur d'exiger le prix avant d'effectuer la délivrance: ici ne s'applique pas l'art. 444 c. com. (Bordeaux, 16 juill. 1840) (2).

249. Les créanciers d'un failli sous condition suspensive ou résolutoire peuvent-ils profiter du bénéfice de l'art. 444 c. com.? Jugé que ce bénéfice ne s'étend pas aux créances sous condition suspensive (Paris, 18 déc. 1840, aff. Sicard, V. Oblig.). La question est discutée vo Oblig., sur l'art. 1188 c. civ.

250. Il ne faut pas croire que l'exigibilité résultant de l'événement de la faillite produise les mêmes effets que l'échéance ordinaire. « La loi, dit fort bien M. Renouard, t. 1, p. 321, veut prémunir le créancier à terme contre la suppression des garanties dont la faillite le prive; mais elle ne veut pas, par un changement dans la conséquence de son titre, l'avantager au

émendant, tollit les inhibitions provisoires accordées aux syndics des créanciers de Loriague et fils aîné; lui permet de donner suite à ses commandements et de faire procéder à la vente de la maison à lui hypothéquée, conformément au contrat du 18 mars 1831.

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Du 4 juin 1832.-C. de Bordeaux, 1 ch.-M. Roullet, 1er pr. (2) Espèce (Audon C. syndics Dumont et Vivès.) Une venie considérable d'eaux-de-vie est faite le 6 sept. 1836, par Audon, négociant, à la maison Dumont-Durand et Vivès, livrables, moitié en mai, moitié en juin 1837. Dans l'intervalle, la maison Dumont tombe en faillite. A l'échéance de la livraison de mai, les syndics assignent Audon devant le tribunal de commerce de Bordeaux, pour qu'il ait à livrer les eaux-devie vendues, offrant d'en payer le prix au moment de la délivrance. Même demande et mêmes offres à l'égard de la seconde livraison qui devait avoir lieu par tout juin. — Audon répond qu'aux termes de l'art. 1188 c. civ. la maison Dumont est déchue du bénéfice du terme stipulé lors du marché de 1836; que, sans doute, elle aurait pu le forcer à l'exécution, si le terme fixé pour la délivrance eût expiré avant la faillite, puisqu'elle avait alors le plein exercice de ses droits; que d'ailleurs, d'après l'art. 1613 du même code, le vendeur n'est plus obligé à livrer, si, depuis la vente, l'acheteur est tombé en faillite, car il y aurait pour lui danger imminent de perdre le prix; qu'en outre l'art. 1657 c. civ., déclarant qu'en matière de denrées et d'effets mobiliers la résolution de la vente a lieu de plein droit, au profit du vendeur, après l'expiration du terme convenu pour le retirement, et que l'art. 444 c. com., portant que la faillite rend exigibles toutes les de tes, il s'ensuit que la livraison des trois-six était devenue exigible aussitôt après la déclaration de faillite; que, n'ayant pas été exigée à cette époque, qui, par l'effet de la faillite, était devenue le terme du retirement, la vente se trouvait résolue de plein droit; qu'enfin le marché n'était pas sérieux et n'avait pas pour objet une livraison réelle de trois-six; qu'il n'y avait point eu vente réelle de celte marchandise, mais un jeu sur la baisse et la hausse de ce prix, jeu qui devait se terminer non par la délivrance des spiritueux, mais uniquement par le payement de la somme qui formerait la différence entre le prix convenu et celui que présenterait le cours au terme fixé, aux mois de mai et de juin 1837. - Jugement qui ordonne la livraison aux offres faites par les syndics. — Appel par Audon. — Arrêt.

LA COUR; Attendu que, d'après l'art. 1613 c. civ., le vendeur n'est dispensé de faire la délivrance que dans le cas où, par suite de la faillite, il se trouve en danger imminent de perdre le prix; Qu'en fait l'appelant ne s'est pas trouvé dans cette situation, puisqu'à l'époque où la délivrance devait être opérée, le prix lui a été offert; —Que si, à raison de la faillite survenue entre la conclusion du marché et l'époque de son exécution, le vendeur pouvait demander caution, c'était une faculté qu'il était libre d'exercer, et qu'Audon ne s'en étant pas prévalu, sous ce rapport encore l'article précité ne lui est pas applicable; — Attendu qu'il ne s'agit point d'une simple dette ou engagement exigible à un terme fixe; - Que le payement du prix était subordonné à la livraison, et que le terme accordé au vendeur pour livrer n'étant pas annulé par la faillite, il en résulte qu'elle n'a pas non plus annulé celui qui avait été fixé pour le payement, et que, dans cette hypothèse, l'art. 444 c. com. n'est pas non plus applicable, etc.

Du 16 juill. 1840.-C. de Bordeaux, 1 ch.-M. Roullet, 1er pr.

préjudice des autres créanciers. L'exigibilité veut dire seulement qu'il prendra part aux opérations de la faillite et aux répartitions de dividendes comme si la créance était échue. » Le même principe se trouve posé dans un arrêt où on lit : « si l'ouverture d'une faillite opère la résolution des termes de crédit accordés au failli et rend exigibles les créances non échues, il ne suit pas que ces créances doivent être acquittées sur-le-champ »> (Motif de l'arrêt de Metz, 28 déc. 1816, aff. B..., V. plus bas). 251. L'exigibilité produite par la faillite ne saurait opérer aucune compensation de la créance du failli avec la somme que le créancier pourrait lui-même devoir au failli. La compensation, en effet, est un véritable payement. Or, après la faillite déclarée, nul payement ne saurait être fait

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(1) 1 Espèce:-(Vangorsel, etc. C. Verplancken.)—Vermeirein, négociant à Gand, avait reçu des sieurs Vangorsel et Smallegenge des marchandises en commission. Il en avait vendu une partie à Verplancken, moyennant 5,111 fr. Depuis, Vermeirein fit faillite et disparut. Vangorsel et Smallegenge réclamèrent le prix encore dû de ces marchandises, et furent autorisés par la masse des créanciers du failli à en poursuivre le recouvrement sur Verplancken.-Celui-ci prétendit compenser sa dette avec plusieurs effets de commerce souscrits par Vermeirein, et dont il était devenu propriétaire par endossement. Vangorsel et Smallegenge repoussèrent l'exception sur le motif que les effets n'étaient pas échus lors de l'ouverture de la faillite, il ne pouvait y avoir de compensation entre une créance non échue et une dette échue. La compensation fut admise par le tribunal de commerce. - 6 fév. 1808, arrêt con.. firmatif de la cour d'appel de Bruxelles : « Attendu que la non-échéance des effets de Vermeirein n'a pu être un obstacle à la compensation, vu que la faillite rendait exigible toute créance à terme; que la compensation s'opère de plein droit, et qu'ainsi elle devait avoir effet dès l'instant de la faillite de Vermeirein. »Pourvoi pour violation des art. 1289 et 1291 c. civ., et des art. 442, 443 et 446 c. com. - Arrêt. LA COUR;

Vu l'art. 1291 c. civ., la déclaration du 18 nov. 1702, et les art. 443 et 446 c. com.;-Attendu que les articles précités du code civil, qui ne font que rappeler les dispositions des lois anciennes, exigent, pour opérer une compensation de deux créances, qu'elles soient également liquides et exigibles; Qu'il est reconnu au procès que Verplancken était débiteur de Vermeirein d'une somme échue, lorsque ce dernier a fait faillite, et qu'il ne présente, pour éteindre cette créance par la voie de la compensation, que des effets de commerce de ce même Vermeirein, dont il était devenu porteur par voie d'endossement, qui n'étaient pas échus le jour de la faillite, et dont il n'aurait pas pu retirer le payement par anticipation dans les dix jours qui l'ont précédée; Que si ces effets, dont Verplancken était porteur, ne sont devenus exigibles que par la faillite de Vermeirein, ils ont été atteints par elle, et par conséquent soumis à en subir les événements à l'égal des autres créances de même nature; et, d'autre part, cette faillite a, dans le même moment, saisi et arrêté la créance du failli sur Verplancken, et en la rendant le gage et la propriété de tous les créanciers, elle l'a soustraite à toute compensation qui n'aurait pas été faite antérieurement; - Attendu que toutes les lois sur les faillites, tant nouvelles qu'anciennes, ayant voulu qu'au moment de l'ouverture de la faillite les droits des créanciers demeurent invariablement fixés; et même que tous les payements faits pour dettes commerciales non échues dans les dix jours qui l'ont précédée soient rapportés, il est impossible de supposer que la faillite puisse donner à un créancier, porteur d'effets de commerce non échus, le droit de se faire payer en entier, par voie de compensation, d'une créance dont il aurait dû rapporter le montant, s'il l'avait reçu dans les dix jours qui ont précédé la faillite; - Qu'un pareil privilége accordé à un créancier au préjudice des autres ouvrirait une porte trop large aux abus, et faciliterait les moyens d'éluder les règles que les lois ont établies pour conserver l'actif du failli et maintenir l'égalité entre les créanciers; d'où il suit que l'arrêt de la cour d'appel de Bruxelles, en admettant Verplancken à compenser ce qu'il devait à Vermeirein pour prix des marchandises à lui vendues, avec des effets de commerce non échus le jour de la faillite, a violé les lois ci-dessus citées; Casse.

Du 12 fév. 1811.-C. C., sect. civ.-M. Delacoste, pr. d'âge.

2 Espèce:(Faillite Defrondat C. Cesbron.) - Defrondat, négociant à Paris, avait accepté une lettre de change de 5,000 fr., tirée à l'ordre des sieurs Cesbron, d'Angers, et payable le 30 mai 1819.-De son côté, Defrondat était porteur d'une traite de 2,000 fr., acceptée par la maison Cesbron, et payable le 10 avril 1819. La maison Cesbron avait deux établissements, l'un à Paris, l'autre à Angers, mais connus tous deux sous la même raison sociale.15 mars 1819, faillite du sieur Defrondat. Delpech, syndic, poursuit en cette qualité, à l'échéance de la traite de 2,000 fr., le payement de celte traite sur la maison Cesbron, et il obtient contre le comptoir de cette maison établi à Paris un jugement du tribunal de commerce de la Seine. Sur l'appel, les sieurs Cesbron ont soutenu que la créance de 5,000 fr. qu'ils avaient sur Defrondat, et qui était devenue exigible par l'effet de sa faillite, devait se compenser, jusqu'à TOME XXIV.

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par le failli. Ainsi, lors même qu'on supposerait que l'exigibilité accidentelle dont il s'agit ici a les mêmes effets que la véritable échéance du terme, aucune compensation ne pourrait être opposée à la masse créancière, puisque le créancier qui invoquerait celte compensation, s'il avait reçu son payement, serait tenu de rapporter ce qu'il aurait touché pour venir au marc le franc avec les autres. Tous les auteurs sont unanimes pour décider la question dans ce sens (V. notamment MM. Pardessus, no 1125, et Renouard, t. 1, p. 321). — Il a été jugé ainsi qu'un créancier ne peut compenser une dette antérieurement échue avec une créance qui n'est devenue exigible que par la faillite; car cette créance ne se compose plus que des dividendes que l'actif offrira (Cass., 12 fév. 1811; 17 fév. 1823; 24 nov. 1811 (1); concurrence avec les 2,000 fr. dont ils étaient débiteurs. 18 juin 1819, arrêt de la cour de Paris qui admet la compensation. En vertu de cet arrêt, la maison Cesbron d'Angers a demandé la restitution des 2,000 fr. que la maison Cesbron de Paris avait été obligée de payer à la faillite Defrondat, en exécution du jugement du tribunal de commerce qui l'avait condamnée. Le syndic a répondu que la maison d'Angers ne pouvait se prévaloir de l'arrêt de la cour de Paris du 18 juin 1819, rendu avec la maison de Paris, et auquel la maison d'Angers était tout à fait étrangère. - 7 août 1819, nouvel arrêt de la cour de Paris qui reconnaît, en fait, que les deux établissements d'Angers et de Paris ne forment qu'une seule et même maison, et, expliquant, au besoin, son premier arrêt du 18 juin précédent, en ordonne l'exécution indifféremment sur la poursuite de l'un ou de l'autre des deux comptoirs.-En cet état, pourvoi par la faillite Defrondat contre l'arrêt du 18 juin seulement. - Arrêt. LA COUR; Au fond; Vu les art. 442, 443 et 446 c. com.; Attendu que la compensation est un mode de libération réciproque, introduit par la loi entre deux particuliers qui se trouvent en même temps créanciers et débiteurs l'un de l'autre ; que chacun d'eux est alors fondé à retenir en payement de la somme qui lui est due celle qu'il doit à l'autre, ce qui opère, sans bourse délier, l'extinction des deux créances, jusqu'à concurrence de leur quo ité respective; - Attendu que si, aux termes du code civil, elle s'opère de plein droit et par la seule force de la loi, il faut néanmoins que le concours des circonstances ne s'y oppose pas; Attendu que, dans l'espèce, elles se réunissaient pour y mettre obstacle; qu'en effet, Defrondat était tombé en faillite ouverte le 15 mars 1819; qu'il devait alors aux frères Cesbron, négociants à Paris, le montant d'une lettre de change de 5,000 fr., par lui acceptée, mais qui ne devait venir à échéance que le 30 mai suivant, tandis que, de leur côté, lesdits frères Cesbron étaient ses débiteurs du montant d'une traite de 2,000 fr., qui ne devait échoir que le 10 avril 1819; — Attendu que, dans une pareille situation des choses, la compensation ne pouvait pas être légalement autorisée; puisqu'au moment où la faillite Defrondat a été déclarée, les créances respectives n'étaient pas devenues exigibles par l'échéance du terme, condition essentielle pour que la compensation puisse être admise; Attendu, d'ailleurs, qu'à compter de l'ouverture de sa faillite, et aux termes de l'art. 442 c. com., Defrondat avait été dessaisi de plein droit de l'administration de tous ses biens, qui étaient devenus le gage de ses créanciers, auxquels il n'offrait plus aucune sûreté; que, dès lors, il n'avait plus qualité ni pour payer, ni pour recevoir; que, dès ce moment, les droits de ses créanciers demeuraient invariablement fixés, et qu'on ne pouvait pas admettre que le porteur d'un effet de commerce non échu fût recevable à demander son payement par voie de compensation après la faillite, puisque, s'il l'avait reçu dans les dix jours qui l'auraient précédée, il aurait été tenu d'en faire raison à la masse; Attendu enfin qu'une pareille faveur, ainsi accordée à un créancier au préjudice des autres, introduirait une espèce de privilége qui n'est point autorisé par les lois; que ce serait d'ailleurs faciliter les moyens d'éluder les règles qu'elles ont établies pour conserver l'actif du failli, et maintenir l'égalité entre ses créanciers, tous également à plaindre, mais tous aussi également frappés par la faillite; -Attendu que de tout ce que dessus il suit que la cour royale de Paris a, par son arrêt du 18 juin 1819, violé les articles de la loi ci-dessus citée, et, en outre, faussement appliqué les art. 1289 el 1291 c. civ., et l'art. 448 c. com. ; Casse.

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Du 17 fév. 1823.-C. C., sect. civ.-M. Brisson, pr.-Minier, rap.

3 Espèce:(Veuve Blanchy C. Gas.)- Le sieur Caizergues, négociant, était créancier de la dame Gas pour une somme principale de 3,600,fr. Le 6 mars 1811, le sieur Gas, chargé de cette dette, devint porteur d'un billet à ordre de 4,000 fr. souscrit par Caizergues et payable à la fin du mois de juin de la même année. Près de deux mois avant cette échéance, le 13 mai 1811, Caizergues fut déclaré en état de faillite. Les créanciers se réunirent et passèrent avec le failli, en mai 1815, un concordat par lequel ils lui firent remise de 70 p. 100 du montant de leurs créances et le chargèrent du recouvrement de son actif.-En 1816, Caizergues assigna le sieur et la dame Gas en payement de la somme de 4,220 fr. montant en principal et intérêts de sa créance sur celle dame. - En 1822 et 1823, le sieur Gas actionna à son tour le sieur Caizergues pour voir dire que la somme réclamée par ce dernier était compensée jus

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Bruxelles, 24 mars 1821, aff. Steenkist,V. no 605-1°).-Décision semblable qui considère « que la circonstance que l'art. 448 c. com. (ancien) dispose que l'ouverture de la faillite rend exigi- | bles les dettes passives non échues, ne saurait être prise en considération pour donner aux créanciers du failli un droit qu'ils n'auraient pas eu si la faillite ne se fût pas manifestée, c'est-àdire de compenser une dette exigible avec une créance à terme; qu'il est évident que la disposition de l'art. 448 c. com. n'a pas eu pour but une dérogation à l'art. 1290 c. civ., qui veut que les deux dettes soient également liquides et exigibles, mais a seulement eu pour objet de ne pas retarder les formalités prescrites par le code de commerce pour la vérification des créances, et de ne pas priver un créancier, qui a un droit acquis et qui se trouve en possession des biens du failli, du droit de surveiller les opérations de la faillite, et de concourir à un concordat, ainsi

qu'à due concurrence avec celle de 4,000 fr., montant du billet à ordre susmentionné. Cette instance était encore pendante, lorsque, par acte du 25 mai 1827, Caizergues a cédé sa créance à la veuve Blanchy. Assignation du sieur Gas à cette dame, pour voir déclarer la cession nulle comme ayant pour objet une créance éteinte par compensation.

13 mai 1836, jugement qui admet en compensation la dette résultant du billet à ordre, mais seulement jusqu'à concurrence de 30 p. 100 de la somme énoncée en ce billet, par application du concordat qui faisait remise à Caizergues de 70 p. 100.- Appel de Gas.

30 juin 1837, arrêt infirmatif de la cour de Montpellier, qui décide que la somme intégrale de 4,000 fr., montant du billet, doit entrer en compensation, par les motifs suivants :-« Attendu que le sieur Caizergues, ancien négociant failli, a cédé, par acte du 25 mai 1827, ses droits contre le sieur Gas à la dame Blanchy;-Attendu que cette dame ne peut avoir plus de droit que son cédant et que le sieur Gas peut demander contre cette dame la compensation des sommes qu'il devait au sieur Caizergues avec celles qui lui étaient dues par ce dernier, avec d'autant plus de raison que, dans l'espèce, celte cession n'a été faite que postérieurement à l'instance introduite devant le tribunal de Montpellier par ledit Gas contre Jedit Caizergues, pour obtenir cette compensation;-Attendu que le sieur Gas était à la fois créancier et débiteur du sieur Caizergues, négociant déclaré en faillite par un jugement du tribunal de commerce de Montpellier du mois de mai 1811, et que l'état de faillite de ce négociant a cessé par suite du concordat du mois de mai 1813 homologué par le même tribunal de commerce; Attendu, en droit, que, suivant les art. 1289 et 1290 c. civ., la compensation s'opère de plein droit, à l'insu des débiteurs, entre deux dettes également liquides et exigibles, au moment où elles se rencontrent;-Attendu que, d'après l'art. 448 c. com., la créance du sieur Gas est devenue exigible et que, dans tous les cas. elle a été exigible le 30 juin 1811 (échéance du billet à ordre); — Attendu que, si l'état de faillite établit une dérogation aux principes du droit commun en matière de compensation, cette dérogation n'existe que dans l'intérêt de la masse des créanciers, en considération du dessaisissement dont le failli est frappé et par une conséquence de cette saisie-arrêt légale que l'ouverture de la faillite jette sur les biens du débiteur; - Attendu qu'il résulte de la combinaison des art. 444, 445 et 447 c. com. que les nullités et exceptions établies en faveur des créanciers sont relatives et ne sauraient être opposées par le failli lui-même ; que, d'ailleurs, la compensation n'est qu'un mode de payement et que, quoique d'après l'art. 446 c. com. toutes sommes payées dans les dix jours qui précèdent l'ouverture de la faillite doivent être rapportées, il est néanmoins de jurisprudence constante que ce droit d'exiger le rapport n'appartient qu'à la masse des créanciers; que, par suite et par identité de raison, il y a lieu de refuser au failli rétabli dans l'exercice de ses actions le droit d'opposer l'exception de non-compensation; - Attendu que, d'après ces motifs et les circonstances particulières de la cause, il y a lieu de déclarer éteinte, par voie de compensation, jusqu'à que concurrence de la somme de 4,000 fr. due au sieur Gas, celle de 4,220 fr. due par celui-ci au sieur Caizergues. >>

Pourvoi de la veuve Blanchy, pour violation des art. 442, 443, 446 et 524 c. com. (ancien), et fausse application de l'art. 448 du même code; fausse application des art. 1289 et 1290, violation de l'art. 1291 c. civ., en ce que l'arrêt attaqué a admis en compensation le montant intégral du billet a ordre de 4,000 fr., bien que ce billet ne fût pas exigible avant l'ouverture de la faillite du souscripteur, qu'il ne pût servir à éteindre une créance du failli tant que durait l'état de la faillite, et que le concordat surveru sur ces entrefaites eût réduit la dette résultant dudit billet à 30 p. 100.-Arrêt.

LA COUR;— Vu les art. 442,443, 446, 524 c. com., et 1291 c. civ.; -Attendu que la compensation ne s'opère qu'entre deux créances de même nature et qui sont en même temps liquides et exigibles;-Attendu qu'il est constant, en fait, que si, au moment de la faillite de Caizergues, la créance de 4220 fr. qu'il avait à faire valoir contre Gas était exigible, celle de 4,000 fr., que ce dernier avait contre lui, n'est arrivée à son échéance que postérieurement à cette faillite; — Qu'il suit de là qu'une

qu'à tous les actes auxquels un créancier est appelé » (Lyon, 25 janv. 1825, 4o ch., M. Montviol, pr., aff. faill. Croisel C. Buffeton).

252. De même, il a été jugé : 1o qu'un agent de change à qui il a été confié des effets pour les négocier, est tenu de remettre le produit de la négociation à ses commettants, sans pouvoir l'appliquer à son profit, sous prétexte qu'il est leur créancier d'autant ou même de sommes plus fortes; qu'en conséquence il ne peut, en cas de faillite des propriétaires de ces effets, les retenir, au préjudice de la masse des créanciers, mais que le montant doit en être déposé à la caisse des consignations pour la conservation des droits de tous (Paris, 24 mai 1808, aff. Gallot, V. Bourse de com., n° 314); 2° Que deux masses de créanciers de faillis ne peuvent s'opposer la compensation (Liége, 26 janv. 1832) (1);—3° Que le porteur d'un effet de commerce

des conditions essentielles pour produire la compensation ayant manqué à l'ouverture de la faillite, les deux créances dont il s'agit n'ont pu s'éteindre, à cette époque, en tout ou en partie, par ce moyen; Attendu que l'état de faillite de Caizergues n'a rien changé à la position respective des créances sur ce point et que, pendant tout le temps qu'il a duré, la compensation invoquée par Gas n'a pu avoir lieu;-Attendu, en effet, que, si l'art. 448 de l'ancien code de commerce a rendu exigibles par la simple ouverture de la faillite, toutes les dettes passives non échues, c'est uniquement afin de donner à tous les créanciers le droit d'être payés en même temps sur les biens du failli; — Que, suivant les dispositions des art. 442, 443 et 446 du même code, à compter de cette ouverture, le failli est dessaisi de l'administration de ses biens; que les droits de ses créanciers se trouvent alors si irrévocablement fixés, qu'aucun d'eux ne peut plus acquérir sur son actif ni privilége ni hypothèque au préjudice de la masse, et que même toutes sommes payées dans les dix jours qui précèdent la faillite, pour dettes commerciales non échues, doivent être rapportées; Attendu, en conséquence, qu'une compensation en faveur d'une créance contre le failli, échoue postérieurement à l'ouverture de la faillite, ne peut s'opérer pendant que le dessaisissement qui en résulte contre ce dernier continue de subsister, puisque cette compensation produirait un payement que la loi ne lui permet pas de faire et constituerait, par là, au profit d'un des créanciers, un privilége ou un avantage qui blesserait l'égalité qu'elle a voulu établir entre tous; - Attendu qu'aux termes de l'art. 524 c. com., le concordat qui a été homologué est obligatoire pour tous les créanciers de la faillite; qu'ainsi, lorsque Caizergues a été rétabli dans l'exercice de tous ses droits, par le concordat homologué intervenu, entre lui et ses créanciers, dans le mois de mai 1813, les conventions qui ont été consenties ont dû régler sa position et celle de Gas relativement à la compensation des créances qu'ils pouvaient mutuellement s'opposer; - Attendu qu'il n'est pas contesté que ce concordat a fait à Caizergues la remise de 70 p. 100 sur toutes les créances qui composaient son passif; - Attendu, dès lors, que Gas n'a plus eu contre lui qu'une créance réduite dans cette proportion et que, s'il a pu, plus tard, prétendre qu'elle avait servi à éteindre par la compensation celle de 4,120 fr. dont il était resté son débiteur, ce n'a pu être que dans les limites auxquelles l'avait restreinte le concordat dont toutes les conditions avaient été nécessairement stipulées dans l'intérêt commun de la masse des créanciers et du failli; Attendu cependant que l'arrêt attaqué a déclaré éteinte par ce mode de payement, jusqu'à concurrence de la somme de 4,000 fr., formant la totalité de la créance primitive de Gas sur Caizergues, celle de 4,220 fr. 90 cent. qu'il devait à ce dernier; qu'en statuant ainsi, il a tout à la fois violé les articles de loi précités et fait une fausse application des art. 1289, 1290 c. civ., et 448, ancien c. com.;-Casse. Du 24 nov. 1841.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1er pr.-Bryon, rap.

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(1) (Syndic Dubois C. syndic Jaumenne.) - LA COUR ; — Y a-t-il lieu à compensation? — Attendu que s'il s'agissait de deux particuliers libres de disposer de leurs biens et ayant capacité de recevoir et de payer, la compensation aurait lieu à due concurrence, entre les sommes dont l'appelant serait devenu créancier et celle qu'il reconnaît devoir à l'intimé, pour les intérêts du prix de vente, depuis le 11 déc. 1822 au 11 déc. 1823; mais que les deux parties se trouvant en état de faillite, lorsque les créances et dettes respectives out coexisté, la compensation ne peut plus exister; Que la compensation suppose la faculté respective de payer entièrement la somme que l'on doit, supposition inadmissible dans le cas d'une faillite où les ressources du failli ne lui permettent de payer qu'une partie de ses dettes; - Que, d'autre part, un créancier ne peut recevoir du failli la totalité de sa créance, par la raison qu'il est débiteur d'une pareille somme envers le failli, puisque le sort de tous les créanciers doit ètre le même, et qu'aucun d'eux, hors le cas d'une créance privilégiée, ne peut en recevoir le payement au préjudice des autres; - Attendu que les mêmes motifs existent, lorsque les personnes entre lesquelles il s'agit d'une compensation sont l'une et l'autre en faillite; - Qu'il n'y a donc d'autres moyens de conserver, entre les créanciers de chaque faillite,

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