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clientèle, à tuer un nombre exagéré de bestiaux, afin de pouvoir trouver les morceaux de choix qu'on lui demande. Il en résulte, de nouveau, une abondance de bas morceaux qu'il doit écouler à perte; nouvelle hausse sur les morceaux de première qualité!

4° Nous n'avons pas encore pu nous délivrer de l'impôt du sou, qui en définitive doit être payé par quelqu'un ; c'est, indirectement, le consommateur qui paie les frais de ces pourboires, décidément entrés dans nos mœurs, du haut en bas de l'échelle sociale.

5° Même en temps ordinaire, et dans l'hypothèse où nous nous sommes placé du maintien du prix de la viande sur pied pendant une série de dix années, il peut arriver et il arrive que le prix de la viande hausse, soit d'abord par suite de la baisse des produits du cinquième quartier, soit encore par suite de l'abondance de ces produits soumis aux exigences de l'offre et de la demande, abondance provenant d'importations étrangères, soit encore par suite des effets de la spéculation qui peut opérer, sans danger, sur ces produits de conservation facile. Chaque année nous voyons, en effet, augmenter, dans une certaine mesure, l'importation des suifs et des peaux.

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L'augmentation de ces importations n'est pas considérable, il est vrai; mais, venant s'ajouter à notre

excès de production et à la nécessité où nos fermiers se sont trouvés de vendre, à tout prix, leurs bestiaux faute de fourrage, elle a fourni son coefficient dans la baisse. Cette baisse est encore motivée par une diminution dans la consommation des articles fabriqués soit avec les suifs, soit avec les peaux, consommation qui n'augmente pas en proportion de la production de la viande. La paraffine et les huiles minérales prennent de plus en plus leur place sur le marché, et diminuent d'autant l'emploi des corps gras tels que les suifs et les saindoux. Les articles fabriqués avec les peaux diminuent d'importance chaque année ainsi, les courroies en cuir sont remplacées par les courroies en coton et en caoutchouc ou par les câbles en chanvre.

6o Les municipalités devraient, de leur côté, ne plus mettre à l'octroi des droits exorbitants. A Paris, notamment, les 12 centimes prélevés de ce fait, et par kilog., le sont au détriment du consommateur et du consommateur pauvre.

XIII

Quels sont les moyens de remédier à cette situation?

Avant de les étudier, il est nécessaire d'examiner ce qui se passe dans le commerce de la boucherie.

Depuis 1863, la boucherie est libre. En 1848, la boulangerie et la boucherie s'accommodaient assez bien des règlements vexatoires de l'Administration; il leur semblait doux et intéressant de passer pour des victimes; car, en échange, les bouchers et les boulangers exerçaient une profession soustraite aux dangers de la concurrence; c'était une large compensation.

Avec la liberté, le nombre des bouchers s'accrut d'une façon inconsidérée, et avec elle la concurrence; les

bénéfices, par ces deux causes, diminuèrent dans de larges proportions. Avec la liberté de la boucherie, on ne s'aperçut en aucune façon que les prix diminuaient dans la proportion large que l'on espérait; bien au contraire. Les bénéfices étant répartis entre un plus grand nombre de concurrents, la clientèle de chacun. des nouveaux bouchers étant nécessairement plus faible, les prix restèrent stationnaires.

On vit s'installer un nombre considérable de détaillants qui, chargés de frais généraux, et ne pouvant débiter qu'un nombre très restreint d'animaux, durent maintenir élevés les prix. C'était piétiner sur place, c'était le statu quo.

Ce qui eût été une solution, et ce qui sera une solution, c'est le contraire; c'est l'organisation de vastes boucheries qui, par l'étendue de leurs affaires, diminuant leurs frais généraux, pourront donner la viande à meilleur marché.

C'est également, à côté de ces boucheries libres, l'existence de boucheries coopératives, empêchant toute ligue, tout pacte pour maintenir des prix élevés.

C'est, assurément, aux consommateurs qu'il appartient d'aider à ce mouvement économique, à cette création de vastes boucheries. Les magasins du Louvre et du Bon-Marché, la création de grandes usines, nous donnent chaque jour l'exemple des bas prix auxquels on peut atteindre, par une organisation de ce genre.

C'est la suppression des petits commerces, des petites industries; c'est, si on le veut, la constitution d'une féodalité d'un autre genre. Peu nous importe. Un courant nous entraine, auquel il est inutile de vouloir résister

Il appartient encore aux consommateurs de réagir, en abandonnant leurs idées fausses et préconçues à cet égard, contre cette déplorable manie de dédaigner les bas morceaux; car, la difficulté que les détaillants éprouvent à se défaire de cette espèce de viande, est

une des plus grandes causes de la cherté de la viande. Les morceaux de choix, tels que les aloyaux, filets et côtes, trouvent seuls immédiatement preneurs.

Aussi, à l'étal des bouchers, les morceaux dits platesde-côtes et gîtes provenant de bœufs de première qualité, mis en vente à 30 ou 35 centimes la livre, restent presque partout invendables, à Paris. Il faut revendre ces morceaux aux marchands ambulants, qui font à la boucherie patentée une incessante concurrence.

XIV

Nous n'ignorons pas que le commerce de la boucherie, à Paris, réagit sur les opérations de la boucherie. de la province. De mème que la capitale nous sert, sans que nous les lui demandions, des révolutions toutes faites, de même elle nous donne des prix tout établis, pour régler la valeur de la viande en province.

On se guide sur les prix de la Villette pour modifier ceux de la province.

C'est une erreur économique contre laquelle nous venons protester en voici les raisons principales.

A Paris, des intermédiaires nombreux existent entre l'éleveur et le consommateur.

Il faudrait assurément, pour arriver à faire bénéficier et les producteurs et les consommateurs, supprimer certains intermédiaires qui prennent souvent la plus grosse part des bénéfices.

La province se guidant sur les prix du marché de la Villette pour régler les siens, il est donc important de connaître ce qui se passe dans le commerce de la boucherie parisienne.

Mais comment se rendre compte de l'écart qui existe entre le prix de la viande sur pied et le prix de la

viande abattue? Comment savoir de quelle façon se répartit cet écart entre les mains des intermédiaires nombreux qui existent à Paris?

Il faut, pour répondre à cette question, connaître le fonctionnement du marché à la viande et suivre le bétail à travers les étapes successives qu'il parcourt, de son champ d'élevage à l'étal des bouchers parisiens.

Voici l'itinéraire :

Un commissionnaire achète un certain nombre de bœufs en Normandie; il en forme une bande qu'il expédie au marché de la Villette.

Animaux entrés au marché de la Villette en 1886 :

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C la différence entre les totaux représente le nombre d'animaux restés au marché, pour être remis en vente immédiatement.

Il est difficile de savoir à combien revient, pour chaque bœuf, le prix des transports qui varient suivant les distances et les facilités de communication. On estime, cependant, à 20 fr. par tête le déplacement d'une bête à cornes, de son lieu d'élevage à l'une des gares de Paris.

Voici maintenant d'autres frais à payer :

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